Z Y A N
Nous avons eu la cérémonie de retour à la nature du seigneur Batz. C’était un moment difficile pour tout le monde, mais nécessaire pour faire notre deuil. À présent, il repose en paix au cœur de la nature.
Il va sacrément me manquer.
Appuyé contre le mur, Enak écoute mon rapport sur les recherches de Gilderic. Eline, sa sœur, est assise dans un fauteuil et suit également la conversation. Ils sont admirables. Leur père vient d’être enterré, mais ils ne s’accordent pas de pause pour autant, même pas la soirée. Ou ils essayent d’oublier.
— Ce n’est pas suffisant, s’énerve Enak. Réquisitionne plus d’hommes.
— Oui, je le fais dès demain.
Des coups contre la porte nous interrompent. Mon ami autorise l’entrée et un soldat apparaît.
— Je vous prie de m’excuser pour le dérangement, mais vous êtes demandé dans la grande salle. C’est urgent, seigneur.
— Nous arrivons.
Il baisse la tête en signe de respect et s’éclipse.
— Je vais vous laisser.
Enak dépose un baiser sur le front de sa sœur. À mon tour, je baisse la tête quand elle passe devant moi pour sortir. Enak lui emboîte le pas et je le suis. Nous descendons, puis entrons dans la salle. Mes yeux s’agrandissent en découvrant Alégria à genoux, menottée dans le dos, le regard rivé au sol. Elle est entourée des Vélenkiens en visite qui partent demain et qui paraissent très énervés.
Dans quelle mauvaise situation s’est-elle embourbée ?
— Bonsoir, messieurs. Puis-je connaître la raison de cette mise aux fers ?
— Seigneur Batz, cette voleuse a fait sortir nos chevaux de l’écurie et un de mes hommes a été gravement blessé en essayant de les rattraper. À l’heure actuelle, trois sont manquants !
— Je n’ai pas voulu…
— Silence ! ordonne le plaignant en la giflant.
Je lève les yeux au ciel.
Quel courage de frapper une gamine sans défense.
Enak soupire et se frotte le front.
— Commandant, je vous prie de me suivre, je dois vous informer de certains points concernant cette jeune femme.
— Bien.
Je m’écarte pour qu’ils passent et les rejoins dans le bureau d’Enak qui n’y va pas par quatre chemins.
— Elle est la fille de l’assassin de mon père. Je ne peux la laisser quitter la région.
Le commandant se pince les lèvres et semble réfléchir.
— Elle doit payer pour ce qu’elle a fait. Elle doit être jugée et châtiée devant mon seigneur, puis vous pourrez la récupérer.
Enak médite ces paroles.
— Mon commandant ici présent et quatre de ses soldats viennent avec vous afin de s’assurer qu’elle rentre en vie.
Encore moi, bien sûr.
— Ça me convient, mais ils ne devront pas intervenir sur sa sentence à Vélenk.
— Il en va de soi.
— Les chevaux doivent être remplacés.
— Vous pourrez lui en prendre trois. Zyan vous accompagnera demain avec elle.
Un soupir m’échappe que je transforme en raclement de gorge sous le regard menaçant d’Enak.
— Bien sûr, confirmé-je. C’est la moindre des choses.
Quelle idée lui est passée par la tête pour commettre une erreur aussi stupide ?
Ils se serrent la main et nous revenons dans la salle. Deux soldats emmènent Alégria au cachot pour la nuit. Ses yeux suppliants glissent dans les miens, mais je ne vois pas comment je pourrais l’aider. Elle doit assumer son geste.
***
En bâillant – ce n’était peut-être pas une bonne idée de rejoindre Alya pour la nuit – je descends au cachot. Les soldats se redressent et me saluent. Je demande la clé, puis m’avance jusqu’à sa cellule. Alégria est recroquevillée dans la paille.
— Alégria.
Elle se retourne et me dévisage, avant de se lever difficilement. Je suis agacé de découvrir qu’ils ne l’ont pas détachée pour la nuit. Je fais la remarque aux soldats et ils m’informent que c’est le commandant vélenkien qui leur en a donné l’ordre.
— Elle a mangé et bu ?
— Oui.
Je regarde Alégria qui hoche la tête. Je lui demande de sortir et elle s’exécute sans un mot. Je la tiens par le bras pour monter les escaliers.
— Je n’ai pas voulu les voler. C’est vos soldats qui m’ont volé trois chevaux, souffle-t-elle.
— Qu’est-ce que tu racontes ? Pourquoi les avoir chassés, dans ce cas ?
— Ils étaient maltraités. Je pensais que c’était ceux des soldats Oktoduriens.
— Et ça justifie ta décision stupide ?
— Je ne sais pas, j’étais en colère.
Nous arrivons en haut des escaliers et avançons dans la cour.
— Pourquoi tu dis que mes hommes t’ont volé des chevaux ?
— Je leur ai proposé trois chevaux en échange de ma jument qui a été saisie... Ils les ont pris, puis sont revenus en affirmant qu’elle n’était pas là et ils ont fait comme si qu’ils ne venaient pas de partir avec les miens.
— Ton histoire est difficile à croire.
— Je vous le jure, je ne mens pas.
— Mais bien sûr, petite voleuse, nous interrompt une voix.
Mes yeux se lèvent vers le commandant. Lui et trois de ses hommes sont déjà à cheval, tandis que trois patientent à pieds.
Un soldat s’avance et entoure la taille d’Alégria d’une corde dont il tend l’extrémité à son commandant. La jeune femme pince ses lèvres tremblantes.
— Vous voulez la faire marcher jusqu’à chez elle ?
— Oui.
— Vous êtes conscient qu’elle ne peut pas faire le voyage à pied ?
Son regard noir m’informe qu’il le sait.
Je vois…
— Elle montera sur un cheval pour le voyage. Nous repasserons ici tout à l’heure pour récupérer mes hommes.
J’acquiesce, bien que je sois mécontent qu’ils la fassent marcher jusqu’à chez elle. Mais je n’ai pas mon mot à dire et ne vais pas risquer un incident diplomatique. Mon écuyer m’amène mon cheval et je monte dessus.
Nous marchons pendant vingt minutes. Le commandant prend le trot. Je lui demande sèchement de rester au pas. Il tire sur les rennes en me souriant. Je me retourne pour vérifier l’état d’Alégria. Elle est essoufflée, ses joues sont rouges, mais elle semble solide.
Nous arrivons devant sa maison et un employé sort des écuries.
— Alégria, que se passe-t-il ? lui demande-t-il, inquiet, en la détaillant.
— Ce serait trop compliqué de t’expliquer. Ne t’en fais pas, souffle-t-elle.
— Écarte-toi ! ordonne le vélenkien.
L’employé obéit, sans lâcher Alégria du regard. Je descends de mon cheval et lui enlève sa corde, pendant que les vélenkiens entrent dans l’écurie.
— Qu’est-ce qu’ils font ? Pourquoi sont-ils chez moi ? m’interroge-t-elle.
— Tu dois leur donner trois chevaux en contrepartie, et nous en prenons un pour toi avec lequel tu rentreras.
Ses iris verts se plongent dans les miens.
— Non, non, ça veut dire qu’il va m’en rester que douze sur les vingt, ainsi que ma jument disparue.
— Malheureusement, tu n’as pas le choix, l’informé-je d’une voix aussi douce que possible.
Elle souffle en regardant le ciel. Après un petit moment d’attente, les hommes sortent avec les quatre chevaux harnachés.
— Non ! Elle est portante ! crie Alégria.
Je l’attrape par la taille et l’empêche d’aller vers eux.
— N’aggrave pas ton cas, je te conseille de ne plus dire un mot. S’il décide d’en prendre plus, je ne pourrais rien y faire.
Elle s’affaisse contre moi et marmonne que ce n’est pas juste. On ne peut pas dire que la chance lui sourit, ces jours-ci.
Je la fais monter sur un cheval, puis saisis la corde accrochée au licol et prends place sur le mien. Dès que tout le monde est prêt, nous passons à Oktodur. Nous mettons en route dès que les derniers soldats vélenkiens nous rejoignent. Les températures sont plus fraîches que d’habitude et je redoute le passage au col du Midi.
Les vélenkiens rient entre eux, tandis que mes hommes discutent. J’observe Alégria, dont le cheval marche à côté du mien. Elle semble s’être complètement effacée de la réalité. J’imagine à quel point elle doit se sentir perdue avec ce qui lui est arrivé en deux jours. Je me demande pourquoi son père disait à tout le monde qu’elle était muette.
Plus la journée avance, plus les températures baissent. Nous commençons la montée sinueuse vers le col. Le chemin est trop étroit pour qu’un char puisse y passer.
Soudain, le vent se lève, puis c’est au tour de la neige de s’écraser contre nos corps frigorifiés. Rapidement, la tempête gagne en intensité et nous aveugle totalement.
— Il faut nous mettre à l’abri ! crié-je.
Le commandant acquiesce.
— Suivez-moi !
Quelques kilomètres plus loin, je bifurque pour rejoindre une grotte repérée lors d’une pause, il y a quelques années. Aussi haute qu’une tour de garde, sa profondeur est suffisante pour nous mettre à l’abri avec les chevaux.
Nous descendons de nos montures. J’aide Alégria à faire de même. Elle claque des dents. Je suppose que j’ai moins froid qu’elle qui ne pouvait pas bouger, alors j’enlève ma cape pour la mettre sur ses épaules. Un merci me parvient dans un chuchotement.
— Tout le monde va bien ? demandé-je à ma troupe.
J’obtiens des réponses positives. Chacun desselle son cheval et pose les couvertures au sol pour s’y asseoir. Une soldate le fait pour Alégria.
La nuit commence à tomber, tout comme la température. Du givre se forme sur les moustaches de nos chevaux. Tout le monde est immobile, gelé. Certains somnolent et je n’aime pas ça. Si ça continue, nous n’allons pas survivre à cette nuit.
⚔️ 𝐎 𝐊 𝐓 𝐎 𝐃 𝐔 𝐑 ⚔️
Petit cafouillage dans les chapitres lol
Bon ben du coup j’attend que tu publies le 4. En plus j’ai vi que c’était Zyan alors je suis émoustillée d’avance loool
Zyan m’apparaît sympathique pourtant, étant proche d’Erak et aimant le seigneur Bartz, ça devrait être le contraire... Décèle-t-il chez elle quelque chose que personne ne voit? Ou un petit coup de coeur, peut-être ?
(Ouii je vote pour le coup de coeur)
Qu’importe je l’aime bien ce gars, néanmoins, je suis certaine qu’il peut se montrer impitoyable... et je crois que c’est ce que j’attends de lui ahah
Sinon hs... la montée vers le col le fout des images d’hiver bien froid façon GoT 😂😂
Haha pour GOT 😂