Chapitre 61 - Derrière Inkeri, qu'est ce qu'il y a ?

Fébrile, Inkeri laissa mes lèvres encore maquillées presser doucement les siennes. Je sentis sa respiration caresser mon visage, comme une brise tiède et légère à la fois rapide et hésitante. Nos bouches se frôlèrent, se touchèrent, glissèrent l’une contre l’autre. La main que j’avais refermée sur ses fesses, par-dessus son t-shirt de nuit, la maintenait contre moi, sans fermeté particulière.

Nos nez s’entrechoquèrent et je pris en otage sa lèvre supérieure entre les miennes. La texture en était agréable. Je sentis quelques volutes fatiguées de son parfum du jour, presqu’évaporées après une longue journée estivale. Ses longs cheveux blonds chatouillaient mes épaules nues, tandis qu’aucun poil de barbe ne venait pour une fois gratter contre mon menton.

Je serrais une fille dans mes bras et m’apprêtais à l’embrasser.

 

Mon regard croisa une nouvelle fois le sien. Ses yeux étaient d’un étonnant bleu profond. Les miens, plus clairs, fixaient les pupilles translucides, et j’eus l’impression de surplomber d’insondables fonds marins au large d’une île paradisiaque.

Inkeri dégagea sa lèvre et pressa contre ma bouche. Son nez trouva sa place contre le mien et la main qu’elle avait posée sur mon bras entama l’esquisse d’une caresse, d’un pouce, premier doigt courageux à partir au front découvrir le terrain inconnu.

Mes paupières se fermèrent sur l’image rémanente des iris bleutés, et mes lèvres s’entrouvrirent. Le temps parut ralentir, tergiverser, accompagnant la langueur de ce baiser promis qui se faisait attendre, comme un plaisir que l’on fait durer, ou que l’on craint au contraire de laisser s’imposer. Je sentis la pointe de sa langue contre la mienne. La sensation fut douce, surprenante. Il me sembla percevoir une saveur à la fois acidulée et très fraîche, mais que je n’identifiai pas.

Quand nos langues se mélangèrent enfin avec fougue, mon premier baiser lesbien devint une énigme gustative. Mes sens s’abandonnèrent à la découverte de cette saveur inédite, tandis que mon cerveau cherchait dans ses souvenirs de vingt-deux années de friandises, à laquelle pouvait bien renvoyer le goût de cette salive nappant la langue qui caressait la mienne.

 

A quoi joues-tu, Léa… ?

 

Je sentis un désir étrange naître au fond de moi.

J’avais initié ce baiser pour des raisons qui de toute évidence dépassaient le cadre de ma conscience du moment, et défiaient les parts les plus rationnelles de mon intelligence.

J’avais donné les clés à Lola.

Mélanie aurait dit que j’avais cédé à la facilité.

Johnny aurait dit autre chose.

 

Derrière l’amour, il y a

Toute une chaine de pourquoi

Question que l’on se pose

Il y a des tas de choses

Les pleurs qu’on garde sur le cœur

Et des regrets et des rancœurs

Des souvenirs éblouissants

Et des visions de néant.

 

Je me sentis dériver vers des ambivalences délicieuses et effrayantes, intensément attirantes, sombres abymes où chaque larme se sublime en soupir.

Mon corps réclamait davantage que ce baiser. Des images érotiques passèrent dans mon esprit abandonné, corps féminins et masculins, irrésistible pouvoir de séduction de l’inexploré. Je sentis deux seins, plus gros que les miens, presser contre ma robe. La main qui caressait désormais toute la longueur de mon bras était gracile, et achevée d’ongles vernis de rose. Mon esprit savait que je tenais une femme contre moi, et que je l’embrassais à pleine bouche. Mon corps ne faisait aucune différence. Le désir et le plaisir montaient simplement en lui.

 

A quoi joues-tu, Léa… ? Dans quel but ?

 

Empêche-moi de me détruire.

 

-Excuse-moi, Inkeri.

 

Je m’étais reculée. Les longs doigts finlandais avaient longé mon bras et tenaient désormais ma main. Inkeri me regardait. Ses adorables pommettes avaient rosi et ses yeux me transperçaient avec incrédulité, mais toujours baignés de cette même culpabilité sincère qu’elle avait affichée en me présentant ses excuses quelques minutes plus tôt. Le piquant de ce bonbon énigmatique baignait toujours mon palais.

 

-Je suis désolée, je fais n’importe quoi.

-Tu pas besoin d’excuser. C’est moi qui suis été conne, avec Éric.

-Ouais…

 

Je me tournai vers Éric, qui avait assisté à ce baiser inattendu, et qui avait dû se demander où je voulais en venir. L’érection que j’avais sentie contre moi quand je l’avais provoqué, juste avant de passer à la blondinette, avait-elle obscurci ses idées, faisant miroiter une improbable partie à trois ? Ou au contraire avait-il senti la dangereuse glissade sur laquelle sa petite amie blessée semblait s’aventurer, sans chercher à tirer profit de la situation ?

Je me sentis stupide. Ce sentiment qui m’avait poursuivi toute la journée, rappel de mes propres traîtrises répétées en boucles depuis six mois, s’était amplifié du ridicule de la capitulation face à mon double sans limites.

C’est moi qu’Éric avait trompée, et c’est moi qui m’en voulais de plus en plus.

Ce baiser rancunier avait fait progresser une bouffée de désir en moi, sans que je ne sache qui je désirais exactement, d’Éric, d’Inkeri, ou de la présence de leurs deux corps contre le mien, comme pour posséder en retour ce dont j’avais été dépossédée, et celle qui me l’avait volé, fût-ce pour quelques minutes insignifiantes, un soir où les corps avaient parlé trop fort.

 

Derrière ce grand rideau noir

Tu m’interdis d’aller voir.

 

Les larmes revinrent, plus fort qu’en fin d’après-midi. La colère, enfin, se dirigea contre Éric. Pour la première fois, mes yeux le fusillèrent au lieu de l’appeler à abuser de la jeune femme que j’étais, et que je lui avais offerte.

 

Et qui ne lui avait pas suffi.

 

Il vint vers moi, et marqua un temps d’arrêt, comme pour me demander l’autorisation de me prendre dans ses bras. La culpabilité refit surface au travers de la colère. Cet homme avait pour moi un respect et un amour qui crevaient ses yeux désabusés. Est-ce que vraiment je méritais que l’on ressente pour moi des sentiments aussi forts ?

J’eus l’impression de lui en vouloir de ne pas réussir à lui en vouloir, et les larmes piégées redoublèrent.

Lola hurla en moi, m’ordonnant de faire volte-face, vomissant son injonction de retourner me mesurer à celle qui ne pouvait pas être à ma hauteur. De le lui prouver. De leur montrer à quel point. Mon corps bouillonna d’une pulsion sexuelle dont l’intensité me fit vaciller. Je me vis prendre Inkeri, la mettre à nu, et lui infliger moi-même l’orgasme réparateur, pour qu’enfin cette scandinave qui n’aurait jamais dû poser ses doigts manucurés sur la verge de mon petit-ami, comprenne qui avait, ici, le pouvoir de décider, et qui ne l’avait pas.

 

« Un sot est un imbécile dont on voit l’orgueil à travers les trous de son intelligence » a écrit Victor Hugo.

 

Pour la première fois depuis six mois, je fis enfin taire Lola.

Je me pressai contre Éric, qui m’enlaça, et mes larmes se répandirent en long sanglots apaisants.

 

Nous redescendîmes dans sa chambre où je m’effondrai à plat ventre sur son lit. Il s’assit à côté de moi et se pencha pour embrasser mon crâne, posant une main chaude sur mon dos nu.

 

-Je suis tellement désolé, Léa.

-Fais-moi l’amour.

-Tu… es sûre ?

-Oui.

 

Il embrassa mon dos, ainsi que mes épaules. Le duvet de sa courte barbe effleura ma peau et le désir revint instantanément, enfin dirigé vers la bonne personne. Une main se posa sur l’arrière de mes cuisses, près des genoux, pas trop haute, encore sage et peu assurée. Mes jambes s’écartèrent de quelques millimètres insignifiants qui délivrèrent l’autorisation espérée. La main caressa mes jambes sur toute leur longueur, et déchaussèrent mes sandales, qui tombèrent au sol. Puis elles remontèrent, redécouvrant cette peau adorée. Quand elles rencontrèrent la lisière de la robe, elles différèrent à plus tard l’exploration à venir, et repassèrent dans mon dos, qui frissonna sous la caresse. Lorsqu’elles terminèrent leur reconnaissance sur ma nuque, je sentis des doigts gourmands et agiles défaire le nœud qui retenait le vêtement contre mon corps.

 

Je me redressai et m’adossai à la tête du lit. La robe détachée fila contre mes seins nus qui se dévoilèrent. Une question frappa contre mon âme endolorie. « Combien fait-elle, en soutif, miss Finlande ? » Je la chassai et passai mes bras autour d’Éric qui venait d’enlever son polo. Petits ou non, ce sont bien eux, mes seins à moi, qui s’écrasèrent contre son torse, et accentuèrent l’envie qui était la sienne de me prendre.

Pas besoin de Lola.

C’est moi qu’Éric aimait. C’est moi qu’il désirait.

 

La robe quitta ma peau et j’ôtai le tanga blanc. Un mélange de larmes et de mascara délavé avait coulé jusque sur mes joues et aux commissures de mes lèvres. Je les essuyai d’un revers de la main et attrapai celle d’Éric, qui venait lui aussi d’achever de se déshabiller. Son pénis bandé le précéda au contact de ma chair.

Nous nous embrassâmes pendant que nos mains retrouvaient les marques qu’elles avaient failli perdre. Deux doigts s’insinuèrent dans mon maquis intime, et accélérèrent ma respiration. Ils ressortirent trempés d’une explicite invitation. Ma main descendit le long de la verge, caressant les points sensibles qu’Inkeri n’avait pas eu le temps de découvrir dans leurs moindres détails, et décalotta le gland qui ne demandait qu’à être englouti.

Je me mis à genoux, poursuivant le baiser, forçant Éric à se mettre assis au milieu du lit, jambes étendues devant lui. Je vins me coller contre sa peau, passant mes jambes de l’autre côté de son buste. Elles s’enroulèrent autour de sa taille, et ses mains vinrent guider ma chute langoureuse le long de son corps. Il embrassa mon téton droit au passage de mes seins contre son visage, et je sentis tout à coup sa présence en moi, pénétrant mon sexe, emportant les atermoiements dans un flot de chaleur qui m’envahit, répandant ses ondes dans mon bassin, mes fesses, mes seins, ma gorge, et jusque dans mes pieds qui se contractèrent l’un contre l’autre, fermant le cercle autour de mon amant emprisonné entre les deux jambes qui alimentaient ses fantasmes depuis qu’il m’avait rencontrée.

Je pris appui en posant mes avant-bras sur ses épaules, et nous vibrâmes de concert jusqu’à ce que les ondes en question entrent en résonnance.

Alors Éric bascula vers l’avant l’entité de nos deux corps imbriqués, et mon dos s’écrasa contre le matelas. Son bassin pressa davantage contre mon pubis, et la verge progressa plus profondément en moi. Il se redressa, surplombant le spectacle de mes seins gigotant sous ses va-et-vient, et le grondement d’un orage vibra dans mon ventre. Il posa la paume de sa main entre les deux mamelons de ma poitrine, et j’en sentis la présence diffuser sa chaleur. Les miennes attrapèrent ses fesses, pour sentir le contact charnel tout en apportant ma rime au poème syncopé qu’il récitait entre mes hanches.

 

Je laissai mes paupières se sceller, et abandonnai mon corps au plaisir qui montait, et à mon amant qui luttait pour m’emmener avec lui vers les sommets. Mes pensées troublées divergèrent quelques instants vers Inkeri, à qui j’avais failli faire l’amour, ou tout au moins tenté de le faire, vers ses petites fesses rondes que j’avais appréciées sous mes mains, à un t-shirt de ma paume nue, et je me demandai si Éric en avait aimé la fermeté. Si moi, j’en aurais aimé la fermeté…

La main d’Éric glissa imperceptiblement vers mon sein droit et les doigts excités jouèrent avec le téton dressé. Je rouvris les yeux. Ceux d’Éric me fixaient, saturés de cette brume de violence et d’émerveillement, autre ambivalence acceptée des corps qui ne font plus qu’un, quand donner et recevoir deviennent indissociables.

Je mis une main autour de son cou, et me cambrai vers le haut, tout en l’invitant à se baisser jusqu’à ce que nos langues puissent se toucher à la lisière de nos bouches. Mon autre main s’enroula sur la base de la verge qui me faisait l’amour, et j’en caressai les testicules comprimés, prêts à se répandre en moi. Mes doigts émeutiers roulèrent contre les chairs, décuplèrent les plaisirs contenus, et glissèrent sur les trainées visqueuses que le pénis ramenait de mes lèvres détrempées à chaque fois qu’il ressortait de moi.

 

Éric poussa un long soupir et se dégagea. Il s’accroupit entre mes jambes qu’il écarta plus encore, et je me souvins du grand écart que j’avais réalisé face à Kevin. Oubliant toute pudeur, mes cuisses basculèrent à cent-quatre-vingts degrés et mon sexe s’ouvrit, béant, offert. Éric prit mes hanches et me tira doucement vers lui. Mes fesses montèrent en direction du pieu tendu dans ma direction et il pénétra mon sexe une dernière fois. Je sentis sa présence pousser sur les muscles de mes cuisses tendus à l’extrême et les murs de la chambre se mirent à basculer. Les sons de nos peaux frottant l’une contre l’autre semblèrent étouffés, lointains, comme si un quarante-cinq tours avait été passé en vitesse trente-trois.

Je m’entendis pousser un cri quand l’orgasme explosa, et je revins à la réalité. Mon pubis eut un spasme et, dans notre position instable, ma jambe droite se replia et heurta le visage d’Éric qui perdit à la fois l’équilibre et sa concentration. Son pénis sortit de moi et je vis le gland pulser, annonçant ce que je connaissais par cœur pour l’avoir tant de fois provoqué.

 

-Merde, bredouilla Éric.

 

Le temps qu’il cherche à reprendre le contrôle des événements, la verge avait achevé son mouvement de bascule hystérique et s’était raidie, pointée vers le haut. Je savais qu’il était trop tard pour qu’il revienne en moi.

 

-Laisse faire. Profite.

 

Éric s’immobilisa, le corps à angle droit du mien, une main refermée sur mon sein droit. Un long jet blanc découpa l’atmosphère de la chambre anglaise et vint zébrer ma peau, dessinant un rail de cocaïne épais et fluide sur mon ventre. Il cria. Une deuxième émission sortit du phallus décalotté, dont le gland rougeâtre rendait les armes avec fracas et nostalgie du temps passé dans mon sexe. Le fier diablotin qui ornait mon nombril se retrouva noyé sous le sperme. Éric cria à nouveau, tenta de se maintenir en équilibre sur une main, mais s’avoua vaincu. Son corps s’écrasa contre moi, étalant entre nos ventres le fruit de l’éjaculation qui s’acheva dans une troisième gerbe, dont je sentis la tiède viscosité cheminer sur mon bas-ventre et ruisseler en direction de mon sexe, où elle avait failli se diffuser.

 

Éric hoqueta.

 

-Je crois que je t’en ai mis partout.

-J’ai adoré.

 

Je pris son visage entre mes deux mains et l’embrassai passionnément tout en le serrant fort contre moi.

 

Nous nous réveillâmes une heure plus tard. Nous nous étions assoupis ainsi, collés l’un à l’autre par les liqueurs figées. Éric sortit sur le palier de son premier étage et entra dans la salle de bains qu’il partageait avec Inkeri. Je l’y suivis. Il pénétra dans la cabine de douche et se rinça. Je tentai de l’y rejoindre mais la cabine était trop étroite pour pouvoir s’y tenir à deux.

Quand il eut fini de se nettoyer, Éric sortit de la cabine et je l’y remplaçai. Il m’attendit et nous nous séchâmes avant de retourner dans son lit où nous nous blottîmes entièrement nus. Il était quatre heures du matin.

 

Je dormis peu, et mal.

Mon cerveau tournait en rond, et imposait une veille à mon corps fatigué. J’étais à un croisement important de mon histoire avec Éric, sinon de ma vie.

Je pouvais pardonner. Je l’avais déjà fait, en reprenant à Lola l’autorité sur le cours de ma vie. Cette fille prête à tout, sorte de négatif de ma photo quotidienne, avait le charme de la toute-puissance que l’on prête si facilement aux gens pour qui les conséquences de leurs actes ne sont que des dommages collatéraux.

Éric et moi valions mieux que ça.

Mais cela ne réduisait pas à néant ce qui s’était produit. Où en serais-je de la confiance que j’avais en lui ? Serait-elle entamée ? Aurais-je désormais la crainte qu’il saute une fille dès qu’il en aurait l’occasion ? Et cette cohabitation avec Inkeri ? Comment allais-je la gérer, au fond de moi, une fois rentrée dans mon studio ? Quand bien même l’un des deux trouverait une solution de remplacement, interrompant leur vie commune dans le triplex de Soho, Miss Père-Noël resterait à Londres. La tentation ne serait plus la même que s’il croisait ses deux seins pointant dans des nuisettes chaque matin au petit-déjeuner, mais enfin, s’ils voulaient retrouver le chemin d’une extase commune, rien ne pourrait y faire obstacle.

 

Il me fallait l’accepter. Accepter que la vie soit complexe et ne résume pas à une organisation méthodique, prévue à l’avance, pesée et soupesée. Acceptée que Lola ne soit pas une solution permanente, mais seulement une fille qui dispense des massages érotiques.

Accepter de lâcher prise.

Dans ma vie, et pas seulement dans un lit.

Que la confiance n’est pas la somme algébrique de ses preuves, mais un sentiment humain.

 

Accepter de ne pas tout maitriser.

 

Éric dormait encore quand j’entendis Inkeri descendre son escalier. Je sortis du lit, enfilai une nuisette rouge en coton, fit un tour par la salle de bains pour me rafraichir, et la rejoignis à la cuisine. Elle y était seule et se faisait infuser un thé tout en rêvassant au-dessus d’un paquet de shortbreads. Elle portait le t-shirt que j’avais failli lui enlever, quelques heures auparavant.

 

-Bonjour Léa.

-Salut Inkeri.

 

Je lui fis une bise. Sur la joue, cette fois-ci.

Une gêne s’immisça entre nous, palpable, composée d’un homme partagé et d’un baiser intensément sensuel, échangé dans la nuit entre larmes et reproches. Elle m’avait présenté deux fois ses excuses pour avoir couché avec Éric. C’était à moi de faire un pas.

 

-Je suis désolée, pour ce que j’ai fait hier soir. J’étais dans un état un peu second.

-Je ai comprendre.

-Ok.

-Et moi encore, je demande pardon…

-On va peut-être arrêter de s’excuser toutes les deux phrases, qu’en penses-tu ?

-Je ne sais pas comment toi voir ma personne, maintenant.

-En t-shirt de nuit, mal coiffée et démaquillée.

-What ?

-Non, rien, je plaisante. Il est à quoi ton thé ?

-Earl grey.

-Il y en a pour deux ?

-Oui, avec volontiers.

-Comme les mecs ici, donc…

-Euh…

-C’est bon, c’est bon, je blague. Je fais toujours du second degré et de l’ironie, quand je suis mal à l’aise.

-C’est très français, je crois.

-Ouais, et en plus chez moi c’est particulièrement prononcé, alors t’imagines…

-Éric m’avait dit que tu es très pleine de humour et de … comment on dit …

-Esprit ?

-Non.

-Humour noir ?

-Non. Quand on trouve bonne phrase.

-Répartie !

-Voilà. Il t’aimer énormément. Il parler de toi et rendre moi jalouse, car aucun garçon a aimé moi autant jamais.

-Ils ont l’air bon, tes gâteaux anglais, là…

-On partager aussi shortbreads, alors ?

-Ça va, tu piges vite le second degré, pour une Finlandaise.

 

Nous prîmes le petit déjeuner en silence, chacune dans nos pensées. Nous n’étions pas en guerre. Malgré tous mes efforts pour la détester, je ne parvenais pas à éprouver de sentiment négatif pour cette blondinette franchement adorable, gentille comme tout, et dont la frimousse finalement bien plus blanche que moi, dès qu’on lui enlevait une couche de fond de teint, prenait un bain de vapeur au-dessus des fumées à la bergamote.

 

-Inkeri, j’ai une question stupide.

-Quelle ?

-T’avais mangé quoi, comme bonbon, hier soir, avant que…

-Before you kiss me ?

-Voilà. Before je kiss toi.

-C’est quelle expression que vous disez, en France, pour le french kiss ?

-Rouler une pelle.

-Really ?

-Yes.

-Mais je pas voir rapport !

-Moi non plus, mais c’est comme ça.

-Toi a roulé une pelle à moi, c’est ça ?

-Oui et j’ai senti que tu avais dû manger un bonbon juste avant, enfin voilà c’est une question conne mais bon…

-Xylimax.

-Oui, évidemment, à question conne…

-C’est bonbon finlandais avec xylitol.

-Ah oui c’est vrai que vous en foutez partout, c’était ça le côté super frais, donc ?

-Et celui que je a mangé il a les arômes orange et … i don’t know how you say « tangerine » in french ?

-Mandarine.

-Orange et mandarine.

-Ok.

-Léa, je peux aussi question ?

-Quatre bières et un joint.

-Please ?

-Non, rien, je croyais qu’on jouait à « qu’est-ce que t’as bouffé hier soir ». Désolée, je t’écoute.

-Pourquoi tu rouler… enfin… tu embrasser moi ?

-He ben je vais te dire. Je n’en sais rien du tout !

-…

-Réaction pas rationnelle dans situation pas rationnelle.

-Tu as déjà embrassé fille ?

-Non.

-Oh ! I was the first ?

-You were.

-Je te faire une secret.

-Une confidence !

-Confidence ?

-Oui, si tu me dévoiles un secret, c’est que tu me fais une confidence.

-Ah ok ! Alors ma confidence, être que je suis autant aimer filles que garçons.

-Bisexuelle.

-Oui, c’est ça.

-Pas moi. Moi juste coup de tête, hier. Je suis hétéro.

-Juste voulais dire que malgré conflit de hier, kissing you était agréable pour moi.

-J’embrasse bien, hein ?

-Oui.

-Non mais je déconnais, là…

-Léa, je propose à toi que nous oublier ce que je faire avec Éric et ce que nous faire hier soir. Je peur que pas amie avec toi soit possible à cause de ma comportement sur Éric, mais je aimer que repartir à zéro avec toi.

 

Je tendis la main à Inkeri pour sceller le pacte de non-agression qu’elle me proposait. Il était vraiment impossible de détester cette fille.

Elle crut que je demandais les shortbreads et me passa le paquet.

Nous nous mîmes à hurler de rire et réveillâmes tous les occupants du triplex de Soho.

 

Derrière ton amour, qu’est-ce qu’il y a ?

Qui est cette femme auprès de moi ?

Quand tu me dis : « je t’aime »

Est-ce bien moi que tu aimes ?

Et lorsque tu me fais l’amour

Est-ce que tu fais vraiment l’amour ?

(…)

J’ai besoin de tes mains sur moi

Et de ton souffle et de ta voix

De tes joies, de tes plaintes

De tes cris, de tes craintes

 

J’ai tant besoin de ton corps

Donne-moi, donne-moi ton corps

Pour y vivre et pour y mourir

Aime-moi, aime-moi plus fort

Empêche-moi de me détruire.

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