-Ça me fait plaisir de te voir, Nicolas.
-Moi aussi, Alessia. Six semaines, cela commençait à faire long.
-Tu vas avoir double dose, aujourd’hui, comme je t’ai expliqué. Voici Lola.
Les yeux bleus se posèrent sur moi. Un homme charmant d’une quarantaine d’année vint spontanément me faire la bise, que j’acceptai. Il avança, puis recula, semblant regretter son initiative. La peur d’être trop direct, sûrement. Puis il avança à nouveau pour me la faire quand même. La peur que j’aie pu croire, et m’en vexer, qu’il n’avait pas envie de m'embrasser. Il donnait l’impression de gesticuler tout en faisant du surplace. Sous quelques banalités polies, je perçus quelqu’un de nerveux et de nettement moins à l’aise que Pascal. Mais il semblait d’une grande gentillesse, était souriant, et avait quelque chose de touchant. Physiquement il était grand, et m’aurait dépassée si je n’avais pas été sur mes échasses. Large d’épaules, il était svelte et habillé d’un jean noir et d’une belle chemise noire et blanche sous un blouson en cuir.
Mélanie participa aux présentations.
-Nicolas est ingénieur, il prévoit la météo.
-Disons que je travaille sur les modèles mathématiques et informatiques pour m’en approcher.
-Oh mon Dieu, un matheux.
-Je peux rester quand même ?
-Allez, si Alessia est d’accord, on te garde.
Mélanie était d’autant plus d’accord que Nicolas avait sorti trois billets de cinquante euros qui allèrent illico rejoindre leurs petits frères dans le tiroir ad-hoc du meuble sino-hindou-suédois. Mon sens aigu de la déduction confirma que je finirais à poil dans pas longtemps. La difficulté allait croissante, et j’étais soulagée que Nicolas fût simple et agréable. J’aurais eu beaucoup de mal à supporter les mêmes circonstances en face d’un macho pseudo dominant.
Mélanie proposa une douche à Nicolas qui s’exécuta et suivit le même chemin que Pascal quatre-vingt-dix minutes plus tôt. Un air de Jacques Brel me revint, qui n’allait plus me lâcher de la journée, colorant à jamais de luxure l’image de l’immense chanteur belge. Il est des associations qui dépassent la logique humaine, et s’acharnent à prendre à revers les théories proustiennes sur les madeleines.
Et quand je ne délire pas
J’en arrive à me dire
Qu’il est plus humiliant
D’être suivi que suivant
Je ne savais pas trop où j’allais, mais au moins j’irais en musique, et pas seulement avec le disque zénifiant que Mélanie avait relancé, et dont la volonté de plonger tout le monde dans une ambiance apaisée finissait sur moi par être contreproductive à tel point que je commençai à envisager au choix de fracasser le lecteur CD à grands coup de talons aiguilles, ou plus diplomatiquement d’offrir un album digne de ce nom à mon auto-entrepreneuse préférée, Michael Jackson, Nirvana, the Doors, Gainsbourg, Amy Winehouse, Adele, ou même Lorie si elle y tenait, que sais-je encore, tout sauf ce machin ridicule à la flûte de pan !
Pendant que Nicolas se douchait, Mélanie me tendit un peignoir satiné noir du plus bel effet.
-On va l’accueillir avec ça, et on l’enlève une fois qu’il est sur la table de massage.
-T’as le sens de la mise en scène, dis-donc.
-Il est à ma taille, j’en ai toujours deux ici au cas où. Tu vas peut-être flotter un peu dedans, et sur toi il risque d’être trop court. Mais bon…
-Ouais, ça ira, quoi.
Mélanie était déjà pieds nus. Elle s’extirpa de son jean, puis ôta le débardeur, dévoilant les deux stars qui trônaient à mi-hauteur entre son nombril et son menton, et qui allaient devoir travailleur à leur tour. Un tanga blanc en coton glissa le long de ses jambes. Elle avait gardé le bas le jour de mon initiation, tout comme moi. Je la voyais donc nue pour la première fois. Son sexe était soigneusement épilé, dégageant ce qui devait l’être, sans chercher à ressembler ni à un pubis de gamine prépubère, ni à une piste d’atterrissage ridicule. La forme naturelle, féminine, avait été conservée, mais taillée, échancrée et désépaissie. Une nouvelle fois, ma vie sexuelle lamentable de ces derniers mois me rattrapa. J’étais aussi négligée du bas-ventre que Mélanie était apprêtée.
-Mélanie, j’ai pas vraiment pensé à me faire le maillot. Ça va pas être jojo.
-T’es blonde, c’est pas trop grave.
-Je le sens pas, là.
Il était évident que j’atteignais mes limites pour cet après-midi. L’état de ma pilosité était un prétexte : je ne me sentais pas capable de me mettre entièrement nue.
-T’as quoi comme lingerie ?
J’enlevai le chemisier et la jupe, qui allèrent rejoindre les vêtements de Mélanie à côté de la bouteille de Perrier près de la fenêtre. Mélanie scruta l’ensemble en dentelle bleu marine.
-Il est super joli ce shorty, et t’es canon dedans. T’arrives à virer le soutif ?
-Je suppose que ça ira.
-Ok ben reste comme ça, alors. Faut pas non plus que tu te sentes mal à l’aise. Il aura une fille nue et une topless. Je ne pense pas qu’il ira se plaindre à la CGT.
Mélanie avait décidément le don de me faire marrer dans les moments où j’en avais besoin. Je dégrafai le push-up et acceptai la comparaison. Mélanie s’amusa.
-Tu te rends compte que des millions de mecs sur terre ont des fantasmes qui tournent autour de la scène précise dans laquelle nous sommes, là ?
-Et encore, je ne te mets pas la main au cul…
Elle pouffa, et son rire communicatif m’entraina avec lui. Je me déridai enfin. Pourquoi avait-il fallu attendre que je fusse les seins pointés vers ceux de Mélanie pour que cela arrive ?
Nous enfilâmes les peignoirs identiques. On aurait dit un boxeur et tenue de combat et son entraineur derrière lui. Choisi pour aller parfaitement à Mélanie, il la mettait en valeur, cintrant ce qui devait être souligné, décolletant ce qui devait être suggéré, et s’arrêtant juste au-dessus de ses genoux. Avec mes quinze centimètres de plus et mon corps longiligne, ça bouffait un peu de partout. Mais il m’arrivait au milieu des cuisses, ce qui jetait toute la lumière sur mes longues jambes encore cambrées dans les escarpins que j’avais gardés aux pieds. On trouve toujours une façon de s’accommoder de tout.
La fameuse attente de la sortie de la salle de bains commença.
J’avais presque vingt ans
Et nous étions cent-vingt
A être le suivant
De celui qu’on suivait
Mais bon Dieu, rendez-moi la flûte de pan ! Faites taire Jacques dans ma tête !
Ce fut Nicolas qui rompit le chant bruxellois. Il sortit dans un grand bruit que nous comprîmes quand le contenu d’une des étagères de la salle de bains s’effondra derrière lui dans un fracas de bougies éventrées.
-Oh merde je crois que j’ai tout cassé, là.
-T’auras la fessée, rebondit Mélanie.
Je hoquetai nerveusement à son sens de la répartie. Nicolas était bien bâti, quoi que peu musclé. C’était avant tout une carrure large, un torse bien dessiné. Ses mollets engageants témoignaient d’une pratique visiblement assidue du vélo ou de quel que sport qui fournisse les mêmes résultats. L’amour du chocolat et la haine des travaux sur les obliques et les grands droits avaient dessiné une petite bouée naissante autour de sa taille, dans des proportions raisonnables. Moi qui n’ai jamais aimé les photos des rugbymen bodybuildés, je persévérai à le trouver touchant, y compris dans sa nudité imparfaite.
Nicolas n’insista pas et s’installa gauchement sur la table, sur le ventre, en se tortillant pour placer l’air de rien les détails de son anatomie. J’avais envie de rire. Là où Pascal avait dégagé une assurance évidente, Nico envoyait des signaux tout à fait opposés, qui le rendaient paradoxalement très humain. Par souci d’éviter de démarrer en fou-rire le body body promis, je m’empêchai de regarder Mélanie et attendis que le service trois-pièces de Nicolas eût trouvé une position confortable, tout en fixant par la fenêtre la neige qui s’était mise à tomber.
-Je suis (…)
Au suivant !
-(…) à vous !
Mélanie ouvrit son peignoir et l’enleva. Je fis de même et lui tendis le mien. Les deux satins noirs achevèrent leur rôle ornemental sur le canapé. Gisant sur la table dans l’attente fiévreuse d’un moment lubrique, Nico se retrouva entre une brune nue et une blonde au postérieur moulé dans un shorty de dentelle bleue marine.
Visiblement habituée à cet énergumène monté sur ressorts, Mélanie posa ses mains huilées bien ouvertes de part et d’autre de la colonne vertébrale enfin immobile, inspira et souffla bruyamment comme pour provoquer un mimétisme et apaiser le stress que nous sentions elle et moi. Sans même se rendre compte qu’Alessia tenait la télécommande, Nico respira un grand coup. Bien joué Mél ! Elle prit sa voix la plus douce, à la limite du perceptible sous l’épouvantable joueur de flûte.
-On ne pense plus à rien… on se détend.
Le massage commença.
Le début fut une réplique du massage de Pascal. Je compris assez vite que le quart d’heure surnuméraire serait celui du « body body » à proprement parler. Je me posai toutefois la question de savoir ce que l’on pouvait bien masser, et qui ne l’avait pas déjà été chez Pascal, dans un massage d’une heure sans option « body ». Le moment de remplacer Mélanie interrompit ma rêverie.
Je posai à mon tour les mains sur une peau très douce et répétai les gestes que j’avais réussis tout à l’heure. Contrairement à son prédécesseur, Nicolas
Au suivant !
ne parla pas, sans que je ne susse s’il était dans un jour timide, si la double présence féminine le mettait sur la défensive, ou si c’était simplement ainsi aujourd’hui. Pour autant, je ressentis quelque chose de très positif, comme une sorte d’apaisement mutuel, d’échange de sensations à travers le contact entre mes mains et sa peau, et vécus ce début de massage comme un vrai partage, bien davantage qu’avec Pascal. Une nouvelle fois, parler n’était pas si important. J’eus presque envie de fermer les yeux pour me concentrer mieux encore sur les seuls stimuli qui me parvenaient de mon cobaye. Je n’avais jamais été une grande adepte des massages, et je découvrais un univers qui me plaisait, me correspondait, bien au-delà de l’aspect sexuel qui attendait l’homme dont j’étais en train de prendre le plus grand soin. J’espérai intérieurement que les clients de Mélanie, celui-ci en particulier, savaient apprécier la partie sage du massage et ne la prenaient pas uniquement pour l’antichambre de l’orgasme attendu.
Sans m’en rendre compte, j’étais repartie dans mes songes et massai nuque, crâne, tempes, épaules, dos, fesses, jambes, en tournant autour de la table sous le regard d’une Mélanie que je ne calculais même plus, et qui me laissait faire, preuve implicite que j’étais à la hauteur. Quand elle m’interrompit, ce fut pour le cours d’aérobic.
Je me reculai afin de l’observer. Elle commença par remettre de l’huile sur le dos de Nicolas, puis s’en étala sur la poitrine dans un mouvement qu’elle expédia sans se rendre compte de son incroyable portée érotique. Elle prit appui sur un marchepied situé sous la table, posa un genou sur la serviette, entre le mollet droit de Nicolas et le bord de la table, qu’elle agrippa des deux mains, et se hissa. Son deuxième genou atterrit symétriquement au premier de sorte qu’elle tenait littéralement Nicolas entre ses jambes. Ses paumes glissèrent sur la partie de la table non couverte par la serviette, et elle se retrouva en appui au-dessus de lui. Nicolas avait placé ses deux mains de part et d’autre de sa tête, son visage étant enfoui dans le trou prévu à cet effet. Elle lui susurra à l’oreille de les écarter légèrement, et elle posa alors les siennes dessus. Elle descendit doucement, et ses deux seins luisants vinrent caresser le dos du bienheureux. Sa bouche était restée près de l’oreille consentante.
-Ça se passe bien, Nicolas ?
-Mmmh quel bonheur…
Nous prîmes cette réponse pour un oui.
Mélanie était arrimée à la table, ses mains et ses genoux jouant le rôle d’amarres. C’est son bassin qui lui permettait de parcourir la totalité du dos avec sa poitrine, variant les pressions et le rythme des mouvements. Selon les positions, ses seins s’écrasaient sur Nicolas, glissaient jusqu’au bas de son dos, ou au contraire elle se cambrait pour remonter vers le haut, et c’est alors son sexe nu qui effleurait les contreforts des fesses de Nicolas, sa toison caressant à son tour les zones érogènes. J’étais impressionnée à plus d’un titre. Non seulement elle réalisait la chose parfaitement ce qui, physiquement, était loin d’être facile. Mais elle donnait vraiment une leçon de sensualité. Les hommes qui passaient ainsi sous la poitrine généreuse de Mélanie ne s’en rendraient jamais compte, mais la scène était envoûtante à regarder. Son corps se cambrait dans des postures à l’érotisme graphique, et la musculature affleurait sous la peau luisante. Elle était belle. Intensément belle. Dans les dernières positions, ses fesses remontèrent si haut et de façon si arquée que je devinai son sexe s’entrouvrir. Je détournai les yeux de ces deux lèvres dont Nicolas devait être en train de rêver qu’il en goutait le petit bouton d’or que j’avais malgré moi aperçu.
Elle redescendit d’un saut maîtrisé. Légèrement essoufflée, et m’invita à répéter l’opération.
-A toi.
-Nicolas, je me lance. Merci d’être tolérant.
J’ôtai les escarpins et grimpai à mon tour, essayant à tort de copier la façon dont Mélanie s’y était prise. Erreur : nos quinze centimètres de différence excluaient que les appuis fonctionnassent aux mêmes endroits. Je redescendis de la table sans avoir cherché à y rester après cette première tentative infructueuse. Mélanie ne paniqua pas, moi non plus. Je me souvins de mes douze années de souffrance à la danse classique, pris mon élan sur le marchepied et donnai un coup de rein. Mes pieds arrivèrent sur le bord de la table tandis que je basculai vers l’avant, mes mains venant retenir ma chute en se positionnant exactement là où je l’avais voulu. « Léa championne olympique » rigolai-je intérieurement. Je descendis les genoux pour être stable, ce qui me releva les fesses et me cambra. J’imaginai la scène en me demandant si j’étais aussi gracieuse que Mélanie deux minutes plus tôt. Mes seins étaient au bas de son dos, quasiment contre ses fesses. Je n’avais plus qu’à pousser sur mes genoux, tout en me tirant en avant grâce aux avants bras, pour coulisser contre Nicolas. Je me rendis alors compte de mes deux oublis. Même si je pouvais le faire, puisque je n’étais pas Jane Birkin, la différence de volume mammaire entre Mélanie et moi m’obligeait à me cambrer davantage pour que mes seins pussent descendre suffisamment bas et que le contact charnel se fît. Je le sentirais plus tard dans le bas de mon dos. D’autre part, j’avais oublié de m’enduire d’huile. Heureusement, la double dose reçue par Nicolas suffit à éviter tout frottement désagréable, et je me vis glisser, tétons en avant, sur un dos masculin, un peu comme spectatrice de ma propre folie. J’exécutai quelques mouvements d’avant en arrière, puis de rotation. Je compris ce que Mélanie avait voulu dire quant à l’aspect bien plus stimulant d’un tel moment. Je me demandai de combien de temps il suffirait pour que, frottés ainsi langoureusement contre un dos lubrifié, mes tétons ne durcissent et que mon cerveau ne commence à lâcher ses salves de dopamine, d’ocytocine et de vasopressine…
Pour terminer ce premier round, je me laissai doucement glisser vers l’avant, recouvrant Nicolas de tout mon corps. Mes mains vinrent se placer par-dessus les siennes, et je sentis ses doigts caresser les miens dans un geste de tendresse que je trouvai plus émouvant que les solides érections qui allaient suivre. Les deux seins écrasés contre lui, je soufflai à son oreille, d’une voix digne de celles qui faillirent perdre Ulysse.
-Il va être l’heure de se retourner, Nicolas.
Je me redressai et sautai de la table, atterrissant pieds nus sur le tapis. Je restai ainsi sans chercher à remettre mes talons hauts. Revenant péniblement de sa béatitude, Nicolas dut fournir un effort pour recouvrer ses esprits et sa capacité à réaliser un demi-tour sur lui-même. Dès qu’il fut allongé sur le dos, je vis son sexe, gonflé et tendu. Il n’y avait eu aucun contact direct entre le pénis et nos mains, contrairement au premier massage, où l’érection avait été provoquée directement à l’endroit du crime. Là, Nicolas s’était mis à bander sans que je m’en fusse aperçu.
Les idées se chevauchèrent dans mon cerveau. Il était bien membré. Au-dessus de la moyenne. Pas de façon extravagante, mais au-dessus quand même. Ce tronc fier accusait une très légère courbure vers la gauche. Rien qui empêchait la chose de pénétrer … de pénétrer … Léa calme-toi… de pénétrer une femme … d’ailleurs, un sexe ainsi proportionné, avec cette petite déviation… quelles sensations cela pouvait-il bien donner … Léa calme-toi… pouvait-il bien donner une fois dans … dans … dans un (mon) sexe de femme (à moi)… Léa calme-toi… est-ce qu’on sentait cette courbure frotter en des endroits inexplorables par les sexes droits ? Léa calme-toi…
Je reculai et laissai Mélanie débuter le massage côté pile. Je ramassai la bouteille de Perrier et bus deux gorgées qui vinrent rafraichir bien davantage que mon gosier. J’entendis Mélanie se transformer en Alessia et reprendre sa voix d’actrice.
-Tu es dans un état, Nicolas, c’est absolument indécent.
-Je suis démasqué.
-Je me demande bien ce que nous allons pouvoir faire avec ça.
Cette fille continuait de me faire rire, même en face d’un mec en érection imbibé d’huile jusqu’à la saturation. Elle tourna autour de la table, et se chargea de cette deuxième partie du massage. Sans-doute avait-elle senti mon besoin de prendre du recul. L’excitation étant à son comble dans son bas-ventre, Nicolas commença à avoir les mains baladeuses. Elles se posèrent sur les fesses de Mélanie, puis cherchèrent ses seins, ses cuisses… ce n’étaient que des caresses. Aucun geste brusque ou invasif à l’horizon. Cela me rassura.
Mélanie assura le job, mais il était évident qu’arrivé à ce stade, le massage n’avait plus rien de neutre. Chaque mouvement avait une connotation sexuelle : soit elle effleurait le membre raidi, soit Nicolas profitait de sa proximité pour caresser le corps de sa belle masseuse… Enfin, Mélanie entama pour la deuxième fois son manège acrobatique et se retrouva dans la position de tout à l’heure, à l’énorme différence près que cette fois-ci elle surplombait le ventre et le visage d’un Nicolas hébété de plaisir, dont les mains glissaient avec délectation sur son dos, ses fesses, accrochant un sein au passage, tandis que les deux magnifiques mamelles glissaient et lui pétrissaient ventre, poitrine, menton, bouche et visage.
Ce fut alors à moi de revenir dans la partie. Remise de mes émotions, je grimpai à nouveau sur la table et démarrai par une glissade complète de ma poitrine qui couvrit le trajet de son nombril à la base de son cou. Je m’arrêtai un instant à la fin de ce mouvement. Je sentais son sexe dur contre le haut de ma cuisse droite. Mon visage était à deux centimètres du sien, et nos quatre yeux bleus s’étaient trouvés. Je cherchai à dire quelque chose pour rompre le silence qui me troublait. C’est Nicolas qui le brisa, avec un sens de la politesse qui, compte tenu du tableau que nous étions en train de dessiner, le rendit de plus en plus attendrissant.
-Je peux ? demanda-t-il d’une petite voix en approchant ses mains de mon dos.
-C’est demandé si gentiment, répondis-je en lui souriant.
Je sentis deux mains brûlantes se poser dans le creux de mes reins et entamer une caresse qui se voulait sage. Je renouai avec le mouvement et descendis mes seins doucement contre son torse. Mes tétons passèrent sur les siens. Sans qu’elles eussent besoin de bouger, ses mains glissèrent donc elles-aussi jusqu’à ma nuque. Il caressa furtivement mes cheveux, passant dans les ondulations blondes, effleurant ma joue d’un revers de l’index. Cet homme était une bulle de tendresse. Je tirai sur mes avant-bras afin que mes genoux se déplaçassent vers le milieu de la table, avançant délibérément vers Nicolas pour installer une position différente. Je m’accroupis sur lui, mes fesses gainées de dentelle bleue frottant par derrière le phallus dressé. Je voyais son torse se soulever et se creuser dans des mouvements respiratoires en pleine accélération. Je bougeai mes fesses de façon à solliciter le membre qui palpitait dans mon dos. Oubliant enfin les bienséances inutiles, la main droite de Nicolas prit mon sein gauche tandis que l’autre se posa sur ma cuisse droite. Le pouce concerné caressa mon mamelon. Je passai une main dans mon dos et sans même regarder, décalottai le pénis prometteur d’un geste lent. Des ondes sismiques parcouraient le corps de Nicolas qui ferma les yeux quand le plaisir monta.
Magnitude 1
Je jetai un regard à Mélanie, surprise par cette initiative.
-A toi, dis-je en faisant rouler mes pupilles vers l’arrière.
Mélanie comprit mon idée et se nappa les mains d’huiles. Elle passa dans mon dos. Je mis une main sur le ventre de Nicolas, sans trop appuyer, juste pour marquer une présence.
Magnitude 2
Quand Mélanie entama la finition, les caresses du tendre garçon que je tenais prisonnier entre mes cuisses fuselées se firent plus osées. Le pouce ostentatoire jouait désormais avec mon téton gauche, et la main libre se baladait un peu partout sur mon corps sans trop s’avoir où poser ses bagages. Choisir étant renoncer, elle n’y parvenait pas.
Magnitude 3
Pour conserver un lien dans le moment ultime, je me penchai vers l’avant, ma poitrine étendue sur la sienne, nos visages se touchant presque.
Magnitude 4
Je collai ma joue gauche contre sa joue droite et glissai à son oreille :
-Laisse-toi aller, Nico…
Je sentis des frissons en provenance de son corps martyrisé.
Magnitude 5
Il passa ses bras autour de moi, sans recherche de caresse ou de geste sexué. Il m’étreignit simplement, donnant encore de la tendresse en lieu et place de la luxure que j’eusse comprise.
Magnitude 6
M’étant penchée en avant, je ne sentais plus son sexe contre mes fesses mais les vibrations qui provenaient de derrière moi témoignaient de façon fort explicite de l’activité à laquelle Mélanie s’adonnait.
Sur l’échelle de Richter, nous ne cessions de monter.
Magnitude 7
Nico resserra son étreinte, le nez enfoui dans mon cou.
Magnitude 8.
Son haleine condensait sur la peau de ma nuque que je sentis humide, et ses doigts appuyèrent dans mon dos, dessinant chacune de mes vertèbres.
Magnitude 9
-Lâche prise, Nico, lâche…
Magnitude 10
Au moment où Mélanie ralentit son action sur la faille de San Andreas, je sentis la bouche de Nicolas se refermer en un baiser qu’il déposa dans mon cou, sans même s’en rendre compte, l’ensemble de sa conscience étant dirigée vers l’éjaculation qui inondait les mains de celle qui en était la cause. Nicolas m’avait embrassée en jouissant ! Il resta figé comme un mime pendant les quelques secondes de plateau du plaisir masculin, puis je sentis son étreinte se desserrer, la respiration reprendre, et je pus me redresser. J’enjambai le soldat à terre pour redescendre de la table, et profitai du spectacle. Mélanie poursuivait de très légères caresses sur le corps mou du pénis qui avait livré sa bataille, les mains dégoulinantes de sperme. Quand elle estima qu’elle ne pouvait plus rien pour sauver le guerrier, elle se retira et essuya ses mains, puis les cuisses de Nicolas, à l’aide de mouchoirs en papiers. Je posai ma main sur son avant-bras.
-Tout va bien, Nicolas ?
C’est un hochement de tête qui me répondit par l’affirmative.
Mélanie eut le bon réflexe.
-On te laisse souffler un instant, d’accord ?
Elle m’entraina dans la salle de bains où nous pûmes nous laver les mains.
-T’es incroyablement souple, me dit-elle à voix basse.
-Ah bon ?
-Oui ! Tu ne te rends pas compte comme tu montes et bouges facilement là-haut, et comme tu y es à l’aise pour changer de position.
-C’est naturel.
-D’où ma remarque.
Je souris, ravie de l’effet produit et de m’en être bien tirée.
Nous ressortîmes de la salle d’eau au moment où Nicolas se levai péniblement, titubant, le sexe fripé, attrapant la serviette qu’il avait utilisée pour sa première douche.
-Tu peux en prendre une sèche sur les étagères, tu sais, intervint Mélanie.
-D’accord.
Il disparut dans la salle d’eau, emportant avec lui la serviette humide.
Tout nu dans ma serviette
Qui me servait de pagne
J’avais le rouge au front
Et le savon à la main
-En tout cas j’ai plus rien à t’apprendre continua Mélanie, imperturbable. Maintenant la balle est dans ton camp. Mais ne décide rien maintenant. Tu vas voir, tu vas passer par de sacrés hauts et de sacrés bas dans les jours qui viennent.
Jamais une parole n’aura aussi bien décrit par anticipation les deux journées et nuits cauchemardesques que je vécus dans la foulée de cette expérience inédite de moins de deux heures qui, une fois le partage effectué, me rapporta cent-dix euros, c’est-à-dire l’équivalent de presque quatre soirées complètes pour faire manger, chanter et dormir Jules.
Mais qui tarauda mon esprit jusqu’à l’obsession dans des proportions que je n’avais pas soupçonnées possibles.
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