— Ça va mieux Solène ? Je suis loin maintenant ! Je suis parti vers le large, je crois, je ne vois plus la côte et je croise plein de poissons.
— Oui, ça va.
Vu qu’elle ne me dit rien de plus, je préfère ne pas insister. Je suis plus calme maintenant, et je suis en train de nager plutôt rapidement lorsque je perçois une odeur qui m’intéresse vers ma gauche. Qu’est-ce que ça peut être ? Je n’en sais rien, mais mon requin le sait sans doute parce que je me précipite vers elle !
Chouette ! Ça veut dire que c’est sûrement une proie ! Enfin je vais pouvoir manger quelque chose comme le vrai grand prédateur que je suis !
— C’est moi le roi des océans ! Ah ah ah !
Le gloussement de Solène me fait réaliser que j’ai pensé à haute voix. Bon, au moins j’ai réussi à la faire rire, même si ce n’était pas exprès !
— Tu as l’air de bien t’amuser Hélios, tant mieux !
— J’ai détecté une proie ! Enfin je crois.
— Encore un phoque ?
— Non, je suis trop au large là…
Alors que je discute, j’ai rapidement atteint ma proie et ouvre grand la gueule pour le croquer à pleines dents. Puis je m’éloigne un peu avec la bouchée que j’ai prise, avant de revenir de nouveau. Je fais ça à plusieurs reprises, mais j’ai beau me creuser la tête, je ne comprends pas du tout ce que je suis en train de manger.
Ce qui est assez curieux comme sensation, je dois avouer. C’est bien plus gros qu’un phoque, ça, c’est sûr, puisque c’est plus gros que moi. Mais ça ne bouge pas, et ça ne ressemble à rien. Et en plus… pourquoi je ne ferme pas les yeux en attaquant cette proie ?
— Hélios ?
— Oui ?
— Tu ne dis plus rien ?
— J’essaye de comprendre ce que je mange, mais en fait je ne sais pas. Je crois bien que c’est une odeur de sang que j’ai senti dans l’eau depuis si loin, mais à part ça…
Alors que je suis concentré sur ma « proie » qui me paraît de plus en plus suspecte, je réalise soudain que je ne suis pas le seul à manger ! Là ! Et là ! Il y a deux autres grands requins blancs ! Oh là là !
— Solène ! Les grands requins blancs ils ne se mangent pas entre eux hein ?
J’essaye de garder une voix calme, mais j’ai du mal.
— Pourquoi tu me demandes, tu as oublié nos recherches ?
— Il y en a deux à côté de moi, alors là tout de suite maintenant je ne sais plus rien ! je hurle malgré moi, perdant mon contrôle mental.
— Tu ne risques probablement rien, pas la peine de paniquer !
Probablement ? Probablement !?
J’ai envie de fermer les yeux et d’aller me cacher dans un coin. Hou là là… finalement, c’est vrai que c’est quand même flippant de se retrouver face à face avec un grand requin blanc… alors deux, c’est encore pire !
Je suis un peu (beaucoup) en panique, mais j’arrive néanmoins à prendre bien garde à ne pas contaminer mon requin par mes émotions. Et si jamais ils étaient comme les chiens et qu’ils sentaient ma peur hein ? Il faut vraiment que j’arrête d’imaginer le pire, j’en tremble presque. C’est simple, j’ai aussi peur que lorsque j’étais une grenouille sur le point d’être avalée par un héron !
— Hélios ?
— Oui oui, je vais bien ! je réponds d’une voix pas très assurée.
— Tu m’inquiétais un peu à ne plus rien dire là…
— On est en train de manger le même repas avec les deux autres grands requins blancs. J’ai eu un petit peu peur quand je les ai vus, mais pas tant que ça, je gère !
Oui je mens, et alors ? J’ai ma fierté quand même.
— Bah alors si vous avez assez à manger pour trois, c’est sans doute une carcasse de baleine. Bon appétit !
Une carcasse ? Beurk ! J’entends Solène rigoler dans ma tête alors que moi j’ai subitement envie de vomir. C’est vrai qu’on a lu qu’ils adoraient la graisse de baleine… mais beurk quoi, la baleine elle est morte. Si j’avais voulu manger des carcasses, j’aurais dessiné un vautour !
*** Informations documentaires ***
Les grands requins blancs pourraient parfaitement être appelés les nez de la mer plutôt que les dents de la mer ! Leur centre olfactif est si développé qu’il occupe les deux tiers de leur cerveau. Ils peuvent sentir l’odeur du sang de très loin. Ce qui leur permet de suivre aisément une proie blessée même à plusieurs kilomètres.
Et de plus, il y a un léger décalage entre l’odeur qu’ils perçoivent entre leur narine gauche et la droite, ce qui signifie qu’ils savent automatiquement de quel côté vient l’odeur ! Pratique non ?
Par contre, rassurez-vous, ils sont attirés par le sang de poisson, mais le sang humain, ils s’en moquent royalement ! Encore un fait qui prouve que les requins ne considèrent vraiment pas les humains comme des proies.
Les grands requins blancs ont beau être des prédateurs, ils leur arrivent de manger des carcasses de baleine. Après tout, ils adorent tout ce qui est gras, et la graisse sur une baleine, ce n’est pas ce qui manque ! Il est à noter que comme il ne s'agit pas d'une attaque, ils ne prennent pas forcément la peine de fermer leurs yeux pour ce repas.