Chapitre 5. Freliora

Par Moje
Notes de l’auteur : Chapitre 5 mis à jour! Je pense accélérer un peu les choses pour publier la suite de l'histoire plus rapidement, donc normalement je mettrais à jour un chapitre par jour!
Sinon je fais une petit pose dans l'histoire pour le moment, juste le temps d'écrire un petit conte à rebours, suivant le rêve que j'ai fait cette nuit.
Bonne lecture!

 

                Sur la pointe des chaussettes, Arka descendit le grand escalier à colimaçon. Depuis deux jours qu’elle l’empruntait en tentant de se faire discrète, elle savait quelles marches grinçaient et lesquelles craquaient. Aussi ce fut sans un bruit qu’elle parvint en bas.

Le feu ronflait toujours dans la cheminée, entretenu à toute heure du jour et de la nuit soit par Edjaard, soit par une vieille muette qui s’occupait du ménage dans l’école.

L’école… Depuis deux jours, Arka avait eu le temps de discuter avec Dacha et Edjaard, leur hôte mais aussi instructeur des premiers temps -correspondant à un concentré du primaire et des deux premières années de collège dans l’autre monde- de la région. Habitué à recevoir de jeunes sorciers peu disciplinés, il y avait à Quartenkeen comme dans la plupart des écoles des sceaux empêchant la pratique de la magie dans l’enceinte des bâtiments. Pour cette raison, Dacha, que son métier avait déjà fait venir dans la région, avait cherché à rejoindre l’école sitôt qu’elle avait comprit la nature de leurs poursuivants, en les entendant se rapprocher inexorablement sur leurs chevaux en dépit des arbres et des obstacles de la forêt qu’il leur était aisé de traverser en se changeant en ombres. D’autres fugitifs connaissant l’emplacement de l’école et étaient venus trouver refuges ici avant de reprendre la route pour rentrer chez eux se mettre en sécurité.

-Les précurseurs doivent se douter que nous sommes ici. Ils viendront tôt ou tard nous chercher ! avait prédit l’un d’entre eux.

-Je ne les laisserais pas franchir l’enceinte de l’école, leur avait assuré l’instructeur. Vous pouvez rester ici aussi longtemps que vous le désirez si vous m’aidez pour gagner votre repas.

Dacha, elle, avait fait le choix de se reposer un peu plus longtemps que les autres, en dépit du danger. Quand Arka lui avait demandé pourquoi, la sorcière avait grogné d’un air peu amène. La jeune fille n’avait compris qu’après, au vu de sa démarche, qu’elle était blessée au genou. Rien de grave, lui avait ensuite affirmé Edjaard : une simple entaille qui s’était un peu infectée. Néanmoins, il valait mieux rester au repos en attendant rémission complète, surtout au vu de périple de six jours qu’elles s’apprêtaient à faire pour se rendre à Grumeaux, où habitait la sœur de Dacha.

-Mais je te rassure, tu peux partir sans moi ! s’était empressée de s’exclamer Dacha.

Arka avait secoué la tête en signe de dénégation. Aider Edjaard dans le potager et traire les quelques vaches qui, en temps normal nourrissaient les élèves ne la dérangeait pas et elle espérait toujours se réveiller, retrouver son véritable corps, comprendre ce qui s’était passer et reprendre une vie normale. Au début elle pensait qu’il suffirait d’attendre que son rêve prenne fin, mais elle était maintenant persuadée d’être coincée. Plus les jours passaient, moins elle était rassurée quant à son sort. Si bien qu’au troisième jour de repos à Quartenkeen, elle décida d’interroger Edjaard, après la traite du soir.

-Dis, toi qui est instructeur, est-ce que tu as déjà entendu parler de personnes restées coincées dans leur sommeil ? Ou plutôt… dans leurs rêves ?

-En effet ! Lorsqu’ils respirent toujours, on dit que ces gens sont des le coma, et lorsqu’ils ne respirent plus, on dit qu’ils sont morts ! avait-il répondu en riant.

Arka avait alors poussé un long soupir déprimé. Après tout, peut-être bien qu’elle était dans le coma… ? Morte, ça non, elle ne voulait même pas y penser !

La tentation de retirer ses gants qu’elle ne quittait pas pour cacher ses mains était tout aussi forte que celle de crier à cet homme qu’elle ne venait pas de ce monde, qu’elle avait besoin d’aide pour retourner chez elle, mais à quoi bon ? Si Edjaard disait vrai, elle était coincée ici jusqu’à ce qu’elle se réveille, qu’elle sorte de ce sommeil trop long pour être juste du sommeil. Il n’empêchait pas que ce secret lui pèse davantage à mesure que le soleil se couchait pour se lever.

Ce ne fut que huit jours après leur arrivée que Dacha décida que le moment était venu de repartir. Edjaard, lui, commençait à préparer tout le matériel nécessaire à la rentrée en classe des élèves, retourné chez eux pour la période des travaux dans les champs. Comme l’avait dit le sorciers, les précurseurs s’étaient présentés à l’école, un jour de pluie, pour demander si l’instituteur n’avait pas vu des fugitifs. Celui-ci leur avait calmement répondu qu’il en avait hébergé certains, mais qu’ils étaient tous partis sans demander leur reste depuis plusieurs jours déjà. Il leur avait également fait comprendre qu’il réprouvait leurs actes et qu’ils serraient tous punis par le Noir sinon par le peuple pour leurs méfaits. Les hommes en uniforme n’avaient pas apprécié, mais curieusement, ils étaient remontés sur leurs chevaux sans un mot.

-Ils peuvent s’en prendre à des sorciers isolés en les prétextant dangereux, personne n’y trouvera rien à redire. Mais qu’ils s’avisent de s’en prendre à l’instructeur des enfants de la région et les villageois des alentours pourraient bien le leur faire payer !

Aussi les deux femmes plièrent bagage en étant consciente de quitter là l’un des rares refuges capables de les préserver des précurseurs. Edjaard leur donna à chacune une grande et longue pelisse qu’il suffisait d’attacher avec un fermoir pour maintenir sur les épaules et qui, sitôt le fermoir retiré pouvait faire une couverture, car même si la saison était celles des récoltes la région n’était guère chaude et plutôt humide.

-Que ferez-vous si vous rencontrer à nouveau ces précurseurs ? leur demanda Edjaard, inquiet, en les raccompagnant jusqu’aux portes de l’école. Tes pouvoirs sont bloqués et Arka n’est pas sorcière.

-Et bien ma foi, nous seront tenues d’être plus rapides et plus maligne qu’eux. Ne t’en préoccupe pas : ils ne sont pas le seul danger auquel peuvent être confrontés les voyageurs, et depuis des années que je courre la Lande je suis toujours vivante.

Avec un hochement de tête peu convaincu, il les laissa partir.

-Mais il a raison, reprit Arka lorsqu’elles se furent un peu éloigné. Même s’il y a peu de chance qu’ils nous reconnaissent, cela n’empêche pas qu’ils pourraient à nouveau s’en prendre à nous.

-Et alors ? s’agaça Dacha. Qu’est-ce que mademoiselle propose ?

Loin de se formaliser du ton excédé de sa nouvelle compagne de voyage, Arka se mit à réfléchir. Grâce à ses quelques jours en compagnie de l’instructeur, elle en avait appris un peu plus sur ces mystérieux agresseurs qui sillonnaient la région en arrêtant tous les sorciers isolés dont la tête ne leur revenait pas. Apparemment, il y avait eu, des années auparavant, une grande catastrophe nommée Clameur. Des sorciers utilisant une magie dite « de l’Ombre » avaient attaqué d’autres sorciers pour leur voler leurs pouvoirs. Leur identité ainsi que le motif de leurs agissements était resté inconnu, et les criminels avaient disparus sans laisser de traces un an plus tôt. À la même époque, un sorcier du nom de Grim, qui avait en charge la protection d’un artéfact capable de réguler le Noir, la malédiction qui punissait les malfaiteurs, avait également disparut. Les rumeurs se contredisaient, les unes prétendant que Grim était un Clameur, d’autres que ces derniers l’avaient tué, mais personne ne savait réellement ce qui s’était passé.

Peu de temps après, les habitants de l’Archizon, région de l’est de la Lande, avaient commencés à entendre parler de cavaliers vêtus de nuit et d’argent, emportant avec eux les mauvais sorciers. Leurs actions sporadiques n’avaient d’abord inquiété personne, mais depuis peu le nombre de victimes avait augmenté. À tous, ils prétendaient agir pour le bien de la population en détruisant les sorciers dangereux susceptibles d’avoir quoi que ce soit à voir avec les Clameurs. C’était donc tout naturellement qu’ils s’étaient orientés en premier lieux sur les sorciers dont la magie se rapprochait de celle de l’Ombre. Cela expliquait la raison de leur défiance à propos d’Arka, et pourquoi ils l’avaient arrêtée, lui attribuant les actes de Ombre, le sorciers qui l’avait enlevée. Tout cela faisait décidément trop de « Ombre ».

-Ben… on a qu’à dire qu’on est pas des sorcières, et… qu’on se rend chez notre famille. Sous-entendu : des gens nous attendent, et ils trouveraient notre absence inquiétante, nous ne sommes pas toutes seules.

Dacha lui lança un regard perplexe.

- … L’idée n’est pas mauvaise… Mais je me demande bien d’où tu viens ! De tous mes voyages, jamais je n’ai entendu aussi curieuse façon de parler !

La remarque la laissa bête. Comparé à ses camarades de classe, elle avait toujours trouvé son registre très correct. Mais maintenant qu’elle y pensait le vocabulaire des habitants de la Lande était assez particulier et évoquait le parler du siècle précédant le sien. Si jamais elle voulait dissimuler ses origines, il lui faudrait s’y accoutumer.

Sa seule réponse fut un haussement d’épaule.

-Bha ! s’exclama Dacha. Peu importe. Bon pour ton idée. Mais je te préviens : ces hommes ne sont pas aisés à confondre ! Éviter la rencontre est préférable, et de loin.

Un grondement orageux dans le ciel lui arracha un soupir mécontent. Les deux femmes réajustèrent leurs capes cirées pour dégainer leurs capuches sitôt que l’averse se déclencherait. Dire qu’elles étaient parties depuis une heure à peine !

Pendant un long moment, elles marchèrent en silence. La sorcière n’était pas extrêmement bavarde, sa compagne de périple non plus. Arka marchait un peu en arrière, scrutant le paysage. C’était la première fois de sa vie qu’elle devrait marcher si longtemps. Six jours ! Pour le moment la fatigue ne la touchait pas encore, mais ce serait un fait inéluctable pour quelqu’un aussi peu habituer qu’elle au sport.

Ce n’était pas faute d’avoir essayé : sa mère avait tenté d’inscrire sa fille à toute sorte d’activités, physique ou artistique. Piano, danse classique puis moderne, peinture, judo, football, escalade, équitation… Elle gardait d’ailleurs un souvenir particulièrement désagréable de ce dernier essaie au cours duquel elle avait dû faire face à une exécrable monitrice qui de toute évidence n’aimait pas les enfants, encore plus lorsqu’ils ne savaient pas monter à cheval. Elle avait passé son temps à lui hurler dessus, et son petit poney, aussi paniqué qu’elle, avait fini par s’enfuir au triple galop, passer sous la corde de la carrière -par miracle Arka avait eu le réflexe de se baisser à temps- et traverser le centre équestre plus vite que son ombre. Au final, il avait tenté de sauté par-dessus les fils électriques menant à son pré habituel. Sa cavalière, en plus de se prendre en plein visage la branche d’arbre sous lequel le poney avait réalisé son exploit, était tombée dans les orties… et immanquablement sur le fil électrique, dans lequel elle s’était empêtrée. À moitié assommée, elle avait dû attendre que les adultes la retrouve puis cours éteindre le post électrique pour la sortir de là en se prenant châtaigne sur châtaigne. Depuis, elle avait décidé que plus jamais elle n’approcherait un cheval ! Malheureusement, les autres activités s’étaient également soldées par des échecs ou des frayeurs, et sa mère avait fini par seulement lui prendre un abonnement à la bibliothèque.

Le chemin de terre battue coulait entre les champs, les prairies et les bois. Dans quelques heures, elles devraient atteindre un village dont la jeune fille avait oublié le nom sitôt entendu. Elles ne s’y arrêteraient que le temps de se désaltérer et de manger un peu. Edjaard leur avait pour cela donné une miche de pain fraiche, une roue de fromage et quelques bardes de viande séchée ainsi qu’une gourde en cuir. Et des petits sachets qui ressemblaient fort à des sachets de thé.

-Et ça, qu’est-ce que c’est ? demanda-t-elle en désignant l’un des sachets.

L’emballage en lui-même était fait d’un papier fibreux qui ressemblait à du papier recyclé, cousu aux extrémités. Une impression mauve foncé légèrement passée l’ornait d’un :

Détoxifiant anhydre pour hydre De la Fabrique Badibulle

Annote : Déchiré le haut du sachet en suivant les pointillés Verser la poudre dans un récipient d’eau

Capacité maximale : Tonnelet …….. (un)

 

À nouveau, Dacha darda sur elle un regard éberlué. Mais au lieu de reproche, elle se contenta d’afficher un sourire amusé.

-N’as-tu jamais vu de pilduick ? Tu es réellement étrange ! Ce sont des sorts de poche. Il suffit de déchirer le papier et d’en verser en respectant l’annotation pour déclencher le sortilège. Je te montrerais à demi-jour comment on utilise ceux-ci pour purifier l’eau de boisson.

Encore l’un des nombreux mystères de la Lande ! Décidément, Arka avait bien des choses à découvrir ici. Entre les gens capables d’invoquer des oiseaux et des cavaliers d’ombre, ceux qui permettaient à leurs camarades d’infortune de sauter d’un train sans finir écrabouillés, d’autres qui mettaient leurs pouvoirs en sachet, ou qui faisaient disparaître les cavaliers des autres… Cette remarque tira de sombres pensées à Arka.

-Au fait. Les précurseurs arrêtent facilement ceux qui utilisent la magie tirée des ombres, n’est-ce pas ?

-La magie de l’Ombre ! Avec une majuscule. C’est un type de magie particulier qui provient de ce qu’il y a de sombre en ce monde, pas juste des simples ombres. Mais oui, pourquoi ?

-Ben…, commença-t-elle, perplexe. Les cavaliers d’Ombre à notre poursuite… ça veut dire que parmi eux il y a des sorciers de l’Ombre, non ?

Dacha s’arrêta tout net. Puis, comme si rien ne s’était passé, elle reprit sa route, sans rien dire. Arka se demanda bien quelle bêtise elle avait encore pu dire, et préféra garder le silence. Jusqu’à ce que l’autre le brise.

-Moui. J’avais déjà songé à ce paradoxe. D’autant que des invocations de ce niveau ne sont pas à la portée du premier charlatan venu. Mais retient bien une chose : cette magie est trouble, aussi trouble que sa source, et seule des choses troubles peuvent en sortir. Méfie-toi de tous ceux qui la pratique, même ceux qui te paraissent inoffensifs comme Edjaard.

Sans plus amples explications, Dacha reporta son attention sur le lointain.

Trouble, c’était un bon therme pour qualifier ce qu’Arka pensait de sa situation. Elle espérait pourtant qu’il finisse par en sortir quelque chose d’un peu moins négatif que ce que présageait son guide !

Le reste du voyage se fit en silence. La jeune fille regardait le paysage, essayant de s’imprégner du chant timide des oiseaux et de la forte odeur de terre humide, agréable en dépit de la lourdeur de l’air. Un nouveau grondement de tonnerre raisonna, peu de temps avant qu’un épais rideau de pluie ne s’abatte sur les voyageuses, qui, loin de ralentir le pas, se contentèrent d’ajuster leurs grandes capuches et de vérifier l’étanchéité du petit sac de toile cirée qui gardait leurs provisions, les économies de Dacha, une carte et un couteau.

Alors que le chemin de terre se faisait plus mou et boueux, Arka se réjouit de la qualité de ses chaussures. Tant qu’elle ne crapahutait pas dans les marais, elles lui gardaient les pieds au sec, tenaient bien sa cheville et leurs semelles épaisse et confortable en faisait des chaussures de marche tout à fait appréciables. Un heureux hasard, puisqu’il s’agissait-là des bottines qu’elle portait en se réveillant dans le train, aux côtés d’Ombre. Ou alors c’est lui qui a échangé mes basquettes avec ces chaussures-là pour que mes origines soient moins flagrantes ? pensa-t-elle. Cette idée en entraina une deuxième quant au reste des vêtements qu’elle portait ce jour-là et la façon dont elle s’était retrouvée avec son jupon sur les fesses, mais elle refusa catégoriquement d’y penser.

D’après l’horloge accrochée au mur d’une sorte d’église, la demi-journée -midi, dans son monde- était passée d’une heure lorsqu’elles s’arrêtèrent au bord de la fontaine centrale du village pour manger et se désaltérer, toujours sous une pluie orageuse. Tout en se demandant s’il y avait dans la Lande aussi des croyances quant à l’existence d’un dieu, ses yeux ne quittaient pas les mains de Dacha qui déchirait le pilduick pour en verser la poudre dans le goulot de la gourde, remplie à l’eau de la fontaine. Ce récipient étant bien plus petit que le tonnelet annoncé sur le sachet, elle ne mit qu’une partie de la poudre et referma le reste en tirant sur le bord des coutures. Pratique, admit Akra. Elles se passèrent ensuite la gourde, puis, une fois leur repas fini, reprirent la route. Six jours à marcher comme ça ? pensa-t-elle en sentant ses jambes déjà lourdes.

Pendant de longues heures encore elles marchèrent vers le nord-ouest, en direction de Grumeaux. À mesure que l’orage éclatait, leur interdisant l’abris des arbres même au plus fort de la pluie, ses méninges s’activaient, sans succès. Il fallait pourtant bien qu’elle trouve une solution à ce qu’elle vivait actuellement ! Suivre Dacha sans but aucun était bien gentil, mais la sorcière lui posait de plus en plus de questions, et elle n’allait tout de même pas passer des jours et des jours à marcher pour la gloire ! Mais qu’est-ce que je pourrais faire en attendant de me réveiller ? se demandait-elle. Ces jambes avaient beau avancer, sa réflexion restait au point mort.

Quant vint le soir, la pluie s’était calmée mais les éclairs continuaient de strier le ciel. À défaut d’être une ambiance propice au sommeil, c’était plutôt joli. Les deux femmes s’installèrent dans la grange d’une ferme pour la nuit.

-On devrait peut-être d’abord demander au paysan, non ? s’enquit-elle.

-En voilà une drôle d’idée ! Il n’aimerait certainement pas être dérangé à cette heure ! Et puis si la grange était ouverte c’est que cela ne le dérange pas. Tous les voyageurs font comme ça lorsqu’ils ne veulent pas dépenser ces cent et des milles en auberge !

Là-dessus, la sorcière tira un peu d’eau au puit attenant, et entreprit de se débarbouiller avant de manger un peu de pain et de fromage. Arka l’imita sans plus rien dire, regrettant déjà l’école d’Edjaard, son confort et ses repas complets.

Quelle misère, pensa-t-elle encore en scrutant le plafond de la grange, dont les fentes entre les planches laissaient passer de soudains éclats de lumière. L’orage fait un de ces bruit, on dirait que le ciel va nous tomber sur la tête. Mais rien. Rien… Me réveillerai-je un jour ? Que dois-je faire en attendant ? Trouver un travail ? Ce serait un bon début, je pense. Au moins je ne dépendrais plus de personne. Mais quel genre de travail ? Je ne sais rien faire de particulier…

Avec un soupir, elle remua sur son tas de paille pour le rendre plus confortable. Elle était arrivée au lycée et avait choisi la filière scientifique par défaut, ne sachant absolument pas vers où s’orienter. Élève très moyenne qui ne fournissait pas d’effort, elle redoutait le moment où il lui faudrait choisir des écoles supérieures. Laquelle ? Pourquoi ? Qu’est-ce qui l’intéressait, au fond, dans la vie ? Sa mère lui parlait sans cesse des métiers de la santé. Médecin, comme c’est gratifiant, comme on gagne bien sa vie ! Arka et elle s’étaient fortement disputées.

-Tu penses réellement ce que tu dis ? s’était emporté la jeune fille. Je déteste m’occuper des gens, j’ai horreur de les écouter raconter leurs problèmes, ils ne m’ont jamais intéressé ! Il faudrait vraiment que je sois une crevure pour accepter que les gens remettent leur santé entre mes mains alors qu’ils ne m’intéressent pas le moins du monde !!

Son père lui avait alors parlé d’architecture. Bien qu’il ne connaisse strictement rien à ce métier, il avait lu un article lui étant consacré dans un magazine et s’était persuadé de c’était dans les cordes de sa fille. À défaut d’avoir un véritable talent pour le dessin, elle savait reconnaitre le bon gout et le mauvais quand elle les voyait.

-Et puis ça s’apprend, le dessin ! avait-il insisté.

Pas franchement convaincu, Arka s’était dit que ça valait au moins le coup de se renseigner.

Mais là, dans la Lande, ce n’était peut-être pas tout à fait le métier qu’elle trouverait le plus facilement. Toute cette histoire lui prenait la tête. Pourquoi, même en changeant de monde, les problèmes restaient-ils les mêmes ?

Le jour se leva sans qu’elle ne se soit aperçut s’être endormie. Leur marche reprit, sous un ciel gris comme une chape de plomb. Déprimant.

-Dit Dacha, tu fais quoi toi, comme métier ?

La sorcière lui lança une oreillarde surprise.

-J’étais missive-coursière, jusqu’à il y a peu. Je livrais des courriers dans l’ensemble de la Lande, mais la compagnie pour laquelle je travaillais à fait faillite il y a peu. Pourquoi cette question ?

-Mmm… Je suis bar…partie de chez moi il y a peu. Pour trouver du travail. Mais je ne sais absolument pas quoi faire.

C’était la première fois qu’elle parlait d’elle à Dacha, et trouvait cela bien dommage que ce soit un mensonge. Quand bien même, peut-être la sorcière pourrait-elle l’aider ?

Mais cette dernière se contenta d’un haussement d’épaules. Arka décida de ne pas insister. Elle n’eut pas bien longtemps à ce taire : tout à coup, un bruit de cavalcade résonna dans leur dos. Les deux femmes se concertèrent du regard, interdite, puis décidèrent d’un commun accord de se cacher dans les hautes herbes du champ que le chemin longeait. Peut-être n’était-ce que des voyageurs particulièrement pressés mais leur mésaventure avec les précurseurs était encore trop encrée dans leurs esprits pour oublier qu’elles étaient potentiellement traquées.

Un premier cheval les dépassa, l’œil fou et la robe couverte de sueur. Son cavalier, cramponné à la crinière, ne cessait de l’enjoindre d’accélérer le train. Peu après, cinq autres cavaliers défilèrent devant les deux voyageuses, accroupies dans la boue du champ. Malgré la vision fugace qu’ils leur avaient offerte, elles eurent tout le loisir de frissonner devant les couleurs des uniformes. Précurseurs.

Elles attendirent de longues minutes dans l’herbe pour s’assurer que les cinq qu’elles avaient vu étaient les seuls. Quant leurs jambes leur firent trop mal pour qu’elles ne restent une minute de plus dans cette position, elles regagnèrent le chemin.

Un regard entre elles, attestant que l’une comme l’autre, elles n’étaient pas sûres de vouloir continuer dans cette direction.

 

 

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MLdlG
Posté le 16/04/2018
Toujours moi, je continue l'ortho et je te fais un commentaire global en suivant.
"A peine arrivées en villes, elles avaient entrepris de faire leurs provisions pour pouvoir repartir aussitôt." [à]<br />
"L’espace d’une seconde, elle aurait été prête à faire demi tours, remonter au triple galop les marches et retourner dehors" [demi tour]
"A droite ? A gauche ?" [à]
"A nouveau, la panique submergea la jeune fille." [à]
"En plus, chaque sorcier est différent, nous ne sommes pas tous fort en tout, tu vois ce que je veux dire ?" [forts]<br />
"Arka avait supposé que c’était comme les gens forts en math et les gens forts en français, ou en histoire : les uns n’étaient pas forcements plus intelligents que les autres, juste intelligents différemment." [forcément]<br />
"A cause de l’obscurité, Arka perdit rapidement tout repère temporel" [à]
"A pas de loup, elles sortirent de leur tanière." [à]
"-Parfais, avec ça ils auront du mal à nous voir." [parfait]<br />
"Elle commença à courir aux côtés de Dacha, se focalisant uniquement sur le fait de caler ses foulées sur celle de son guide." [celles]<br />
"Pour une fois, elle réussi même à ralentir en même temps que Dacha et personne ne se gamella royalement." [réussit]<br />
"C’est mon rêve, si j’y pense fort, peut-être que ça va finir par venir ! c’était d’abord persuadé la jeune fille." [persuadée]<br />
"Malgré sa sieste dans la cave, Arka se sentit toujours fatiguée." [j'aurai plutôt mis ici l'imparfait : "se sentait"]<br />
"A nouveau, elle se mit à activer ses petites jambes fatiguées et griffées de partout quand soudain elle trébucha sur une branche enfouie dans l’humus et tomba dans une fondrière vaseuse." [à]
"-Aller vient ! s’exclama-t-elle en lui tirant le bras pour la relever." [viens]
"Ensuite, Dacha avait parlé des sorciers qui aurait commis des crimes, de guerres entre familles et de bien d’autres choses à propos de magie qu’Arka n’avait pas tout à fait compris." [auraient]<br />
"A ce moment-là, les dignitaires étaient encore relativement loin, et puis la fille n’aurait de toute façon trouvé personne d’autre pour l’aider : pour que le secret de la Lande reste sauf, il avait fallu que les Hauts Dignitaires s’arrangent pour que l’autre monde et ses habitants effraient ceux d’ici !"
"Leurs poursuivants les talonnaient de près, et Dacha se disait qu’elle aurait mieux fait de lui expliquer comment ce qu’elle savait et de lui dire de partir à la recherche de Guiving" [je ne suis pas sûre que le "comment" ait sa place, cela n'a pas trop de sens ainsi ;) ]
"Arka s’était mise à pleurer, Dacha s’était contenté de serrer les poings en les maudissant" [contentée]<br />
"Arka voyait les auréoles de lumière onduler sur les murs de pierre. A un moment, ils se rapprochèrent d’elle, mais la cache était petite et peu visible, surtout avec une source de lumière au niveau du sol. Au grand soulagement de la fugitive, la lumière finie par s’évanouir." [à + la "lumière au niveau du sol" ? c'est pas des bougies qu'ils utilisent ? je trouve cela un peu étrange ou je n'ai pas compris ;)]
"Certains sorciers plus puissants que moi y arrive." [arrivent]<br />
"Les oiseaux chantaient, mais à part ça, pas un bruit." [cela]<br />
"Après être passées aux buissons, Arka tendit l’oreille pour tenter de repérer le léger coulis d’un ruisseau" [passée]<br />
"En lui suivant, elle arriva à un endroit où il s’évasait un peu, et elle retira sa cape et ses jupons, restant avec sa culotte bouffante qu’elle trouvait ridicule et une sorte de mini débardeur assortit qu’elle devinait être une brassière." [le]<br />
"Puis-ce que le reste de ses vêtements ressemblaient vraiment à ceux qu’avaient portés les gens de son monde des années auparavant, sûrement ses ancêtres avaient-elles eut les mêmes genres de sous-vêtements ? [Puisque + ressemblait (je pars du principe que c'est "le reste" qui ressemblait et pas les vêtements en eux-mêmes) + porté + eu]<br />
"Une fois que l’habit avait retrouvé une couleur un peu satisfaisante elle se débarbouilla rapidement le visage et les bras, puis noua les manches de sa robe sur ses épaules par-dessus la cape." [je mettrai du passé antérieur ici donc "eut"]<br />
"Elle remonta pieds-nu jusqu’à la cabane, s’essuya les pieds sur un coussin de mousse séché au soleil puis remit ses chaussures déjà usées. [pieds nus + répétition de pied]<br />
"Depuis l’attaque simultanée des dignitaires et de la créature de pierre, elle s’était chaque fois contenté de murmurer, marmonner et souffler, ce qui lui donnait maintenant l’impression que sa voix s’était éteinte à jamais." [contentée]<br />
"Elle fit la grimace, puis tira du baluchon deux tranche de lard séché." [tranches]<br />
"-Tu attaque déjà le lard ? s’étonna Arka." [attaques]<br />
"Dacha fini par tirer une carte cirée du baluchon." [finit]<br />
"Ce devait être que les distance étaient relativement importants, supposa Arka." [distances + importantes]<br />
"La jeune fille parcourus la carte." [parcourut]
"A côté de son nom, une fine croix semblait indiquée que c’était la bourgade principale du comté des Quanmors." [indiquer]
 
Voilà, voilà...
Donc sur le fond, je trouve que ton histoire est plutôt sympathique, ma curiosité est piquée. J'aime bien le fait que tu prennes ton temps pour dérouler l'histoire. J'aime bien le côté anti-héros développé.
Les dignitaires et Hauts Dignitaires se ressemblent peut-être un peu trop à mon goût (en terme de désignation), il y a déjà pas mal d'info à retenir en lisant, ça aurait pu être plus facile de trouver des noms complètement différents (encore que il y a peut-être une raison que je ne saisis pas encore ;) )
Je trouve surprenant que Arka et les personnes qu'elle rencontre se comprennent tout le temps. Il y a l'histoire du OK, que je trouve tout à fait charmante. "ok" cela ne se dit pas dans la Lande, mais Dacha dit qu'elle s'est faite virée parce que sa boite a coulé... ;) Pareil, plusieurs fois, il est question de la "fête" dans laquelle se rend Arka et son amie, que ce soit avec Ombre ou Dacha, ils semblent tous savoir de quoi on parle alors que la Lande paraît être restée un peu en arrière... D'ailleurs où est le portable d'Arka ? ça aurait pu être drôle ce passage ;) (à moins qu'il revienne plus tard). En fait ce que je veux te dire, c'est que certains traits de ton histoire pourraient être accentués permettant un peu plus de réalisme, ouvrir le champ des possibles sur les incompréhensions respectives des personnes. Cela renforcerait le côté ils ne viennent pas du même monde, même s'ils se ressemblent.
Tu utilises souvent du vocabulaire familier dans ton texte. Si cela ne me choque pas quand on est dans les dialogues, les pensées ou les ressentis des personnages, il y a certaines formulations qui pourraient être revues de ce côté (avis perso, hein). Cela se remarque parce que le reste du temps, tu as plutôt un vocabulaire courant voire soutenu.
Un mot qui revient souvent c'est "gens". Je ne l'ai pas mis en évidence dans mes précédents commentaires, mais il revient assez régulièrement, et je crois dans tous tes chapitres.
Si je pense à d'autres choses, je reviendrai te le dire dans le coin, en attendant, bonne continuation et bonne écriture.
MLdlG
Moje
Posté le 16/04/2018
Merci de prendre autant de temps pour relire!! O.O
Oui, je pense remplacer "dignitaire" par "précurseur", mais ça m'embête un peu pour la suite...<br />D'accord et d'accord. Dans mon esprit, la Lande est en effet calquée sur une époque antérieur à la notre, mais avec des évolutions, différentes ou similaires et donc des expressions qui se rejoignent ou d'autre qui n'existent pas dans le Grand Monde. Après je comprends que ce soit étrange à lire: un truc de plus auquel je devrais prêter attention lors de la réécriture (mais pour ça j'attends d'avoir fini la première partie)!<br />Le téléphone est passé à la trappe en même temps que les vêtements"normaux" d'Arka. Ombre a pensé à (presque) tout au moment du passage, même si j'imagine bien la panique du téléphone sonnant en plein marcher!!
D'accord, je vais également y prêter plus attention. Mon principale problème pour le moment c'est que le "caractère" de la Lande et des personnages est encore un peu flou pour moi, j'espère que cela viendra au fur et à msure de l'écriture et que je pourrais améliorer le début lors d'une réécriture (parce que là il y a plein de cheveux sur la soupe et de trucs qui me paraissent un peu vague)!
Merci merci, et bonne continuation à toi aussi!
Moje
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