Chapitre 5

Amiya Southall Dhoraji

La porte vibre sous l'impact de coups redoublés. À peine éveillé, je me redresse d’un bond. Billaa m’adresse un miaulement offusqué, mais je ne lui prête guère attention, le temps de reprendre mes esprits. Pas de panique, la tueuse ne prendrait pas la peine de frapper.

— Monsieur Southall ! crie une voix féminine. Ouvrez s'il vous plaît !

Lorsque j'entrebâille le battant, Miss Lambeth débite son message à toute allure.

— Excusez-moi de vous déranger, mais la police vous demande en urgence ! Je crois qu'une autre victime a été découverte ce matin.

— Je descends tout de suite.

— Dépêchez-vous, crie-t-elle, le commissaire vous attend dans la véranda !

Je referme la porte pour échapper aux regards curieux des domestiques. Ainsi, la tueuse ne dissimule plus ses crimes ; elle a frappé la nuit dernière, pendant la visite de Liliana Mayfair.

La lady s'est esquivée, s’agissait-il d'un rêve ? Mais ma lampe de chevet s'illumine dès que j'actionne l'interrupteur et l'étrange calme qui règne en moi n'est pas factice. Et maintenant ? J’espère qu’elle n’entretient aucune illusion à mon sujet. Je tiens trop à mon indépendance pour devenir un dena attitré.

Liliana Mayfair

Son énergie se diffuse en moi et cette présence me bouleverse. Je croise les bras sur ma poitrine, incapable de me lever. Sous les draps, sous ma peau, un flux étranger irrigue mon cœur. J’ai reconnu dès la première goutte l’arôme corsé transmis par le chat, mais son évolution m’a surprise. L’amertume des larmes imprégnait les premières gorgées, les suivantes se sont adoucies et les dernières se teintaient de miel.

Douce Reine, sa détresse m’a vaincue. J’étais imperméable à la colère, mais il m’a rappelé les dernières volontés de Clement. Lord Westminster nous a chargés d’enquêter sur la tueuse, mais mon compagnon souhaitait surtout aider son ami et c’est le désir de protéger Monsieur Southall qui m’a poussé vers lui hier soir. Amiya a besoin de moi, même s’il ignore à quel point. Il lui faut un lyne pour le défendre et rétablir son équilibre énergétique, mais je manque de forces. Notre échange d'hier soir n'a pas de sens. Je refuse de m'engager, sans parler de combattre dans cet état.

Une femme de chambre toque avant d’entrer.

— Madame ? dit-elle à voix basse. Le commissaire attends en bas, souhaitez-vous lui parler ?

— Que me veut-il, au juste ?

— À vous rien, Lady Mayfair. En fait, il réclame Monsieur Southall.

— Dans ce cas, je ne m’en mêlerai pas.

La voix de la jeune femme trahit ses craintes et sa déception.

— Mais madame, certains disent qu’un autre garçon a été violé ce matin ! Pauvre âme, quelle fin horrible !

— Quel rapport avec Monsieur Southall ?

— Je ne sais pas, mais notre Maîtresse s’inquiète pour lui.

Je m’affale contre les oreillers en tentant de me convaincre que cette affaire ne me concerne pas. Puis, ma propre lâcheté me dégoûte. Clement ne m’aurait pas pardonné d’abandonner son ami.

— Aidez-moi à me préparer

En un instant, la figure de la camériste s’éclaire. Ses jupons blancs voltigent tandis qu’elle ouvre les volets, tire les draps et dispose des serviettes propres sur la table de toilette. Par chance, elle ne pose aucune question sur ma robe de chambre chiffonnée sur le sol.

Amiya Southall Dhoraji

J’essaie de dissimuler mon appréhension en entrant dans la véranda. Pourquoi Bow tient-il à me voir ? Me réclamera-t-il un portrait ? Dès que le majordome m'annonce, il vide son café d'un trait.

— Vous voilà, Monsieur Southall. Nous partons.

— De quoi s’agit-il ?

— Je vous l’expliquerai en route, réplique le commissaire.

Il repousse sa chaise et Madame Bloomsbury se lève à son tour.

— Il n’a même pas déjeuné ! Laissez-le au moins boire son thé.

Son interlocuteur lisse sa moustache d’un air autoritaire.

— Je regrette, mais le temps presse. Mes hommes ne contiendront pas la foule très longtemps. Il nous faut une réponse, et vite.

Des talons martèlent le parquet ciré derrière moi.

— Lady Mayfair ! s’exclame le policier. Je vous croyais…

Il n’achève pas sa phrase, de peur de commettre une impolitesse, mais j’imagine fort bien les adjectifs manquants. « Malade », « abattue », « alitée », « mourante »…

La jeune femme se tient très droite, malgré son teint pâle et ses cernes. J’ignore comment me comporter suite à notre rapprochement d’hier soir et mon « bonjour » s'étrangle dans ma gorge. Elle ne m'adresse aucun un regard de connivence et je me raidis.

Quand je recule d’un pas, elle avance de deux.

— Cette affaire m'intéresse. Je vous accompagne, affirme-t-elle d’un ton sans réplique.

Amiya Southall Dhoraji

La voiture de police roule à vive allure sur le chemin caillouteux. Malgré son épaisseur, la banquette en cuir n'absorbe pas les secousses et je serre les dents pour éviter qu'elles ne s'entrechoquent. Je regarde par la fenêtre pour ne pas fixer mes vis à vis. Comme le commissaire et la lady gardent le silence, je n'ose les interroger sur cette course folle.

Les charrettes et les paysans se rangent sur le côté en nous voyant arriver, par contre notre escorte n'impressionne nullement les vaches qui flânent au milieu de la route. Dès que nous ralentissons, Bow consulte sa montre à gousset.

— Dégagez le passage ! hurle-t-il à l'intention des cavaliers. Dépêchez-vous !

Je vois qu'il ne connaît guère ces animaux placides. Les cris et les gesticulations ne les touchent guère, tandis qu'elles vous suivraient au bout du monde pour des caresses.

— Que se passe-t-il ? demande enfin Liliana Mayfair. Vous semblez craindre une émeute.

— Certes, maugrée son interlocuteur. Les gens perdent vite la tête par ici. Les Indiens respectent moins les forces de l'ordre que les Anglais.

— Et si vous en veniez aux faits ?

— Un homme vidé de son énergie a été retrouvé ce matin. Une nouvelle victime de la tueuse.

— Qui l'a retrouvé ? À quelle heure ? A-t-il été identifié ?

Je remarque que la lady porte à nouveau le médaillon des Gardes Royaux en sautoir. La jeune femme adopte l'attitude et le ton impérieux des représentants de la Reine, alors qu'elle ne s'en jugeait plus digne cette nuit. Quelle étrange personnalité !

Le commissaire se soumet sans protester.

— Son nom ne vous apprendrait rien, Madame. Les misérables qui monnayent leur flux à Katargam en changent comme de chemise.

— Katargam ?

Bow me jette un regard gêné, puis se racle la gorge. Je suppose qu'il craint de froisser ma sensibilité.

— Un quartier mal famé, où règnent l'alcool et la prostitution. Le corps a été découvert à l'aube par l'un de ses... collègues.

— Ils ne se lèvent pas si tôt d'habitude.

Je dissimule un sourire derrière ma main quand les joues du policier se teintent d’écarlate. Visiblement, évoquer des sujets vulgaires en présence d'une lady et d'un dena l'embarrasse au plus haut point.

— D'après sa déposition, le témoin est sorti pour assouvir un besoin naturel.

— Je comprends mieux, répond Liliana Mayfair sans broncher, mais cela n'explique pas votre précipitation.

Le commissaire se renfrogne de plus belle, des rides apparaissent sur son front et il tire sur sa moustache d’un geste nerveux.

— Des passants ont vu la victime emprunter un rickshaw ce soir-là. Du coup, ils accusent la tireuse. J’ai dû l’arrêter pour lui éviter de finir lynchée par les habitants du quartier.

— Il ne s’agit pourtant pas d’une preuve.

— Ces gens-là n’en ont pas besoin ! s’écrie son interlocuteur d’un ton exaspéré. Ils s’en prennent à cette femme, car elle arrive d’une autre province et que les étrangers servent toujours de bouc émissaire. En ce moment, ils manifestent devant le commissariat pour exiger une exécution. Ces barbares n’exercent aucun contrôle sur eux-mêmes !

Je le corrige aussitôt, choqué par son étroitesse d’esprit.

— Des disparitions suspectes ont été signalées à la police depuis des mois, sans aucune réaction de votre part. Comme ces gens n’ont plus confiance en vous, ils essaient de résoudre cette affaire. Hélas, la peur et la colère les aveuglent.

— Je ne voulais pas vous offenser, Monsieur Southall, grommelle-t-il en réponse. J’ai besoin de vous pour déterminer s’il s’agit de la tueuse ou non.

Nous y voilà. Tandis qu'il détaille ses attentes, le sang se retire de mon visage. Même dans le cadre d'un poste de police, en présence des forces de l'ordre, la perspective d'une confrontation avec la tueuse me terrifie. Je l'imagine très bien arracher les barreaux pour se jeter sur moi. Mais l'autre alternative signifie que ce monstre a encore frappé impunément, qu'il rôde au creux des chemins, au coin des ruelles, prêt à violer au gré de ses appétits.

— Après avoir recueilli votre déposition, j'annoncerai le résultat aux habitants du quartier, conclut Bow. J'espère qu'ils vous écouteront, puisque vous êtes la seule personne capable de l'identifier.

Oui, et elle m'éliminera pour cela. Mon regard croise celui de Lady Mayfair et la gravité de son expression me frappe. A-t-elle raisonné comme moi ?

Amiya Southall Dhoraji

La foule emplit la rue qui mène au commissariat. Combien sont-ils ? Des centaines de pieds foulent la terre battue, un nuage de poussière dissimule leurs visages. Mais j'entends des cris et des injures, je distingue des poings dressés par la fenêtre. Notre escorte nous ouvre le passage jusqu'au perron. Autour des marches, les gardes forment une ligne d'uniformes, de dents serrées et de matraques, qui tiennent les manifestants à distance. La voiture s'arrête près de cet îlot de pierre, devant la façade ouvragée du bâtiment administratif. Des têtes surmontées de képis se penchent vers nous depuis les fenêtres en encorbellement.

Bow descend en premier, aussitôt suivi de Liliana Mayfair. Lorsque mon tour arrive, une onde de panique me saisit. Je me fige au niveau de la portière, tous les sens aux aguets, cherchant malgré moi un signe imaginaire. La tueuse est là. Pas très loin. Elle imite les autres et ses cris dissimulent ses rires. Elle se cache parmi ses proies pour mieux les dévorer, elle surveille mes moindres gestes. ! Non, je délire. Il ne s'agit que d'un fantasme issu de mes cauchemars.

Dès que l'épaisse porte bardée de fer se referme, l'intensité de la menace s'atténue. Les policiers s'agglutinent autour de leur chef et leur voix résonnent dans le hall. Un couloir à droite, à couleur à gauche, les bureaux s'alignent comme des soldats au garde à vous.

La lady observe les cartes qui couvrent les murs en plâtre avec attention. Son index se pose sur Katargam, puis sur la plantation Bloomsbury.

— Dimanche matin, où la tueuse vous a-t-elle attaqués ?

Je désigne la lisière de la jungle, à l'ouest.

— Ici.

La jeune femme acquiesce, sans trahir la moindre émotion. Est-ce l'effet de son autorité tranquille, de sa voix calme, du claquement régulier de ses bottines sur le carrelage ? Sa présence me rassure.

Les policiers nous conduisent à l'étage et s'arrêtent devant une cellule sans fenêtre, meublée d'un simple banc. La femme assise en tailleur sur le sol nous jette un regard féroce. Ses pupilles carmin ressortent dans son visage tanné par le soleil et son pantalon, qui s'arrête aux genoux, dévoile des mollets nerveux. Depuis le couloir, je fixe ses traits anguleux, surmontés de boucles coupées très court.

Bow me pousse en avant.

— Alors ?

— Ce n'est pas elle.

— Vous en êtes sûr ? Avouez qu'elle correspond au signalement. Approchez, observez là de plus près.

Je me dérobe d'un pas sur le côté.

— Je n'ai jamais vu cette femme. Libérez-là !

La tireuse de rickshaw se lève d'un bond ; elle agrippe les barreaux et les secoue avec une force étonnante.

— Je n'ai rien fait ! crie-t-elle en hindi. Dis leur, à ces maudites faces blanches !

— Oui, ils te relâcheront bientôt.

Son visage ne trahit aucun soulagement.

— Et que vais-je devenir ? Personne ne montera dans mon rickshaw. Ils me croient tous coupables.

J'écarte les mains en signe d'impuissance et elle crache un juron. Liliana Mayfair effleure mon bras pour attirer mon attention.

— S’il vous plaît Monsieur Southall, demandez-lui si elle a vu la victime.

— Bien sûr ! s'écrie la tireuse. Je l'ai transporté d'un bout à l'autre de Kagartam. Mais il ne s'est rien passé après, je le jure !

— Je lui avais déjà posé cette question, indique le commissaire d’un ton bourru.

La lady ne tient pas compte de sa remarque et je lui sers de traducteur par la suite, malgré le mécontentement de Bow. Garde Royale ou non, il n’apprécie pas qu’elle empiète sur ses prérogatives.

— Où l'avez-vous déposé ?

— Rue Savta, pas loin de l’impasse où vous l’avez retrouvé. Le pauvre.

— Et vous n’avez remarqué aucune personne suspecte ?

— Non, je suis partie tout de suite. Je ne m’arrête jamais dans ce coin-là.

— Merci pour votre aide. Voilà de quoi repartir sur de meilleures bases une fois sortie d’ici.

La jeune femme s’avance vers la cellule et tend une pièce à travers les barreaux. Je ne vois pas la somme en question, mais les yeux de la tireuse s’écarquillent de surprise ; pour elle, il doit s’agir d’une fortune. Elle saisit vivement sa récompense et la cache dans les replis de sa tunique.

Le commissaire toussote d’un air désapprobateur.

— Et si nous passions à la déposition ? Dehors, les gens attendent toujours.

— Parfait. J’en profiterai pour évoquer quelques détails avec vous…

Les policiers se détournent d'un air dégoûté. Mais enfin, qu'espéraient-ils ? Capturer la tueuse par hasard relèverait du miracle et jamais elle ne se rendra sans combattre. Croyaient-ils en ce bouc émissaire désigné par la vindicte populaire ? Elle ne parle même pas anglais… Leur déception m'exaspère.

Amiya Southall Dhoraji

Mettre mon témoignage par écrit ne prend guère de temps ; il suffit d’indiquer que je n’ai pas identifié la tueuse. Bow s'installe derrière son grand bureau en palissandre et nous désigne les chaises destinées aux visiteurs. J'obéis, mais au lieu de m'imiter, la Garde Royale reste près de la porte d'entrée. Elle s'immobilise devant la carte de Surat épinglée sur le mur, examine les croix rouges et les inscriptions, puis compte sur ses doigts d’un air songeur.

Elle longe les étagères chargées d'ouvrages juridiques et marmonne les mots « récolte de coton », sans prêter attention au portrait officiel de la reine. Puis elle pivote sur ses talons et traverse la pièce jusqu’à la table où s’entassent des piles de dossier. Absorbée par ses réflexions, elle s’y appuie, les sourcils froncés.

— Comment a-t-elle appris l’anglais ? Voilà la question.

Le commissaire pose ses paumes à plat sur son sous-main et s'exprime d’un ton sec :

— Jouons cartes sur table, Lady Mayfair. Dans quelle mesure souhaitez-vous participer à la résolution de cette affaire ?

La jeune femme incline légèrement la tête.

— Pardonnez-moi, je n’ai pas l’intention de prendre l'enquête en main, seulement d’y apporter ma contribution.

— Et je vous en remercie. Si vous voulez bien signer la déposition de Monsieur Southall…

La Garde Royale obtempère sans discuter, puis tapote la carte de son index replié.

— Vous avez recensé les disparitions suspectes et les dates correspondantes.

— Tout à fait. Il nous en manque peut-être une ou deux, mais un rythme se dégage.

— Des intervalles réguliers, de quatre à six jours, approuve-t-elle. Un élément révélateur.

— Certes. La tueuse dispose d’une endurance exceptionnelle vis-à-vis de la soif. Un lyne ordinaire ne tient pas plus de trois jours…

— Pas du tout, coupe Liliana Mayfair. Il ne s’agit pas de viols ordinaires, elle les a vidés. Imaginez-vous la quantité d’énergie que cela représente ? Elle a bu le flux vital de ces malheureux sans en laisser la moindre goutte !

Son interlocuteur se trouble. La sueur perle sur son front et il tire plusieurs fois sur sa moustache.

— Que voulez-vous dire ?

— Cette femme devrait tenir une dizaine de jours, au moins. Son organisme consomme beaucoup d’énergie.

— Mais tout de même, cinq jours… Je n’ai jamais jeûné si longtemps.

— Moi si, rétorque la lady avec assurance, et je n’ai pas eu besoin de tuer un dena pour autant. De plus, les délais entre ses crimes diminuent depuis deux semaines, elle n’a attaqué Clement que deux jours après la disparition précédente.

Mon cœur manque un battement. Je n’arrive pas à croire que Liliana Mayfair évoque ce drame d’un ton détaché après ses confidences nocturnes. Quelle est sa véritable personnalité ? La jeune femme anéantie qui buvait mes larmes ? La lady décidée à rejoindre son compagnon dans la mort ? Ou la Garde Royale qui s’empare de l’enquête ?

— Mais la tueuse n’était pas poussée par la soif, objecte le commissaire. Elle souhaitait surtout se débarrasser d’une menace potentielle.

Son interlocutrice serre les dents. Pendant une seconde, une onde de souffrance balaie ses traits épuisés, mais elle se reprend et poursuit sans dévoiler sa faiblesse. Sa maîtrise de soi me confond.

— Certes. Il n’empêche que sa moyenne est tombée de six à quatre jours quand la récolte du coton a commencé.

Je la vois encore avec sa hotte, ses vêtements poussiéreux et ses mains couvertes de duvet.

— Vous pensez qu’elle vit parmi les paysans ? Qu’elle brûle plus d’énergie à cause du travail supplémentaire ?

— Pourquoi pas ? Quand les plantations cherchent de la main d’œuvre, elles ne se soucient guère de son origine. Et quoi de plus discret qu'un saisonnier parmi des centaines d’autres ? Par contre, ces gens n’apprennent pas l’anglais à l’école.

Bow se tourne vers moi.

— Comment s’exprimait-elle, Monsieur Southall ? Il ne s’agissait que de mots simples, je présume. Les Indiens baragouinent souvent des phrases toutes faites.

— Pas du tout. Elle le parlait bien, sans hésitation et sans accent, ni comme une langue scolaire, ni comme des tournures apprises dans la rue. Je vous l’ai déjà dit ce jour-là.

Il se renfrogne et pianote sur son sous-main.

— Tout le monde peut se tromper sous le coup de l’émotion…

Son insinuation m’agace, combien de fois me forcera-t-il à répéter la même chose ? L’irruption de son secrétaire nous interrompt.

— Excusez-moi, Monsieur, mais les manifestants s’impatientent. La rumeur se répand comme une traînée de poudre et leur nombre ne cesse d’augmenter.

Le commissaire déplie sa haute carcasse en s’appuyant sur les accoudoirs de son fauteuil.

— Renforcez la garde et distribuez des boucliers. Ensuite, je leur apporterai la réponse qu’ils attendent. Elle ne les satisfera sans doute pas, mais la justice passe avant leur vengeance aveugle.

Amiya Southall Dhoraji

Je me tiens en retrait derrière les rangées de policiers, derrière Liliana Mayfair et son visage de marbre, derrière le commissaire qui hurle dans son porte-voix. La foule frémit, gronde et crie, tandis qu’il évoque l’innocence du suspect. Les avancées de l’enquête ne satisfont personne. Des poings se lèvent, des insultes fusent, mais les boucliers et les matraques imposent le respect aux premiers rangs.

La lady voulait sortir par derrière, mais Bow s’y est opposé. Il tient à m’exposer pour justifier ses actes, à confronter le témoin et l’accusation. Peut-être désire-t-il aussi punir notre arrogance. La peur déferle et reflue. Je perçois encore la présence hostile de la tueuse, si près, trop près. J’aimerais devenir transparent pour éviter que des centaines de regards ne se posent sur moi. Ils me jugent et j’ignore quelle contenance adopter. Les affronter, les ignorer, penser à autre chose ? Tant d’agressivité m’écrase.

Soudain, Liliana Mayfair se jette sur moi. Je m’effondre sur le perron, un bruit sec claque derrière moi. La voix de Bow s’étrangle dans sa gorge. Je suis tombé sur le côté, avant de rouler sur le dos. Mon coude meurtri me lance, le poids d’une lyne contre ma poitrine évoque des souvenirs odieux. Quand j’essaie de me redresser, elle m’ordonne de ne pas bouger d’un ton impérieux, mais la panique me gagne, je la repousse d’instinct. Mes mains écrasent sa poitrine haletante, son visage se crispe et elle gémit :

— Laissez-moi vous protéger. Elle essaie de vous tuer !

Mes bras retombent sans force. Ma tête roule de droite à gauche. Je vois une pierre aiguisée à quelques pas de là, un projectile de la taille d’un poing.

— Elle visait la tête, ajoute la lady. J’ai repéré la trajectoire, mais pas celle qui l’a lancée.

Un frisson me secoue de part en part. J’entends mes dents claquer.

— Qui a tiré ? gronde le commissaire dans son porte-voix. Qui ?

Un murmure inquiet parcourt les manifestants. Ils réalisent que la coupable se trouvait parmi eux et se fixent avec suspicion. Les premiers rangs reculent, les derniers s’enfuient. Lors de la débandade, la pression qui m’écrasait s’atténue.

— Du calme, souffle la Garde Royale. À mon signal, courez vers la porte. Compris ?

— Oui, mais je ne sens plus la tueuse. Elle est déjà partie.

— Je préfère ne prendre aucun risque.

Elle prend une profonde inspiration, et son corps se crispe contre le mien. L’air miroite autour de nous, il forme une pellicule brillante et compacte. Un bouclier d’énergie. La jeune femme bondit.

— Maintenant !

Dès que je me relève, les jambes flageolantes, elle se place dans mon dos.

Les gardes nous suivent en bon ordre, puis referment la porte après eux. Je m’assois sur les marches de l’escalier, en sueur, et la fraîcheur des dalles me soulage. Avec une pierre, une seule, tout aurait été terminé. Je l’imagine parfaitement heurter mon front ou ma tempe, s’encastrer dans ma chair et briser mes os. Je m’accroche à la rampe pour me sentir vivant.

Dès que le commissaire nous rejoint, Liliana Mayfair se rue sur lui. Malgré leur différence de taille, elle attrape sa chemise et le secoue comme un prunier.

— Espèce d’irresponsable, il a failli mourir à cause de vous ! La tueuse sait qu’il représente une menace. Vous lui jetez votre unique témoin en pâture au lieu de le protéger !

— Mais mes hommes…

— N’ont servi à rien ! crie-t-elle de plus belle. Pas d’avertissement, pas la moindre réaction !

Bow rougit jusqu’au front. Il recule d’un pas et balbutie :

— Avec un portrait, rien de tout cela ne serait arrivé.

— Ne rejetez pas la faute sur lui. Qui dirige la police, ici ? N’êtes-vous pas le garant de l’ordre public ?

— Assez, je ne vous permets pas…

— Moi, je me permets ! rugit-elle d’un air féroce. J’exige une escorte, et des mesures de sécurité dignes de ce nom. J’exige que la tueuse n’ait pas la moindre chance d’entrer chez les Bloomsbury !

Amiya Southall Dhoraji

La Garde Royale ne m’adresse pas la parole lors du retour à la plantation. Les yeux clos, les lèvres pincées, elle respire avec difficulté. Pendant le premier quart d’heure, je la laisse se reposer et m’enfonce dans la banquette, bercé par les pas des chevaux. Bow ne nous raccompagne pas, mais il n’a pas lésiné sur l’escorte.

Lorsqu’un cahot nous secoue, la tête de la jeune femme ballotte sur ses épaules et heurte la portière. Je m’inquiète enfin pour elle.

— Lady Mayfair, vous vous sentez-mal ?

— Excusez-moi, répond-elle d’une voix faible. Générer un boucler requiert beaucoup d’énergie.

Quel imbécile ! Elle vient d’user ses dernières forces pour me sauver la vie et je la regardais mourir de soif. Malgré l’angoisse qui me serre la gorge, je me force à demander :

— Vous avez besoin…

— Non, coupe-t-elle. Surtout pas.

D’un côté, ce rejet me soulage, de l’autre il me blesse. Suis-je donc un si piètre donneur ? Je suppose que oui.

Ses paupières frémissent, puis elle ajoute dans un souffle :

— Et vous ? Comment allez-vous ?

— Pas très bien, je l’avoue. La tueuse n’abandonnera pas et le commissaire ne m’inspire pas confiance. J’ignore comment vivre dans ces conditions.

Son expression s'assombrit. Je me raidis aussi et la tension monte dans le petit habitacle de la voiture, qui grince sur ses essieux.

— Je vous ai trouvé nerveux. Saviez qu’elle se trouvait parmi la foule ?

— Je ne comprends pas d'où viennent ces étranges intuitions.

— D’une Union Véritable, je le crains. Ce phénomène se produit dans le cadre de dons importants. En général, il concerne les vieux couples qui développent un lien entre eux avec le temps, mais...

— Comme mes parents ?

— Oui, sans doute.

Un filet de sueur glacé ruisselle le long de ma colonne vertébrale.

— Vous voulez dire qu’entre la tueuse et moi…

— Elle vous a bu, je n’ose imaginer à quel point, et malgré les années votre flux vital coule encore dans ses veines. C’est cette présence que vous détectez à distance, comme une trace de vous-même.

Comment décrire la répugnance qui m’envahit ? Ce viol me poursuivra toujours, jamais je ne retrouverai ce qu’elle m’a volé.

— Impossible. Pourquoi moi ? Pourquoi en une seule fois ?

— Je suis désolée, Monsieur Southall.

— Et l’inverse ? Elle me sent aussi ? Elle me débusquera n’importe où ? Je l’attire peut-être !

Liliana Mayfair

La soif me consume. Son flux m’appelle et je n’y résisterais pas si je le touche. S’il savait. Son goût intense ne se dilue pas, il ne s’oublie pas non plus, en dépit du temps qui passe. Je serre les poings pour ne pas abuser de sa faiblesse. Il mérite mieux.

Malgré les soubresauts de mon cœur, je tâche de raisonner posément :

— Elle vous obsède, mais ce n’est pas réciproque. Vos perceptions s’affinent parce que vous la guettez sans cesse.

— Avant, je ne représentais rien pour elle, gémit-il, mais maintenant je suis l’unique personne capable de l’identifier. Elle me cherchera aussi.

— Raison de plus pour diffuser un portrait. Bow a raison sur ce point.

Amiya Southall s’effondre, la tête entre les mains.

— J’ai déjà essayé, en vain. Contre elle, je n’y arriverai pas tout seul !

— Ne paniquez pas.

— Je devrais partir, murmure-t-il avec un désespoir sans nom. Éloigner ce monstre des enfants. En finir pour qu’elle ne me viole pas une seconde fois !

— Ne songez pas au suicide, je vous en prie.

— Quelle autre solution me reste-t-il ? Vivre dans la peur ? Attendre qu’elle revienne me tuer ?

Quand la voiture ralentit, Monsieur Southall redresse ses lunettes et reprend contenance. Il n’attend pas de réponse, mais le désespoir inscrit sur son visage m’inquiète. J’aimerais disposer d’un peu plus de temps pour lui parler, hélas, un véritable comité d’accueil nous attend chez les Bloomsbury. Madame Dhoraji étreint son fils, les demoiselles se précipitent vers leur précepteur et la maîtresse de maison ordonne aux domestiques de servir le déjeuner.

Ma tension retombe pour de bon et les effets de la soif reviennent en force. Ma gorge s’assèche, mes lèvres se craquellent, mes jambes flageolent et je brûle de l’intérieur. Par mon sang, qu’il me coûte cher, ce bouclier ! Des flammes rouges dansent devant mes yeux. Ne craque pas Liliana ! Je me concentre sur les courbes de l’allée, qui n’en finit pas de serpenter entre les bosquets. Au détour d’un massif, une silhouette rousse fuse vers moi. Lorsqu’une fourrure soyeuse se frotte contre ma cheville, je m’empresse de la caresser. Une parcelle d’énergie remonte le long de mon bras et j’en tremble de plaisir. Dépendre d'un chat, Père s’en tordrait de rire.

Amiya Southall Dhoraji

Le geste de la lady n'échappe pas à l'œil acéré de maman.

— Elle a bu ! souffle-t-elle en hindi.

— Oui.

— Billaa transporte TON flux vital, mon fils. Tu dois agir.

Je prends une grande inspiration et l'attire à l'écart. Surtout, ne pas perdre mon calme.

— Par pitié, ne t'en mêle pas ! La brusquer ne sert à rien.

— Je ne la laisserai pas dépérir sous mes yeux, répond-elle d'un air offusqué. Trois jours de jeûne épuiseraient un lyne ordinaire. J'ignore comment elle arrive encore à marcher...

— Tu ne sais pas tout.

Ses ongles s'enfoncent dans mon avant-bras.

— Pardon ? Tu me caches encore des informations à son sujet ?

Je me dégage d'un geste brusque.

— Certaines choses ne te regardent pas.

— Amiya !

— Tu ne me demandes même pas ce qui s'est passé ce matin ?

— La police n'a pas arrêté la bonne personne, comme d'habitude. Ton témoignage permettra au moins de libérer une innocente.

Son indifférence me rend fou et je lui crache la vérité au visage au lieu de l'y préparer en douceur.

— Oui, mais la tueuse se trouvait parmi la foule. Elle a essayé de m'assassiner.

Maman vacille, livide, et mon ton s'adoucit. Pour éviter qu'elle ne l'apprenne par les journaux, je lui raconte mon agression et l'intervention de Liliana Mayfair. Sa réaction ne m'étonne pas ; elle m'ordonne de devenir le dena de la Garde Royale.

— Je comprends tes réticences, il s'agit d'une étrangère, de la compagne de ton ami, mais elle ne te forcera sûrement pas à remplir tous les devoirs d'un époux.

Ce sous-entendu me donne la nausée. Non, je ne me prostituerai pas contre une illusion de sécurité !

— Assez ! Nous en reparlerons plus tard.

— La police ne m'inspire aucune confiance, siffle-t-elle. Essaie de t'allier avec cette lady pour le moment et propose-lui ton énergie contre sa protection.

Sa suggestion me révulse. Conclure un marché, échanger des bons procédés, donner sans le moindre attachement ; ma propre mère me considère comme une pile délivrant son flux vital à la demande. Pour elle, mon intégrité physique et mes sentiments ne comptent pas.

Liliana Mayfair

Je ne comprends pas ce que dit Madame Dhoraji, mais les réactions de son fils parlent pour lui. Son anahata s'emballe, ses autres chakras s'engorgent, son énergie bout dans ses veines, ses membres se tordent, il recule jusqu'au bord des marches et... je le rattrape de justesse. Deux sauvetages dans la même journée, bien joué, Liliana.

— Que se passe-t-il ? demande Madame Bloomsbury avec inquiétude.

— Je crois qu'il a besoin d'un peu de solitude. Nous avons traversé des moments difficiles.

La douleur irradie dans mes muscles assoiffés quand je pousse sur les épaules de Monsieur Southall pour l'aider à reprendre son équilibre. Il ne dit mot, pas un même un merci, franchit le seuil de la maison et gravit l'escalier à pas lents. Sa silhouette voûtée me navre.

Je raconte l'attaque de ce matin sans prêter attention aux lamentations de mon hôtesse. Ses manifestations de pitié et d'effroi me fatiguent, car je n'ai aucun réconfort à lui offrir. Au lieu de déjeuner en sa compagnie, je me retire à l’étage. Sur le palier, des notes me guident jusqu'à la salle de musique. Les accords graves et solennels me rappellent des noces funèbres, ils évoquent la mort qui rôde au tournant, pourtant ces vibrations m'apaisent.

Je frappe à la porte close et l'ouvre sans attendre de réponse. En me voyant, le pianiste sursaute, tel un animal piégé.

— Continuez, je vous en prie. J'aimerais juste vous écouter.

J'emprunte la chaise du professeur, tandis qu'il interprète une série d'arpèges. Ses doigts courent sur les touches, ils dérivent de nocturnes en requiems au gré de son inspiration, les mélodies s'enchaînent et se répondent. Cette symphonie mélancolique m'emporte, je ferme les yeux pour mieux la savourer.

Le chat bondit sur mes genoux et me transmet une étincelle d'énergie. Je le gratte sous le museau et ses ronronnements se mêlent aux déambulations musicales de son maître, qui m'adresse un sourire amusé.

— Il vous apprécie, je crois.

— Moi aussi. Comment s'appelle-t-il ?

— Billaa.

Il ponctue sa réponse d'un trille qui attire le félin. Je m'approche aussi. Monsieur Southal entonne un air plus gai, puis ses mains décrivent une courbe élégante au-dessus du clavier.

— À votre tour, maintenant.

— Sans façon ! Je suis beaucoup moins douée que mon frère.

— Cela ne vous interdit pas de jouer pour autant.

Sa réponse m’interloque et je garde le silence. Il se décale sur le tabouret rectangulaire, puis le tapote en guise d’invitation.

— Venez !

Je cède, mais sa proximité réveille le brasier qui sommeille en moi. Pour oublier le désir qui me taraude, je pianote une berceuse enfantine et il m’accompagne avec les accords appropriés. Je ne respecte ni le rythme, ni les nuances, mais il s’adapte avec une aisance qui me confond. J’envie les demoiselles Bloomsbury en songeant à l’intransigeance de mon ancien professeur, dont les coups de baguette me terrifiaient. Monsieur Southall se tourne vers moi dès que la dernière note s’éteint.

— Vous avez soif, n’est-ce pas ?

Il n’imagine même pas à quel point… Tant mieux. Je me contente de répondre « Oui », mais mon ton léger ne le trompe pas.

— C’est du suicide, constate-t-il, et nous en mourrons tous les deux.

— Je ne connais pas la solution.

— Si je vous donne mon énergie, arrêterez-vous la tueuse ?

— Douce Reine, vous ne comprenez pas ! Je suis anergique, je suis exclusive, avec moi, les dons ponctuels ne mènent à rien. Si vous commencez aujourd’hui, je dépendrai de vous jour après jour et nous ne nous quitterons plus. Acceptez-vous cette relation, ces contraintes et ces responsabilités ? Je ne vous les imposerai pas à la légère.

Son regard déterminé plonge dans le mien, un regard plus sombre que sa teinte naturelle.

— J’aimerais au moins essayer, Lady Mayfair. En mémoire de Clement.

Il prend ma main et la porte vers sa tempe. Ses doigts tremblent autour des miens, de plus en plus, et je lis sur son visage le combat qui se déroule en lui.

— Ne vous forcez pas.

Son sourire triste me bouleverse.

—  J’ai confiance. Vous me traitez comme un homme, pas comme un producteur d’énergie.

Il achève son geste et un flux impétueux se presse vers moi. C’est presque trop fort, trop bon, un cri m'échappe tandis qu'il se répand en moi. La tête me tourne. Respirer. Ne pas me noyer, ne pas me perdre dans ce torrent doux-amer. Du miel et du café, saveurs étroitement mêlées, je m’appuie contre son épaule pour ne pas tomber.

Ma main retombe lorsque la soif s'estompe, mais nous ne nous séparons pas.

— Très bien, dis-je lentement, je vous protégerai de la violeuse en mémoire de Clement. Mais si j’arrive à la tuer…

— Notre marché s’achèvera et chacun d’entre nous retrouvera sa liberté.

— Parfait.

Monsieur Southall ne se montre pas sentimental et son pragmatisme me soulage. Je refuse de m’engager dans une relation de longue durée, surtout pas avec un précepteur indien.

— Visualiser la tueuse me terrorise, m’avoue-t-il d’un air gêné. Voilà pourquoi je n'arrive pas à dessiner son portrait.

Il sursaute quand je pose la main sur son épaule et je le reprends fermement :

— Cessez de penser comme une proie, désormais nous sommes les chasseurs.

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Sorryf
Posté le 02/04/2019
ouiiiii la suite ! c'est moi la gentille plume qui t'as réclamé cette suite, ça valait le coup de courir <3  trop contente de retrouver cette histoire que je trouve très belle, malgré les affreuses choses qui se passent dedans.La fin de ce chapitre m'a trop émue, il était temps que ces deux là partagent leur énergie ! et en même temps je comprend tout à fait qu'ils aient eu des réticences, c'est vraiment bien fait, le bon dosage et timing. je te l'avais peut-être déjà dit, mais j'espère voir des femmes dena par la suite, et quelques hommes lynes. Les victimes de l'affreuse sont toujours des hommes, mais ça pourrait aussi être des femmes. Oui bon, ça a pas trop d'importance... mais comme ce concept est tout nouveau, on a envie de le voir abordé de toutes les façons. Poste vite la suite ! je l'attend !!   
elikya86
Posté le 02/04/2019
Coucou Sorryf, je suis désolée, je ne me souvenais plus de qui me l'avait demandé et j'avais peur de me tromper.
Merci beaucoup pour ton retour sur ce chapitre, je m'aperçois que je n'avais pas pensé à présenter toute la diversité possible entre les couples homme/femme et lyne/dena. Cela dit, il va y avoir de nouveaux personnages par la suite qui changent un peu, j'espère qu'ils te plairont. Si j'oublie de poster un nouveau chapitre à l'avenir, je compte sur toi pour me le rappeler ! :-p
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