Chidera n’avait jamais été très croyante. Enfant, les cérémonies envers les dieux protecteurs de l’île avaient surtout été l’occasion de retrouver ses amis, puis, ses onze ans passés, de montrer la dignité de la famille Volindra. Les dieux ne lui étaient devenus importants qu’une fois disparus. Dès lors, il était trop tard pour les prier.
—Mort comment, tu dis ? demanda-t-elle.
—Nous n’avons pas pu le déterminer avec précision, dame, répéta sans broncher l’homme debout devant elle. Le docteur pense qu’il s’agissait d’un grand chien… ou d’un ours.
Quel dieu prenait soin des morts ? Perlez, se rappela-t-elle aussitôt, Perlez aux yeux de sang qui voient par-delà le voile sans retour. Maintenant que la déesse avait disparu, qu’allait-il arriver aux âmes des défunts ? Il y en avait eu, des morts, depuis l’incendie. Pourtant la question ne lui avait pas traversé l’esprit avant aujourd’hui.
Elle fit signe à Élos de s’asseoir, ce qu’il fit. Chidera pointa du doigt une esquisse qu’il avait déposé sur son bureau au début de son rapport :
—Il n’y a pas d’ours à l’intérieur de la cité. Quant aux chiens, je n’en ai pas rencontré un seul capable de faire ce genre de dégâts. Tu es certain que ton artiste n’a pas exagéré les faits ?
—Dame Chidera, j’y étais. L’image est la copie exacte du cadavre.
—Bon sang, soupira la jeune femme en observant à nouveau le dessin. Et il fallait que ça arrive en même temps que la venue de la délégation.
Toutes les cités devaient faire face aux rixes, aux jeux d’argent, à un certain degré de pauvreté et de violence. Galatéa ne faisait pas exception et, en temps normal, jamais la mort d’un ivrogne sans métier ni famille n’aurait été rapportée à une jeune femme de son rang, fut-elle héritière des Volindra. Cependant les circonstances n’avaient rien d’ordinaire : l’Empire était là et les maudissait tous de sa présence.
—Nous n’avons rien remarqué d’anormal à la Maison rouge, dit Élos face à sa question muette. Aucun de nos invités ne s’est laissé tenter par une excursion nocturne.
—J’entends, Élos. Mais il n’y a pas de hasard. Ils sont arrivés hier et ce matin, un corps remonte à la surface ? Non, je refuse de croire à une coïncidence. Reste à savoir quel est le lien. Pas d’informations sur des… penchants de certains de nos invités ?
—Rien de ce genre. Le comte aime un peu trop les femmes, son fils paraît développer la même habitude. Le Bellusuk boit trop et sa femme est une mégère aux dents longues. Rien qui sorte de la norme, et rien qui indique un goût pour la violence. Surtout, nous n’avons pas relevé la présence d’un animal à bord. Mais il faut dire que nous n’avons pas beaucoup cherché de ce côté-ci, étant donné que le navire était gardé. Vous voulez que je mette mes hommes sur le coup ?
Chidera acquiesça. Les services d’Élos n’avaient jamais été moins que parfaits : sa mère ne l’aurait jamais gardé aussi longtemps auprès d’elle si ça n’avait pas été le cas. S’il disait que la délégation n’avait pas bougé, alors celle-ci avait dû agir autrement.
—Je veux un rapport dès que tu as du nouveau. Peu importe qu’il fasse jour ou nuit, compris ? Élos hocha la tête, dévoilant l’anneau d’or et d’onyx à son oreille droite. En attendant, dis-moi si nos amis les prêtres des caves ont quelque chose de neuf pour nous.
L’espion grimaça.
—Oui, j’imagine que c’est trop demander, ricana Chidera avec dérision.
Un an que les prêtres survivants étaient enfermés dans les prisons du Conseil pourpre, à se faire interroger. Ceux qui ne s’étaient pas suicidés dès les premiers jours avaient refusé de révéler quoi que ce soit – à moins, comme ils le répétaient, qu’ils ne soient véritablement au courant de rien. La jeune femme se mit à pianoter lentement sur son bureau.
—Ça fait six mois que nous n’avons plus eu la moindre information utile.
—Je sais, dame, dit Élos. Sa voix se fit apaisante. Pardonnez-moi. J’aimerais pouvoir vous en dire plus. Hélas, ces chiens du temple refusent d’avouer quoi que ce soit. On ne peut pas parler avec des gens pareils.
—Et pourtant, nous n’avons pas le choix. Il n’y a qu’eux qui savent déchiffrer les textes sacrés – bien que je ne me fasse plus d’illusion. Il n’y aura aucun indice sur l’absence des dieux. Si seulement le grand prêtre avait eu la bonne grâce de ne pas mourir dans l’incendie !
—Que voulez-vous : ces gens manquent cruellement d’éducation.
Des années passées à allumer les vasques et à écouter les prêtres ânonner leurs chants, tout ça sans en comprendre un seul mot ! Elle savait que les regrets ne servaient à rien. Néanmoins, elle ne pouvait penser aux heures passées assises dans les volutes d’encens, à écouter rêveusement la musique, lentement bercée par les flammes vivotant au gré de la chorégraphie des officiants, sans se dire qu’un peu de zèle aurait pu lui donner la clé du mystère. Les amitiés filées par les Volindra avec les prêtres survivants n’avaient mené à rien : les plus dociles étaient soient morts, soient trop jeunes pour être au courant de quoi que ce soit ; les autres restaient silencieux dans leurs cachots.
Seule la fouille du temple leur avait apporté des réponses – et au moins le double de questions. Le départ précipité d’Iasonas et de ses plus proches subordonnés avait été confirmé par les lambeaux de toge brûlée et de cheveux roussis retrouvés aux alentours du temple, dans la direction opposée de la Voie blanche. Mais la disparition du grand prêtre n’était au fond qu’un détail : les hommes d’Élos leur avaient ramené un journal, trouvé dans les appartements du grand prêtre, ainsi qu’un rouleau de feuilles couvertes de symboles. Les deux restaient indéchiffrables. Or la solution s’y trouvait, ou tout du moins des indices : Chidera le savait d’instinct, de la même manière qu’elle savait que retrouver les dieux était le seul moyen entièrement sûr de protéger Galatéa des envahisseurs. « Même s’ils sont déjà là, » pensa-t-elle avec amertume.
—Puis-je faire quelque chose d’autre pour vous, dame ?
—Non, pas pour l’instant. Tiens-moi au courant des activités de nos invités et de leurs hôtes. Si tu entends quoi que ce soit d’intéressant…
—Je vous enverrai mot sur-le-champ. Permettez-moi de prendre congé, dame Chidera.
Les pieds de sa chaise raclèrent contre le parquet. Une révérence, cinq pas et il avait disparu.
Lentement, Chidera posa la tête contre son poing, tandis que sa main gauche faisait tourner sa plume. À l’extrémité de son champ de vision, elle pouvait voir la fenêtre de son bureau, ouverte, d’où soufflait une brise légère. De là, Galatéa s’offrait à elle : le chant des oiseaux se mêlait au brouhaha distant des rues et faisait écho au parfum des fleurs de leurs jardins. Puis, au loin, venait l’océan, bleu et brillant, comme autant de lapis jetés à la surface de l’eau. Elle s’étendait à perte de vue, bien au-delà des bateaux et du port dont elle apercevait une partie, au-delà encore des bancs de sable blanc.
Tout était calme. Comment cela était-il possible ? Le monde ainsi que Chidera l’avait toujours connu était sur le point d’être totalement renversé. Peut-être était-il même déjà trop tard. On ne pouvait pas voir le temple depuis son bureau et pourtant, il aurait aussi bien pu se trouver au beau milieu de la pièce. Il accompagnait chacun de ses pas, s’insinuait dans toutes ses pensées. Il la narguait depuis les hauteurs de sa colline et les lacérations de l’incendie, creusant violemment dans ses murs, tachant son marbre de vilaine suie, ne l’empêchait pas de la hanter. Elle en rêvait même la nuit. « Si les dieux continuent de nous échapper, » pensa Chidera en lissant distraitement sa plume avec son pouce, « alors il faudra se débarrasser de la délégation le plus rapidement possible. » Restait à trouver le meilleur moyen de le faire. Elle en était là dans ses réflexions quand on frappa à sa porte.
—Entrez. Ah, dit-elle en voyant l’une des servantes de sa mère. Qu’y a-t-il ?
—Dame Léonide requiert votre présence dans ses appartements, Dame Chidera. Maintenant, ajouta la petite femme en se dandinant, gênée.
Chidera reposa prestement sa plume à côté de l’encrier et lui offrit un sourire complice.
—Mieux vaut ne pas la faire attendre, dans ce cas.
Le visage de la servante, soulagée, se détendit. Elle lui fit une petite révérence et, une fois Chidera dans le couloir, entreprit de la suivre aussi vite que ses petites jambes le pouvaient.
—Des nouvelles de mon père ? demanda la jeune femme en pénétrant dans la cour intérieure.
—J’ai cru comprendre qu’il devait garder le lit encore un jour ou deux, haleta la servante derrière elle. Mais le médecin a bien dit qu’il ne devrait pas avoir de nouvelle crise de sitôt ! Je suis sûre qu’il pourra vous recevoir cette semaine, et en pleine forme.
Chidera espéra qu’elle avait raison. Vers quel dieu fallait-il se tourner pour les problèmes de santé ? Heol, sans doute, avec sa connaissance des plantes. Sinon, Maen : chef des dieux, créateur, défenseur. Quel que soit le problème, Maen pouvait le résoudre.
La première fois qu’elle avait vu son effigie, Chidera avait fondu en larmes. Quelle fillette de quatre ans ne serait pas restée pétrifiée devant ce colosse barbu, glaive au poing ? Sa nourrice avait beau eu lui montrer le compas d’architecte à sa ceinture et lui pointer la tendre noblesse de son expression, rien n’était parvenu à la calmer. Ce n’est qu’une fois devant la statue d’Ashtar que la fillette inconsolable avait retrouvé son souffle. C’était un de ces souvenirs d’enfance flous, racontés mille fois par les adultes et qui finissent par prendre la forme que la mémoire des autres leur donne. Chidera avait l’impression de s’en souvenir, pourtant : ce jeune homme à la bouche ronde, enveloppé de voiles violets brodés de doré, tendant sa main de bois vers elle et Chidera, la poitrine encore soulevée par de gros sanglots, avait attrapé le bout de ses doigts entre les siens. Elle n’aurait su dire pourquoi. Le prêtre qui les accompagnait dans leur visite avait été ravi de voir la puissance de son dieu agir sur une enfant agitée, et la foi innée que la petite Chidera avait ressenti. Avec le recul, Chidera se rappelait surtout de l’or du tissu qui ornait la statue, similaire à celui de ses propres vêtements, et de la beauté du jeune homme gravé. Mais le prêtre avait eu l’air si content et sa mère si satisfaite qu’elle ne les avait pas contredits. Après tout, pourquoi ne pas croire qu’il s’agissait là de l’œuvre du dieu de l’amour ?
Au fil des années, elle avait vu les représentations des dieux se multiplier, leurs visages changer. Seuls leurs traits distinctifs restaient les mêmes : les longs cheveux d’Andon et son nez d’aigle, l’iris sanglant de Perlez, le géant barbu qu’était Maen, la jeunesse d’Heol et la figure svelte et élégante d’Ashtar. Comment retrouver les dieux avec si peu d’indications ? À moins de compter sur une aura particulière, une grandeur innée qui les séparerait des mortels, Chidera aurait pu les croiser cent fois dans la rue sans les reconnaître. S’ils étaient encore là.
Car Chidera y avait réfléchi, longuement : soit les dieux étaient partis de leur plein gré, pour une raison qui échappait à Galatéa toute entière, soit ils avaient disparu pour de bon. Des poètes étrangers chantaient parfois de telles légendes. Même les dieux n’échappaient pas toujours à la mort. Si c’était le cas, alors la cité était perdue.
Il y avait bien une autre possibilité. Elle était apparue à Chidera lors d’une de ces séances de travail interminables, où la logique semble ne mener à rien, où les idées les plus folles prennent l’allure du bon sens. La jeune femme s’était gardée d’en faire part à quiconque tant son hypothèse flirtait avec l’hérésie. Pourtant, pourtant ! Les dieux qui avaient protégé Galatéa pendant de si nombreux siècles les avaient désertés sans aucun avertissement. Il devait y avoir une raison. C’est alors que l’idée lui était venue. Et s’ils n’étaient pas partis, mais plutôt enfuis ? Si la raison pour laquelle on ne les avait pas retrouvés, qu’ils n’avaient pas dit un mot sur leur départ, était parce qu’ils se cachaient ? De qui, de quoi, Chidera n’en avait aucune idée. Mais au bout d’un an de recherches infructueuses, elle devait envisager toutes les possibilités, même les plus terrifiantes. Car qui peut effrayer un dieu ?
—Mère, dit-elle en entrant dans la chambre. Vous souhaitiez me voir ?
—Entre, lança sa mère, la voix lointaine. Viens par ici ; j’ai quelque chose à te montrer.
Chidera referma la porte derrière elle. Trois pièces se succédaient : l’une avec un balcon et toutes sortes d’objets qu’un visiteur ou un ami pourrait admirer ; une autre où se trouvait le lit, un miroir et deux grands coffres de vêtements ; et enfin une office où la cheffe de famille aimait travailler. Toutes embaumaient la fleur d’oranger : le parfum montait des pétales blancs flottant les bols chauffés par le soleil. Des vitraux perçaient les murs à la suite du balcon, une multitude de petits carrés colorés qui répandaient leur lumière jaune et rousse sur les murs ornés d’oiseaux et d’arbres peints. Leurs rayons s’arrêtaient juste devant le grand bureau en chêne noir, identique à celui de Chidera. Là se trouvait Léonide.
Chidera attendit qu’elle finisse, les mains dans le dos. Au bout d’un moment, elle se souvint qu’une vingtaine de minutes plus tôt, Élos s’était trouvé dans la même position face à elle. « Comme quoi, on travaille tous pour quelqu’un, » se dit-elle, et elle dut se mordre la joue pour ne pas réagir. Sa mère finit par interrompre son travail.
—Tiens, et elle lui tendit une lettre au sceau rompu, et lis ce que nous annonce mon frère.
La jeune femme leva un sourcil mais obéit. Bientôt ses yeux s’écarquillèrent de surprise.
—Oncle Félix revient ? s’exclama Chidera. Je pensais qu’il était déterminé à rester à Skevent ! Non, attendez. Et la banque ? Il devait se charger du développement de la succursale, non ? Il n’arrêtait pas de nous répéter que l’avenir se trouvait dans l’Empire. Pourquoi revenir après seulement un an ?
—Tu le connais, répondit Léonide en haussant les épaules. Lui et ses envies… Qui sait s’il reviendra vraiment. Pour l’heure, ce n’est qu’une de ses humeurs. Mais ce n’est pas le plus important.
Chidera reporta son attention sur la lettre. Malgré son style ronflant, son oncle faisait un compte rendu précis des plus récentes transactions et des nouveaux clients qu’il avait obtenu. Elle ne s’attarda pas sur les détails, cherchant ce qui avait pu faire tiquer sa mère quand une phrase l’arrêta net.
—Par le sang de Maen, siffla-t-elle. Ça ne peut pas être vrai.
—Et pourtant.
Chidera lut à voix haute, un peu plus incrédule à chaque mot :
— « L’on dit sur les côtes des Landes que bientôt, Galatéa sera le nouveau bijou de la couronne impériale. Les rumeurs de conquête ne m’auraient pas inquiété outre mesure, chère sœur, tant il s’agit là d’une indécrottable habitude continentale, si je n’avais pas aussi eu vent d’une certaine malédiction. Car c’est là le sel de l’histoire, et le plus délicieux ragot qu’on déguste en ce moment même à la cour de l’empereur : nos dieux se seraient retournés contre nous. Certains chuchotent même qu’ils nous auraient abandonnés. » Bon sang ! s’écria Chidera en jetant la feuille sur le bureau. C’est impossible qu’ils soient au courant. Leurs armées seraient déjà à nos portes.
—Ils n’ont aucune preuve, convint Léonide. C’est pourquoi ils vont en chercher une par tous les moyens. Je ne me soucie pas trop du comte – c’est une bonne âme distraite. Son fils, en revanche… Chidera, tu vas devoir t’occuper de lui.
La jeune femme attendit, mais sa mère n’ajouta rien. Elle cligna des yeux, surprise, puis soulagée.
—Oh. Si ce n’est que ça. J’avais déjà prévu de le faire. J’ai eu l’occasion de lui parler, hier, et il m’avait semblé un peu trop intéressé par le temple. Élos a aussi mis ses hommes en place… Chidera passa rapidement en revue les mesures nécessaires pour le reste du séjour, avant d’affirmer : Vous pouvez compter sur moi.
—Non, Chidera. Sa voix s’était adoucie. Il va falloir que tu t’en occupes personnellement. Nous ne pouvons pas laisser ce jeune homme traîner avec les oies blanches des autres familles, ou bien se balader sans surveillance dans les rues de Galatéa. Nous devons être certaines, et elle insista sur le mot, qu’il n’apprenne rien.
La statue d’Ashtar flotta un instant devant les yeux de Chidera. Elle se rappela l’incendie, les cris de désespoir des habitants respirant à grand mal sous la cendre qui tombait à gros flocons. Une nouvelle image lui apparut : des navires, allant de la plage jusqu’à l’horizon, chargés de canons et de soldats, alors qu’en haut de la colline, le silence du temple enveloppait les Galatéens réfugiés et impuissants.
—Je ne peux pas, dit Chidera avec lenteur. Le Conseil pourpre m’a donné l’autorisation de poursuivre l’investigation sur la disparition des dieux ; il faudra que je me rende sur place, en personne. Je m’arrangerai pour me trouver aux évènements où il se rendra, mais faire plus…
—Tu délègueras, contra Léonide en reprenant le lourd livre de comptes devant elle. De toute façon, les dieux peuvent attendre. Ce n’est pas comme si tu allais découvrir ce qui s’est passé en l’espace de deux semaines…
—Mère, insista la jeune femme en luttant contre sa gorge serrée. Nous n’avons pas de temps à perdre. Qui sait ce que les hommes d’Élos ont pu manquer ? Si nous n’accélérons pas nos recherches maintenant, nous n’aurons rien pour nous défendre lorsque l’Empire décidera de nous attaquer – et vous savez comme moi qu’il finira par prendre cette décision.
Chidera avait mille autres arguments encore – l’absence d’armée galatéenne, leurs manques de munitions et de chevaux, la récente chute d’Atern là-bas au Sud – mais elle croisa le regard de sa mère et sut que rien ne saurait la faire changer d’avis. Chidera sentit tout le poids de sa défaite quand Léonide reprit sa plume en main et dit :
—Reste éloignée du temple, et le jeune Duad-Govel avec. La priorité n’est pas les dieux, mais le traité. C’est un ordre, Chidera.
Que dire de plus ? Les dents serrés, Chidera se fendit d’une révérence. Elle s’était à peine redressée que sa mère ajoutait :
—Et mets les pendants de rubis, pour le banquet de ce soir. Cati te les apportera.
La jeune femme sourit et hocha la tête. Mieux valait un brin d’hypocrisie que laisser ses émotions prendre le dessus.
Ce n’est qu’une fois de retour dans ses appartements, heureusement vides de serviteurs, que Chidera put respirer à nouveau. Elle se frotta le visage. « Réfléchis, Chidera. Il y a forcément quelque chose que tu puisses faire. » Soudain lui vint une idée. Elle alla à son bureau, prit une feuille et, debout, se mit à griffonner quelque chose. Elle souffla sur l’encre encore humide, le plia en quatre et fit couler la cire mordoré. Une fois son sceau apposé, elle ouvrit grand la porte et dit au premier valet qui passait :
—Prend ce pli et donne-le à Ojas, le représentant du Quartier des Cordes. En mains propres ! Tu reviendras avec sa réponse.
—Bien, dame.
Chidera referma la porte et s’y adossa. « Voilà qui est fait, » songea-t-elle. « Les choses vont se mettre en place. » Déjà elle entendait les pas des servantes dans le couloir, occupées à chauffer l’eau de son bain avant d’aller la chercher. Dans trois heures tout au plus, le banquet de bienvenue commencerait, et demain, à la première heure, elle mettrait son plan en marche. Ojas ne la refuserait pas ; il viendrait, ne serait-ce que pour entendre ce qu’elle avait à dire. Sa mère avait raison sur un point : il était temps qu’elle apprenne à déléguer.
—Dame Chidera ? l’appela une voix étouffée par les lourds battants de bois. L’eau est chaude, et nous avons réussi à récupérer cette huile de rose que vous aimez tant.
Elle se passa la main sur le visage une dernière fois. Le nez en l’air, elle inspira profondément, puis ouvrit. Quand les servantes entrèrent, bassines et flacons en main, elle leur adressa un sourire qui était presque sincère :
—J’espère que vous êtes prêtes, mesdames !
Je reprends ma lecture mise en pause, et ce qui est fort appréciable est que je me rappelle bien des enjeux et des quelques personnages principaux :)
Ça veut aussi dire que ton univers est donc mémorable ! <3
Je n'ai pas grand chose à relever ici, j'avance <3
À bientôt
Ça fait plaisir de te revoir par ici ! J'espère que l'histoire continuera de te plaire :)
À bientôt !
Chapitre cool, qui permet de préciser encore davantage les enjeux.
Je me demande si on ne peut arriver encore plus vite du rapport de l'espion au dialogue avec Léonie, en réduisant légèrement l'introspection entre deux, on comprend vite ce qu'il se joue, le plus intéressants ce sont les théories de Chidera, tu peux aller plus vite sur le reste je trouve.
Très très cool ce rapport entre hommes et dieux dans ton univers, qui est assez ambigü, ils sont à la fois sacrés et très humains, du moins dans la vision de Chidera. Ses hypothèses sont intéressantes, je suis curieux d'en apprendre plus sur ce mystère.
C'est très intéressant de voir les liens se multiplier entre les personnages : Chidera / Ojas, Chidera / le fils impérial... Ca promet des développements vraiment très intéressants par la suite.
Cool aussi d'écrire la backstory de Mirage, j'imagine que c'est mieux de la lire après cette histoire ?
Petite remarque :
"qu’elle savait que retrouver les dieux étaient le seul moyen" -> était
Un plaisir,
A bientôt !
Le passage d'introspection de Chidera me permet de poser des bases pour des scènes à venir, donc malheureusement je ne peux pas les singer pour accélérer la lecture, ça me créerait des problèmes d'incohérence pour la suite x)
Le rapport avec les dieux est effectivement ambivalent, particulièrement chez Chidera et d'autres membres des grandes familles qui sont désormais au pouvoir. J'espère que le développement de cet aspect, et des relations entre les personnages, te plaira !
Pour ce qui est de la préquelle, tu peux la lire mais c'est plein de spolies pour des éléments de Mirage qui ne sont même pas encore soupçonnés x) Après l'histoire est suffisamment éloignée dans le temps pour que ça ne te spoile pas cette histoire.
Merci pour la faute, je corrige ça !
À bientôt !
Ca roule (=
En voilà un chapitre riche en informations. J'aime bien la théorie sur les dieux disant qu'ils pourraient se cacher. De qui? De quoi? c'est intriguant, d'autant plus si les prêtres, enfermés depuis un an n'ont rien dit. Soit ils sont hyper endurant, soit ils ne savent vraiment rien!
La menace se précise en tout cas, avec le continent qui a des doutes. C'est intéressant de voir que malgré l’intellect de Chidera (et son autorité aussi d'après ce que j'ai compris), sa mère la ramène au rang de (au mieux) chaperonne d'un jeune homme.
Ca me parait plutôt crédible de ce qui pouvait se passer dans les familles bourgeoises!
Contente de te revoir par ici ! Effectivement, il y a clairement quelque chose qui va avec les prêtres, la situation avec les dieux est loin d'être résolue, malgré de nouvelles hypothèses...
Contente que tu trouves ça crédible, j'essaie de construire mon histoire pour que les lecteurs s'immergent au max et je trouve important qu'il n'y ait pas de comportement trop en dehors de ce qui serait attendu d'eux socialement.
Merci pour ton commentaire et à bientôt !
Contente de retrouver Chidera !
Le dialogue avec Elos est bien écrit, efficace et pose bien les enjeux (mort à la cause indéterminée, incendie, prêtres qui refusent de parler...) même si tout n'est pas encore clair dans ma tête, ce qui est sans doute normal.
"Si seulement le grand prêtre avait eu la bonne grâce de ne pas mourir dans l’incendie !" : drôle, j'ai souri.
- Beaucoup beaucoup de dieux mentionnées, ce qui n'est pas forcément embêtant comme on n'a pas nécessairement à tous les retenir, mais je pense que tu peux en introduire certains plus tard.
"Toutes embaumaient la fleur d’oranger : le parfum montait des pétales blancs flottant les bols chauffés par le soleil." je pense qu'il manque un mot (à la surface ?)
- lien avec Ojas, du coup, qui est connu de Léonide !
Chute amusante, je trouve Chidera intéressante, attachante. Elle m'a l'air très intelligente, j'ai hâte de voir son évolution dans l'histoire.
A bientôt !
Oui, il y a encore beaucoup d'éléments qui n'ont pas été révélés, et je pense qu'il faudra encore quelques chapitres avant que tout ne soit véritablement en place.
Pour ce qui est des dieux, techniquement ce sont les cinq mêmes que dans le prologue, donc je me demande si en lecture successive ce ne serait pas plus simple à retenir et à faire le lien... Je note quand même pour la réécriture.
Effectivement, il manque un mot, je vais corriger ça x)
Oui, le lien avec Ojas est là, Léonide en a conscience, et il est approfondi dans les chapitres suivants - et sera explicité au fur et à mesure. On se rapproche du moment où tous les fils des personnages se rejoignent !
Ravie que Chidera te plaise, j'espère que son parcours et son rôle dans cette histoire continuera à te plaire.
À bientôt !