L’arrivée de Maggie et des enfants redonna le courage et le sourire à William. Les semaines qui suivirent leur arrivée fut florissantes, tant au niveau du restaurant que dans le cadre familial.
Leur nouvelle maison leur convenait parfaitement, quand bien même les choses à bricoler ou réparer étaient nombreuses. Le déménagement avait été compliqué, un camion s’était perdu en route et parents et enfants avaient dû se partager le canapé pendant près d’un mois. Mais les petits ennuis s’estompaient peu à peu au profit des retrouvailles. William reprit pleinement son rôle de père délaissé par le travail et retrouva la complicité qu’il entretenait auparavant avec Elizabeth rapidement. Georges, plus distant, digérait mal le changement d’école. Quant à Michael, fidèle à lui même, il s’était enfermé dans son coin, bien que son père l’ait déjà croisé à la sortie de la pizzeria avec de nouveaux amis, signe que la situation s’arrangeait.
Pour ce qui était du restaurant, l’arrivée de Maggie fit énormément de bien au petit commerce. Sa femme le déchargeait des tâches de cuisine afin qu’il puisse se concentrer davantage sur ces robots. William avait finalement signé le contrat de Frédéric Fazbear. Il avait trois ans pour créer les robots et changer le nom du restaurant pour “Freddy Fazbear’s Pizzeria”. La construction des mascottes prenait du temps, mais l’ingénieur était satisfait du résultat. Foxy fut terminé en quelques mois, puis il enchaîna sur la création de Freddy, la star de la franchise, un ours brun à l’embonpoint généreux, le chanteur principal du groupe. Il serait secondé plus tard par Bonnie, un lapin violet guitariste et Chica, une poule jaune, chanteuse secondaire du groupe et un peu gourmande. Foxy était un peu à part. Dans le dessin animé, il était l’antagoniste principal, avant de devenir un anti-héros casse-cou, près à tout pour accompagner ses amis. Il ne chantait pas, mais il était bon acteur.
La deuxième grande innovation était la mise en marche, enfin, des costumes à springlocks. William se promenait maintenant déguisé en SpringBonnie de temps en temps, lors des spectacles. Son compère, SpringFreddy, Golden Freddy, était encore à l’abandon. Le recrutement de nouveaux employés ne donnait toujours rien. Mais il espérait toujours. Golden Freddy remplacerait bientôt Fredbear, dont la mâchoire commençait à s’user. William craignait de mettre la main à l’intérieur de sa bouche depuis que l’endosquelette s’était refermé sur son bras, lui brisant l’os et le forçant à un bon mois d’arrêt. Les mécanismes de l’ours vieillissaient et il devenait assez instable, surchauffant rapidement lors des spectacles.
William avait aussi pris une grande décision : il avait mis la Marionnette dans un carton et l’avait balancée dans une décharge publique. Avec sa femme et les enfants dans les environs, il avait craint que ce passé encombrant lui pose des problèmes. Cela s’était avéré le meilleur choix possible. La pizzeria avait retrouvé la bonne humeur de la première ouverture.
Rien ne semblait pouvoir stopper la machine. Enfin… Presque rien.
*********
Ce jour-là, Georges était rentré plus tôt de l’école. Sa maîtresse était tombée malade et, faute de remplacement, les élèves avaient été relâché. Du haut de ses six ans et demi, il avait pris sur lui pour rejoindre la pizzeria de son papa, située à l’autre bout de la rue. Depuis qu’il était entré “chez les grands”, ses parents lui offraient leur confiance pour rentrer seul. Tant qu’il ne quittait pas le trottoir, rien ne pouvait lui arriver. Et puis, il avait cette énorme peluche à l’effigie de Fredbear pour l’accompagner. Il en était sûr : rien ne pouvait lui arriver.
Aujourd’hui, son papa lui avait expliqué que lui et Maman devaient aller voir le médecin, parce que Papa devait aller retirer son plâtre. Il serait donc seul à la pizzeria. Mais Papa avait préparé des gaufres pour lui, elles étaient dans le frigo. Et puis, en plus, il ne serait seul que le temps que les aiguilles de l’horloge fassent un tour complet. Après, Elizabeth le rejoindrait pour jouer aux jeux vidéo sur les bornes d’arcade. C’était le principal. Tant qu’il pouvait jouer aux jeux vidéo, il s’en fichait d’être seul.
Le jeune garçon brandit fièrement sa clé devant lui à l’approche de la pizzeria. Il déverrouilla la porte et rentra, avant de refermer à clé derrière lui, comme Papa lui avait demandé. Il s’approcha tranquillement de la salle principale dont il alluma les lumières. Le gamin marqua quelques secondes de pause devant Fredbear et SpringBonnie, ébahi par leur taille. Ils étaient un peu effrayant, comme ça, leurs yeux vides fixés dans le lointain. Georges aimait les voir bouger quand il y avait d’autres enfants dans le restaurant. Mais seul, ils avaient quelque chose d’impressionnant. Il renifla et serra un peu plus sa peluche contre lui. Il lança un rapide coup d’oeil vers la porte de la cuisine et courut subitement vers elle, comme piqué par la folie.
Enthousiaste, il ouvrit le réfrigérateur et saisit la grande assiette de gaufres soigneusement placée à son attention, juste devant ses yeux. Il ferma le frigo d’un coup de pied et regagna la salle, le plat trop lourd en équilibre fragile au-dessus de sa tête. Il déposa le tout sur la table puis s’installa sur une chaise, dos aux robots. Il déballa les gaufres hors du papier aluminium, puis en saisit une, le ventre en proie à des gargouillis qui ne demandaient qu’à être contentés.
Alors qu’il portait son goûter enfin à la bouche, le bruit d’une porte qui grince attira son attention. Surpris, le garçon lâcha son mets et se redressa d’un coup, suspicieux. Depuis quelques temps, Michael avait trouvé un nouveau jeu : il se cachait et quand il s’y attendait le moins, il surgissait et lui faisait très peur. Papa lui avait déjà dit de ne pas le faire, mais son frère s’en fichait.
“Mike, c’est toi ? appela-t-il d’une petite voix peu assurée.”
Personne ne répondit, mais le grincement cessa brutalement. Georges descendit de sa chaise et se rapprocha discrètement de la porte. Dans le couloir d’en face, celui qui menait dans les bureaux, il repéra distinctement la porte entrouverte du bureau de l’ami de Papa, Henry. Elle ne l’était pas lorsqu’il était arrivé, il en était certain. Inquiet, son ours en peluche toujours dans les bras, il s’approcha pour regarder dans le petit espace ouvert.
Un homme se tenait là, dos à lui. Sur une chaise au milieu de la pièce, un enfant de sa classe était ligoté. Le garçon, un blond aux grandes lunettes, le repéra immédiatement. Il voulut appeler à l’aide, Georges le vit distinctement, mais la corde qu’il avait dans la bouche l’empêchait de parler. L’homme devant lui fronça les sourcils. Il saisit une batte de baseball et l’écrasa sur la tête de l’enfant. Georges recula. Une gerbe de sang avait traversé la pièce pour gicler sur la porte. Il en reçut sur ses chaussures. L’homme n’en resta pas là. Il saisit un couteau, et alors que son camarade reprenait connaissance, il lui planta dans le ventre. Les yeux du garçons s’exorbitèrent et il se débattit avec force. L’inconnu recula d’un pas et contempla son oeuvre. Il se tourna vers la porte.
Georges, poussé par l’instinct de survie, se jeta dans la grande armoire devant le bureau de son père. Il reconnut l’homme dès qu’il sortit : Henry Miller. Il regarda à droite et à gauche, avant de quitter la pièce. Georges sortit et rentra dans le bureau. Du sang coulait partout autour de la chaise. Le garçon poussa le bras du petit garçon, il ne bougeait plus, les yeux grands ouverts. Tétanisé, il réalisa brutalement qu’il était mort.
“Tiens, tiens, qu’est-ce qu’on a là ?”
Georges fit volte face. Ses yeux se remplirent de larmes immédiatement à la vue de l’homme. Il bloquait la sortie, sa batte ensanglantée à la main, menaçant. Le garçon recula légèrement. Il trébucha sur la jambe de la victime et fit tomber la chaise dans un boucan de tous les diables. L’homme releva subitement la tête, paniqué, et attendit quelques secondes pour s’assurer qu’aucun bruit n’était audible.
“Ecoute-moi, gamin, j’ai pas le temps pour toi et je ne veux pas blesser ton père. Mais crois-moi, si tu racontes ce que tu as vu ici, les choses vont très, très mal se passer pour toi.”
Il chopa le garçon par le col et le souleva. Georges se mit à renifler bruyamment, alors qu’un flot de larmes coulait de son visage.
“Tu m’as bien compris, monsieur Afton ?”
Le garçon, terrifié, hocha vigoureusement la tête. L’homme sourit. Il le porta jusqu’à l’armoire de l’entrée, la même où il s’était caché quelques minutes auparavant. Il le jeta violemment dedans et ferma la porte à clé. Il jeta ensuite la clé dans le couloir et retourna à ses occupations.
Henry devait encore nettoyer la scène du crime avant l’arrivée de William et du reste de la fratrie. S’il écartait ce détail gênant, le plan s’était déroulé parfaitement comme prévu. Il ne lui restait plus qu’à mettre le corps dans son prototype de robot, en construction non-loin de la pizzeria et voir ce qui se passerait, en espérant qu’il se mette à bouger comme elle, comme la Marionnette. Si tout fonctionnait comme prévu, il pourrait alors se lancer dans des expériences pour ramener sa fille à la vie. Il en était certain, il pouvait encore réparer ses erreurs.
Le roboticien saisit le cadavre et le porta jusqu’à sa voiture, garée derrière la cuisine. Il retourna ensuite sur ses pas pour nettoyer le sang méticuleusement. Personne n’en saurait rien, à part le garçon. Henry hésita brièvement devant l’armoire où de longs sanglots terrifiés retentissaient. Devait-il le tuer lui aussi ? Non, le gosse était fragile et manipulable. Il se rappellerait simplement à son bon souvenir de temps en temps pour qu’il garde le silence. Il ne se sentait pas capable de détruire la vie de son ami, alors même qu’il avait choisi la pizzeria pour commettre le meurtre afin que William soit accusé avant lui en cas de problèmes.
Il poussa ensuite la porte du bureau de William et se dirigea vers les caméras. William les avait éteintes pendant son absence pour éviter que ses enfants ne déclenchent les systèmes de sécurité. Il avait bien prévu son coup. Il ferma enfin les égouts des toilettes par lesquels il était rentré la première fois, n’ayant pas vraiment le choix depuis que William avait changé les serrures, puis quitta la pizzeria par la cuisine. Il démarra en trombes et s’éloigna le plus rapidement possible du restaurant.
Je note ce bout de phrase que j'ai du relire plusieurs fois pour en saisir le sens : "et retrouva la complicité qu’il entretenait auparavant avec Elizabeth rapidement" --> "auparavant" et "rapidement" c'est un peu lourd, trop d'adverbes ?
Je me suis demandé combien de temps s'écoulait durant ce chapitre, je suppose qu'il se passe 6 mois environ.
Le changement de ton "du point de vue de Georges" passe bien :)
J'ai du mal à saisir la logique du plan de Henry pour l'instant (il n'a plus le corps de sa fille), mais OK, la bonne surprise en rentrant de l'école.
Bon courage pour la suite !