Chapitre 9 - Faute professionnelle

-Qui cela peut être ?, demanda Lya en se redressant sur le canapé.

 -À cette heure en plus..., renchérit Archi.

Matt, intrigué, se leva avec précaution pour éviter de réveiller les autres pensionnaires. Il tourna la poignée et ouvrit doucement la porte, s'attendant à voir un camarade égaré ou une mauvaise surprise.

Mais non.

Devant lui, une surveillante se tenait droite, les bras croisés, son regard inquisiteur trahissant une certaine gêne.

-Matthew ?, demanda-t-elle à voix basse.

-Oui..., répondit-il, jetant un regard inquiet vers ses amis.

-Madame Obscuda vous demande.

Un frisson parcourut le dos du jeune homme. Il se tourna immédiatement vers Lya et Archi, cherchant une approbation muette. La jeune femme hocha discrètement la tête, lui signifiant qu'il devait y aller.

Sans un mot de plus, Matt fit un pas en avant, prêt à suivre la surveillante, mais une main ferme l'attrapa par le poignet. Il se retourna et croisa le regard sérieux d'Archi.

-Prends ça.

Dans un geste rapide, il glissa deux gourdes dans la main de son ami. Le poids et le clapotis du liquide confirmèrent immédiatement leur contenu. Pas besoin d'être devin pour comprendre de quoi il s'agissait.

Matt lui lança un regard reconnaissant, puis emboîta le pas à la surveillante.

Arrivé devant la porte de Valma Obscuda, il fut abandonné à son sort. La surveillante s'éloigna sans un mot, le laissant seul face à la terrifiante entrée en bois sombre.

Il déglutit, tenta de calmer le tambourinement de son cœur et frappa trois coups.

Un bruit assourdissant retentit de l'autre côté. Des objets s'effondrèrent, un juron étouffé s'échappa, suivi d'un « Aïe, bordel... » et de ce qui ressemblait à quelqu'un se cognant violemment contre un meuble.

Puis, soudain, la porte s'ouvrit à la volée.

-MAAAATT !!

Valma Obscuda se jeta littéralement à son cou.

Sous le choc, il vacilla légèrement en arrière, écarquillant les yeux.

-M-madame ? Ça va ?

-Parfaitement !!, répondit-elle d'un ton bien trop enjoué pour être naturel.

Elle se détacha de lui en titubant légèrement, manquant de peu de s'écrouler sur elle-même. Matt n'eut pas besoin d'être un expert pour comprendre la situation : elle était déjà ivre.

Sans attendre, elle lui fit signe d'entrer et referma la porte derrière lui d'un geste maladroit. L'odeur de l'alcool flottait dans l'air, mêlée à celle du bois brûlé dans l'âtre de la cheminée.

L'adolescent détailla rapidement la pièce. Le bureau autrefois impeccable était un véritable champ de bataille : des papiers jonchaient le sol, un encrier renversé avait laissé une large tache noire sur le bois, et une bouteille de verre vide trônait en équilibre précaire sur le rebord.

Valma, quant à elle, se dirigea d'un pas chancelant vers le canapé en cuir, s'affalant dessus sans aucune retenue.

Puis, ses yeux tombèrent sur les gourdes que Matt tenait encore.

-NOOOON !, s'exclama-t-elle en portant une main dramatique à sa bouche.

Matt sursauta, pensant un instant qu'elle allait le dénoncer. Mais au contraire, ses yeux brillèrent d'excitation.

-Tu en as rapporté ? SUPER !! Je voulais justement te demander où tu avais eu ça !

Elle éclata de rire comme si c'était la meilleure nouvelle de la soirée.

-Allez, viens ! On trinque !

-Vous êtes sûre, Mada... Valma ?, hésita-t-il.

-Tu voulais boire, non ?

Elle attrapa difficilement deux verres et les posa sur la table basse, manquant de peu de les renverser.

-Eh bien, on va boire.

Matthew ne se fit pas prier et enchaîna les verres avec Valma. La professeure, déjà bien éméchée, parlait à bâtons rompus, oscillant entre anecdotes décousues et réflexions philosophiques embrouillées. Le jeune homme l'écoutait attentivement, attendant le bon moment.

Mais l'alcool commençait aussi à le gagner. Son esprit devenait brumeux, sa langue légèrement pâteuse. S'il voulait tirer quelque chose de cette conversation, c'était maintenant ou jamais.

-Pourquoi faut-il toujours qu'on nous dise quoi faire ?! , s'agaça soudain Valma, levant son verre d'un geste maladroit avant d'avaler une gorgée d'un trait.

-C'est bien vrai, acquiesça Matthew, sentant une opportunité. Et pourquoi ne nous dit-on jamais rien ? Comme pour la cérémonie d'Accointance, par exemple... Personne n'a voulu nous expliquer ce qui s'était réellement passé.

D'un seul coup, l'attitude de Valma changea. Son regard se fit plus acéré, sa voix perdit toute trace d'ivresse.

-Ça, c'est normal.

-Pourquoi ?, insista Matt, sentant une résistance. On a le droit de savoir, non ? Après tout, on a été des victimes !

Valma le fixa, une étrange lueur dans les yeux. Puis elle lâcha d'un ton ferme :

-Vous n'êtes pas des victimes... et c'est pour votre bien.

-Notre bien ?!, s'étrangla le jeune homme.

La professeure poussa un profond soupir et s'installa difficilement à côté de lui sur le canapé. Le silence s'installa, seulement troublé par le crépitement de la cheminée. L'atmosphère était devenue plus lourde, plus intime.

Finalement, elle reprit, la voix plus douce, presque protectrice.

-Écoute... Je vais te donner un conseil. Si tu creuses trop cette histoire, tu risques de perdre bien plus que ce que tu peux y gagner. L'ignorance est parfois la meilleure des options.

Elle tenta de se relever, mais Matthew, dans un geste instinctif, lui attrapa doucement le poignet. Il ne pouvait pas la laisser s'en tirer aussi facilement.

-S'il te plaît, Valma... J'ai besoin de savoir. Pour mes coéquipiers. Pour Archi. Pour Lya...

À la mention de ce dernier nom, Valma éclata d'un rire amer.

-Lya ? Ah ! Parlons-en, alors ! C'est la première dont tu devrais te méfier...

Matt tressaillit.

-Me méfier ? De Lya ?

-Matt..., soupira-t-elle en retrouvant un semblant de sérieux.

Son regard se fit lointain, presque triste.

-Il va se passer des choses... Des choses qui nous dépassent tous.

Elle marqua une pause, comme si elle hésitait à aller plus loin.

-Tout ce que je sais, c'est que cette fille... est une bombe à retardement. Elle est le début... et la fin.

Un frisson parcourut la colonne vertébrale du garçon.

-Je ne comprends pas, supplia-t-il. Explique-moi !

Valma secoua la tête.

-Même si je le voulais, je ne pourrais pas..., dit-elle, et cette fois, une véritable détresse transparaissait dans sa voix.

Elle plongea son regard dans le sien, cherchant à lui faire comprendre quelque chose qu'elle ne pouvait exprimer à voix haute.

-Vous trois, votre trio... Si tout est vrai... C'est terrible.

Elle prit une inspiration tremblante avant d'ajouter dans un murmure :

-Il ne faut jamais que tu cèdes, Matt.

-Que je cède à quoi ?!

Valma lui agrippa soudain les mains avec force, son visage marqué par la panique.

-À l'obscurité. À la vengeance. Tu ne dois jamais quitter la lumière, sinon... tu ne reviendras pas.

Matthew resta interdit. Il ne l'avait jamais vue aussi bouleversée. Ses yeux brillaient sous l'effet de l'émotion, au bord des larmes. Et c'est à cet instant précis, dans cette ambiance électrique et très peu appropo, qu'il se rendit compte de la beauté troublante de sa professeure.

-Promets-le-moi !, insista-t-elle, la voix brisée.

-D'accord... Je te le promets.

Dès qu'il prononça ces mots, un immense soulagement se peignit sur le visage de la jeune femme. Elle relâcha lentement ses mains et détourna le regard, cherchant à retrouver une contenance.

Puis, dans un geste presque désespéré, elle attrapa la bouteille et leur servit un nouveau verre.

-Allez, trinquons et parlons d'autre chose, d'accord ?

Matthew comprit qu'il n'obtiendrait rien de plus ce soir. Et l'alcool l'emportait peu à peu dans un état d'euphorie irréfléchi. Il se laissa aller. Ce soir... c'était la fête.

Après quelques verres supplémentaires, Valma se laissa tomber contre le dossier du canapé.

-Sois honnête, Matt... Est-ce que je suis une ratée ?

Il fronça les sourcils, surpris par la question.

-Une ratée ? N'importe quoi ! Tu es une légende de la magie de combat, tout le monde a déjà entendu parler de toi pour tes exploits !

Elle eut un rictus amer.

-Et c'est bien ça le problème... J'ai 24 ans et je n'ai rien vécu à part la guerre... J'ai des cicatrices sur tout le corps. J'ai tout donné à mon pays. Et ma propre famille continue de me traiter comme une moins que rien... Tu y crois, toi ?

Matthew la regarda, une pointe de tristesse dans le regard.

-Moi, je ne pense pas que tu sois une ratée. Tu es forte. Intelligente...

Il marqua un temps d'arrêt, puis ajouta dans un souffle :

-... Belle.

Valma releva lentement la tête et planta ses yeux dans les siens.

Leur échange de regard était intense, chargé d'émotions et de non-dits. Aucun d'eux ne bougea, mais en silence, quelque chose se jouait entre eux.

-Pourquoi es-tu venu ce soir, Matt ?, murmura-t-elle finalement.

-C'est vous qui m'avez fait venir...

-Ne joue pas sur les mots...

Un fin sourire naquit sur les lèvres du garçon.

-C'est pourtant amusant de jouer, parfois.

Leur respiration se fit plus audible. Instinctivement, leurs visages s'étaient rapprochés à une distance dangereuse.

Ils pouvaient sentir le souffle de l'autre contre leur peau.

Et puis, tout bascula.

Sans vraiment réfléchir, portée par l'élan du moment et l'alcool qui embrumait son esprit, Valma captura les lèvres de Matthew. Il ne recula pas. Au contraire, il répondit avec une intensité qui la fit frissonner.

Leur baiser s'approfondit, une urgence nouvelle s'installant entre eux. Valma bascula en arrière, entraînée par le poids du jeune homme qui la surplombait à présent, une main glissant le long de sa taille.

-Restons-en là, Matt..., murmura-t-elle, à peine audible, quand leurs lèvres se séparèrent.

Son souffle était court, son regard incertain, mais brûlant.

-On est déjà allés trop loin pour s'arrêter maintenant, tu ne crois pas ?, répondit-il, un sourire en coin, la voix plus rauque.

Elle ne trouva rien à répliquer. À la place, elle passa ses bras autour de son cou et l'attira à elle, scellant une fois de plus leurs lèvres dans un baiser fiévreux. Il laissa sa bouche descendre le long de sa mâchoire, puis de son cou, semant des frissons sur son passage.

Sa chemise glissa le long de ses épaules, révélant un torse sculpté que Valma caressa du bout des doigts, explorant la chaleur de sa peau. Chaque geste, chaque effleurement, faisait grimper la tension.

Soudain, elle s'immobilisa.

-Ce n'est pas... ta première fois ?, demanda-t-elle, sa voix teintée d'une légère anxiété.

Matthew s'arrêta un instant, puis releva le menton, son regard emprunt d'une assurance troublante.

-Je vais te prouver que non, souffla-t-il contre sa peau.

Un sourire effleura Valma avant qu'elle ne ferme les yeux sous une nouvelle vague de sensations.

Dans un geste à la fois impatient et précis, Matthew fit sauter les boutons de son chemisier, révélant peu à peu sa silhouette sous la lueur vacillante du feu de cheminée. Ses lèvres suivirent le chemin de sa peau nue, s'attardant sur chaque parcelle découverte, chaque cicatrices,  descendant lentement, torturant délicieusement la jeune femme.

Son corps frissonna sous l'intensité du moment.

D'un mouvement fluide, il la souleva contre lui, ses bras puissants l'enserrant avec aisance. Valma enroula instinctivement ses jambes autour de sa taille, se laissant porter jusqu'au lit, sa respiration mêlée à la sienne.

Lorsqu'il la déposa doucement sur les draps, ils restèrent un instant figés, se contemplant dans une bulle hors du temps.

— Juste pour une nuit, murmura-t-elle, la voix brisée par l'émotion.

Matthew effleura sa joue du bout des doigts avant de lui répondre, d'un ton presque solennel :

— Juste une nuit.

Et cette nuit leur appartint.

 

*****

 

Les cloches annonçant la fin du couvre-feu n'avaient pas encore retenti, et pourtant, une silhouette furtive longeait déjà les murs de l'école. Matthew avançait avec précaution, l'adrénaline pulsant encore dans ses veines, comme si chaque pas sur le parquet grinçant risquait de trahir son escapade nocturne.

Avec une discrétion presque parfaite, il se glissa à l'intérieur du dortoir, espérant regagner son lit sans attirer l'attention. Mais à peine avait-il franchi la porte qu'une petite voix ensommeillée l'interpella.

-Ma... Matt ?

Lya, à moitié endormie, battit des paupières. Elle était toujours allongée sur le canapé, la tête posée sur les jambes d'Archi. À son mouvement, son compagnon de sieste sursauta brusquement, relevant la tête d'un coup, les yeux encore embrumés par la fatigue.

-Matthew... Tu es enfin rentré, bâilla-t-il en s'étirant.

-O-ouais... me voilà..., répondit-il, tentant de masquer le trouble dans sa voix.

Il n'avait pas encore réfléchi à la manière dont il allait raconter les événements de la nuit. Une chose était certaine : certains détails allaient rester sous silence.

Après avoir passé la nuit auprès de Valma, il s'était réveillé avant elle et avait préféré partir discrètement. Ce n'était peut-être pas très chevaleresque, mais il n'avait aucune idée de ce qu'il aurait pu lui dire au réveil. Toute cette situation était assez... gênante.

-Allez, raconte vite, avant que les autres ne se réveillent !, s'impatienta Archi, visiblement plus alerte à présent.

-Je...

-Tu as eu des informations ?

Matthew acquiesça et vint s'asseoir à leurs côtés.

-Rien de très précis, mais... Elle m'a dit de me méfier.

Lya fronça les sourcils.

-De te méfier de quoi ?

Il marqua une pause, cherchant ses mots.

-Pas de quoi... mais de qui.

Un silence tendu s'installa entre eux.

-Elle m'a dit de me méfier... de toi, Lya.

La jeune fille écarquilla les yeux, le souffle coupé.

-Moi ?

-Oui. Elle a dit que tous les trois, nous étions en danger... ou plutôt que nous étions "le danger". Et que toi... tu étais "le début et la fin".

Lya secoua la tête, totalement perdue.

-Mais... ça ne veut rien dire !

-Ce n'est pas grand-chose, admit Archi. Mais si on met toutes les pièces du puzzle bout à bout, on finira bien par avancer.

Matthew hocha la tête, mais Lya n'était pas convaincue. Ses doigts jouaient nerveusement avec une mèche de ses cheveux.

-Attends, ça t'a pris toute la nuit... pour obtenir ces infos ?, releva-t-elle, suspicieuse.

Le garçon blêmit légèrement.

-Non...

-Qu'est-ce qui s'est passé ?

Archi le scruta, une lueur de curiosité et d'inquiétude dans le regard.

-Il ne s'est rien passé !, coupa Matthew avec un peu trop d'empressement.

Et avant qu'ils ne puissent insister davantage, il se leva brusquement.

-Sur ce, je vais me doucher.

Il s'apprêtait à disparaître dans la salle de bain quand la voix de Lya le retint.

-Matt...

Il s'arrêta net.

-Plus de secrets, tu te souviens ?

Il resta silencieux un instant, puis, avant même de s'en rendre compte, il lâcha :

-J'ai couché avec Valma.

Aussitôt, il regretta ses paroles. Un frisson de honte et de gêne le traversa alors qu'il voyait les yeux ébahis de ses amis. Sans leur laisser le temps de réagir, il disparut dans la salle de bain et claqua la porte derrière lui.

Lya et Archi restèrent figés, sous le choc.

-Attends... quoi ?! , souffla la jeune fille, les joues empourprées.

Des images incongrues envahirent son esprit malgré elle, et elle secoua violemment la tête pour les chasser.

-Comment... ? Pourquoi... ? Non, en fait, je ne veux pas savoir !, balbutia-t-elle, visiblement perturbée.

Archi, lui, esquissa un sourire amusé, savourant la situation.

C'est alors qu'Emrys sortit de sa chambre, baillant à s'en décrocher la mâchoire.

-Dites... vous n'avez pas de lits ?, lança-t-il nonchalamment.

-Hein ?!, fit Lya, soudainement sur la défensive.

-Chaque matin, je vous trouve devant la cheminée. Je commence à me poser des questions..., plaisanta-t-il.

Archi s'amusa alors à attraper Lya par les épaules et déclara avec un sourire malicieux :

-Oh, on fait des folies toute la nuit.

-QUOI ?! Mais n'importe quoi !, s'exclama-t-elle en s'écartant vivement, rouge comme une pivoine.

Les garçons éclatèrent de rire en chœur. Il était si facile de la faire paniquer.

 

*****

 

Depuis le matin, Lya tentait de parler à Matt. Mais chaque fois qu'elle approchait, il trouvait un prétexte pour s'éclipser. Il était devenu un maître dans l'art de l'évitement, se dérobant habilement à chaque tentative d'échange.

Même en cours d'histoire, il avait délibérément choisi la place la plus éloignée, s'installant tout au fond à côté de Nata, tournant ostensiblement le dos à ses coéquipiers.

Mais à la pause de midi, son stratagème toucha à sa fin.

-Cette fois, tu n'iras nulle part !

D'un geste aussi vif qu'inattendu, Lya lui attrapa l'oreille devant tout le monde et le tira à l'écart. Archi, hilare, emboîta le pas, ravi d'assister à la scène. Les autres élèves, intrigués, s'amusèrent du spectacle.

-Ils sont vraiment marrants, ces trois-là, ricana Nathalie.

-Un peu bizarres, mais c'est vrai qu'ils sont drôles, admit Nata en haussant les épaules.

Amanda, elle, resta méfiante, observant la scène avec une moue soucieuse.

-Ils trament quelque chose, j'en suis sûre...

Pendant ce temps, une fois à l'abri des regards indiscrets, Lya relâcha enfin son prisonnier. Matt, frottant son oreille douloureuse, la fusilla du regard.

-Tu comptes me torturer ou on peut parler normalement ?

-Crache le morceau, ordonna-t-elle, les bras croisés. Qu'est-ce qui s'est vraiment passé ?

Le jeune homme haussa les épaules.

-Rien de plus que ce que j'ai déjà dit.

Lya hésita. Elle sentait ses joues s'échauffer, mais elle voulait savoir.

-Comment... comment ça s'est passé ?

Matt haussa un sourcil, avant de prendre une expression moqueuse.

-Tu veux les détails, princesse ? Je ne suis pas sûr que tes oreilles chastes y survivent...

Il avait perçu son malaise et s'amusait visiblement à la taquiner. Archi, en retrait, observait la scène avec un sourire amusé.

Lya, piquée, lui donna une tape sur le torse.

- Arrête de te foutre de moi ! Je veux dire... c'est toi qui as commencé ou c'est elle ?

-Plutôt elle, mais quelle importance ?

-Ça peut en avoir une énorme !, s'exclama-t-elle. Tu pourrais te faire renvoyer !

Matt haussa les épaules, imperturbable.

-Peu probable. Elle non plus n'a aucun intérêt à en parler.

Lya inspira profondément.

-D'accord... Mais alors... tu es amoureux d'elle ?

Un silence tomba aussitôt.

Archi releva la tête, surpris par la question. Matt, lui, resta figé un instant, avant de répondre lentement.

-Je... Je ne crois pas.

Il réfléchit un instant, cherchant ses mots.

-C'était... dans l'élan du moment. Juste une rencontre à un instant précis. Rien de plus.

Lya fronça légèrement les sourcils. Elle ne comprenait pas vraiment. Dans son esprit, une relation physique était nécessairement accompagnée de sentiments forts. Pour elle, l'amour et le désir ne faisaient qu'un. Mais ce matin, elle réalisait que le monde ne fonctionnait pas comme elle le pensait. À vrai dire, les seuls livres auxquels elle avait eu accès à l'orphelinat étaient en fait des ouvrages pour les enfants. Comment pouvait-elle savoir que ça ne se passait pas toujours comme dans les contes de fées ?

Archi, lui, s'impatienta.

-Bon, si vous avez fini de parler de vos sentiments de filles, on retourne manger ?

-Attendez !

Lya s'interposa, son expression plus sérieuse.

-Moi aussi, j'ai quelque chose à vous dire.

L'inquiétude se dessina immédiatement sur le visage de ses deux coéquipiers.

-Tu te rappelles, Matt, quand on s'était dit plus de secrets ?

-Oui...

-Eh bien... je vous ai menti.

Matt et Archi échangèrent un regard.

-Je vous cache quelque chose depuis la rentrée.

Le silence se fit.

- À propos de quoi ?, demanda Matt en plissant les yeux.

Lya prit une grande inspiration avant de lâcher :

-L'examen de magie élémentaire... Je l'ai réussi.

Matt écarquilla les yeux, reculant instinctivement d'un pas.

-Attends... quoi ?!

Elle hocha la tête.

-Tu veux dire que... tu es une triple mage ?

Il jeta un regard à Archi, qui n'avait pas l'air surpris.

-Et toi, tu étais au courant ?!

-Oui, et alors ? Tu ne vas pas en mourir, répliqua Archi avec désinvolture.

-C'est pas la question !

Matt était visiblement sous le choc. Mais Lya n'avait pas fini.

-Archi, je t'ai menti aussi...

Le blondinet haussa un sourcil.

-Comment ça ?

-Oh Archi, lui jetta Matt dédaigneux, tu ne vas pas en mourrir !

Le blondinet lui jeta un regard noir avant de se reconcentrer sur Lya.

-Je... J'ai réussi l'épreuve de magie de combat aussi, continua la jeune femme sans se soucier de leur chamaillerie.

Un silence abasourdi s'installa. Cette fois, ce fut au tour d'Archi de reculer, la bouche entrouverte.

-Attends, attends, attends... Ce n'est pas possible. On ne peut pas avoir quatre dons à la fois !

-C'est aussi ce qu'a dit Monsieur Talford. Pourtant... c'est la vérité.

Sa voix trembla légèrement.

-Il m'a demandé de cacher mes pouvoirs, de ne rien dire à personne.

Elle baissa les yeux, sa gorge se serrant sous l'émotion.

-C'est contre-nature...

Le dernier mot s'étrangla dans sa bouche, et un frisson la traversa.

-Les garçons...

Elle releva des yeux remplis de doute et d'angoisse.

-J'ai peur. Peut-être que... peut-être que je suis un monstre.

Pour Lya, tout cela ressemblait à un cauchemar. Elle qui ne voulait qu'une vie normale... Pourquoi fallait-il que tout soit aussi compliqué ?

-Lya.

La voix douce d'Archi rompit le silence.

-Tu n'es pas un monstre.

-On ne te connaît pas depuis super longtemps, admit Matt. Mais la seule chose dont je suis sûr, c'est que tu es une fille géniale. Et tu es foncièrement gentille.

- Alors on va tirer tout ça au clair, continua Archi avec conviction.

Il lui tendit la main.

-Ensemble.

Lya releva lentement la tête.

-Nous sommes une équipe, pas vrai ?

Elle sentit ses yeux s'humidifier légèrement.

-Oui...

-On ne te laissera jamais tomber, ajouta Matt en esquissant un sourire.

Un soulagement immense la traversa, car quoi qu'il arrive... Elle n'était plus seule.

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M.P Lenoir
Posté le 21/03/2025
Alors là ! Si je m'y attendais ! Bon, il y avait l'avertissement mais wow ! C'est toujours aussi bien écrit mais on sent l'aisance maintenant. C'est vraiment bien rythmé, tout se met en place.
Je crois que j'aimerais bien voir une relation entre Valma et Matt, finalement quoi de mieux que de réunir le trio infernal et cette prof' décalée. On commence en plus à bien la cerner. Ça serait dommage de perdre ce personnage.
Aller zou, je lis le dernier chapitre posté, pas envie d'attendre.

Sors vite ton histoire que ma curiosité et mon envie dévorante de lire soient rassasiées. :)
DSWritter
Posté le 21/03/2025
Je suis contente que tu sois surprise !

Ça me fait plaisir que tu me dises tout cela, car j'essaye toujours de jongler entre description, ambiance et action. Personnellement, dans une histoire, ce que je préfère, ce sont généralement les dialogues, donc j'ai tendance à en mettre beaucoup. J'écris parfois plus comme un script de série TV que comme un roman. Mais j'essaye d'y faire plus attention !
M.P Lenoir
Posté le 22/03/2025
Personnellement, j'aime bien cette dynamique que tu instaure avec mes dialogues, on ne perd jamais le fil et les personnages ne parlent pas pour ne rien dire alors c'est bien dosé.

Perso, les dialogues ce n'est pas forcément mon fort, je suis plus dans la projection, je vois tous les paysages dans ma tête, donc c'est plus immersif pour moi quand j'écris. C'est qui pourrait m'amener à écrire sans avoir besoin de dialogues, cependant ça serait ennuyeux à lire alors je m'efforce de m'améliorer sur cet aspect là.

C'est amplement mérité, on a tendance à plutôt dire ce qui ne va pas, alors que des encouragements et des félicitations on en reçoit beaucoup moins. Moi je veux te soutenir dans ce projet, alors crois bien que je vais toujours voir le positif avant le négatif. C'est ça aussi être constructif.

Sincèrement, les descriptions sont vraiment bien, ce n'est pas à rallonge mais ce n'est pas trop court non plus, de plus avec l'ambiance ça permet aux personnes comme moi, qui visualise beaucoup ( si bien que ca prend la forme d'un film ) d'être complètement immergées dans ce que l'on lit. Pareil pour l'action, quand il y en a,c'est bien amené et on sent que c'est là car ça doit l'être et non pour dire " okay là il me faut un truc pour rendre cela plus intéressant".
Enfin, dans tes dialogues tu mises aussi sur les émotions, les éléments clés alors ils sont au centre de ton histoire, ça la rythme et c'est vraiment bien. Même si tu améliore le côté " roman ", tel quel c'est déjà immersif, j'ai comme l'impression de lire de la fantaisie déjà sous contrat d'édition.
C'est peu dire ! Crois en toi car ça fonctionne. :)
DSWritter
Posté le 24/03/2025
Ow... C'est trop mignon, tu pourrais presque me faire pleurer premier degré ! En tout cas ça me motive énormément, merci beaucoup ^^
M.P Lenoir
Posté le 24/03/2025
Je t'en prie ! Maintenant plus qu'à attendre la parution de ton histoire. :)
M.A.Frogerais
Posté le 16/03/2025
chapitre chargé en emotion, j'aime beaucoup. c'est surment l'un de tes meilleurs puisque je n'ai qu'une chose a redire qui n'est pas en rapport avec l'histoire en elle meme: se serait bien de prevenir en debut de chapitre qu'il y a du "slurp", merci.
non mais par se que la.... j'ai du me retenir de faire du bruit pour ne par reveillé mon mec endormit au milieux de sa nuit :,)
DSWritter
Posté le 17/03/2025
C'est noté XD
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