Asha et Lohan clignèrent des yeux à l’unisson.
— Quoi ? croassa-t-il.
— Mais… heu… quelle grossesse ?
— Si c’est une blague, ce n’est pas drôle.
Le gloussement qu’émit Clervie donna des frissons à la jeune fille.
— Mais ce n’est pas une blague.
Elle planta ses yeux clairs dans ceux de la Sylvienne.
— Tu n’as qu’à vérifier.
Asha resta immobile tandis que Lohan tournait vers elle un regard interrogateur. Après quelques secondes d’hésitation, elle posa sa main sur son ventre et ferma les yeux.
Elle ouvrit les paupières sur une forêt nocturne aux arbres chantants. Son regard fouilla le paysage en prenant garde à se pas se confronter au ciel vide. Elle avisa les lucioles au-dessus du ruisseau, la grotte qui engloutissait l’écume, la prairie ondoyante, l’ombre épineuse de la canopée. Elle eut du mal à faire abstraction des huit chats au pelage étoilé qui jouaient, courait, chassaient, dormaient dans ce décor bruissant. Elle chercha, sans vraiment savoir ce qu’elle voulait trouver.
Une brise lui ébouriffa les cheveux pour les tendre en avant, vers un vieux chêne noueux. Asha vit le félin qui dormait, roulé en boule à son pied. Contrairement à tous les autres, il était parfaitement immobile. Elle s’approcha à pas lents, fixant le tronc tourmenté. Une lueur à peine perceptible attira soudain son regard. Elle se pencha au-dessus d’une cavité dessinée dans le bois. Dans le noir doux qui l’habitait, elle put voir briller une petite flamme bleue qui pulsait à un rythme régulier. Fascinée par cette lumière timide, elle tendit la main pour l’effleurer. Une onde de chaleur l’envahit alors que toute la scène s’éclairait.
Asha rouvrit les yeux devant un Lohan pendu à ses lèvres.
— C’est vrai, souffla-t-elle.
— Quoi ?! s’exclama le jeune homme tandis que le sourire de Clervie s’élargissait encore.
La jeune fille eut soudain l’impression que l’espace rétrécissait autour d’elle. Ses jambes furent agitées de soubresauts qui l’emmenèrent en arrière jusqu’à ce qu’elle heurte un mur. Alors, elles cessèrent de la porter.
— Je… je ne comprends pas… balbutia-t-elle d’une voix étouffée, je n’ai jamais…
— Bien sûr que si, ma chérie, c’est juste que tu n’en as pas le souvenir, annonça la maîtresse de maison. Vous vous demandiez ce qu’était mon pouvoir, et bien vous en avez une des utilités.
Lohan se leva d’un bond et renversa sa chaise.
— Vous… vous nous avez fait faire un… enfant ?! cria-t-il, butant légèrement sur le dernier mot.
— Exactement.
La respiration d’Asha se faisait acérée, raclante, rapide. Puis, inexistante. L’air ne semblait vouloir passer dans ses poumons que par à-coups douloureux. Le sol, le plafond, le regard de Clervie, la brûlait. Cette dernière fit un mouvement vers elle en avisant sa détresse, mais elle fut happée par la main enragée de Lohan. Il la plaqua violemment contre un pilier de la maison, faisant voler les guirlandes de perles décoratives qui dévalèrent les épaules tressautantes de la jeune femme. Elle enfonça ses ongles dans le bras assassin sans parvenir à le faire frémir. Prise de hoquets, elle agita les jambes. Son teint se faisait de plus en plus pâle. Ses yeux roulaient sur l’œil orbite, pris de cette peur absolue de voir la mort arriver.
Asha la vit, cette peur. Plus encore, elle s’en rappela. Elle ferma les yeux, plissa les joues, serra les dents. Son cœur se fendit d’un hurlement intérieur, son corps s’effondra sur lui-même. Elle agrippa sa poitrine, griffant son torse au traverse de sa tunique. Elle voulait en faire sortir son âme. Elle émit un râle au milieu des larmes qui affluaient.
Soudain, il y eut moins de lumière. Elle ouvrit brièvement les paupières pour voir une silhouette entourée d’un halo sombre se dresser devant elle. Elle reconnut à peine Lohan. Il la toucha, à l’épaule. Elle s’y agrippa mentalement comme pour se sauver d’une noyade. Alors le monde bascula dans le néant d’une chute infinie. Puis, il renaquit. Elle prit une inspiration dure.
*
Lohan aurait tué mille fois Clervie. Pourtant, il avait encore du mal à réaliser ce qu’elle lui avait fait. À lui, et à Asha. Quand il l’entendit gémir, ratatiné contre le mur, il lui semblait qu’elle était blessée. Elle lui rappela ces hommes dont le sang se déversait sans fin sur le sol après une bataille. Un jour, un de ces subordonnés était mort ainsi, dans ses bras. Il avait ce même visage pâle et tremblant, cette même respiration irrégulière, cette même détresse absolue dans le regard, cette même angoisse terrifiante. Lohan lui avait tenu compagnie jusqu’au bout, cachant avec sa cape les entrailles fuyantes du pauvre homme.
Avant qu’il ne l’ait réalisé, le jeune homme était auprès d’Asha.
Il n’avait cependant aucune idée de ce qu’il devait – ou voulait – faire. Il posa sa main sur son épaule, à l’endroit de son étrange tatouage, dans un geste dérisoire de réconfort. Il ressentit alors un vertige puissant. Il chancela, ses yeux ne renvoyant qu’un immense néant dans lequel il semblait tomber. Il ouvrit la bouche pour crier mais sentit à cet instant-là ses pieds retrouver la stabilité d’un sol.
Sa vision revint, et il vit. Il vit une chaîne de montagnes, glabre de végétation, couverte d’un ciel orageux agité de spasmes. Il vit, autour de lui, une plaine enserrée de cendres d’où émergeaient les carcasses calcinées de bateaux, habitations et forêts. Il vit le fossile d’un rivage mort saupoudré d’éclats d’argent. Il la vit, elle, dans ce paysage désolé et cruel, rayonnante d’une clarté fragile.
Asha observait le paysage, les yeux écarquillés, elle s’était un peu redressée.
— C’est… c’est un Sanctuaire…
— Un Sanctuaire ?
Ses grandes prunelles pivotèrent lentement vers lui.
— Ton Sanctuaire…
Elle se recroquevilla.
— Il me fait peur.
Il s’accroupit près d’elle, impuissant. Lui non plus n’aimait pas cet endroit. Le sol était empli de mort, le vent criait sa détresse, les montagnes les enfermaient, et les nuages voulaient tout détruire.
— Asha…
Elle avait caché son visage dans ses bras. Il l’entendit renifler.
— Après ce tu m’as fait, je pensais que j’avais vécu la pire expérience possible.
Sa voix résonnait dans ses oreilles, pourtant elle ne semblait pas venir de cette chevelure ébouriffée et tremblante. Comme une pensée.
— Pour mon peuple, l’acte d’union est sacré… il permet la communion ultime entre les êtres… Co-comment peut-on…
Elle remua, gémit.
— Je voulais le faire avec Conan…
— Asha…
— Mais il m’a trahi…
La voix se faisait plus grave, plus féroce. Lohan eut un mouvement de recul tandis que le vent se levait. Avec vinrent des murmures, une armée de murmures qui se chevauchaient. Il y reconnut sa propre voix.
— Que va penser Adhara ?
— J’ai mal…
— Je l’ai encore fait souffrir…
— Je l’ai vraiment fait ?
— Ça ne peut pas être possible !
— Je vais la tuer et la dépecer, cette sorcière !
— C’est un cauchemar…
— Mon corps…
— Non, je refuse que ce soit arrivé !
— Mais coment ?
— Pardon…
— Non !
Il poussa un cri et se prit la tête dans ses mains. Il s’agrippa les cheveux, tomba à genoux. Il ferma les yeux. Il voulait oublier. Il ne voulait plus être ici.
Il croisa, au milieu de la tourmente, le regard d’Asha. Il y vit le reflet de sa souffrance. Elle lui tendit une main livide qu’il s’empressa de saisir.
Le monde se dissolut, encore. Le vertige cessa cependant bien vite. Il atterrit dans un nouveau décor. Une clairière nocturne alimentée par un petit ruisseau. Asha se laissa glisser contre le tronc d’un chêne.
— Je n’en peux plus… souffla-t-elle.
Il déglutit. Elle se tourna vaguement vers lui.
— Ça, c’est mon Sanctuaire. Mon monde intérieur.
Elle renifla, les larmes affluèrent encore. Elle se tassa contre le chêne.
— Avant… continua-t-elle d’une voix brisée, les ronces se tapissaient au plus profond de la forêt et n’avaient pas envahi les sous-bois. Avant… ce ruisseau n’était pas englouti dans une grotte. Avant, le ciel était orné de milliers d’étoiles… elles dansaient, chatoyaient, elles… elles étaient magnifiques.
Il demeura silencieux. Les murmures s’étaient su, il ne se sentait pas pour autant mieux. Il n’avait pas besoin de demander à Asha quel évènement séparait « l’avant » idyllique qu’elle décrivait du triste présent.
— Je n’en peux plus…
Un élan discret le poussa vers elle. Il s’adossa à ses côtés contre le tronc. Il remarqua un chat qui dormait à son pied et se mit à le caresser d’une main discrète. Il leva les yeux vers le ciel indubitablement vide. Il resta là, aux côtés d’Asha, pendant un temps qui sembla une éternité.
Lorsque Lohan rouvrit les yeux sur le monde tangible, il réalisa en premier lieu qu’il ne sentait plus la chaleur d’Asha. Il se leva brusquement. La chaise de Clervie était renversée, les perles étalées sur le sol. Mais la sorcière n’était pas visible. Il entendit une voix dans la chambre qu’il partageait avec Asha. Il s’y rendit, s’appuyant contre le mur. Il se sentait pesant, fatigué. Une pointe de rage jaillit cependant quand il vit Clervie qui bordait Asha en lui murmurant une berceuse. La jeune fille paraissait endormie.
— Va-t’en ! ordonna-t-il. Tu n’as pas le droit de la toucher !
La jeune femme tourna vers lui un regard cinglant.
— Va-t’en, monstre ! répéta-t-il en s’approchant.
— Je t’en prie, je n’ai tué personne, moi.
Il voulut l’étrangler encore, finir le travail qu’il avait commencé. Mais elle l’évita aisément malgré la marque rougeâtre qui ceinturait son cou. Asha se mit alors à gémir.
— Arrêtez, pleura-t-elle. Arrêtez… la colère, la tristesse…
Sa grimace de douleur effaça les dernières miettes d’énergie restantes à Lohan. Il alla s’effondra sur sa propre couche.
— Pourquoi vous avez fait ça ? lâcha d’une voix harassée.
Clervie plissa les yeux, collée contre le mur, prête à éviter encore un de ces assauts. Elle finit cependant par se détendre un peu.
— Je suppose que je vous dois bien une explication. Je ne peux pas vous dire pourquoi j’ai fait ce que j’ai, mais je peux en revanche vous dire comment.
Elle marqua une pause.
— Le pouvoir qui m'est conférée par la Marque me permet de lire les pensées des gens, mais aussi de les influencer lorsqu'ils sont éveillés. Et quand ils sont endormis, je peux même prendre le contrôle de leur corps. C'est un peu comme si je créais des somnambules. Vous dormiez dans la même chambre... vous n'avez sans doute pas besoin que je vous explique la suite.
Asha s’enfouit sous sa couverture, Lohan se prit la tête dans les mains. Après un instant à trembler, il leva la tête vers la jeune fille.
— Asha ? Je vais t’apporter de la mortis.
— Certainement pas ! réagit Clervie.
Il l’ignora. La jeune fille, elle remua.
— Pour… pourquoi ? entendit-il sous les draps.
— Tu sais très bien pourquoi.
— Je ne le permettrai pas !
Clervie fit un geste vers lui, furieuse. Il sentit une force rageuse embraser son poing qui s’abattit sur sa joue. Elle s’écroula, sonnée.
— Je vais chercher la mortis.
— Non…. gémit Asha.
— Comment ça, non ? Cet enfant ne peut pas naître.
— Mais…
— Tu veux qu’il naisse ? Malgré les circonstances ?!
— Je ne sais pas ! s’écria-t-elle en se tassant un peu plus sous les draps. Mais… Mais je ne mangerai pas de mortis.
Tendu, il eut un mouvement de recul.
— Comptez-vous réellement nous laisser partir quand je serai guérie ? demanda Asha d’une petite voix dans la direction de Clervie.
Cette dernière se redressa difficilement en se tenant la mâchoire.
— Je vous laisserai partir.
— Mais alors…. pourquoi cette barrière ?
— Ce n'est pas mon pouvoir qui a créé la barrière.
— Qui ? fit Lohan.
— Vous n'avez pas à le savoir, de toute manière ça ne change rien. Je n'ai aucun pouvoir sur cette personne. Je suis prisonnière, comme vous.
— Et cette personne… nous laissera-t-elle passer ?
— Je ne pense pas.
— C'est une blague ?! s’exclama Lohan.
— Je vous l'ai dit, je n'y suis pour rien.
— Où est la personne en question ?
— Pas ici. Et vous n'allez pas la chercher.
Lohan souffla abruptement. Il se sentait nauséeux. Il quitta la pièce d’une démarche fébrile.
*
Asha gisait dans son Sanctuaire. Les ronces susurraient autour d’elle, elles se rapprochaient à chaque instant pour l’enlacer de leur terrible étreinte. La jeune fille fixait l’étoile minuscule qui était apparue dans son ciel vide. Elle semblait froide, pourtant elle était sûre d’y déceler une chaleur lointaine, plus discrète que celle qui émanait du tronc du chêne.
Asha fixait l’étoile, ignorait les ronces.
Après un temps, elles finirent par se rétracter pour s’entasser dans les recoins d’ombre.
*
Kurtis trempa son doigt enduit d’huile de malpone dans la poudre rouge. Il traça avec application un cercle sur une pierre ronde avant de le remplir de symboles élégants. Une fois fini, le talisman alla rejoindre un empilement de cailloux semblables et le jeune garçon reprit une nouvelle pierre. Il devait se concentrer intensément pour créer des protections impeccables, sans quoi il serait obligé de recommencer.
— J’en ai marre, soupira Oanell en faisant claquer la roche.
— La patience est le premier atout d’un Arsalaï, la reprit Ealys d’un ton sentencieux
— Peut-être, mais après deux jours entiers à faire des talismans, j’estime que mon impatience est légitime.
— Nous n’avons pas le choix, les guerriers doivent être protégés lors de la bataille.
— Peut-être, mais si les aînées nous aidaient au lieu de nous refiler les corvées les plus pénibles, on en serait pas là.
— Arrête de discuter, tu sais très qu’elles sont aussi occupées que nous.
— Oui mais au moins c’est intéressant ce qu’elles font !
— Intéressant et bien plus crucial. Elles ne peuvent pas faire reposer sur l’épaule de jeunes sans expérience le sort de tous nos Hekaours.
— Pfff, c’est pas en s’entrainant si peu qu’on les réussira, leurs enchantements super compliqués. Je pensais qu’en ayant mon totem on arrêterait de me considérer comme une gamine, je me suis trompée.
— Peut-être que si tu te comportais moins comme une gamine, on te considèrerait autrement, siffla Ealys, agacée.
Oanell afficha un visage outré et seule l’apparition de Saoirse la retint de lancer une réplique.
— Alors, où vous en êtes ?
L’aînée jeta un regard à leur production du jour, un sourire s’afficha sur ses lèvres.
— Je vois que vous avez bien avancé. Je vous autorise à faire une pause, vous l’avez bien mérité. Vous reprendrez après le repas du soir.
— Victoire ! s’écria Oanell.
Son sourire déforma le raton laveur qui s’étalait sur son visage, lui conférant une grimace comique. Elle sortit de la hutte des guérisseurs d’une démarche sautillante.
— Et vous, où en êtes-vous ? s’enquit Kurtis en se levant difficilement, les jambes douloureuses.
— Nous avons encore du travail.
— Moïa tient le coup ?
— Elle a fait une sieste tout à l’heure, mais a tout de suite voulu reprendre les enchantements.
Kurtis eut une moue inquiète.
— Elle en fait trop, ce n’est plus de son âge.
Saoirse haussa les épaules d’un air las.
— Je suis bien d’accord avec toi, mais nous ne pouvons rien lui ordonner. C’est elle, notre guide.
— Je sais, soupira-t-il. Je peux venir vous regarder ?
— Avec plaisir.
— Je viens aussi, ajouta Ealys.
Kurtis sortit avec bonheur de l’atmosphère chaleureuse mais confinée de la hutte. Il accompagna l’aînée derrière la bâtisse trapue, dans une clairière isolée du village. Là, autour d’un grand feu, trois personnes dansaient en psalmodiant des formules. Il reconnut aisément la silhouette squelettique de Moïa entre celles, plus énergiques, de Daïré et Isbail. Leurs pieds frappaient avec précision des emplacements sur un sol jonché de talismans. Après quelques instants, Saoirse se glissa dans la danse comme si elle ne l’avait jamais quittée.
Kurtis se perdit dans la contemplation de ces mouvements tantôt brusques, tantôt doux. Dans les peintures que dessinaient les ombres sur leur peau presque totalement nue. Dans la courbe ondoyante de leur corps. Dans la torsion de ces muscles harassés qui continuaient pourtant de s’agiter. Dans leur souffle bruyant qui rythmait leur pas. Dans leur chant sporadique, grave, aiguë, et silencieux.
Cette danse, il l’avait effectuée plusieurs fois. Mais jamais il n’avait atteint un tel degré de maîtrise, d’harmonie, de passion sanguine. Il ne pouvait qu’admirer ces danseuses ivres de fatigue qui malgré la nuit tombante ne faiblissaient pas.
— C’est magnifique, souffla Ealys, et il ne put que l’approuver.
*
— S’il te plaît !
— C’est hors de question !
— Mais vous ne serez que cinq !
— Ce sera suffisant ! On a déjà eu du mal à convaincre Moïa de ne pas venir, alors n’en rajoute pas !
Il fixait sa sœur avec désespoir.
— Pourquoi tu ne veux pas ?
— C’est la guerre Kurtis, pas un jeu.
— Je le sais très bien !
— Tu n’as même pas encore ton totem, c’est trop dangereux pour toi !
— Je n’ai peut-être pas de totem, mais je suis aussi compétent que toi. Le Cercle est imparfait sans moi !
— N’exagère pas, cinq c’est suffisant.
— Tu sais comme moi que c’est faux.
Il gratta la terre de son pied nu.
— Asha est partie. Et maintenant toi, Keira et Aedan partez guerroyer. Qu’est-ce que je fais, moi, si vous ne revenez pas ?
Les lèvres d’Ealys tremblèrent.
— Tu vivras.
— C’est cruel de dire ça, souffla-t-il, les larmes aux yeux.
Elle le considéra un instant, tentant de masquer sa tristesse. Elle s’approche doucement, le prit dans ses bras et le berça comme le faisait Séla, jadis.
— Ça ne va pas ? s’enquit Saoirse en les apercevant derrière la hutte des guérisseurs.
Kurtis renifla.
— Si, si.
Des rides apparurent sur le visage de l’aînée lorsqu’elle fronça les sourcils, sceptique.
— Je vous cherchais, annonça-t-elle, je voulais demander quelque chose à Kurtis.
— Qu’est-ce qu’il y a ? fit-il en levant ses yeux rougis.
— Nous ne sommes pas assez nombreuses pour créer un Cercle digne de ce nom, est-ce que tu accepterais de nous aider ?
— Non ! s’écria Ealys.
— Pardon ? répliqua Saoirse, surprise par ce ton irrespectueux.
— Il est trop jeune, il court un grand danger là-bas… En plus, sans son totem, il aura du mal à établir le Lien… reprit la jeune femme d’un air plus timide.
— Tu n’as pas tort, malheureusement nous n’avons pas le choix, nous devons saisir toute aide.
Kurtis eut un triste sourire en direction de sa sœur.
— J’irai avec vous, souffla-t-il.
— Bien.
Ealys serra les poings en regardant son aînée s’éloigner, impuissante.
— Tu… tu ne m’en veux pas ? demanda timidement son frère.
— Si.
Des larmes affleuraient ses yeux crispés.
— J’ai promis à Maman de vous protéger, j’ai l’impression d’échouer sur toute la ligne…
Ce fut au tour du jeune garçon de l’étreindre. Il posa son front contre le sien.
— Ne t’inquiète pas, je ne vais pas mourir, tenta-t-il sans parvenir à chasser son angoisse.
Le premier groupe partit le lendemain à l’aube, mené par Aelig et Saoirse. C’était en tout une centaine de Hekaours qui participeraient à l’attaque. Comme il était impossible qu’une troupe si grande traverse la région sans être repérée, ils étaient divisés en cinq groupes, qui partiraient chacun à une journée d’intervalle.
Kurtis observa les au revoir anxieux des familles séparées. Il se dit que bientôt ce serait à son tour de quitter le village pour l’inconnu, et son cœur se serra.
La tribu se vida au fil des départs. Un silence nerveux régnait entre les bâtisses vides, détonnant avec l’effervescence qui avait accompagnée les préparatifs. Les Laevis étaient amputés de deux tiers de leur Hekaours, et de presque la totalité de leurs Arsalaïs. Moïa veillait devant sa hutte, immobile, contemplant sa moitié de tribu.
Kurtis fut presque soulagé de quitter l’atmosphère gluante du village. Il salua ceux qui restaient dans un état second, sans vraiment réaliser. En voyant les silhouettes des maisons disparaître entre les buissons, il sentit les larmes monter. Sa jument suivait placidement celle d’Ealys, le laissant se gorger des dernières visions de sa forêt natale.
Lorsqu’il franchit la Frontière, le jeune garçon se courba. La douleur qui avait afflué dans sa poitrine se rétracta comme à regret, le laissant se redresser. Il fut pris d’un vertige devant un horizon de champs dégagé de tout arbre. Il déglutit.
Conan qui chevauchait, ligoté, avec Keira, parvint à sa hauteur. Avant de partir, Moïa avait appliqué aux Arsalaïs un enchantement qui leur permettait de comprendre l’helmët.
— C’est grand, le monde, hein ? murmura le prisonnier.
En tout cas, je m'interroge surtout pour l'avenir. Tu m'avais dit que les Sylviens ne peuvent pas avoir de Marque, alors que va donner un métis Sylvien-Porteur?
J'aurais peut-être aimé un peu plus d'explication sur les sanctuaires. Est-ce juste une connexion métaphorique? Tout le monde a-t-il un sanctuaire? Du plus mystique des Sylviens au premier clodo humain? Je suppose qu'on ne peut amener dans son Sanctuaire qu'un personne qui a une forte connexion mentale ou affective avec soi.
Pour la deuxième partie avec les Sylviens, je la trouve un peu molle (désolé). Pour moi, celle sur les talismans est un peu trop longue. Peut-être parce qu'elle s'attarde sur des personnages qu'on n'a pas beaucoup vus, c'est dur à définir, mais je ne me suis pas senti très investi dans cette partie.
Pareil pour la longue phase de dialogue ensuite façon: "je veux y aller! -non -oui -non -oui - bon d'accord..." Surtout que je ne me souviens pas forcément de ce qu'est le Cercle.
Peut-être que des paragraphes plus concis sur ce que fait chacun pour la préparation de la bataille serait plus fluide: "Keira fait ça; Aedan fait ça; Moïa fait ça; Conan fait ça; ..." (Surtout pour Conan, on le voit chevaucher avec les autres à la fin, mais on en l'a pas vu du chapitre). Voilà, voilà, en route pour la suite...
Le Sanctuaire est quelque chose que les Sylviens apprennent à développer, donc non les clodos humains n'en ont pas x) J'utilise le terme français "humains" pour marquer l'opposition que les Sylviens créent mais dans leur langue la traduction du mot qu'ils utilisent (shelmêt) signifie "ceux qui n'entendent pas la voie des esprits" = les glandus qui n'y connaissant rien en spiritualité, donc non, pas de Sanctuaire pour les humains (normalement).
Je comprends que tu n'aies pas trouvé la partie "préparation pour la bataille" palpitante à côté de ce qui se passe chez Clervie, mais je la trouve nécessaire en terme de build-up et caractérisation.
Pour ce qui est "du côté des Sylviens", j'ai apprécié que tu mettes en avant leurs deuils ainsi que leur préparation à la guerre. C'est toujours aussi poétique !
Merciiiii ! Tu avances vite dis donc !
Okey, I understand... 🤔 C'est particulier, comme pouvoir, franchement 😅 Asha est hyper résignée, je pense que moi aussi j'aurais râlé 😅
Et Clervie est elle aussi prisonnière... Mais de qui ?? °o°
C'est une super idée, le truc des Sanctuaires, très poétique, j'adore ! ^^
Je suis très curieuse de voir ce qui va arriver à Asha et Loan, ainsi qu'à toute la petite troupe qui vient de partir ! <3
Pitites choses ^^
• "Une brise lui ébouriffa les cheveux pour les tendres en avant, vers un vieux chêne" → tendre
• "Asha vit le félin qui dormait, roulé en boule à son pieds" → pied
• "Elle se pencha au-dessus d’une cavité dessiné dans le bois" → dessinée
• "Viens par ici, fit-elle en lui agrippant de nouveaux le bras" → de nouveau
• "Pourquoi me montre-tu ça ?" → montres
• "Je ne te demandes rien" → demande
• "Il se tourna et du plisser les yeux" → dut
• "Lointaines mais bienveillante." → bienveillantes
• "J’en ai ma rre, soupira Oanell en faisant claquer la roche." → marre
• "Avant de partir, Moïa avait appliquer aux Arsalaïs un enchantement" → appliqué
X) en fait le pouvoir en lui-même est plutôt basique mais c’est son utilisation qui dénote un peu
Merci <3
Et j'espère vraiment que la guerre va pas aussi mal tourner que je l'imagine... Cent guerriers contre une cité... ayayayaya
Comment ça "la manquer" ?
Haha comme tu dis
- Pourquoi me montre-tu (montres-tu) ça ?
- Moïa avait appliquer (appliqué)
- Le pouvoir qui m'est conférée (conféré) par la Marque
- J’en ai ma rre (pk y a un espace ?)
- elles sont aussi occupées de (que ?) nous
- Elle s’approche (approcha)
La toute dernière phrase que Conan adresse à Kurtis, Kurtis ne la comprend pas si ? Car s'il ne la comprend pas je pense que ça devrait malgré tout être précisé, pour le coup j'ai vraiment pas l'impression qu'il y a des problèmes de langue :/
Oui c’est encore ce fameux sort XD bon cette fois je savais que je l’avais pas précisé mais je savais pas où le caser. Faut que je regarde !
Est-ce que le coup du bébé n’a pas trop malmené ta suspension consentie d’incrédulité ?
Ow Merci <3
Et après le coup du bébé, je sais pas si les Sylviens sont particulièrement fertiles et que ça à marché du premier coup ou si ils ont essayés plusieurs fois, et je ne sais pas trop comment Clervie sait qu'elle est en ceinte...
Et sinon pour le sort je pense que ça devrait bien passer dans les descriptions que tu fais des préparatifs ^_^
À ce stade ils sont restés deux semaines chez Clervie donc... ça a pas marché du premier coup, non.
Et comment Clervie le sait -> elle a fait le test avec le pot de chambre en scred... je suis pas trop chaude pour expliquer tout ça, ça fait un peu artificiel...
Ok, je vais voir ça, merci !
Alors, il y a un petit je ne sais quoi qui m'a dérangé dans ce chapitre, peut-être le fait que le rapport sexuel non consenti passe si vite sur les mémoires (genre, c'est normal.). Je trouve que c'est un thème assez important, mais qui n'est peut-être pas assez développé. Surtout qu'Asha, on lui dit ça, et elle fait juste "Ah. Bon. Ben écoute, c'est fait. On l'appelle comment ?". Même Lohan m'a pas l'air assez furax xD (et pourtant, il a failli la buter la madame) Peut-être montrer sa réaction comme étant encore plus violentes, des détails sur les doigts qui se serrent, les tentatives pour Clervie de respirer (la respiration sifflante), le tremblements des mains, les potentielles marques qu'ont pu laisser les mains de Lohan... c'est des idées qui me viennent.
Toute la partie dans les sanctuaires m'a beaucoup plu, mais un peu plus de description m'aurait plu :D
Et je suis plutôt d'accord avec Sorryf, NOM DE DIE POURQUOI CLERPUTE (quel doux surnom) A FAIT CA ?
Au plaisir :P
Un je ne sais quoi ? Genre la situation totalement WTF XD Oui, alors, je vais un peu plus insister sur ça, notamment par rapport à Asha. C'est une bonne idée de montrer à quel point il est violent sans ajouter un autre acte violent (une tentative de meurtre ça suffit je pense XD). Après pour Asha c'est plus traumatisant mais elle est du genre à (trop) encaisser. Mais t'as raison je vais essayer de modifier un peu ça.
"Ah. Bon. Ben écoute, c'est fait. On l'appelle comment ?" mdr c'est un bon résumé
J'espère du coup que tu as compris pourquoi Lohan se laisse facilement convaincre par Clervie quand elle lui demande de raccompagner Asha. Je pouvais pas te le dire à ce moment-là mais elle l'a influencé, sinon il aurait pas accepté comme ça.
Plus de description ? Du paysage ? Moi qui croyait en faire trop XD
Ah... le pourquoi du comment... je me fais taper si je dis que la réponse arrive assez tardivement ? (eh t'as vu elle est douée pour trouver des surnoms à mes perso XD(dieu sait que c'est pas le premier))
Bisouilles <3 :P
Mmmmh, ce que tu dis est pertinent, je vais essayer de l’appliquer mais bon c’est délicat
<3
Le fait que la question de le garder ou non soit posée avant la question de NON DE DIEU MAIS POURQUOI CLERPUTE A FAIT CA ??? me perturbe aussi... le fait qu'elle donne pas de réponse et que ça les rende pas dingues...
tout ça est tellement glauque et space O_____O
Mais en meme temps... nan ma suspension d'incrédulité à un peu tangué mais au final elle tient le coup. Parce que Asha est si spéciale. Ca n'empêche pas que je me sente mal a l'aise et dégoutée, je me dis que Asha devrait pas accepter ça aussi simplement et Lohan il devrait péter un cable plus que ça, devenir fou... tout ça est trop malsain... mais incohérent, je sais pas. La situation est tellement bizarre que vas-y pour estimer la cohérence xD
D'autre part... toute cette partie dans l'imaginaire, le monde de Lohan tout sec et moche, celui d'Asha si beau maintenant abîmé... le fait qu'elle ait perdu les étoiles... tout ça est TROP BEAU ! TROP TROP TROP BEAU ! poétique, plein de symboles, pur... j'ai adoré <3. Je trouve que t'as fait tellement de progrès depuis Clockgirl (qui était déjà bien)!
Je m'attendais pas à ce qu'ils soient fait prisonniers par quelqu'un d'autre que Clervie, je me demande qui c'est.
J'aurais moi aussi préféré que Kurtis reste à l'abri...
Bah disons que Lohan était en train de péter un câble et que du coup ça s'est enchaîné comme ça...('fin moi je veux qu'il devienne pas assez fou mais il a quand même failli tuer Clervie donc... je veux dire il a juste appris qu'il allait être papa XD est-ce que ça vaut un meurtre ?)
Ça me rassure que finalement tu sois pas totalement sortie du truc.. Comme ça fait longtemps que j'ai inventé ça tout me parait logique et cohérent mais au moment de l'écrire je me suis dit "mais putain c'est grave WTF comment je vais faire avaler ça au lecteur ?"
Ow merci <3 merci merci merci merci ! (tu me rassures en disant ça!)
Réponse dans le prochain chapitre ;-)
Ah.... oui x)
Merci pour ta lecture et ton com' Soryfounette <3 à + sur KEM !
Mais ça m'a pas sorti du truc non... Asha l'a calmé, j'ai l'impression ? un peu ?
Mais carrément elle l'a calmé ! Ça s'est pas senti ? Pour moi c'était clair XD
M’enfin de toute manière je vais changer des trucs c’est sûr. Et vos com m’aident beaucoup <3