La soirée avait été longue et la nuit bien trop courte pour pleinement récupérer. Le pire était que je n'étais pas vraiment physiquement fatigué. Au moins, ça me permettrait de tenir la journée.
En arrivant dans la cuisine, je tombai sur Kayla qui était en train de prendre un café tout en fixant son portable. Elle leva alors sa tête vers moi.
— Dis donc, pour te réveiller aussi tard, ça devait être très fatigant hier soir, lança-t-elle, assez amusée.
— On peut dire ça comme ça...
Je me dirigeai vers la machine à café pour m'en servir une tasse puis m'installai rapidement aux côtés de ma sœur.
— Ulric est parti rejoindre sa copine pour la matinée. Visiblement, il est bien plus matinal que toi.
Un sourire narquois se dessina sur son visage et elle but une rapide gorgée de sa tasse.
— Ulric ne boit pas d'alcool, comme d'habitude...
— Et toi, tu n'as fait que boire de toute la soirée c'est ça ? plaisanta-t-elle de plus belle.
— Non ! Pas du tout !
— Oh ça va ! Je te charrie !
Son sourire ne s'éteignit pas, du moins, jusqu'à ce qu'elle prenne cette boîte orange remplie de pilules. Elle la regarda longuement et je pus y discerner distinctement mon prénom.
— Merci, souffla-t-elle d'une voix à peine audible.
— C'est normal... Tu n'as pas à me remercier continuellement pour ça.
— Sans toi, je serais morte.
— Quand j'ai revu Tyler hier, il a tenté de me faire reconnaître quelque chose. Je ne suis pas un sauveur... Ce n'est pas mon devoir. Et que j'y arrive ou pas, je ne devrais pas culpabiliser pour ça.
— Parce que la seule personne qui peut me sauver... C'est moi-même ? lâcha-t-elle d'une voix hésitante.
— Il n'a pas dit ça... Mais c'est une belle manière de voir les choses.
Elle me prit la main dans la sienne et la serra énergiquement. Ses yeux se fermèrent et quelques larmes ruisselèrent sur ses jours. Je les essuyai immédiatement, mais maintenant, je savais que je serais à jamais impuissant quant à sa situation. Et ce fut au tour de mes larmes de couler.
— Merci quand même d'être là et de me comprendre.
Elle me prit dans ses bras et ses larmes reprirent de plus belle. Tout comme les miennes.
Je rêvais du jour où ma sœur serait enfin libérée de ses démons, où tous ses problèmes ne seraient que d'horribles souvenirs. Mais c'était un combat qu'elle devait mener d'elle-même et tout ce que je pouvais faire, c'était la soutenir.
Elle me relâcha lorsque son portable se mit à vibrer. Nous essuyâmes chacun nos pleurs et elle s'empara alors de son téléphone. Un triste sourire se dessina sur son visage, probablement parce qu'elle ne pouvait pas passer d'une expression à une autre.
— Charlie me dit qu'elle t'a vu de loin, m'annonça-t-elle.
Je pris une brève inspiration et une gorgée de mon café, sans dire un mot. Elle ne savait pas encore que ce n'était pas juste de loin que l'on s'était vu. Je me rappelai encore de notre contact un peu trop humide et de ses lèvres qui avaient caressé si délicatement les miennes. Hier, nous avions franchi une limite que nous n'aurions jamais dû et mon esprit ni mon corps n'arrivaient pas à s'en remettre.
— Est-ce que... Charlie te paraît être quelqu'un de bien ?
— Tu doutes parce qu'on est de famille ennemie ? détourna-t-elle immédiatement ma question.
— Plus ou moins.
— Je crois... Enfin, elle me paraît vraiment être sincère. Et puis, quand je croise son regard, je ne sens pas la moindre pointe de haine. Juste un peu de maladresse. Mais je sens que je peux lui faire confiance... Et puis, elle ne connaît pas mon vécu. Ça fait du bien d'échanger avec quelqu'un sans être jugée constamment. Pendant quelques minutes, je peux prétendre avoir une vie normale... Et c'est cette vie que je veux retrouver. Cette légèreté que j'ai perdue...
Ses yeux s'embuèrent, parce qu'elle se rendait compte désormais de tout ce qu'elle avait pu perdre ces derniers mois.
— Ne t'en fais pas pour moi, ajouta-t-elle d'une douce voix.
— D'accord...
Je finis mon café d'une traite et mes mains resserrèrent un peu trop fermement ma tasse.
— T'as vraiment l'air fatigué...
— On peut dire ça comme ça, prétendis-je.
Elle répondit brièvement à un message et je vis alors le même sourire se dessiner sur son visage. Cette fois-ci, il avait complètement effacé sa mine morose. Cette fille la rendait vraiment heureuse... Et le baiser avec cette fille m'avait rendu heureux le temps d'un instant. J'en avais même oublié nos querelles familiales, mais ce ne fut que de courte durée, parce que, désormais, la réalité me frappait au visage.
— En fait, il s'est passé un truc avec Charlie hier soir, finis-je par avouer en fixant le fond de ma tasse.
— Vous vous êtes engueulés pour de stupides histoires de famille ?
— On s'est embrassés.
Je levai mon regard vers elle et je ne m'attendais pas à voir ses yeux aussi écarquillés, comme s'ils étaient prêts à sortir de leur orbite.
— Pardon ? Vous avez fait quoi ? Mais dans quel monde ça arrive ça ? s'étonna-t-elle en haussant le ton.
— Dans des circonstances assez... particulières.
— Tu ne peux pas me laisser avec aussi peu de détails ! J'ai besoin d'en savoir un peu plus ! Tu me sers du croustillant sur un plateau là !
— J'ai un peu mis court à tout ça... Parce que ça n'aurait jamais dû arriver.
— T'as peur des répercussions familiales ? Mais on ne fait qu'avoir peur depuis des années et ça ne nous a pas fait du bien. Au contraire. Il suffit de voir ma vie...
Je la fixai sans dire un mot. Parce que j'étais juste persuadé de commettre la pire connerie de ma vie. Ou pire, de l'avoir déjà faite. Parce que je devais reconnaître que, dès le moment où nos lèvres s'étaient séparées, j'avais envie de recommencer. Dans ce baiser, il y avait eu quelque chose de libérateur, tout autant qu'il pouvait être destructeur.
— Ce n'était qu'un délire d'une soirée, tentai-je de me persuader.
Sa mine fut assez équivoque quant à ses pensées : "Mouais, c'est ça". Elle, non plus, n'y croyait pas. Mais ça m'importait peu au final...
*
En vérifiant rapidement le courrier, j'aperçus Charlie qui sortait de chez elle. Nos regards se croisèrent et elle s'arrêta dans sa démarche pendant de longues secondes.
Elle me fit un signe de main et me sourit. Il n'y avait aucune méfiance ni aucune haine à mon égard. Comment pouvait-elle balayer tout le contexte dans lequel nous vivions depuis tout petit d'un revers de la main ? Parce que, là, j'avais juste envie de m'approcher d'elle et de lui expliquer clairement en quoi hier était une erreur. Mais je savais déjà ce qu'elle pourrait me dire "Pourquoi tu viens devant chez moi pour me dire ça ? Pourquoi tu ne fais pas comme si de rien n'était ?". Et je ne pourrais pas la contredire.
Alors, je m'avouai vaincu et la saluai à mon tour. Néanmoins, mon geste fut bien timide et je remontai mon écharpe sur ma bouche. Puis après avoir constaté qu'il n'y avait pas la moindre lettre, je rentrai chez moi.
Qu'est-ce que j'avais fait ?
J'aimerais tellement qu'ils discutent entre eux des versions respectives pour ne serait-ce que les comparer. autant c'est juste une vieille rancœur avec de l'exagération...
C'est trop bien !!!!! Je vais lire la suite xD
Surtout qu'il y a toujours deux versions différentes dans chaque histoire. (':
Bon a tout les coups cette rancoeur ne date pas d'aujourd'hui et que d'autres personnes se sont peut-être entiché de l'autre famille ;)
Bon sinon on voit clairement que Blaine est intéressé par Charlie mais que tous ces secrets l’empêche d’aller vers elle. Il est très même hyper protecteur envers sa sœur en tout cas. J’aime ce côté là mais je n’aime pas son côté « je reste sur la retenue »🤣
Merci ! o/
Avec tout le bordel familial, c'est pour le moment assez compliqué d'en faire autrement haha :')