Chapitre 6 : Aller de l'avant

Par Myfanwi

William se réveilla aux coups brutaux donnés dans la porte de sa chambre. Il mit quelques secondes à émerger. La nuit avait été rude et trop courte encore une fois. Il tâtonna pour allumer sa lampe de chevet. Les coups redoublèrent, insistants.

“Monsieur, c’est la police, ouvrez !”

L’homme bondit de son lit, le cœur battant la chamade. Oh non. Quelqu’un avait découvert le corps. Il était fini ! Ils allaient le mettre en prison. Il hésita, fit un tour de sa chambre. Les policiers allaient s’impatienter, il devait prendre une décision. Il calma sa respiration et ouvrit la porte, la gorge sèche et l’angoisse nouée à l’estomac. L’homme qui lui faisait face, il l’avait déjà vu. Il s’agissait du même homme qui s’était chargé d’analyser Fredbear. Avait-il finalement eu des suspicions ? Quelqu’un l’avait dénoncé ? L’homme ne lui paraissait cependant pas tendu, bien au contraire. Il sortit sa plaque et lui tendit.

“Officier Clay Burke, nous nous sommes déjà rencontrés. Monsieur Afton, je viens vous avertir d’une effraction nocturne dans votre restaurant. Des voisins nous ont alerté sur la présence de bruits suspects et un homme a été aperçu en train de fuir votre restaurant. Pouvez-vous me suivre pour faire un état des lieux ?”

Henry, pensa immédiatement William. Soulagé à l’idée que l’agent ne venait pas pour lui, William se détendit un peu. Il baissa les yeux sur sa tenue, un peu gêné.

“Je vous laisse dix minutes pour vous préparer, lui dit l’agent, ne vous inquiétez pas.

— Vous voulez boire quelque chose ? lui demanda William. Je n’ai que du café à vous proposer, pas très bon de surcroît, mais ça rendra l’attente plus agréable.

— Volontiers.”

William s’écarta pour le laisser passer. Clay regarda autour de lui, un peu suspicieux. Le locataire dégagea les chaises de la table, couvertes de papiers et pièces robotiques, puis mit la machine à café en marche. Il servit l’officier et s’éclipsa dans la salle de bain. Dès que la porte fut fermée à clé, il poussa un long soupir qui évacua la pression. Tout allait bien, il devait se calmer. Henry avait peut-être fait face à… La chose qui habitait la Marionnette. Il frissonna d’effroi. Il détestait cette idée. Cela expliquait sa fuite précipitée. Il ferma les yeux, alors que le jet d’eau froide coulait le long de son corps. Ne pas paniquer, surtout ne rien montrer à l’officier. Il termina de se préparer en quelques minutes puis sortit, l’air faussement serein. 

Burke était debout à côté du lit et tenait un portrait dans ses mains. Il releva le regard vers William, nullement gêné de fouiller dans ses affaires.

“Ce sont vos enfants ? dit-il en pointant la photographie.

— Oui, répondit William. Ils sont dans le Colorado avec leur mère. Elisabeth, Georges et Michael.

— Ils sont mignons. J’ai un fils moi aussi. Carlton. Il a l’âge de votre plus grand. On y va ? dit-il pour changer de sujet.”

William hocha la tête et les deux hommes sortirent du motel. Ils traversèrent la route rapidement. Devant la pizzeria, deux voitures de police aux gyrophares allumés patientaient. Des agents se tenaient devant la porte d’entrée. William jeta un regard nerveux à la boîte de la Marionnette dans la vitre. Elle avait encore bougé, il en était certain. Il se força à détourner le regard pour ne plus la voir. Il tenta de pousser la porte, elle était fermée à clé.

“Il y a d’autres entrées ? demanda l’officier.

— Il y en a une derrière la cuisine, dans la petite allée juste au-dessus, dit-il en pointant quelques mètres à l’est. Mais elle ne s’ouvre que de l’intérieur.

— L’individu a été vu fuyant par cette porte, c’est étrange qu’elle soit fermée à clé. Quelqu’un d’autre que vous peut ouvrir l’établissement ?

— Oui, Henry Miller. Mais il n’est pas dans la région actuellement, mentit-il.”

L’officier lui répondit d’un grognement. William déverrouilla l’entrée et s’avança dans le hall. Jusqu’ici, rien d’étrange. Il lança un regard dans la salle de restauration. Les deux robots principaux se tenaient immobiles, en bon état. Le gérant les mit en marche pour s’assurer qu’aucun autre problème n’était apparent. Il s’approcha ensuite de la Marionnette, beaucoup plus inquiet. Il donna un coup dans le robot. Comme la veille, il se redressa subitement et commença à saluer la foule. William le força à retourner dans la boîte, tout en sachant qu’il devrait renouveler l’opération le lendemain. 

L’officier Burke le regardait depuis la scène. Il pointa soudain un coin de la pièce.

“Vous avez des caméras de surveillance ?

— Oui. Elles sont visibles depuis mon bureau.”

Les deux hommes quittèrent la salle de restauration pour se diriger vers le couloir adjacent. William comprit immédiatement que quelqu’un était rentré dans son bureau. Un brin paranoïaque sur la sécurité de son laboratoire, il n’aurait jamais laissé la porte ouverte sans être présent. Burke lut immédiatement sur son visage sa surprise. Ils accélèrent tous les deux le pas pour découvrir un carnage. Les télévisions étaient explosées au sol, ses dossiers étaient éparpillés un peu partout. William les ignora pour courir vers la porte de son atelier. Il poussa un soupir de soulagement lorsque celle-ci s’ouvrit et qu’il tomba nez à nez avec l’endosquelette de Foxy, dans le même état où il l’avait laissé. Burke, curieux, regarda les robots au-dessus de son épaule. 

“Le suspect a sans doute vu la caméra, annonça l’officier. C’est un cas classique, malheureusement. Vous êtes assuré ?

— Oui, ça aurait pu être plus grave. Les cassettes sont inutilisables, cependant, on ne saura pas qui a fait le coup.

— Il a sans doute paniqué avant de voler quoi que ce soit. Vous êtes un homme chanceux, monsieur Afton. Nous allons augmenter les patrouilles dans votre rue ce mois-ci, pour nous assurer que votre cambrioleur ne revienne plus. Nous vous envoyons quelqu’un dans la journée pour faire un bilan exact des pertes matérielles, pour l’assurance. Vous comptez quand même ouvrir ce soir ?

— Ce n’est pas un peu de casse qui va m’arrêter. On ouvre ce soir.

— Très bien, à ce soir, donc. Je veux voir vos robots en action.”

L’officier le salua d’un signe de tête et le laissa seul. William attendit que la porte claque pour commencer à rassembler les dossiers. Henry avait-il volé des papiers ? Peu probable, songea-t-il. La plupart des papiers importants, y compris les contrats d’emploi, William les avait toujours avec lui par chance. Il y passa l’après-midi entière. Les télévisions, en revanche, étaient irrécupérables. Les écrans fissurés n’affichaient plus qu’une grosse tache noire au-dessus des parasites blancs. Tant pis. L’assurance les couvrirait. 

Le moral dans les chaussettes, il commença à installer et nettoyer la salle de restauration deux heures avant l’ouverture. Le temps de faire chauffer les fours, il était déjà l’heure. Il craignait que les récents événements ne lui fasse une mauvaise pub, mais à sa grande surprise, une grande file attendait déjà devant les portes. Il fit entrer tout le monde et dut même en refuser certains. Pendant que Fredbear et SpringBonnie, qui enthousiasmait beaucoup ceux déjà présent lors de la cérémonie d’ouverture, assuraient le show auprès des enfants, William s’activait en cuisine pour s’occuper des pizzas. Des parents volontaires vinrent même lui donner un coup de main en s’apercevant qu’il était seul pour tout gérer. 

Pour la première fois, William eut vraiment l’impression de gérer un restaurant. Les pizzas étaient bonnes, les robots émerveillaient les enfants et la salle était plein de rires et de discussions. C’était pour ça qu’il avait ouvert ce Diner, pour cette ambiance qui lui rappelait sa jeunesse. Sourire aux lèvres, il prit quelques minutes de pause pour admirer le fruit de son travail. Des enfants se chamaillaient pour voir Fredbear de plus près, les parents s’étaient regroupés sur deux tables et discutaient tous ensemble. L’officier Burke lui adressa un léger signe de main pour lui signaler sa présence. Tout se passait bien. Trop bien.

Alors que les douze coups de minuit frappaient, William eut la mauvaise surprise, en sortant de la cuisine avec les boîtes à pizza, de tomber nez à nez avec la Marionnette. Elle l’ignora et se dirigea vers la porte extérieure. Comme sur les caméras de surveillance, elle se mit à claquer dedans. Plusieurs fois, prise de démence. Le gérant confia les pizzas à un des volontaires pour le service en salle et se tourna vers le robot, agacé.

“Qu’est-ce que tu veux ? Il n’y a personne dehors, retourne t’occuper des enfants.”

Il lui saisit le bras pour la faire reculer. Mais elle recommença son manège. William hésita avant de lui ouvrir la porte. Elle se précipita à l’extérieur. La sang du roboticien se glaça quand il la vit se coucher à l’exact endroit où il l’avait trouvée ce jour-là, le jour où il avait trouvé le cadavre de la petite fille. La Marionnette ne bougeait plus depuis plusieurs minutes, alors il la saisit courageusement pour la rentrer. Dès qu’il la toucha, les yeux noirs du robot se mirent à briller. William bondit en arrière, effrayé.

Papa ?

La voix avait résonné autour de lui, partout. Il recula légèrement. Le robot s’était relevé et avançait vers lui. 

“Res… Reste là ! cria William.”

Il saisit maladroitement une poubelle et la plaça sur le chemin. Il courut ensuite vers la porte laissée ouverte et la referma. La Marionnette tambourina un moment derrière, puis plus rien. Le cœur battant la chamade, William recula vers la salle de restauration, qui se vidait petit à petit. Il poussa un cri lorsqu’une main se posa sur son épaule. Il fit volte-face et dévisagea de haut en bas l’homme surpris qui se tenait devant lui. 

Assez âgé, son visage ridé souriant, il lui tendit une main vigoureuse. William la prit sans trop comprendre et il la serra avec enthousiasme.

“Monsieur Afton ! Je suis ravi d’enfin vous rencontrer. Je suis Frédéric Fazbear, le créateur du dessin animé Freddy Fazbear and Friends. Nous avons échangé par téléphone il y a quelques mois et je voulais avoir un aperçu de votre travail avant de vous faire une proposition.”

Abasourdi, William rougit légèrement. S’il s’était attendu à ça ! Le vieil homme faisait partie de ces nouveaux millionnaires qui s'installaient dans les petites villes pour asseoir leur autorité et se créer une réputation. Le dessin animé était en pleine explosion en ce moment, ce qui avait donné envie à William de s’inspirer des personnages pour créer Foxy le Pirate.

“Je sais qu’il est tard, mais j’aimerais vous rencontrer demain pour parler de mes personnages. J’aimerais racheter votre restaurant pour créer un projet encore plus fou.

— Pardon ?

— Ne vous inquiétez pas, ce n’est pas contre vous, vous serez toujours en charge de tout. Mais… Enfin, je vous expliquerais demain. Voici ma carte, appelez-moi quand je peux venir.”

Il lui glissa le morceau de carton dans la main et disparut dans la foule aussi vite qu’il était arrivé. William, un peu choqué, regarda un instant le bout de papier. Racheter un restaurant si tôt après son ouverture ? Le vieil homme devait avoir perdu la tête. Il avait sans doute mal compris. 

La salle se vida de ses derniers occupants. Il s’arrêta quelques minutes pour observer Fredbear et SpringBonnie s’agiter sur scène, impassibles. Finalement, la situation n’était pas si terrible et tendait même à s’améliorer. Il devait arrêter de penser au passé et embrasser l’avenir. Il fallait qu’il avance.

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Vylma
Posté le 30/06/2020
Encore nickel, j'ai bien aimé l'ambiance du restaurant et le manège de la marionnette.
Le "Finalement, la situation n’était pas si terrible" m'a quand même fait marré, le mec a un grain ^^'
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