Cette nuit-là Victor dormit très peu, agité par des rêves sans queue ni tête mettant en scène Rei. Le lendemain, il suivit ses cours la tête dans les nuages en jetant des regards en coin au jeune homme, qui ne semblait pas remarquer l’attention qu’il lui portait. Remzi lui adressa des regards sceptiques tout le long de la journée, probablement surpris par son comportement, mais se garda de poser la moindre question. Et tant mieux, Victor n'aurait pas su quoi dire à son meilleur ami car lui même ne savait pas quoi se dire à lui-même !
A midi, toujours dans un état second, Victor s’assit à une table vide à la cafétéria en compagnie de Moïra et Wendy. Il avait l’impression de faire tâche entre les deux jeunes filles qui flirtaient sans même essayer d'être discrètes. Il était heureux pour Moïra mais il aurait préféré s’épargner la scène. Avec soulagement les jumeaux se joignèrent à eux quelques minutes plus tard.
-Où est Rei ? Demanda Victor, surpris de ne pas voir le jeune homme avec eux. Il savait que son cours était terminé en même temps qu’eux, où était-il ?
Alex haussa les épaules en ouvrant l'emballage de son sandwich, Max se pencha vers lui :
-Il parle avec Kim… dit-il avec un petit sourire entendu.
Son sang ne fit qu’un tour, Victor se redressa brusquement, Moïra sursauta et lui jeta un regard surpris en fronçant les sourcils :
-Il te prend quoi ?
-Je… je reviens… marmonna-t-il.
Victor abandonna ses affaires et se dirigea vers la sortie de la cafétéria presque en courant. Ok, il était peut être un peu drama là, Kim allait pas l’agresser ou quoi mais Victor voulait s’assurer que tout allait bien. Vu comment Rei avait été perturbé samedi à cause d'elle…
Il repéra le couple immédiatement et s’approcha d’eux en se retenant de courir.
-Yo, tout va bien ? S’exclama-t-il.
Kim et Rei se tournèrent vers lui dans un seul mouvement, ils avaient l’air autant l’un que l’autre surpris de le voir débarquer.
Kim voulut répondre mais elle se tut, laissant Rei faire :
-Oui, pourquoi ?
Victor les regarda tour à tour. Rei avait l’air normal (autant que le jeune homme pouvait l’être) et Kim semblait gênée.
-Je…
Victor se sentit très con. La pression redescendit d'un coup, il se rendait compte de la scène qu'il faisait :
-Je… on t’attend dans la cafet Rei… pour manger…bredouilla-t-il en essayant de paraître naturel.
-Ok, je vous rejoins dans 5 min, grogna Rei visiblement pas ravi d’être dérangé.
Victor mit bien 10 secondes avant de se décider à partir et dû mettre en oeuvre tout son sang froid pour laisser la jeune fille et Rei seuls de nouveau. Alors qu’il tournait les talons, Kim déglutit et s’exclama :
-Attend Victor, Je voulais juste m’excuser auprès de Rei… je… je n’ai pas réalisé ce qu’il se passait samedi… Je suis désolée…
Kim sembla sur le point de continuer mais elle se pinça les lèvres et jeta un regard anxieux à Rei.
-Oui oui… je… dit Victor en se sentant con.
Rei poussa un soupire et dit :
-Ok, tout va bien, Kim c’est bon, tu n’as pas besoin de t’excuser, j’aurai dû être plus clair, j’ai pas osé… Victor, je vais bien, ok ?
-Tout de même, j’ai été super débile avec toi Rei ! Renchérit la jeune fille. J’étais un peu éméchée, tu es plutôt mignon mais j’aurais pas dû me jeter sur toi sans être sûre… Mais juste que tu saches, j’aurais jamais fait plus sans que tu… tu vois quoi, que tu le veuille aussi.
Victor savait qu’il n’aurait pas dû se trouver présent pour cette conversation mais il se sentait incapable de bouger. Rei lui jeta un regard noir du coin de l'oeil et dit à Kim :
-Ok, merci, tu es pardonné, n’en parlons plus ok ?
-Ok… ami ? Proposa Kim timidement en tendant sa main.
Rei lui adressa un petit sourire et serra sa main. Victor sursauta presque quand la jeune fille tendit sa main vers lui. Victor se racla la gorge et serra la main de la jeune fille à son tour.
-Ok, Victor, on y va… Dit Rei en le prenant par l’épaule pour l'entraîner vers la cafétéria. Quand ils furent plus loin, le brun lui dit un peu sèchement :
-La prochaine fois laisse moi régler mes problèmes seul ok ?
Victor sentit son coeur descendre dans son ventre et sa gorge se serrer.
-Je suis désolé… je… j’ai réagit à l’instinct, marmonna-t-il.
Rei soupira et lui adressa un petit sourire désolé :
-Pardon, je voulais pas être sec… Mais je suis pas en verre, je pouvais rester seul avec Kim… bref, merci Victor, tu es un super ami.
Victor répondit par un sourire mais ne put s’empêcher de se sentir un peu déçu. Un super ami…
OOO
Victor passa le reste du mois de septembre et le début d’octobre dans un entre deux, plein de questions à propos de Rei et de ce qu’il ressentait. Moïra n’avait pas abordé le sujet avec lui de nouveau et Victor lui en était reconnaissant, car il ne savait pas quoi lui dire.
Il continuait à voir Rei au lycée, dans la salle des pions presque tous les matins où ils fumaient et écoutaient de la musique que Victor choisissait toujours.
Le blond avait été effrayé par le manque de culture musicale de Rei et s’était fait un point d’honneur de lui faire découvrir plein de morceaux de tout genre. C’était aussi une excuse pour passer du temps avec lui et se tenir proche de lui alors qu’il lui prêtait un de ses écouteurs.
Victor prenait tout de même sa mission à coeur et avait créé une playlist exprès pour la partager avec Rei. Au fur et à mesure il ajoutait ses morceaux préférés mélangeant sans honte tout les genres. Il y mêlait des chansons de Muse, Kooks, Eminem, Beatles, Fitz and Tantrums, Twenty One Pilots, Linkin Park, Arcade Fire, Marilyn Manson. Victor y mettait du blues (Nina Simone, Blues Brother), du jazz, du rap, de la pop, du rock, hard rock, metal. Et de la musiques classiques aussi…
Ces morceaux-là, Victor les envoyait par messages vocaux, juste des extraits qu’il faisait défiler sur sa chaîne hi-fi le soir chez lui juste pour le brun. Il savait que Rei n’aurait pas la patience d’écouter des symphonies entières.
Parfois, Victor s’enregistrait lui-même jouer ses passagers préférés, le plus souvent au violon parfois sur son synthé. Rei avait l’air d’adoré quand il le faisait. Le deal c’était qu’à chaque enregistrement envoyé, Rei devait lui montrer un de ses dessins par photo.
Depuis que Victor avait vu le carnet à dessin de Rei chez Moïra, il mourrait d’envie d’en voir plus.
Le brun lui envoyait toujours de magnifiques croquis, au fusain ou crayon à papier, qui transpiraient de réalisme. Victor y reconnut parfois Taylor, Soso, les jumeaux. Son préféré était un dessin de lui, Moïra et Remzi assis sur un banc, scène assez commune pour le trio. Rei lui avait dit l’avoir dessiné pour lui.
Plus le temps passait, plus Victor brûlait littéralement sous l’attirance qu’il éprouvait pour Rei. Il ne pensait qu’à lui, ne voulait qu’être avec lui et ne rêvait que de lui. C’était devenu une véritable obsession et Rei ne semblait même pas s’en rendre compte. Étrangement, fantasmer sur le jeune homme était son petit moment plaisir où la mort de son père n’était pas aussi vivace et déprimante qu’en temps normal.
Grâce à ça, Victor se surprenait à penser qu’un jour, il arriverait à surmonter sa peine et à se souvenir de son père avec le sourire. Ca rendait Rei encore plus spécial à ses yeux… Pas qu’il lui vouait un culte béat absurdement mais quand Rei apparaissait dans son champ de vision ou au creux de ses rêves éveillés, Victor se sentait comme dans un autre monde, loin de ses tracas quotidiens.
Le blond, innocemment, avait essayé d’aborder l’orientation sexuelle de Rei, avec des questions du genre “tu le sais depuis quand ?”, “tu as un copain ?” mais Rei se fermait à chaque fois qu’il lui en parlait alors Victor avait abandonné retenant tout de même le principal : Rei n’avait pas de petit copain.
Mais le brun avait été clair l’autre fois en le qualifiant de “super ami” et Rei n’avait pas été curieux de savoir si lui, il avait une copine ou autre. Rei avait l’air de s’en foutre totalement, renforçant l’idée que Victor s’était bel et bien fait friendzoné.
Un mardi matin, après une série de rêves érotiques le mettant en scène lui et Rei, Victor n’en put plus du secret. Entre midi et deux, il se jeta sur Moïra et l'entraîna sur un banc en lui lançant :
-Il faut qu’on parle !
-Ah enfin, je t’écoute...
Moïra s’assit à côté de lui et attendit patiemment qu’il crache le morceau. Mais il n’y arrivait pas. Il abandonna et dit :
-C’est à propos du cours d’Histoire.
Moïra le regarda sceptique. Les lèvres pincées comme si elle se retenait de dire quelque chose de blessant. Mais il demanda quand même :
-Quoi ? Qu’est ce qu’il y’a ?
Moïra lâcha un soupire :
-Mais que tu es empoté ! Tu m’étonne que t’ai pas keen encore !
Victor ouvrit la bouche, outré par l’honnêteté de son amie et les mots crus.
-Hé oh ! Grogna-t-il.
Il regarda autour d’eux, il avait pas forcément envie que tout le lycée sache qu’il était aussi pure que la neige éternelle de l’Himalaya, mais personne ne faisait attention à leur petit couple. Le lycée était habitué à les voir ensemble pendant la pause déjeuner, sur un des bancs de l’école, s’agitant à cause de conversations animées.
-Victor, commença Moïra sur un ton sévère et ferme. Tu le kiffes… je vois pas pourquoi tu te pose trois mille questions…
-Oui mais… la coupa-t-il pour protester.
Elle ne comprenait pas. Moïra dû lire dans ses pensées car elle le regarda fixement, les lèvres pincés :
-Ecoute, je sais ce que tu es en train de traverser, je suis lesbienne.
Victor rougit, il n’était pas gêné par la sexualité de sa meilleure amie mais quand elle le sortait de but en blanc comme ça, ça le mettait toujours étrangement mal à l’aise. Il ne put s’empêcher un regard à droite et à gauche, pour vérifier que personne ne les écoutait. Elle ne le quitta pas du regard et continua :
-C’est pas simple, tout ça, le regard des autres et patati et patata. Mais, tu le kiffes alors invite le pour une date ! En plus tu sais déjà qu’il est gay, c’est plus simple à gérer que quand tu sais pas !
Victor ouvrit la bouche surpris par la proposition de Moïra : une date ? Voyant son air surpris, Moïra renchérit :
-Oui, une date, Vicky, bam, efficace, un petit moment romantique ou ce que tu veux, un moment que pour vous deux. Un moment où tu montre à ce mec ce qu’il peut avoir avec toi ! Tu vois le truc ? C’est comme un show, une parade…
-Parade ?
-Oui, tu flirte quoi !
Ils se regardèrent en silence, Moïra les sourciles haussés attendait visiblement qu’il réagisse. Lui, laissa son cerveau lui renvoyait une image absurde de lui et Rei, sur un banc dans un parc, entouré de fleurs, mains dans les mains, le regard bovin et le sourire bête aux lèvres. Non, pas pour lui. Moïra dû comprendre à quoi il pensait car elle lui dit, exaspérée :
-Victor, une date que tu penses qu’il aimera ! Si la drague c’est pas trop ton truc, juste amène le faire un truc que tu aimes…
Il lança un regard à Moïra, incertain et proposa d’une petite voix :
-La fête foraine à Finsbury Park ?
Moïra eut un rire :
-Ouiii, exactement ! C’est parfait ça !
Victor lui adressa un sourire timide, le coeur battant à l’idée de se retrouver seul avec Rei de nouveau. En parlant du diable, Rei apparut dans son champ de vision, les yeux plongés dans un livre d’art, certainement pour préparer le cours qu’il avait l’après-midi. Moïra et lui échangèrent un regard et de suite, il sut à quoi elle pensait mais avant qu’il ne put l’en empêcher, Moïra s’exclama :
-Hey ! Rei !
Rei s’arrêta net et leur jeta un regard surpris, son expression morose habituel. Leurs regards se croisèrent un instant, surpris l’un comme l’autre par Moïra :
-Victor veut te dire un truc ! Viens là !
Rei fronça les sourcils, lui adressa un mouvement de menton interrogatif et Victor ne put que hausser les épaules. Alors que Rei s’approchait d’eux, Moïra se leva et lui dit :
-Assis-toi, moi je dois y aller ! Salut les gars !
Et aussi vite que ça, elle disparut vers le bâtiment, le laissant seul avec Rei. La tension monta d’un cran et Victor se racla la gorge de gêne. Par quoi commencer… Rei, visiblement intrigué et aussi gêné que lui, lui demanda un peu brusquement, inquiet :
-Tu veux me dire quoi ? Tout va bien ?
Et sans réfléchir, Victor lui demanda :
-Ca te dit d’aller à la fête foraine de Finsbury Park samedi ?
Il eut un moment de flottement, Rei écarquilla les yeux, surpris et resta bouche bé. Victor lui avait envie de s’enterrer vivant. “Fuck Moïra…” pensa-t-il.
-Avec qui ? Demanda Rei d’un ton léger.
Victor se força à ne pas soupirer de désespoir. Au moins ce n’était pas un non.
-Avec… moi. Juste toi et moi, murmura-t-il en baissant la tête, attendant la réponse avec appréhension.
Les cinq secondes qui suivirent furent certainement les plus longues de sa vie et il eut le temps de maudire Moïra sur quatre générations, puis la réponse de Rei tomba :
-Ok, à quelle heure ? Demanda-t-il d’une voix étrangement douce.
Victor leva les yeux, surpris par la réponse et il remarqua que Rei avait les joues un peu rouges et un petit sourire aux lèvres. Victor ne put s’empêcher de penser “il est vraiment beau le con…”
-16h ? On y passe la soirée ?
Rei acquiesça timidement et Victor rajouta :
-On se rejoint devant Harringay Overground station, samedi 16h.
Rei lâcha un petit rire de sa voix grave et se redressa sur le banc :
-Parfait.
OOO
Pourquoi avait-il accepté ? Rei connaissait la réponse, il kiffait Victor à mort et la moindre occasion d’être avec lui, il la prenait. Toutes les miettes d’information qu’il obtenait de Victor, il les stockait dans son cerveau, il écoutait en boucle les musiques que Victor ajoutait à leur playlist ou lui envoyait par messages. Malgré la peur qu’il éprouvait, il se surprenait à vouloir plus, encore plus. Quand il s’agissait de Victor, Rei ne se reconnaissait plus.
Rei passa toute la semaine avant le rendez-vous (est-ce que c'en était un ?) avec Victor à la fête foraine, un peu distrait, se surprenant plusieurs fois les yeux perdus sur le blond.
Les deux jeunes hommes se retrouvaient tous les matins avant les cours dans la salle de pion, partageant un café, une cigarette et un écouteur. Parfois ils parlaient ou ils finissaient vite fait un devoir. Souvent ils écoutaient de la musique alors que lui dessinait et ne s’adressaient pas vraiment la parole à part pour les banalités. C’était devenu le moment préféré de la journée de Rei, celui qui le poussait à se lever le matin même quand il se sentait particulièrement mal, même quand il avait fait ce cauchemar de nouveau, celui où il revivait la mort de sa mère, encore et encore. Ces matins là, il se levait, la nausée au fond de la gorge, des larmes aux yeux, se demandant comment et pourquoi il était encore en vie, puis il entendait son père et Soso dans la cuisine, il reprenait doucement contacte avec la réalité. Et puis Victor apparaissait dans ses pensées, lui faisant monter le sourire aux lèvres.
Rei se demandait pourquoi Victor lui avait proposé d’aller à la foire samedi. Il s’était attendu à qu’au moins Moïra et Remzi fassent parti du plan. Mais non. “Avec moi, juste toi et moi” avait dit Victor les joues un peu rouges. Rei avait sentit son coeur battre plus vite.
Le samedi, il mit à sac son armoire en grognant, essayant de trouver une tenue un peu plus… sortie ? Un peu plus rendez-vous ? Taylor, probablement attiré par le bruit qu’il faisait, vint le voir :
-Tu fais quoi ?
-Je me prépare… marmonna Rei en passant un jean noir savamment troué qui avait l’avantage de le mettre en valeur en minimum. Ca changerait de son pantalon d’uniforme un peu trop grand et ses joggings.
-Ah, tu vas où ?
Rei se tourna vers son père, torse nu, se maudissant de ne pas lui avoir dit ou même demandé son autorisation :
-Ah désolé, je t'ai pas dit, Victor m’a proposé d’aller à la foire cet après midi… Ca te dérange pas ?
-Ah non pas du tout ! Victor c’est le petit blond qui est venu dormir il y a quelques semaines, c’est ça ? lâcha son père avec un petit sourire entendu.
Rei savait exactement ce que ce sourire voulait dire et il se gratta la tête en soupirant, un peu gêné. Il regarda les hauts qu’il avait posé sur son lit. Taylor s’avança dans la chambre.
-Oui c’est ça… murmura-t-il sentant ses joues rougirent.
-Il a l’air sympa et il est plutôt mignon non ? Continua Taylor d’une voix amusée.
Rei serra les lèvres, ne préférant rien dire que de se trahir même si il savait que son père lisait en lui comme dans un livre ouvert.
-Cette chemise, elle te va bien, dit Taylor en lui montrant une chemise noire qui soulignait ses bras et ses épaules. Enfin, je dis ça mais bon...
-Ok, merci… dit Rei en la prenant, embarrassé.
Taylor lui posa la main sur l’épaule et le tourna doucement vers lui. Rei était encore un peu plus petit que lui, mais il savait que bientôt il rattrapperai les 1 mètres 90 de son père.
-Amuse toi bien, te prends pas la tête, ce mec tombera dans tes bras en un clin d’oeil…
-Papa, arrête… gémit Rei en se sentant rougir, gêné.
Taylor éclata de rire et lui dit :
-Je te laisse te préparer !
Et enfin, il partit en refermant la porte derrière lui. Rei passa la chemise, se regarda dans le miroir et marmonna pour lui-même :
-Arrête tes conneries Rei, ça ira.
OOO
Si Victor était nerveux ? L’ironie, il était pas que nerveux, il était terrifié. C’était la première fois qu’il allait à une date… Et pour rajouter à ça, sa première date était avec un mec. Qui l’aurait cru… Mais ça rajoutait du stress quand même !
Malgré la situation, Victor se sentait bien, excité et impatient… Pas un instant il avait eut l’impression que c’était une erreur, c’était cela qui ne le faisait pas reculer. Rei lui avait dit être gay non ? Il avait donc ses chances… Et alors que jamais Victor n’avait voulu une copine (ou un copain pour ce que la différence importait à présent), il se sentait prêt à conquérir Rei.
Il adressa un dernier regard à son reflet dans le miroir de l’entrée : cheveux coiffé, ok, tenue décontractée mais qui le mettait en valeur, ok. Il s’adressa un regard décidé et se murmura pour lui même : “Let’s do it !” et il ouvrit la porte d’entrée.
Rei et lui avaient décidé de se retrouver devant Harringay Overground Station un peu plus bas, à mi chemin entre leurs maisons et Finsbury Park. Quand Victor arriva, le brun était déjà là, les mains enfoncées dans les poches de son jean un peu troué qui soulignait ses jambes fines, Victor se sentit son coeur manquer un battement. Il referma sa veste en jean épaisse en frissonnant, le temps n’était pas dès plus chaud à cette fin d'octobre.
-Hé, s’exclama-t-il en arrivant au niveau de Rei.
Le brun lui adressa un petit signe de la main, un peu timide et répondit :
-Salut.
Victor s’arrêta à son niveau, impressionné par la prestance de Rei, qu’il voyait rarement habillé autrement qu'avec l'uniforme du lycée. Le jeune homme d'un an plus jeune que lui était aussi plus grand et plus large. Ses cheveux bruns rasés lui donnaient un petit air de mauvais garçon (ou bien c’était son air sombre et renfrogné qu’il avait en permanence ?) mais avait l'avantage de souligner ses incroyables yeux verts, les mêmes qui avaient l’air de faire partir de sa famille. Les jumeaux, Ambre et son père avaient les mêmes que lui.
-On y va ? Proposa Rei et ils se mirent à marcher en silence.
-J’aime bien ta veste en cuire, déclara Victor pour se redonner contenance quelques secondes plus tard alors que le silence le rendait nerveux.
C’était vrai, Rei portait une veste en cuire noir qui avait l’air vieille de quelques dizaine d’année mais avait un côté rock mais vintage. Rei eut un petit sourire et le regarda sans s’arrêter de marcher :
-Elle était à mon père, enfin, y’a une histoire derrière cette veste, tu veux que je te la raconte ?
Victor ne put s’empêcher de lui adresser un sourire éclatant, c’était si rare que Rei parle de lui même et sur lui même.
-J’adore les histoires de famille, répondit-il.
Rei répondit d’un sourire en coin du genre “bien sûr que tu aimes les histoires de famille”.
-Quand mes parents étaient ensemble, il y’a 18 ans, ma mère adorait la veste de mon père, à ce qu’elle m’a dit. Bref, en voyant ma mère porter sa veste non stop, Taylor lui a prêté et ne la jamais récupéré. Pendant toute mon enfance, cette veste était la seule preuve que mon père existait, je l’adorais et quand j’ai été assez grand, ma mère me l’a donné.
Victor le regardait avec curiosité. Il avait envie de poser mille questions sur les parents de Rei et son passé. Mais il savait que Rei lui en disait déjà beaucoup, plus qu’à beaucoup d'autres alors il se retint. Rei continua :
-Quand Taylor m’a vu pour la première fois avec sa veste sur le dos il y’a deux ans, j’ai cru qu’il allait faire un arrêt cardiaque. Il ne se souvenait pas où il l’avait perdu… bref, mon histoire est nulle un peu mais juste pour dire que c’est une veste un peu spéciale.
-Elle est cool ton histoire… souffla Victor en donnant un petit coup d’épaule à Rei.
Ils échangèrent un sourire complice et Victor se détendit enfin. Ils remontèrent l'avenue Green Lanes jusqu'à la station de métro Manor House en longeant le parc Finsbury et entrèrent dans la fête foraine.
Victor regretta presque immédiatement d’avoir proposé à Rei de se rendre à la fête foraine un samedi après-midi, l’endroit était noir de monde. Les enfants criaient d’excitation dans les allées en courant, les parents hurlaient derrière eux essayant de les empêcher de faire une connerie mortelle. Les bandes d’amis rigolaient en plein milieu du passage sans aucun respect pour les autres. Il vit même certaine personnes du lycée, pour compléter le décor.
Si Victor envisageait de draguer avec spectateurs il avait tout bon. En plus Rei tirait une drôle de tête, il regardait la foule avec nervosité et ne lui accordait aucune attention. Décidement, ce n’était pas ce que Victor avait imaginé.
-Tu veux manger un truc ? Demanda Victor peu sûr de lui.
Rei sursauta presque et grogna un :
-Ouais, bof, j’ai pas trop faim…
Victor retint un soupire et regarda les allées à la recherche d’un stand moins animé que les autres. Il attrapa Rei par la manche, par miracle le brun ne sursauta pas à son contact et se laissa traîner vers un glacier un peu à l'écart de l'animation ambiante.
La jeune fille se redressa brusquement à leur approche et se revêtit de son plus beau sourire avant de déclarer avec un fort accent français :
-Bonjour ! Que puis-je faire pour vous ?
Victor glissa un regard à Rei et dit :
-Tu veux quoi ? C’est moi qui offre.
Rei regarda les parfums. Victor savait déjà ce qu’il allait prendre, il prenait toujours la même chose :
-Bonjour ! Vanille pistache, dans un cornet, s’il vous plaît ! Rei ?
Le brun lui adressa enfin un sourire et dit :
-Choisis pour moi, tu pourras goûter…
Victor frissonna, goûter la même glace que Rei, ça faisait un peu date ça non, partager une glace ? C’était intime n’est-ce pas ? Est-ce que le jeune homme le sortait enfin de la friendzone ? Plein d’espoirs, Victor lui sortit son plus grand sourire et commanda :
-Noisette et chocolat !
La jeune fille prépara le deuxième cornet et déclara :
-8 pounds.
Victor tendit immédiatement un billet de 10 à la française. Rei grogna :
-Tu es sûr ? Je peux payer tu sais…
-Non c’est bon, je t’ai invité cette aprèm, tu m’offriras un tour de manège !
Cornets en main, ils restèrent dans l’allée et s’enfoncèrent dans la fête foraine, le début de la foire était plutôt envahi de kiosques de nourriture divers et variés, avant de laisser place aux manèges à proprement parlé. Quand ils étaient plus petits, sa soeur et lui adoraient la foire et son père les y amenaient tout le temps. Victor regarda avec un peu de nostalgie les stands de pêches au canard et tir à la carabine.
-Tu veux goûter ? Demanda Rei en lui tendant son cornet.
Victor acquiesça timidement et se pencha en avant pour prendre un peu de glace. Dans l’action, il se rapprocha du brun à son grand plaisir et se sentit un peu fébrile en posant ses lèvres sur la glace. Dire que Rei venait d’y mettre les siennes…
-Pas mal, mais je préfère la pistache, tiens essaye… déclara-t-il en se redressant et tendit son propre cornet.
Victor essaya de garder une tête normale quand Rei se pencha à son tour pour goûter le cornet sans le quitter du regard. Putain… la scène ne pouvait pas être aussi clichée et aussi sexy qu’elle ne l’était… Rei se lécha les lèvres et lui adressa un sourire :
-Pas mal tes boules !
Victor devint rouge et se mit à rire nerveusement, Rei grogna en rougissant à son tour se rendant compte de ce qu’il venait de lui sortir :
-Oh ça va, tu as compris… je voulais dire ta glace est bonne… marmonna le brun qui semblait ne pas savoir où se mettre.
-Oh oui Rei, viens là que je lèche ton cornet ! Se moqua Victor en prenant une fausse voix sulfureuse accentuant les rougeurs des joues de Rei mais le brun finit par rire.
-Putain Victor, arrête ça ! S’exclama Rei en rigolant.
-Quoi Rei ? Je dis ça innocemment ! S’offusqua Victor sur le ton de la plaisanterie.
-Bon, allez, pour jouer sur le cliché tu veux pas gagner une peluche pour moi ou un truc comme ça ?
Victor sentit son coeur battre à cette phrase, Rei déconnait peut être mais ça voulait dire qu’il n’était pas totalement friendzoné si lui aussi plaisantait non ?
-Grave ! Tu veux quoi ? Je suis assez bon en tir ! S’exclama Victor enthousiaste.
Rei regarda autour de lui, pensif et désigna un stand un peu plus loin.
-J’aime bien la petite peluche pikachu là ba !
Victor acquiesça, résolu et saisit la main de Rei pour le traîner derrière lui. Le brun referma sa prise autour de sa main.
OOO
Rei avait espéré que Victor lui propose une date, sans grands espoirs tout de même, car clairement le blond était hétéro. Mais le jeune homme devait avouer que toute cette situation était ultra ambigüe : le cornet, les blagues salaces, la promesse d’une peluche et maintenant la main de Victor dans la sienne…
Arrivé devant le stand, sans pouvoir vraiment réagir, Rei se retrouva avec le cornet de Victor dans les mains et regarda le blond parler avec le forain. Les mains prises, Rei ne put même pas prendre son portefeuille et se retrouvait le spectateur impuissant de la scène étrange que Victor lui livrait. Le jeune homme avait clairement fait un effort vestimentaire aujourd'hui et Rei devait dire que le voir en jean et pull lui allait bien mieux que son uniforme de lycée qui lui le rajeunissait. Avec des fringues normales et les cheveux coiffés avec un style plus destructuré qu’au lycée, Victor sortait de son look de garçon bcbg propre sur lui pour adopter un look un peu plus épicé et adulte qui affolait un peu ses senses. Victor lui adressa un grand sourire et prit la carabine que lui tendait le forain.
-Bon, faut faire quoi pour gagner la peluche pikachu ? Demanda le blond.
-Tu dois viser les trois ballons et voilà, tu as droit à 6 tirs ! Dit le forain.
Visiblement Victor savait y faire car immédiatement il positionna la carabine au bon emplacement sur son épaule et pencha un peu la tête en fermant un oeil pour viser. Rei sursauta quand le coup partit et atteint le premier ballon dans un bruit de pétard.
Victor ne s’accorda pas une pause et tira de nouveau. Rei se crispa de nouveau, le bruit sec du coup de carabine lui rappelait les coups de feu le jour où sa vie avait changé et il se détesta pour laisser ce souvenir là l’envahir.
Ça lui arrivait parfois. Un son, une odeur et il revivait les pires souvenirs de son passé. Rei suivit le conseil que ses psy lui avaient donné dans ces situations, il regarda autour de lui pour s’accrocher à la réalité, respira lentement et se força à manger un peu de glace pour garder la tête hors de l'eau. Son coeur battait à fond la caisse dans sa cage thoracique et il fut soulagé quand Victor baissa enfin le fusil. Il fallut les 6 tirs à Victor pour éclater tous les ballons et Rei se retrouva avec une peluche pikachu sous le bras.
-Ca te plait ? Demanda Victor un peu trop proche de lui.
Quelques centimètres de plus et Rei aurait pu sentir ses lèvres sur les siennes.
-Oui, merci ! Se contenta-t-il de répondre en essayant vainement de détacher ses yeux des lèvres de Victor.
Ils restèrent l’un en face de l’autre, à se regarder un peu stupidement puis Rei lui tendit sa glace, qui avait commencé à fondre un peu. Il détourna enfin ses yeux et avisa les manèges un peu plus loin.
-On en fait un ? Cette fois c’est moi qui offre ! Proposa le brun.
Victor acquiesça et se mit en route à ses côtés. Cette fois il ne lui prit pas la main. Rei ne savait pas si ça le soulageait ou si il le regrettait.
OOO
Victor et Rei restèrent un long moment à la foire, enchaînant manèges sur manèges. Victor ne se privait pas pour doucement se rapprocher physiquement du brun qui le laissait faire.
Épaules contre épaules, une main qui s'attarde sur un bras, ou une taille. Prétextant la peur, Victor osa même serrer sa main dans une des montagnes russes. Victor était grisé par les sensations que ces petits gestes faisaient naître en lui. Jamais Victor n’avait entendu Rei rire autant de fois et son estomac se tordait à chaque fois à ce son.
Rei paraissait une personne totalement différente, c’était comme si durant quelques heures ce qui le hantait avait disparu et qu'il était redevenu un garçon inconscient, blagueur, voire un peu dragueur. Victor en était quasiment sûr, il n’était pas le seul avec un crush.
Vers 22h, alors que la foire s'apprêtait à fermer, ils décidèrent de rentrer chez eux. Sur le chemin du retour, Victor décida de tourner dans Umfreville Road au lieu de continuer tout droit.
-Où tu vas ? Demanda Rei en le suivant, la peluche pokemon sous le bras.
-Harringay Passage...
Rei approuva d’un signe de tête et le suivit dans le passage étroit. Il faisait sombre, assez pour y voir cependant et que cela ne devienne pas glauque. Ils passèrent une rue, en silence, et s’engagèrent dans le passage de nouveau. Victor s’arrêta juste à la sortie de la ruelle, qui donnait maintenant sur Cavendish Road.
-J’habite cette rue, déclara-t-il.
Rei continua un peu à marcher et voyant qu’il ne le suivait pas revint en arrière :
-Qu’est-ce qu’il y’a ? Demanda-t-il inquiet en le regardant.
Victor s’appuya sur le mur, faisant face à Rei, le coeur battant. Il avait adoré l’après midi et le début de soirée passée avec Rei. A la foire, si Victor n’avait pas été aussi timide, il aurait peut être tenté de l’embrasser comme il en mourrait d’envie. Mais il n’avait pas osé le faire car ils étaient trop exposés à la vue de tous.
Victor ne savait pas si Rei ressentait la même chose que lui mais il se sentait confiant, il savait qu’il se passait un truc entre eux et il voulait en avoir le coeur net. La petite ruelle sombre et déserte semblait être une occasion en or pour amorcer un baiser. Mais, maintenant que Rei était face à lui et que rien ne l’en empêchait, Victor se sentait nerveux et commençait à perdre confiance en lui.
-Je… rien… j’ai pas vraiment envie de rentrer… murmura-t-il d’une voix incertaine.
Rei lui lança un regard inquiet et s’approcha un peu de lui pour le regarder de plus près :
-Pourquoi ? Ca va pas ?
Victor avait remarqué que Rei avait tendance à voir le côté négatif des choses et à s’inquiéter pour peu. Il eut un sourire et lâcha :
-Tout va bien, j’ai juste pas envie que cette journée se termine…
Il rougit à peine la phrase eut franchis sa bouche. Rei le regarda surpris et émit un simple : “Oh” d’étonnement. Prenant son courage à deux mains, Victor s’approcha de lui, un peu trop proche pour de simple camarade de classe. Un peu plus proche que le ferait un simple ami. Et cela arriva vite.
D’abord Rei le regarda fixement puis ses yeux glissèrent vers sa bouche. Puis comme dans un commun accord, leur visage s’avancèrent l’un vers l’autre. Victor arrêta son mouvement, perdant tout son élan, la tête pleine de “qu’est ce que je fais là ? Mayday, mayday…” mais Rei, lui, n’arrêta pas. Et leur lèvres se rencontrèrent.
Le cerveau de Victor arrêta d’analyser la situation et quelque chose d’autre, en lui, reprit le relais. Victor répondit au baiser, il s’approcha, il ferma les yeux et ses bras entourèrent Rei dans une étreinte hésitante et légère. Contre lui, le corps et les lèvres du brun bougeaient aussi, sensuellement, doucement, sans précipitation… Rei l’embrassait comme on mange une glace qu’on a longtemps voulu, par petite bouchée et petit coup de langue timide, juste pour s’habituer à la texture et au goût sucré.
Victor le serra plus fermement contre lui, mêlant sans complexe sa langue à celle de Rei. “Wow” pensa Victor qui sentait la situation lui échapper peu à peu. Et cela avait un côté si grisant… Puis Rei se détacha de lui.
Ils se regardèrent un instant, Rei avait l’air au bord de la panique et lui était bien trop déboussolé par l’échange si bon qu’il ne savait pas quoi dire.
-Victor… murmura Rei en le regardant les yeux ronds.
Le blond reprit sa respiration, un peu tremblant et demanda doucement :
-Quoi ?
-Pourquoi tu as fait ça ?
Victor eut un petit rire gêné et répondit :
-Parce que tu me plais.
-Je te plais ? Moi ? Continua Rei qui semblait encore plus paniqué.
Victor fronça les sourcils, se rendit compte que le brun était littéralement en train de perdre pied.
-Rei… ça va ?
Le brun détourna son regard du sien et passa un main nerveuse dans ses cheveux rasés court. “Putain…” murmura-t-il pour lui même. Victor sentit son bonheur remplacé peu à peu par l’inquiétude.
-Rei, tu vas bien ?
-Oui ça va, désolé… je suis surpris… je savais pas que tu étais… gay ?
Victor haussa les épaules et répondit :
-Je sais pas trop Rei, je suis pas gay, peut être bi… c’est important ?
Rei reprit sa respiration et répondit :
-Non, bien sûr, c’est pas important… je…
Victor approcha doucement sa main de la sienne et la serra délicatement. Rei eut un petit tressaillement comme si il voulait se détacher de son contact mais finalement, serra sa main à son tour.
-Ok, viens, je t’accompagne jusqu’à ta rue, dit Victor.
Sans répondre, Rei se laissa guider dans Harringay Passage. Arriver à Mattison Road deux rues plus haut, Victor se tourna vers Rei mais le regard du brun se fit distant et il affichait une expression fermée.
Victor sentit un bloque de glace lui tomber dans le ventre. Il se rendit compte que Rei n’avait rien dit de leur baiser ou même n’avait pas réagi quand il lui avait dit qu’il lui plaisait. Est-ce que ça voulait dire que son attirance n’était pas partagée ? Pourtant il l’avait embrassé aussi non ?
Victor se pinça les lèvres, pour retenir ses questions. Il avait honte et était déçu.
-Ok, je te laisse… glissa-t-il espérant que Rei fasse quelque chose, dise quelque chose.
Mais cela n’arriva pas, le brun lui adressa un vague signe et quitta Harringay Passage, se dirigeant d'un pas décidé vers chez lui sans se retourner.
OOO
Rei fut soulagé de constater que Taylor et So n’étaient pas là quand il rentra. La seule chose qui tournait dans sa tête était “putain, putain, putain”. Puis la nausée arriva, il se précipita vers les toilettes et vomit. Essoufflé, il s’assit péniblement par terre et eut un rire nerveux. Putain, un mec l’embrassait et lui ça lui filait la gerbe. Son rire nerveux se transforma en larmes. Il était pathétique, il avait adoré le baiser, bien entendu, c’était Victor.
Mais tout était allé si vite, Rei ne s’était pas senti prêt, après le baiser, il s’était rendu compte de ce que tout ça impliquait. Victor et lui ? Ensemble ? Et sur le chemin jusqu’à chez lui, main dans la main avers Victor alors qu’il réalisait peu à peu ce qu’il venait de se passer, c’était Jorik qui avait remplacé Victor. Au creux de son oreille, le souvenir cauchemardesque lui soufflait : “Bah alors petit pd, tu vas lui tailler une pipe ? Tu aimes ça… tu as menti à tout le monde, tu as aimé ce que je t’ai fait…”
Arrivé dans sa rue, Rei avait presque couru jusqu’à chez lui, la peur au ventre, la honte au trousse sans se retourner pour adresser un dernier signe rassurant à Victor. Puis, là, assis devant ses toilettes qui sentaient le vomi, son visage plein de larmes et brûlant, Rei se rendit compte qu’il avait ruiné sa chance avec Victor. Il lui avait foutu un rateau. Il enfouit sa tête entre ses bras, recroquevillé sur lui même, les souvenirs de Jorik se superposèrent au baiser de Victor, à son odeur, à ses bras autour de lui. Et il se perdit au fond de lui même…
Rei ne sut pas combien de temps il passa assit par terre devant les toilettes, il se rendit compte d’où il était quand Taylor posa sa main sur son épaule. Il sursauta et tenta de s’éloigner.
-C’est moi Rei, c’est moi… murmura son père d’une voix qui se voulait rassurante.
-Qu’est ce qu’il se passe… croassa-t-il, la gorge sèche.
-Je sais pas, tu me dis… on vient de rentrer de soirée avec Soso et je viens de te trouver ici, dans cette position…
Taylor se redressa, ouvrit le robinet et lui tendit un verre rempli d’eau. Rei l'attrapa et l’avala d’un coup sec, sa gorge lui brûlait. Taylor s’assit à côté de lui, la mine anxieuse et le regarda attentivement.
-Qu’est ce qu’il y’a ? Ta date s’est pas bien passée ?
-Je veux pas en parler… murmura-t-il d’un air sombre.
Taylor fronça les sourcils :
-Est ce que je dois aller casser la gueule du blondinet ou quoi ?
Rei se prit la main dans la tête :
-Mais non, peut être que tu devrais me filer une branlée à moi plutôt…
Taylor lui adressa un regard perplexe et exigea d’une voix douce mais ferme :
-Dis moi ce qu’il s’est passé…
Rei soupira mais répondit tout de même :
-Rien, on a passé un super moment à la foire, et sur le chemin du retour… il…
Rei n'arrivais pas à cracher le morceau.
-Il a quoi ? Insista Taylor.
-Il m’a embrassé… lâcha-t-il.
-Oh, déclara Taylor, qui avait l’air de plus en plus perplexe. Ce n’est pas ce que tu voulais ? Il ne te plait pas ?
Rei soupira :
-Si bien sûr mais ça m’a surpris et puis tout…
Il désigna sa tête, peinant à expliquer rationnellement ce qui se passait dans son cerveau et dans son coeur.
Taylor haussa les sourcils, à l’écoute, l’air de dire “je t’écoute, va-y”. Il ne lâcherai pas l'affaire.
-Papa… tout s’est mélangé… ça m’a rappelé… tu sais… tout ça… et j’ai flippé.
Taylor lâcha un soupire mais ne dit rien, il n’y avait pas vraiment grand chose à dire. Ils échangèrent un regard et Taylor lui adressa un petit sourire. Il se redressa et lui tendit la main :
-Allez, viens, on va dans ta chambre.
Rei se laissa guider dans le couloir, il se sentait faible, sans force ou volonté. Taylor le suivit et l’aida à retirer ses vêtements, puis le borda. Au fond de sa couette, il se sentit enfin en sécurité et calme, les larmes lui vinrent aux yeux, il se pinça les lèvres pour les retenir. Taylor accroupi à côté de son lit, lui serrait la main et lui murmurait :
-Dors, fils, je reste avec toi, ok ?
-Ok… marmonna-t-il la voix enrouée et il ferma les yeux.
Pauvre Victor qui va se croire rejeté
Et surtout pauvre Rei. J'espere qu'avec le temps et le soutien de ses proches il va arriver a surmonter son traumatisme et etre heureux :-(
C'est toujours aussi agreable a lire. Le date etait tout chou! D'ailleurs, tu dis "une date" Mais j'ai toujours entendu "un date" En français, tu es sur de toi?
Un ou une date... bonne question! Non je suis pas sûre de moi du tout ! J'utilise ce mot en anglais mais mes potes francophones et moi on traduit "j'ai une date" et pas "j'ai un date". Du coup j'ai assumé qu'en France c'était pareil... Ou alors c'est que mes potes et moi qui avons opté pour le féminin et on a faux... Bref, merci de le soulever, je vais modifier (ou carrément enlever le mot XD).