L’écurie était toujours plongée dans l’obscurité mais Guigues était réveillé depuis un bon moment. Allongé sur la paille, il écoutait la respiration régulière de Jean dormant à côté de lui.
Sa joue le brûlait et il ne cassait de poser sa main froide dessus dans une tentative veine de diminuer la douleur. Mais plus que sa joue, c’était le souvenir cuisant de la gifle qu’il avait reçu la veille au soir qui le tourmentait. Il n’arrivait pas à comprendre pourquoi Lucie avait réagi ainsi. N’avait elle pas entendu la façon dont Reuel lui parlait ? Attendait elle de lui qu’il se laisse faire sans rien dire et se laisse insulter ouvertement ? Il n’en était pas question, mais bizarrement Guigues ne ressentait aucune colère envers Lucie. Il avait été très surpris par son geste, tellement surpris qu’il était resté planté la à la regarder. Ce n’était pas la première personne a lever la main sur lui, durant toute sa vie ses parents et ses frères s’en étaient donné à cœur joie. Mais cette fois ci, c’était différent. Il avait bien senti que Lucie n’en avait tiré aucune satisfaction et qu’elle essayait de le faire réagir. La ou les coups de sa famille provoquaient habituellement chez lui colère et haine, ici il se sentit envahi par un sentiment tout nouveau pour lui, la culpabilité. C’était de sa faute si Lucie avait perdu les pédales, c’était son comportement qui l’avait poussée à bout. Une chose était sur, il devait changer radicalement sa manière de parler aux autres ou il perdrait Lucie, ce qu’il ne pouvait tolérer.
Les autres commencèrent à s’activer autour de lui et à préparer un petit déjeuner de fortune. Du coin de l’œil, il aperçut Lucie rejoindre Reuel, Rafael et Roland qui étaient déjà en train de manger. Pierre était la aussi, pratiquement remis sur pied, il se tenait debout adossé contre un mur et semblait pensif. Guigues se mit sur son séant et réveilla Jean en le secouant doucement.
- Ha je suis le dernier levé, marmonna-t-il encore endormi.
Ensemble, ils allèrent rejoindre les autres et s’assirent à leur tour pour déjeuner. A peine assis, Guigues comprit que les événements de la veille étaient toujours bien présent dans les esprits. Personne ne parlait, Reuel semblait encore plus froid et distant que jamais et il ignora complètement la présence de Guigues. Visiblement, Lucie aussi était toujours en colère contre lui et elle mangeait son pain en silence, les sourcils froncés et les poings serrés. Guigues n’avait pas beaucoup d’appétit, mais il se força à avaler quelque chose en vue de la longue journée qui l’attendait. Alors que tout le déjeunait en silence, Pierre prit la parole d’une voix incertaine :
- Alors vous allez vraiment me laisser partir maintenant ?
- Tu peux partir tout de suite si tu le souhaite, répondit Rafael avec un grand sourire. Mais avant j’ai une question à te poser.
Tout les autres tournèrent la tête vers lui d’un air intrigué. Guigues aussi était curieux, quelle question bizarre allait bien pouvoir poser Rafael ? Celui-ci garda ses yeux étincelants fixés sur Pierre et demanda avec enthousiasme :
- Quel est ton plus grand rêve ?
Les yeux de Pierre s’agrandirent à la question de Rafael et il resta silencieux. Il réfléchit un moment, les sourcils froncés par la concentration et finalement l’air un peu gêné il finit par répondre :
- Mon rêve est d’amener ma famille loin d’ici. Je veux retourner dans mon village natal avec ma femme et mes deux fils pour devenir pêcheur, comme mon père avant moi et son père avant lui. Oui, je veux leur offrir une vie simple et paisible, c’est mon plus grand souhait.
A ces mots Rafael sourit encore plus largement, il semblait très content de la réponse de Pierre :
- Je veux t’aider à réaliser ce rêve. J’aimerais qu’en partant d’ici tu prennes avec toi la charrette et les chevaux. Tu pourras amener ta famille dans ton village. Nous allons nous servir dans le coffre d’or mais j’aimerais aussi que tu emporte le reste, cela te permettrait d’avoir une vie confortable.
- Mais pourquoi ? Tonna Roland incrédule. En plus de le laisser partir, on va donner de l’or à ce meurtrier ? Il a tué ma famille vous vous souvenez ? Et nous on va gentiment lui donner un coffre plein d’or pour le récompenser ?
Pierre regarda tour à tour Rafael et Roland avec des yeux exorbités comme si il n’arrivait pas à croire la scène qui se déroulait sous ses yeux. Guigues aussi était choqué, il ne saisissait pas pourquoi Rafael voulait venir en aide à leur ennemi. Rafael inclina la tête en direction de Roland avant de répondre :
- Je comprends ton point de vu Roland mais nous avons sauvé la vie de Pierre, autant l’aider jusqu’au bout maintenant. De plus le laisser partir avec la charrette et le coffre nous permettrait de nous en débarrasser. Il me paraît difficile de passer inaperçu avec un chariot rempli d’or.
- Je ne peux pas accepter ça, coupa Roland le visage déformé par la haine. Je ne peux pas c’est tout.
- Je propose un vote, dit calmement Reuel en replaçant ses longs cheveux blonds derrière son oreille.
- C’est une bonne idée, approuva Rafael en hochant la tête. Que ceux qui sont pour lève la main.
L’espace d’un instant personne ne bougea, chacun jetant un un œil à son voisin. Rafael leva la main en premier, bientôt imité par Jean et Lucie. Reuel leva la main à son tour en restant impassible comme si le vote ne le concernait pas. Guigues était partagé, il ne voulait pas donner tout cet or à Pierre. D’un autre côté, la majorité était déjà atteinte et sa voix ne changerait rien à l’issue du vote. Il croisa le regard de Roland qui était le seul avec lui à ne pas avoir levé la main, il baissa, la tête les poins serrés. Peut être qu’en levant la main Guigues pourrait se rattraper un peu aux yeux de Lucie. Il se décida et imita les autres qui avaient la main levée, mais à son grand désarroi Lucie l’ignora complètement.
- Bon c’est décidé, conclut joyeusement Rafael. On va t’aider à charger le chariot et tu pourras partir.
- Je suis désolé, murmura tristement Lucie en tapotant l’épaule de Roland. Je pense que c’était la meilleure chose à faire.
- Je comprends ne t’inquiètes pas, marmonna Roland qui de toute évidence avait du mal à accepter le résultat du vote.
Une fois le petit déjeuner terminé , tout le monde s’activa pour préparer le chariot. Lucie et Reuel amenèrent les chevaux dans la cour et les attelèrent à la charrette. Rafael Jean et Guigues y chargèrent le coffre de pièce d’or après en avoir pris suffisamment pour remplir une bourse à chacun des membres du groupe. Puis ils chargèrent aussi quelques sacs de vivres et aidèrent Pierre à grimper à la place du cocher.
Quand tout fut prêt, le jour était déjà levé et tout le monde se rassembla devant la charrette. Roland manquait à l’appel mais Guigues se doutait bien qu’il n’avait aucune envie de participer à ces adieux.
- Bon et bien bonne route, s’exclama Rafael qui paraissait toujours d’aussi bonne humeur.
- Je… Je n’oublierais jamais ce que vous avez fait pour moi, balbutia Pierre dont le visage trahissait l’émotion. Vous avez changé ma vie. Je ne pourrais jamais assez vous remercier, mais j’espère de tout cœur que nos chemins se recroiseront.
A ces mots et sans attendre de réponse Pierre détourna vivement la tête, les yeux embués de larmes. Pierre cingla les chevaux, la charrette quitta la cour et se perdit dans la ruelle.
Une fois Pierre partit, Rafael demanda à tout le monde de se rassembler dans l’écurie. Roland s’y trouvait, assis sur la paille, il semblait les attendre en examinant une épée qu’ils avaient pris au campement de la croisade noire.
- Ça y est, il est partit ? Demanda-t-il d’un ton bourru. Bon débarras.
- Justement, maintenant que Pierre n’est plus la on va pouvoir parler plus librement, déclara Rafael les yeux brillants d’excitation. Comme vous l’avez sûrement compris je pense que l’évêque Orlando est lié à la Rage noire d’une manière ou d’une autre.
- Il va falloir en être sur avant de s’attaquer à lui, remarqua Jean. L’église est très puissante, sûrement plus que la royauté. En plus avec l’a croisade noire sous sa coupe, ça va être compliqué de l’atteindre.
- J’en suis presque certain, répondit Rafael l’air surexcité. Pierre nous a raconté que l’évêque était réapparu juste avant le début de l’épidémie et qu’il avait complètement changé de personnalité à son retour. Comment quelqu’un peut il devenir un tyran cruel en moins de deux semaines alors qu’avant c’était quelqu’un de doux et gentil ? Ça ne vous met pas la puce à l’oreille ?
Guigues ne comprenait pas ou Rafael voulait en venir. Il est vrai que le changement d’attitude de l’évêque était pour le moins bizarre mais il ne voyait pas quel rapport il pouvait y avoir avec la Rage noire. Visiblement Jean et Lucie ne comprenaient pas plus que lui et Roland continuait d’examiner les armes sans leur prêter attention.
- Je suis prêt à parier que ce n’est pas la même personne, reprit Rafael. Soit l’évêque Orlando a bel et bien disparu et quelqu’un a pris son apparence et se fait passer pour lui. Soit c’est bien lui mais je ne sais par quel moyen quelqu’un a pris possession de son corps et de son esprit.
- C’est impossible, marmonna Lucie qui semblait plus pâle qu’a l’ordinaire.
- C’est ce que je pense aussi, approuva Jean d’un ton grave. D’un autre coté cela expliquerait le comportement de l’évêque et sa potentielle implication dans l’épidémie de Rage noire.
- Alors il ne nous reste plus qu’a arpenter la ville pour trouver des réponses à nos question ? Demanda Guigues d’une voix la plus neutre possible pour essayer de se faire bien voire par Lucie.
- C’est exact, répondit Rafael. Je propose de faire des binômes, on sera plus efficace. Comment voulez vous vous répartir ?
- Je vais avec Guigues, lança Jean en souriant. Sans moi il est capable de tout et n’importe quoi.
Guigues ne releva même pas la plaisanterie de Jean. Il était bien trop content que Jean se propose d’aller avec lui. Après les événements de la veille, il avait eu peur que lui aussi cesse de lui adresser la parole.
- Lucie j’aimerais que tu m’accompagnes si tu es d’accord, proposa gaiement Rafael.
Guigues du réprimer un rictus à l’idée que Lucie se promène avec quelqu’un d’autre que lui dans les rues de Fort-Des-Tombes. Il aurait préféré qu’elle fasse équipe avec Roland la au moins il n’aurait pas eu à s’inquiéter. Lucie jeta un regard interrogateur en direction de Roland qui lui répondit en hochant la tête :
- C’est bon, j’irais avec Reuel.
- Alors c’est décidé, dit Rafael qui paraissait réjoui. Je vais vous donner à chacun une bourse remplie d’or, mais restez discret. Il n’est pas questions d‘attirer l’attention en dépensant sans compter ou en posant des question trop directs.
Rafael lança un regard appuyé vers Guigues, ce qui l’irrita énormément mais il ne laissa rien paraître. Rafael et Jean distribuèrent les bourses d’or et Guigues reçu la sienne avec une grande excitation. Il avait été pauvre toute sa vie et cette bourse représentait à elle seule plus d’argent que toute sa famille réuni n’en avait jamais eu. Il la rangea avec précaution dans sa tunique et vérifia plusieurs fois qu’elle était bien à sa place en sécurité.
- Rendez vous ici à la tombée du jour, dit gravement Reuel. Il est trop dangereux de se promener la nuit. Trop de gardes. Et ce soir, première leçon de maniement des armes.
Roland eu l’air d’accueillir la nouvelle avec enthousiasme ce qui ne fut pas le cas de Guigues. Il redoutait de se retrouver une arme à la main, tétanisé devant tout les autres. Particulièrement quand le professeur était Reuel qui lui inspirait une grande terreur et un profond dégoût.
- Bon, si tout le monde est prêt on peut y aller, annonça Rafael. A ce soir et soyer prudents !
Guigues et Jean parcoururent les rues de Fort-Des-Tombes durant toute la matinée sous un magnifique ciel bleu. Guigues était vraiment heureux que Jean ne soit pas fâché contre lui et ils cheminèrent à travers la ville comme ils avaient l’habitude de le faire au village d’Oulmes.
Tout d’abord, ils tentèrent leurs chance dans plusieurs auberges. Ils commandaient de la bière en se mettant à proximité d’une table déjà occupée dans l’espoir d’entendre les conversations des clients. Malheureusement, ils n’apprirent rien d’intéressant et après trois auberges, Jean trouvera préférable d’essayer d’autres endroits et Guigues dont l’alcool faisait tourner la tête ne put qu’être d’accord avec lui.
Ils tombèrent sur une petite place avec une église sur laquelle se trouvait un puits. Guigues se passa la tête sous l’eau pour se rafraîchir les idées et ils en profitèrent pour remplir leur gourdes de cuir. Ils entrèrent dans l’église ou quelques personnes se recueillaient silencieusement sur les bancs de bois. Jean les imita et ferma les yeux un moment pendant lequel Guigues observa attentivement autour de lui. L’église était simple, des bancs en bois , un autel avec derrière Jésus sur la croix. Guigues nota tout de même ici et la des étendards avec un blason qu’il ne connaissait pas. Ils étaient d’un blanc immaculé, et au milieu se dressait une croix d’argent entourée de flammes rougeâtres s’entremêlant dans un cercle parfait.
Guigues attendit patiemment que Jean sorte de sa liturgie et quand ce dernier ouvrit les yeux, Guigues lui montra discrètement les étendards :
- T’as vu ça, j’ai jamais vu ce symbole nul part. Tu le connais ?
- C’est vrai que c’est étrange, répondit Jean l’air décontenancé. Je suis étonné que les prêtres aient donné leur accord pour placarder ça à l’intérieur d’un lieu saint.
- Ils ont peut être pas eu leur mots à dire,répondit Guigues en observant les vitraux qui étincelaient de mille feux et qui propageaient partout la lumière du dehors.
- Va m’attendre devant, je vais interroger le curé, dit Jean en se levant.
Guigues sortit et s’assit sur les marches de l’église. Depuis son arrivé à Fort-Des-Tombes, il était émerveillé par tout ce qui l’entourait. Il n’avait pratiquement jamais quitté son village natal et les seules fois ou il l’avait fait c’était pour se rendre dans des villages proches du sien. Fort-Des-Tombes était la première ville qu’il visitait et tout ici lui paraissait démesuré. Tout était en pierre, les pavés, les bâtiments et les maisons qu’il voyait à perte de vue, toutes ces innombrables maisons collées les une aux autres. Il avait hâte de s’approcher de la cathédrale dont il voyait le clocher dominer la ville peu importe l’endroit ou il se trouvait. Jamais il n’avait vu une construction aussi haute ce qui lui donnait le tournis et l’impression d’être minuscule.
Les gens aussi étaient complètement différents. Jean lui avait expliqué qu’en temps normal, les rues d’une ville était bondées du soir au matin mais qu’ici au vu de la situation il n’y avait pratiquement personne dans les rues.
Jean finit par sortir de l’église, il semblait contrarié et pensif.
- Alors t’as appris quelque chose ? demanda Guigues avec curiosité.
- Oui beaucoup même, répondit Jean en s’asseyant à ses côtés.Il y a eu de profonds changements au sein de l’église. Le curé vient de m’expliquer que depuis le début de l’épidémie, un nouveau courant de pensée est né et qu’il a très vite pris de l’ampleur. Ses adeptes se font appeler l'ordre du feu et Orlando en fait partie. Apparemment, ils sont persuadés que la Rage noire est une épreuve envoyée par Dieu pour purifier l’humanité de ses péchés. Pour eux, Dieu désigne certaines personne en les contaminant et leurs missions et de massacrer ceux marqués par la Rage noire.
- Mais le rôle de l’église n’est il pas de guider les hommes vers la paix ? Questionna Guigues perplexe. Enfin ce n’est pas ce que tu m’a appris ?
- Si tu as raison, approuva Jean d’un ton catégorique. C’est bien ça qui me chiffonne. Il paraît que l'ordre du feu est trés présent dans les hautes sphères de l’église. Mais je ne peux m’empêcher de voir cette façon de penser comme une corruption qui gangrène la vrai foi.
Guigues ne saisissait pas tout les concepts de la foi car il ne croyait pas lui même. Bien souvent Jean essayait de l’éclairer sur des question théologiques mais il avait du mal à tout retenir. Néanmoins il vit que Jean était très perturbé par la nouvelle et il lui proposa gentiment :
- Viens on va trouver quelque chose à manger et on parlera de tout ça avec Rafael ce soir.
Jean acquiesça d’un signe de tête et ils reprirent leur route. L’après midi fut chaud et étouffant et c’est sans avoir rien appris de plus qu’ils rentrèrent à l’auberge rejoindre les autres un peu avant la nuit.
Jean raconta au groupe ce qu’ils avaient appris sur l'ordre du feu et sur le fait que l’évêque Orlando en faisait parti. La nouvelle sembla beaucoup intéressé Rafael bien qu’il ne fit qu’écouter Jean sans intervenir. Avant le dîner, Reuel leur donna leur première leçon de maniement des armes et comme Guigues l’avait redouté, il était particulièrement mauvais. Roland et Lucie se débrouillaient plutôt bien et même si Jean avait plus de difficultés, il restait de loin meilleur que lui. Guigues écourta la séance et partit se coucher honteux, écœuré par sa propre faiblesse.
Les jours suivants furent long et ennuyeux. La chaleur suffocante n’arrangeait rien et les rues de Fort-Des-Tombes restaient inexorablement vides. Guigues et Jean déambulaient en suant à grosses gouttes et s’arrêtaient toute les deux heures pour profiter de la fraîche obscurité d’une église ou de boissons rafraîchissantes d’une taverne. Ils ne croisaient guère de monde et ne dégottèrent aucune information utile. Leur compagnons n’avait apparemment pas plus de chance qu’eux et le soir du quatrième jour après le départ de Pierre, l’ambiance du repas dans l’écurie fut triste et pesante. Guigues avait complètement abandonné le maniement de l’épée et se contentait de regarder les autres s’entraîner, rongé par l’envie et une haine toujours plus grande envers leur professeur.
Le lendemain Guigues et Jean repartirent encore une fois à la recherche d’informations et empruntèrent les rues qu’ils commençaient à connaître par cœur. Après une nouvelle matinée brûlante et infructueuse, ils décidèrent de se rafraîchir dans une auberge qu’ils n’avaient pas encore visitée.
L’endroit était presque vide mais il y avait une petite dizaine de clients, ce qui représentait déjà plus de monde que dans toutes celles qu’ils avaient découverte jusqu’ici. Il faisait frais à l’intérieur, Jean commanda deux verres de bières puis il allèrent s’installer discrètement prés d’une table déjà occupée. Ils firent semblant de boire en essayant d’écouter la conversation de la table voisine mais comme d’habitude ils n’apprirent rien d’intéressant.
Guigues commençait sérieusement à en avoir marre de passer ses journées à traîner sur les pavés de la ville transformés en pierre incandescente par un soleil de plomb. Il se désintéressa complètement de la table voisine et malgré un regard réprobateur de la part de Jean, il s’enfonça confortablement dans sa chaise et ferma les yeux quelques instants.
Soudain la porte de la taverne s’ouvrit à la volée, laissant entrer quatre soldats portant le blason de la croisade noire sur leur tuniques. Guigues s’était habitué à croiser des groupes de gardes faisant des rondes dans les rues, mais c’était la première fois qu’il en voyait un dans une auberge. Les gardes se dirigèrent vers une table et prirent place bruyamment, puis l’un d’eux, un grand blond au regard mauvais se tourna vers le comptoir :
- Tavernier ! Quatre bières et que ça saute !
- Quelle chaleur à crever, grogna un autre soldat à la barbe grisonnante.
Dans l’auberge l’atmosphère avait changée en l’espace de quelques secondes, les conversations s’étaient tues et chacun semblait retenir son souffle pour ne pas attirer l’attention des soldats. Guigues lança un regard inquiet vers Jean qui lui fit signe de se taire et de regarder son verre.
Le tavernier, un petit homme chauve à l’air malingre, apporta leur bières aux quatre hommes en accourant presque. Il déposa les verres sur la table et alors qu’il s’apprêtait à repartir après une courbette, le grand blond lui posa une main sur l’épaule et le retint :
- Ola, pas si vite. Tant qu’on est la on a quelques questions à te poser.
- Des… Des questions, balbutia l’aubergiste d’une voix mal assurée.
- Trois fois rien, ne vous inquiétez pas monsieur, le rassura le soldat grisonnant avec un sourire encourageant.
- T’es pas drôle Tom, on peut même plus se faire plaisir de temps en temps, s’exclama le grand blond visiblement déçu.
- Je pense que les gens sont assez effrayés sans qu’on s’amuse en plus à les tourmenter, répondit l’autre sur un ton plein de reproches.
- Un vrai rabat-joie!
- Bon on a pas toute la journée, intervint un troisième soldat aux cheveux bruns et au visage dur. Monsieur, nous recherchons activement une sorcière qui se cacherait ici à Fort-Des-Tombes. Elle est accusée d’avoir tenté de jeter un sort à notre cher évêque Orlando. Un tel acte ne peux rester impuni. Avez vous entendu parler de cette sorcière ?
- Oui bien sur comme chacun des habitants de cette ville, répondit l’aubergiste qui paraissait un peu rassuré. Mais je n’ai jamais vraiment pris ces rumeurs au sérieux.
- Et bien c’est très sérieux, coupa le grand blond d’un ton sec. Une fois qu’on l’aura attrapée, elle aura droit au bûcher devant la cathédrale. J’ai hâte de voir ça.
Le soldat grisonnant termina son verre, se leva et dit poliment au tavernier :
- Nous en avons fini monsieur. Ouvrez l’œil et sachez que chaque information qui aidera à la capture de la sorcière sera récompensée par l’évêque.
Les autres soldats l’imitèrent et se dirigèrent vers la porte mais avant de sortir le grand blond ajouta :
- On t’a à l’œil, si on apprend que la sorcière et passée par ici mais que tu nous a rien dit, on crama ta foutue auberge !
Il éclatât de rire et sortit, suivi par ses camarades. Un lourd silence s’abattit dans la pièce et Guigues sentit l’atmosphère se détendre un petit peu. A la table voisine, un homme roux aux chevaux bouclés et au visa marqué par l’alcool se racla bruyamment la gorge et cracha en direction de la porte.
- Tu es fou, s’exclama son voisin. Si quelqu’un te voit t’es bon pour la potence.
- Pff, m’en fou, répondit l’autre qui semblait très éméché. Quel ramassis de conneries. Tu vas me dire qu’ils sont réellement à la recherche d’ une sorcière ? Avec le nombre qu’ils sont, tu crois pas qu’ils auraient déjà pu mettre la main dessus ?
- Qu’est-ce que tu veux dire par la ? Questionna un autre de ses voisins qui portait un drôle de chapeau sur la tête.
- Que ces histoires de sorcière, c’est des foutaises ! Rugit l’homme au cheveux roux en postillonnant de la bière partout. C’est un prétexte pour pourvoir patrouiller dans les rues et contrôler la population.
- C’est vrai que c’est bizarre tout ça, commenta l’homme au chapeau. J’ai moi aussi entendu parler d’une sorcière, mais on dit qu’elle serait très veille et qu’elle viendrait en aide aux habitants.
- J’ai entendu la même chose, s’exclama le tavernier en s’approchant de la table. Mais si elle aussi vielle que ce qu’on dit, c’est étonnant que la croisade noire ne l’ai pas encore retrouvée.
- Ha vous voyez ! Beugla l’homme aux cheveux roux qui n’avait plus aucune retenue. Il se foutent de nous j’vous dis.
- Allez savoir, si c’est vraiment une sorcière, elle est capable de tout, lança un autre homme à la table en tirant sur une fine pipe de bois.
- Tu y crois toi? Questionna le tavernier en rapprochant une chaise pour s’asseoir.
- Je ne sais que croire, mais cela me paraît étrange que la croisade se mette en quatre si jamais il n’y a pas de réelle menace.
Un autre silence se fit et Guigues en profita pour se pencher vers Jean et lui demanda à voix basse :
- Ça peut nous être utile ?
- Sûrement, murmura Jean. Si nous trouvons la sorcière peut être aura-t-elle des informations à nous donner sur Orlando ou alors peut être a-t-elle un lien avec la Rage noire. Restons encore un peu.
Guigues acquiesça et se tourna de nouveau vers la table voisine ou la discussion avait repris de plus belle. L’homme au chapeau se querellait avec l’homme aux cheveux roux à grands renforts de gestes.
- Puisque je te dis qu’elle n’existe pas ! Tonna ce dernier en renversant la moitié de son verre.
- Mais ils ne peuvent pas courir après du vent ! S’exclama l’autre visiblement exaspéré. Les gars aidez moi à le raisonner.
- La sorcière existe, intervint alors un vieil homme qui était resté silencieux jusqu’ici. J’en ai la preuve.
L’homme était assis au bout de la table et n’avait fait qu’écouter les autres depuis le départ des soldats. Tout les visages se tournèrent vers lui d’un même mouvement.
- Vas-y, raconte Tristan, le pressa l’homme au chapeau de paille qui comme les autres, était suspendu à ses lèvres.
- Bon je sais pas trop si je devrais vous raconter ça mais tant pis, commença le dénommé Tristan. J’ai une cousine qui est mariée avec un couturier. Le type a son atelier sur la place de la petite église prés de la porte nord de la ville.
- Ha je le connais, c’est celui qui a un jambe boiteuse ! S’exclama l’homme au chapeau.
- Tout juste, acquiesça Tristan. Ensemble ils ont eu trois enfants et récemment la petite dernière est tombée malade. Elle a attrapée une mauvaise fièvre et elle n’arrivait plus à sortir du lit. Ma cousine était morte d’inquiétude et l’état de la petite ne faisait qu’empirer. Personne ne savait ce qu’elle avait et ma cousine a comprit très vite que si rien n’était fait, sa fille était condamnée. Ma cousine a couru les rues de Fort-Des-Tombes, désespérée, à la recherche d’une solution. Elle a fait tout les apothicaires de la ville, mais aucun ne semblait avoir de remède efficace au mal de sa fille. Personne ne pouvait l’aider et pendant que son mari veillait sur la petite, elle arpentait les rues en pleurant et en hurlant son malheur. Un soir, elle est rentrée chez elle et a trouvé sa fille mourante. J’étais la ce soir la, je suis allé la soutenir et j’ai veillé la petite avec elle. La fillette était très faible et n’allait probablement pas passer la nuit. Au milieu de la nuit, alors que je m’apprêtais à partir pour rentrer chez moi, le cœur gros, on a frappé à la porte. C’était elle, c’était la sorcière.
Un frémissement d’étonnement parcourut les occupants des tables autour du vieil homme. Mais très vite le silence retomba et l’homme reprit :
- Une très vielle femme toute rabougri, couverte d’un voile noir est entrée et à demander à voir la petite. Comment était elle au courant, comment savait elle ou trouver la maison ? Aucune idée. Néanmoins ma cousine désespérée, l’a conduite prés de l’enfant qui était d’une pâleur effrayante. Elle respirait à peine, mais la vielle femme s’est tout de même approchée et l’a examinée. Elle a sorti une fiole de sous son châle et en a fait boire le contenue à la petite. Après ça, elle a tout simplement quitté la maison sans rien ajouter. Croyez le ou non, le lendemain matin la petite a ouvert les yeux comme si rien ne s’était passé. Elle était guérie, toujours faible, mais bien guérie. La fièvre était tombée et elle mangeait avec appétit. Ma cousine était sur un nuage, persuadé d’avoir assisté à un miracle. Par la suite elle a longtemps cherché la sorcière pour la remercier, mais elle ne l’a jamais retrouvée.
Guigues avait écouté l’histoire de l’homme avec le plus grand intérêt et une excitation grandissante. Une sorcière pourrait peut être lui être utile pour se débarrasser de Reuel. Il imaginait déjà cet idiot se tordre de douleur à cause d’une potion ou d’un sort quelconque et cela lui procurait une joie sauvage.
Les hommes assis à la table voisine semblaient tous abasourdis par l’histoire de leur camarade. Mais le tavernier finit tout de même par rompre le silence :
- Alors elle existe !
- Aussi vrai que vous et moi, répondit l’autre d’un air grave. Mais je ne vois pas pourquoi les soldats la cherche, elle n’a pas l’air dangereuse, au contraire.
- J’y crois pas à ton histoire ! Beugla l’homme aux cheveux roux qui avait l’air de plus en plus ivre en se levant.
Alors ce fut un l’explosion, tout le monde se mit à parler en même temps avec de grands gestes. Certains se levèrent eux aussi pour mieux se faire entendre et le tavernier hurlait en répétant qu’il ne voulait pas de bagarre.
Guigues sentit quelque chose lui toucher les côtes. C’était le coude de Jean et ce dernier lui indiqua la porte :
- C’est le moment de filer !
Ils sortirent dans la chaleur étouffante de la rue et Guigues dut se protéger les yeux du soleil, le temps qu’ils s’habituent à la lumière.
- Rentrons, proposa Jean qui paraissait perturbé.
- Une sorcière, s’enthousiasma Guigues alors qu’ils marchaient. Et qui aide les gens en plus. Pourquoi les soldats veulent il à tout prix mettre la main dessus ?
- Pour plusieurs raison, répondit Jean en retroussant les manches de sa soutane. Déjà les sorcières sont considérés comme des hérétiques et il est du devoir de l’église de les éliminer. Et puis si elle a vraiment essayé de jeter un sort à l’évêque, pas étonnant que la croisade noire cherche absolument à la retrouver.
- J’espère qu’ils ne la trouveront pas, lança Guigues qui avait déjà de grands projets pour la sorcière.
- Peut être que Rafael a raison au sujet d’Orlando, marmonna Jean d’un air pensif. Si la sorcière a découvert la vrai nature de l’évêque, cela expliquerait pourquoi elle a tenté de lui jeter un sort.
- En tout cas il faut qu’on la trouve en premier, commenta Guigues. Elle pourrait être une alliée précieuse.
- Sans doute, approuva Jean en hochant la tête. Le problème est comment s’y prendre ? Plusieurs centaines de soldats lui courent après depuis des semaines sans y arriver et nous on est que six.
Jean marquait un point. Comment faire pour retrouver la sorcière ? Guigues n’en avait aucune idée, mais avec un peu de chance Rafael trouverait bien un plan. Et lui n’aurait plus qu’a marchander avec elle en secret pour se procurer une potion ou un sort capable de supprimer Reuel. Depuis qu’il avait appris l’existence de la sorcière, cette idée l’obsédait et il voyait sa vengeance toute prés, à porté de main.
Guigues marchait en silence aux côtés de son ami qui semblait tout aussi perdu dans ses pensées que lui. Sans même s’en apercevoir, ils arrivèrent devant l’écurie ou ils avaient élus domicile. Ils étaient les premiers à rentrer et Jean commença à éplucher les légumes pour le dîner. Guigues lui donna un coup de main et au bout d’une demi heure ils entendirent des bruits de pas dans la cour.
Roland et Reuel entrèrent dans l’écurie. Roland vint s’asseoir avec eux et se mit à discuter avec Jean alors que Reuel resta à l’écart et examina les armes avec lesquelles ils s’entraînaient. Roland Guigues et Jean s’occupèrent du repas, ils firent un feu dans la cour et firent bouillir de l’eau. La nuit commençait à tomber mais Lucie et Rafael n’étaient toujours pas rentrés. L’inquiétude se lisait sur le visage de Reuel qui faisait les cent pas dans la cour en jetant des regards réguliers vers la ruelle.
De longues minutes passèrent sans qu’ils ne reviennent. Guigues aussi commençait à s’inquiéter pour Lucie, il espérait vraiment qu’il ne lui soit rien arrivé. Encore plus tard, alors que Reuel ne tenait plus en place et que la soupe était prête et fumante, Lucie apparut au coin de la ruelle, soutenant Rafael qui avait l’air en piteux état. En une fraction de seconde, Reuel se porta à son secours et passa le bras de son frère par dessus son épaule.
- Que s’est il passé ? Demanda-t-il vivement, la voix tremblante.
Guigues fut surpris de voir Reuel si inquiet, lui qui était toujours de marbre avait l’air effrayé au point d’en perdre son sang froid.
- Nous marchions en ville quand une enfant nous a accosté. Elle nous a dit qu’elle avait besoin d’aide et que son jeune frère était sur le point de mourir. Nous l’avons suivis et nous nous somme retrouvés dans une sorte d’hospice clandestin ou se trouvaient des dizaines de personnes contaminées par la Rage noire. Quand nous avons voulu poser des question à la fillette, elle avait disparue. Rafael a décidé d’aider tout ces gens et les a guéris les uns après les autres, mais malheureusement, après avoir fini guéri tout le monde, il s’est écroulé.
- Combien de personne y avait il ? Questionna Reuel qui était devenu blanc comme un linge.
- Une cinquantaine, répondit Lucie. Peut être plus.
A cette réponse le visage de Reuel se décomposa. Il semblait plus grave et plus froid encore qu’a l’ordinaire :
- Je vais le monter dans une chambre de l’auberge, il y sera plus à l’aise pour se reposer.
- Je vais t’aider, proposa Jean en se levant.
- Non c’est bon, je me débrouille, coupa sèchement Reuel.
Jean parut très surpris mais se rassis sans rien dire. Guigues était persuadé que le ton sec de Reuel et son inquiétude inhabituelle cachait quelque chose de louche. Il ne savait pas encore quoi, mais il était bien décidé à la découvrir.
Reuel se dirigea vers la ruelle avec son frère sur le bras et après leur départ Guigues et les autres commencèrent à manger. Lucie leur raconta le déroulement de l’après midi durant lequel Rafael avait guéri tout ces gens simplement en posant la main sur eux. Elle leur fit la description de la jeune fille rousse qui les avait conduit sur place avant de disparaître subitement. Quand les bols furent vides Lucie parti se coucher, bientôt imité par Roland et Jean.
- Tu viens pas ? Demanda Jean en baillant.
- Je vais éteindre le feu et je vous rejoins, mentit Guigues.
Il attendit d’être seul pour mettre son plan à exécution. Il aspergea le feu avec un sceau d’eau, mais au lieu de rejoindre les autres dans l’écurie il se précipita vers l’auberge. Il entra et se présenta au comptoir ou l’aubergiste fumait négligemment sa pipe.
- Mes amis sont venus prendre une chambre tout à l’heure, l’un d’eux ne se sentait pas bien.
- Et ça vous étonne ? Ils en ont peut être eu marre de dormir dans l’écurie, répondit l’aubergiste visiblement agacé et qui ne semblait pas voir oublié que Guigues l’avait traité de voleur.
- J’aimerais savoir dans quelle chambre ils sont s’il vous plaît ? Demanda Guigues le plus poliment possible. Je dois leur apporter un remède.
L’aubergiste le toisa de haut en bas et secoua la tête comme pour désapprouver les dires de Guigues, mais finit tout de même par lâcher d’un ton maussade :
- A l’étage à droite, la dernière porte au fond du couloir.
- Merci monsieur, répondit Guigues avant de se diriger vers l’escalier.
Il monta les marches en faisant le moins de bruit possible. Arrivé en haut des marches, il se retrouva plongé dans une obscurité presque totale et une forte odeur de moisi lui monta au nez. Il traversa le couloir à pas de loup en suivant le mur des mains jusqu’à la porte désignée. Il colla son oreille à la porte dans l’espoir de surprendre une conversation entre Rafael et Reuel. Aucun son ne provenait de la chambre, mais au bout de quelques instants il entendit un bruit qui ressemblait à un grognement étouffé. Il n’était pas certain d’avoir bien entendu, mais il voulut en avoir le cœur net et se pencha pour regarder sous la porte mais il ne vit rien. Il chercha un autre moyen pour voir l’intérieur de la chambre. Au bout de quelques temps, il finit par trouver un espace entre deux planche de bois à travers lequel un raie de lumière filtrait.
Guigues colla son œil à la fente et put voir l’intérieur de la pièce. Une bougie éclairait faiblement les meubles et il vit Reuel assis dos au mur à sa gauche. Il avait retrouvé son impassibilité habituelle et paraissait concentré sur un point en face de lui.
Guigues changea d’angle pour suivre le regard de Reuel. Il faillit pousser un cri et se couva la bouche de la main. La vision qu’il avait devant lui lui glaça le sang et il sentit la peur l’envahir tout entier. Une bête immonde, similaire à celle qui l’avait poursuivi au village d’Oulmes était allongée sur le sol, ficelée de la tête au pied. Elle se débattait comme elle pouvait, mais ses liens étaient si étroitement attachés qu’elle n’arrivait qu’a bouger de quelques centimètres. Guigues entendait clairement maintenant les grognements de la bête dont la bouche était baillonné avec un énorme morceau de tissu. De grosses marques noirs recouvraient la peau visible de la bête et Guigues voyait clairement ses yeux fous roulaient dans la direction de Reuel assis en face d’elle.
Malgré la transformation et l’apparence hideuse qu’il avait, Guigues devina que la bête n’était autre que Rafael car elle portait les mêmes vêtements que lui. Comment la transformation avait elle eu lieu ? Rafael était censé être immunisé contre la Rage noire. Guigues n’était sur que d’une chose, il avait eu raison depuis le début. Il avait eu raison de se méfier des deux frères et de na pas leur faire confiance. Lui seul ne s’était pas laissé avoir par ces deux menteurs et il avait eu raison sur toute la ligne. Enfin pas tout à fait. Il s’était trompé sur un seul point. Reuel n’était pas le monstre. Le monstre c’était Rafael.
Très bonne fin de chapitre ! Excellente, tant dans la manière dont elle a été amenée que dans l'écriture, via la perception de Guigues ! Elle réveille et donne envie de voir la suite.
Voici mes remontées au fil de ma lecture :
- Le début me fait de la peine pour Guigues. Quand il songe au fait qu'il a été frappé toute sa vie et que ça ne le choque donc pas de l'être encore.
- J'aime de plus en plus le personnage de Rafael. Il est assez aléatoire mais bienveillant.
- "chacun jetant un un œil à son voisin. Rafael leva la main en premier, bientôt imité par Jean et Lucie" -> je suis surprise que Lucie suive si facilement, étant donné sa proximité avec Roland. Ne serait-elle pas au moins désolée ? Pourrais-tu ajouter quelque chose quant à son expression ?
- "levé la main, il baissa, la tête les poins serrés" -> et il baissa la tête, les poings serrés -> la virgule est mal placée et découpe bizarrement ta phrase.
- Jean trouvera préférable -> je ne comprends pas l'utilisation du futur ici. J'aurais plutôt mis "jugea préférable", ou trouva, mais au passé en tout cas pour rester logique.
- "Ils étaient d’un blanc immaculé, et au milieu se dressait une croix d’argent entourée de flammes rougeâtres s’entremêlant dans un cercle parfait." -> voilà qui rappelle étrangement l'emblème de la croisade noire !
- "Jamais il n’avait vu une construction aussi haute ce qui lui donnait le tournis et l’impression d’être minuscule." -> j'aime bien ce passage, encore une fois un joli parallèle entre le paysage et les sentiments de ton protagoniste.
- "appris de plus qu’ils rentrèrent à l’auberge rejoindre les autres un peu avant la nuit.
Jean raconta au groupe ce qu’ils avaient appris ..." -> attention aux répétitions -> ce que le curé avait raconté à Jean, ce qu'ils avaient entendu dans l'église...
- "Guigues avait complètement abandonné le maniement de l’épée et se contentait de regarder les autres s’entraîner, rongé par l’envie et une haine toujours plus grande envers leur professeur." -> quel dommage ! Jean n'essaye pas de le convaincre que lui aussi, devrait apprendre à se défendre ?
- "deux verres de bières" -> simple suggestion, j'entends rarement "verre de bière". Plutôt "chope" ou "deux pintes" par exemple.
- "Ils firent semblant de boire" pourquoi semblant ? "quand le vin est tiré, il faut le boire" ahah
- " à l’air malingre" -> à la silhouette ? plutôt que l'air ?
- "Monsieur, nous recherchons activement une sorcière qui se cacherait ici à Fort-Des-Tombes. Elle est accusée d’avoir tenté de jeter un sort à notre cher évêque Orlando." -> je suis surprise de cette révélation dans une taverne, pas bondée mais où il y a quand même du monde. D'ordinaire quand on interroge, on évite de révéler trop directement le pourquoi du comment, d'autant quand on est dans une position de force, et qu'ici tu exposes une faiblesse du chef de file, l'évêque lui-même. Est-il si fragile pour qu'une vieille sorcière ait presque réussi à s'en prendre à lui ?
Et je trouve que la conversation qui suit entre ceux de l'auberge est très risquée devant des inconnus. Pourtant les citadins ont l'air prudents ! Ils sortent peu, etc.
- "Une sorcière pourrait peut être lui être utile pour se débarrasser de Reuel. Il imaginait déjà cet idiot se tordre de douleur à cause d’une potion ou d’un sort quelconque et cela lui procurait une joie sauvage." -> il perd pas le nord ahah
"il voyait sa vengeance toute prés, à porté de main" -> (à portée*) ceci dit je trouve qu'il est un peu extrême, Reuel lui ayant tout de même sauvé la vie à leur rencontre, je ne trouve que vouloir le tuer est un peu fort, même pour Guigues.
Fautes / coquilles :
"il ne cassait" -> cessait, non ? ; "veine" -> vaine ; "Une chose était sur" -> sûre ; "étaient toujours bien présent" -> présents ; "Alors que tout le déjeunait" -> tout le monde ? ; "si tu le souhaite" -> souhaites ; "tout les autres" -> tous ; "d’amener ma famille" -> d'emmener ; "tu emporte" -> emporte ; "le coffre de pièce d’or" -> pièces ; "Je n’oublierais jamais" -> n'oublierai ; "Pierre cingla les chevaux" -> le verbe n'est pas bon ; "qu’ils avaient pris" -> prise ; "il est partit" -> parti ; "avec l’a croisade" -> la croisade ; "Guigues du réprimer un rictus" -> dût, et une grimace* conviendrait mieux qu'un rictus ; "j’irais avec Reuel" -> j'irai ; "restez discret" -> discrets ; "des question trop directs" -> questions* directes* ; "reçu" -> reçut ; "sa famille réuni" -> réunie ; "Roland eu l'air" -> eut ; " certaines personne " -> personnes ; "la vrai foi" -> vraie ; "tout les concepts" -> tous ; " toute les deux heures" -> toutes ; "Leur compagnons n’avait" -> leurs compagnons n'avaient ; "qu’ils avaient découverte" -> découvertes ; "Un tel acte ne peux rester impuni" -> ne peut ; "et passée par ici" -> est passée ; "on crama ta foutue auberge" -> cramera ; "Il éclatât" -> éclata ; " et au visa marqué " -> visage ; "qu’elle serait très veille" -> vieille ; "ne l’ai pas encore retrouvée." -> l'aie ; " a comprit" -> compris ; " persuadé d’avoir" -> persuadée ; "ce fut un l’explosion" -> ce fut l'explosion ; "plusieurs raison" -> raisons ; "élus domicile" -> élu ; "alors que Reuel resta à l’écart et examina" -> restait ; examinait (concordance de temps) ; "Lucie parti se coucher, bientôt imité" -> partit* imitée* ; "sceau d’eau" -> seau ; "n’était sur" -> sûr ; "de na pas leur" -> de ne
À bientôt !
Je te remercie pour ton retour qui me fait super plaisir. Ce chapitre est aussi un de ceux pour lesquels j'ai pris énormément de plaisir à écrire, en particulier la fin !
Le personnage de Guigues est pour moi assez claire dans ma tête mais peut être que j'ai du mal à le dépeindre comme il se doit. Il en veut à tout et à tout le monde, en particulier à Reuel et il serait prêt à faire beaucoup de choses pour pouvoir se venger de lui. C'est un de mes personnages préférés et j'essaie de le rendre aussi complexe que les émotions qu'il ressent mais c'est pas évident =)
Rafael est pour ainsi dire un peu l'opposé de Guigues. Lui aussi est un personnage que j'affectionne tout particulièrement et j'essaie de le rendre fidèle à l'image que j'ai de lui. Peut être que les événement vont le changer lui aussi.....
Pour ce qui est de la scène dans l'auberge, je me suis aussi posé la question de savoir si cela était cohérent ou pas. Les gardes parlent de la sorcière pour bien montrer aux habitants que eux aussi sont au courant de son existence et pour éviter que la population ne lui vienne en aide. Les habitants ont un peu bu et se mettent à discuter devant Guigues et Jean sans vraiment faire attention à leur présence. C'est peut être un peu tiré par les cheveux mais je me dit que dans leur élan après l'intervention des gardes et l'alcool aidant, il ne se rende pas compte.
Merci encore pour tout le temps que tu consacres à lire et me faire des retours. Tu n'a pas idée d'à quel point ton aide m'est précieuse. =)
Encore merci !
Tu vois, par exemple, ça aurait été Jean, qui avait eu affaire le premier aux jumeaux, ça m'aurait semblé plus cohérent. Du genre il y aurait de la jalousie parce qu'ils ont sauvé Jean.
Alors oui, Reuel représente un peu ce qu'il voudrait être sans y parvenir, mais de là au meurtre, je ne sais pas. Après, est-ce qu'il irait aussi loin, ton récit me le fera découvrir ^^
Pour la scène de l'auberge, ça reste plaisible. Ce n'est pas tant la réaction des habitants qui m'a fait tiquer, mais plutôt la partie précédente, quand les soldats ont parlé aussi directement de ce qu'ils recherchaient. Je ne trouve pas très discret d'annoncer directement la couleur, tu vois ce que je veux dire ?
Et je t'en prie, avec plaisir :)