Chapitre 5 — Le calme avant la tempête

— Omar —

J’ai passé la journée d’hier à travailler tous les dossiers que je défends aujourd’hui devant la cours. Tout le monde semble paniquait et veut passer en justice rapidement. Je ne suis pas près d’avoir fini cette journée. Le procureur souhaite que six affaires soient bouclées, autant dire un record dans ma carrière d’avocat. Malaïka, a le même problème. J’avoue avoir été complètement insociable avec ma colocataire, hier. Il fallait que j’avance et j’ai passé quasiment toute la journée enfermé dans ma chambre à pianoter sur mon clavier. Je suis assis dans la cuisine devant mon café, ce matin une nouvelle sur l’application du journal que je lis réguliérement : La NR. Le président va refaire une intervention ce soir.

Une intervention pour dire quoi, je me le demande. Il a déjà fermé les écoles qu’est ce qu’il veut fermer d’autre. Soudain, je vois un article qui attire mon attention, cela fait deux jours que je n’ai pas trop regardé l’actualité. Le premier ministre a annoncé samedi soir la fermeture des bars, restaurants, cinéma, et commerces non-essentiels. J’avais raté une info importante. Très importante. La soirée de samedi avait été vite expédiée et dimanche je suis resté concentré sur le travail.

Ma sœur Sidney a essayé de m’appeler au moins cinq fois. Mais la connaissant, j’avais cru qu’elle n’avait pas grand-chose à m’annoncer, je comprends maintenant pourquoi, elle avait autant insisté. Ma sœur est fleuriste, elle tient une boutique dans le centre de Tours. Elle est très douée pour ce métier. Je suppose que une boutique de fleuriste ça rentre dans les commerces non-indispensables. Je regarde l’heure il est à peine 8 h, l’heure de se mettre en route. J’attrape mes affaires et prends la route pour le centre-ville. J’appelle ma sœur en kit main-libre dans la voiture.

Il est tôt mais je ne serais pas surpris qu’elle réponde. Quelques sonneries et oui elle décroche, elle semble avoir une voie énervée :

— Omar tu as ignoré mes appels tout le week-end !

— Sid, je suis désolé, j’avais six affaires à préparer pour aujourd’hui, je n’ai quasiment pas consulté mon téléphone.

Elle me répond de plus belle :

— Et les infos tu les a consulté ?

— Je viens de voir ce matin, la nouvelle de samedi.

Elle est toujours énervée et me lançe :

— Pour un avocat, tu n’ai pas très au courant des actualités, c’est pas compté comme un manque de professionnalisme ça dans ton métier.

— Sidney, c’était un week-end de folie, je suis désolé, je l’aurais vu je t’aurais appelé. Bon comment tu t’organises du coup ?

Elle parait encore vexée :

— Puisque maintenant ça t’intéresse, ils ont annoncé que les fleuristes pouvaient continuer les livraisons, mais les boutiques, devait rester fermer.

— D’accord et toi tu vas les continuer les livraisons ?

Sa voix est plus adoucie :

— Je n’ai pas le choix Omar, j’ai des dizaines de plantes en réserve je dois les écouler. Mais je dois t’avouer que les livraisons ne se bouscule pas vraiment au portillon. Les gens annulent toute leur commande. Il ne va pas falloir que ça dure longtemps Omar, la trésorerie n’est pas bien grande. Ça pourrait couler la boutique.

Je tente de la rassurer :

— Ne t’en fais pas tu n’es pas toute seule. On est tous derrière toi, s’il faut on te donnera un coup de pouce.

Elle ne parait pas convaincue par ce que je viens de lui dire :

— Vous allez tous être dans la galère. Tu le sais.

Elle poursuit en coupant cour à la conversation :

— Bon je dois te laisser, j’ai encore un peu de travail, pour essayer de sauver les meubles.

Je tente au moins de finir cette conversation sur une note positive :

— D’accord, ça va aller Sid, je t’embrasse et bonjour à Antonio et les filles.

 

Le téléphone raccroche, je continue ma route vers le tribunal.

La journée a été interminable. Les six affaires sont toutes bouclées, mais je suis littéralement vidés. On dirait que la course pour la victoire que je viens d’effectuer vient de prendre fin. J’ai perdu quatre affaires sur six. Travailler dans la précipitation n’a jamais vraiment été mon fort. J’ai été tantôt partie civile, tantôt à la défense.

Il est presque 20 heures quand j’arrive pour garder la voiture devant la maison du 7 rue du Pommier Vert. Franchisant le portail, j’entends ma colocataire s’affairer dans la cuisine. J’ouvres la porte d’un coup de clé dans la serrure. Puis, je m’adresse à elle :

— Bonsoir Gabrielle !

Elle me répond, encore très mal à l’aise :

— Bonsoir….euh

Le voilà le problème elle se rappele plus mon prénom. J’en suis presque amusé qu’elle n’ose pas demander. Je décide de mettre fin à son supplice, en la coupant :

— Omar, je m’appelle Omar.

Elle me fixe puis retourne à la cuisine en faisant comme si, elle s’en souvenait.

Je vais dans le salon allumer la télévision, il est 19 h 58, pile à l’heure. Les deux minutes passent alors que je m’installe dans l’un des fauteuils.

Puis l’infographie apparait à l’écran. Gabrielle a dû entendre le son de la Marseillaise qui retentit à l’écran car elle arrive dans le salon après avoir abandonné la cuisine et elle vient s’assoir dans l’autre fauteuil.

Nouvelle apparition du président de la République. Deux fois en à peine une semaine, le Covid-19 nous fait vivre des situations inédites. Le président commence par marteler à quelques minutes d’intervalles plusieurs fois que nous étions en guerre. Une guerre sanitaire dans laquelle, il allait falloir unir nos forces. J’écoute avec attention, les mesures pour les entreprises pour ma sœur Sid. Elle va certainement me demander ce que j’ai compris de ce que le président à annoncer. Elle veut toujours avoir une confirmation, sur ce genre de point juridique. L’avocat ressortant en moi, je bois en quelques sortes les paroles de l’homme qui parle à la télévision. Il affirme qu’il va ouvrir un fond pour aider les entreprises en difficulté. Et il prend des mesures comme le report du paiement des impôts. De l’aide également pour garder tout les employés au travail, ou les maintenir en chômage partiel.

Ma sœur a une employée, et au vu du peu de travail, le chômage partiel allait être indiqué dans son cas.

Nous savons tous que les aides que le président promet sont certes mise en place mais qu’il va falloir tout de même trouver du soutien ailleurs.

Ensuite le président aborde un sujet, bien plus général. Concernant toute la population, tous les déplacements hors du domicile, allaient devoir être limité à partir de demain 12 h. Nous n’allions pas pouvoir nous déplacer librement. Tous les déplacements devaient se limiter aux stricts minimums. Par stricts minimums, on entendait déplacement du au travail, du aux besoins nécessaires comme aller faire ces courses, prendre soin de personnes vulnérables comme nos parents âgées, l’activité physique, ou promener son chien.

J’ai encore du mal à acquiescer cette nouvelle. La liberté de mouvement venait de disparaître en une seule phrase prononçait par le président de la République. Il annonce ensuite que dés demain chacun devra remplir une attestation de dérogation pour pouvoir se déplacer. Sans la présentation d’une telle justification des amendes seront appliquées par les forces de l’ordre.

Je regarde Gabrielle, elle semble aussi choquée que moi.

Une fois le discours du président terminé, les informations continuent sur un flot de commentaires sur son intervention. Mais je n’écoute déjà plus. Évidemment un flot de messages fait planter mon téléphone, toute ma famille a décidé de commenter cette intervention. Et la première sur la liste fut bien évidemment Sidney :

— Quoi tu as entendu, ce que j’ai entendu ?

Je lui répond :

— Oui, Sid, j’étais devant la télé à 19 h 58 tu aurais été fière de moi.

Aussitôt, le téléphone tinte, elle me répond :

— Ce n’est pas drôle… C’est légale d’empêcher les gens de sortir ?

Sa réaction me parait légitime, moi-même je ne suis pas sur de la justesse des ces mesures. D’un point de vue juridique, cela a l’air vraiment à la limite.

Juliana et Mia qui travaillent toutes les deux à l’hôpital (mes deux autres sœurs) semble ravie de cette mesure, car presque en même tant j’ai droit à un message de leur part. D’abord Juliana :

— Ce n’est pas trop tôt on passe en confinement. Parce que c’est la guerre ici.

Et Mia :

— Eh bien, il était temps qui se réveille, on va peut-être sortir la tête de l’eau.

Juliana l’aîné des deux, m’inquiéte particulièrement. Elle est enceinte de cinq mois et elle s’amuse toujours trainer dans l’hôpital, pour soigner ces patients. Pour le moment ses supérieurs la mettent à l’écart des contaminés mais je n’aime pas la savoir là bas, et Julien son mari non plus. Mais elle est plus têtue qu’une mule. Quant à Mia, elle est rentrée de bon heure en apprentissage à l’hôpital. Elle a suivit la voie de Juliana. Dans la famille, les cadets ont une tendance à faire une carrière similaire aux ainées.

Nos parents n’ont pas vraiment été gâtés pour nos études. Enfin pour la plupart on s’est débrouillé. Avocats, médecin ça coûte cher. Et le petit dernier aussi coûte cher. Ethan est en audiovisuel. Mais il a eu le chance que ses études coïncide avec le divorce des parents. Ils sont prés à tout pour qu’Ethan en aime l’un plus que l’autre donc ces études, c’est un moyen de l’influencer dans son amour. Lui n’y prête pas attention et se contente de profiter un peu de la situation.

D’ailleurs en parlant du loup, lui aussi m’envoi un texto :

— Déjà que l’école c’était fini, maintenant je suis coincée dans mon 12m2.

Le pauvre il est coincé à Paris. En parlant de coincée, je réalises que moi aussi, je vais être coincé là si ça continue. En effet, il faut rester dans un lieu de confinement fixe à partir de mardi midi. Or le plombier m’a dit qu’il ne viendrait que mardi matin.

Nouveau tintement de téléphone. Et parce qu’une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule, le plombier venait de m’envoyer un texto :

— Monsieur, je suis navrée mais je suis dans l’obligation de fermer mon entreprise dés ce soir, je ne vais pas assurer la réparation de votre fuite d’eau demain.

Une catastrophe ! Tout simplement, je suis coincée ici, pour une durée indéterminée ! Je dois trouver une solution. Peut-être qu’une de mes sœurs pourrait m’héberger. Pas Juliana ni Mia elle travaillent à l’hôpital c’est trop risqué. Sidney n’a pas vraiment de place. Malaïka non plus, elle vit dans un mouchoir de poche.

Il n’y avait plus aucun doute, le covid-19 allait avoir des conséquences sur cette année 2020.

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