La nuit était tombée. Les moutons et les villageois étaient rentrés. Les prédateurs étaient dehors, se cherchant, se cachant et se traquant.
La seule question était de savoir qui allait être la proie.
Une piste souillée de sang. Le vent qui portait les lamentations des fantômes. Les feuilles humaines pendues aux arbres. La boue en putréfaction.
Moi et la bête. Et dans quelques instants, une vie sera perdue, ou deux, qui aurait pu le savoir ?
Il arrive que cela n'a pas d'importance. Mais cela me rendait nostalgique.
La lampe à UV était de la triche. C'était bien superflu pour moi, mais lorsque l'on s'attaque aux miens, je ne joue plus.
Cette dernière me montrait le sang et avec la lampe frontale je repérai les animaux qui me fuyaient. C'était incroyable de voir tant de spectateurs pour une farce aussi macabre. Je croyais qu'il n'y avait que les humains qui étaient malsains.
Je faisais du bruit et la lampe signalait ma position à des lieux à la ronde. Cela importait peu : si la créature fuyait, elle s'épuiserait. Et si elle me tendait un piège, je le verrai de loin.
Les loups qui attaquent en meute font plus de traces que ce qu'il y avait devant moi. Il était seul. Drôle de bête. Il n'était même pas passé par la rivière pour effacer ses traces. Soit il ne connaissait pas la région, soit il m'attendait.
Un piège ? Qu'à cela ne tienne.
J'avais l'âge d'être téméraire, et curieux de savoir comment se débrouillaient les jeunes.
En esquivant les branches, j'arrivai devant une souche renversée. La piste s'arrêtait ici. Et je vis une masse avec mes lunettes. Elle était sous la souche. Elle ne bougeait quasiment pas. Il n'y avait rien autour de moi. Je m'approchai lentement.
« Est-ce vraiment un loup ? »
Je marchai sur un os. Puis un autre. Puis un autre...
« Si ce n'est pas un loup, ça y ressemble fort. »
Doucement.
Doucement.
Doucement...
Jusqu'à.
Ce qu'il soit.
A portée de main... ?
« Est-ce une main d'enfant ? »
Je retirai un tissu qui couvrait la forme.
Et je découvris un enfant, 3 ans, comateux, qui respirait bruyamment.
Il ne saignait pas. Et les traces de sang s'arrêtaient juste avant moi !
Piège !
Je me retournai juste à temps pour contrer quelque chose de pointu qui se logea dans mon bras plutôt que dans mon dos. Malgré la douleur, je contrai d'un revers et envoyai voler une boule de poil derrière un rocher.
La saloperie m'avait enfoncé un os dans le bras ! J'en étais stupéfait, mais elle s'était prise une baffe qui l'avait mise KO.
Je m'approchai du rocher, et découvris une petite fille de 10 ou 12 ans sanguinolente.
Qui tituba en se levant.
Puis elle me lança un regard de pure haine, avant de s'effondrer.
Elle était couverte de feuilles. Et de morceaux d'os.
Elle s'était cachée sous les feuilles par terre. Je lui avais sans doute marché dessus sans m'en rendre compte.
Je jetai un coup d’œil aux alentours. Il ne semblait pas y en avoir d'autre.
Bon, il y avait deux gosses dans cette forêt. L'un était malade à crever. L'autre avait essayé de me poignarder et avait sans doute attaqué ma chienne.
Que devais-je ?