Chapitre 62 : Calir

Par Talharr

Calir souriait, du haut de la tour, savourant le spectacle.
Dalar faisait trembler la terre, des fissures s’ouvraient, la chaleur en jaillissait, enfumant le ciel. 
La bataille grondait encore entre les guerriers de son dieu et ceux de Talharr. Mais elle ne durerait plus.

Le loup géant avait perdu son combat contre Nekrahl, jeté dans la mer grondante. 
Son élu était mort. Tué de sa main.

Il allait enfin rejoindre Gwenn, pensa Calir, le sourire carnassier figé sur ses lèvres.

Un visage qu’il n’aurait plus jamais besoin de cacher.
Depuis plus de trois siècles, il survivait, immortel. Dalar lui avait offert ce don, et avec lui un rôle : préparer son retour. C’était la seule fois où son dieu lui était apparu, mais cela avait suffi. Ce n’étaient pas les demi-dieux qui régneraient. Non. C’était lui.

Des siècles durant, il avait changé de visage, réécrit les récits, mêlant vérités et mensonges, manipulant les royaumes.
Il avait utilisé les anciens sbires de Malkar, les convainquant que leur maître réclamait vengeance, que le soulèvement était proche. Ainsi, la Terre de Talharr s’était fissurée.

Une seule personne aurait pu anéantir son œuvre : Elira.
Elle avait deviné la vérité.
Malkar n’avait jamais voulu tout détruire pour tout reconstruire. Non… ce stupide demi-dieu n’aspirait qu’à régner sur ces terres telles qu’elles étaient, sans jamais les transformer.
Quelle faiblesse. Quelle absence de vision.
Lui, Calir, avait compris qu’un monde nouveau exigeait des ruines de l’ancien. Que seule la cendre pouvait nourrir l’avenir. Dalar était celui qui porterait ce monde vers sa véritable destinée.
Mais Calir s’était montré plus rusé, plus persuasif. Aux Dralkhar, aux Zarktys, aux créatures des Terres Abandonnées, il avait promis gloire et vengeance.
Alors Elira fut bannie, puis enfermée en Drazyl, auprès d’un roi tordu qui croyait qu’elle l’avait trahi.

Il avait aussi su qu’elle choisirait son fils plutôt que sa fille.
Aelia avait toujours été l’Hirondelle.
Il ne s’était servi de Gwenn que pour attirer le Loup hors de sa tanière, pour nourrir sa rage, pour l’amener à vouloir venger les siens.

Il a fait en sorte qu’Alion devienne l’instrument qui perdrait Elira.

À présent, il ne restait plus que l’Hirondelle.
Seule, elle ne pourrait rien.
Dalar allait écraser ce monde.

Pourtant, au loin, Calir aperçut un petit groupe qui fuyait.
Il sentit le flux de magie. L’Hirondelle.
Et une autre aura, plus faible mais tenace.
Le Loup n’était pas mort.

Talharr… pourquoi s’entêter ? La défaite est déjà acquise.

Il haussa les épaules. Pas la peine de les poursuivre.
Le Loup ne survivrait pas à une telle blessure. Qu’ils profitent de leurs derniers instants.

Le ciel virait au jaune.
Bientôt, les royaumes s’effondreraient.
Le sol s’embraserait, recouvrant toute la surface de ces terres.
Et un monde nouveau naîtrait.

Après tant d’années, je vais enfin être récompensé.

À peine eut-il formé cette pensée que des explosions retentirent.
Sous ses pieds, la terre se soulevait déjà.
Le changement avait commencé. Le monde de Talharr touchait à sa fin.

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