Ce dimanche allait être crucial pour moi. Premièrement, Lucie m’avait promis que mon problème serait définitivement réglé. Deuxièmement, mon frère Zacharie rentrait à la maison, et je ne comptais pas le laisser finir comme Madeleine. Il devait lui aussi se libérer pour vivre, et je comptais bien lui montrer la voie.
Mise à part cela, c’était lundi, jour de la Saint-Valentin. Pendant que je trainai avec Lucie, Dalila et d’autres, nous vîmes de loin Augustin et Justine. Les deux étaient en Seconde, et ils étaient « le plus beau couple qu’on puisse imaginer ». Avant, je trouvais leur amour et leur relation extrêmement belle et pure. Aujourd’hui, je n’étais convaincue que d’une chose : ils faisaient semblant. J’étais persuadée qu’au moins l’un d’eux jouait la comédie : c’était trop beau pour être vrai, comme avec ma sœur ou le Père du Mellier.
Les deux étaient très chrétiens, ce qui m’agaçait encore plus. En vérité, j’étais jalouse d’eux et je les enviais terriblement. Je ne voulais plus qu’une chose : briser ce si beau couple, dévoiler la fausseté et le mensonge. Cette fois-ci, c’est moi — bouillante de jalousie — qui proposa une ruse à Lucie et Dalila.
En échange de quelques dizaines d’euros, Dalila acceptait de séduire Augustin, d’avoir des rapports avec lui et de filmer leurs ébats. Cela était plus que facile : Augustin avait toujours eu un faible pour Dalila, et elle était terriblement forte. De plus, Dalila avait appris de Justine qu’Augustin était sexuellement frustré, car sa petite amie voulait se préserver jusqu’au mariage : il suffisait juste de mettre une étincelle. Qui plus, faire cela le jour de la Saint-Valentin allait encore plus les détruire.
Le soir, Augustin devait avoir un rendez-vous galant avec Justine, mais « étrangement », il ne s’y rendit malheureusement pas ! Dalila nous envoya les vidéos, à nous puis à Justine. Le lendemain, durant la pause, elle insulta et dévoila publiquement Augustin. Elle tenta aussi de s’abattre sur Dalila en la traitant de traînée, mais ses amies prirent sa défense en disant : « C’est pas la faute de Dalila hein, c’est toi. Si ton mec va voir ailleurs, c’est p’tete parce que tu veux jouer la sainte ou même que t’es juste une très mauvaise copine. Dalila a plutôt même rendue service à ton mec, du coup rampe pour lui dire merci plutôt ! ». Justine fondit en larmes et partit en courant : elle sécha le reste de la journée.
Lucie me félicita et était particulièrement contente de moi. Moi, j’étais heureuse d’un côté et chagrinée de l’autre. Ma joie venait du fait que le mensonge avait été dévoilé, mais ma peine venait du fait que j’avais brisé un si bel amour. Mon cœur me faisait encore et toujours mal dans ces moments-là. Moi, je continuai à faire la sourde oreille. Lucie était contente de moi : cela me suffisait amplement. Je me sentais libre et heureuse, c’était tout ce qui importait. J’avais juste hâte à dimanche pour pouvoir parler avec mon frère et voir ce que Lucie m’avait préparé. Quelque chose me disait que ma croisade contre Dieu allait bientôt toucher à sa fin.