Demain, ils reviennent, ou du moins on l’espère. Ils ne sont là qu’à moitié, de simples corps inertes dans des caissons stériles. Des humains sans âmes, dans un laboratoire sans vie véritable. Depuis cinq ans, plus aucun cris ne résonnent dans les couloirs.
La scientifique finit d’écrire ces mots. Elle ouvrit la fenêtre et laissa le papier s’envoler. Elle savait mieux que quiconque que la nature portait aussi bien les joies que les doutes de ses habitants. Son regard se perdit un instant dans la forêt qui entourait le laboratoire.
Ils se réveillèrent presque simultanément. Lucie ouvrit ses grands yeux verts et observa ses camarades en phase de réveil. Ils grognaient contre ceux qui les avaient tirés de leurs caissons chauds, pour les laisser dans une salle où la température ne dépassait pas les vingt degrés. Elle s’assit en tailleur en attendant l’arrivée de leurs anges-gardiens. Les yeux rivés sur la porte d’entrée, elle ne broncha même pas quand Lou lui sauta dessus et que le reste des enfants le rejoignit. Ils se retrouvèrent un six sur un petit caisson, se poussant pour avoir plus de place. Pierre et Sarah grelottaient depuis le réveil. Ils se tenaient l’un et l’autre dans les bras pour essayer de se réchauffer. La porte grinça bruyamment, les faisant tous se retourner. Un scientifique entra, épousseta ses vêtements et les regarda.
— Ah vous êtes réveillés. Tant mieux.
Il eut du mal à masquer son sourire naissant. Tout en lui irradiait la joie et la bonne humeur, quelque soit la situation.
— Bah alors, vous ne me dîtes pas bonjour ?
Les six enfants étaient restés assis, immobiles, ne cherchant même plus à se bagarrer. Ils échangèrent des regards surpris et éclatèrent de rire.
— Si, si on arrive, confirma Django.
Deux scientifiques se joignirent au petit groupe pour les salutations. Les adultes prirent le temps de discuter avec chacun des enfants, avant tout pour s’assurer qu’ils étaient en bonne santé, mais aussi pour monter leur joie de les retrouver.
Dans les alentours de midi, Jacques fit son apparition.
— Vous faîtes quoi ? On vous attend depuis plusieurs heures.
Pierre écourta sa discussion pour lui répondre.
— Désolé, on n’avait pas vu l’heure.
— C’est pas grave mais dépêchez vous, on vous attend à l’infirmerie.
Jacques lui adressa un clin d’œil rieur et retourna à ses occupations.
— On doit aller à l’infirmerie. Jacques nous y attend. Les jumeaux, vous allez chercher des vêtements en plus.
Sarah et Pierre acquiescèrent sans protester, chose très inhabituelle chez eux. Ils aimaient les joutes verbales, comme ils préféraient les appeler.
Lucie, Django et Lou furent les premiers à se rendre à la visite médicale. L’infirmier les rassura quant à l’état de leur santé. Les jumeaux passèrent et Sören patienta dans la salle d’attente. Ses muscles se contractaient sous l’effet du stress. Le souvenir des ses dernières visites lui laissa un goût amer. L’infirmier n’était pas sûr qu’il se réveillerait à la fin du prochain Sommeil. Après une longue discussion, ils s’étaient mis d’accord sur un seul point, ils ne devaient rien révéler aux enfants.
Monsieur Laflaut ouvrit la porte et resta dans l’encadrement. Il ne voulait pas déranger son patient, conscient que sa visite durerait plus longtemps que celle de ses camarades.
— Prêt ?
Django releva mollement la tête. Il lui adressa un sourire et se releva. Chaque pas était une lutte interne pour ne pas faire demi-tour et retourner dans son caisson. Si il devait mourir, autant le faire dans un lieu qu’il aimait.
L’infirmerie était décorée de tous les dessins des enfants. Deux fauteuils se faisaient face dans un coin sous la fenêtre. Une bibliothèque et une table d’auscultation venaient finir l’ameublement. Malgré tous les efforts de l’infirmier, les lieux avaient une ambiance médicale et froide.
— Tu te sens comment depuis ton réveil ?
Monsieur Laflaut s’était assis dans son fauteuil préféré et faisait signe à Django de s’asseoir en face de lui.
— Alors ?
— Ça va. Je me sens plutôt bien.
Il prit des notes sur un calepin orange.
— C’est tout ? Tu es sûr qu’il n’y a rien d’autre. Même au fond de toi, là.
Il tapota son cœur. Monsieur Laflaut savait mettre les mains sur les failles de chacun. Il les creusait pour mieux les réparer ensuite. Django explosa en sanglots. Il ne savait pas comment lui expliquer qu’il ne voulait pas mourir, qu’il ne voulait pas inquiéter ses amis.
— Tu as peur de mourir c’est ça ?
Il sourit à travers ses larmes et prit le mouchoir que l’infirmier lui tendait.
— Tu sais, tu devrais arrêter de t’inquiéter. Je vais t’ausculter, on va voir si ça va mieux ou pas et on improvisera en fonction. Ça te va ?
Django murmura un oui inaudible. Il se leva pour rejoindre la table d’auscultation et s’y assis. Le contact du stéthoscope en métal contre son dos, fit se raidir Django. Il attendit que monsieur Laflaut finisse pour se lever.
— Au moins ton cœur et tes poumons vont biens.
Django monta sur la balance puis se plaça contre le mètre. L’infirmier nota les chiffres et fit claquer son calepin. Ce geste arracha un sourire à Django. Il savait que ça signifiait que monsieur Laflaut était content. Ils échangèrent un sourire entendu.
— Tu vas pouvoir rejoindre tes amis tranquillement, mon petit.
Django sortit avec l’impression qu’il volait sans toucher le sol. Il avait un poids en moins sur les épaules. Il courut le long des couloirs, saluant les scientifiques qu’il croisait. Il s’arrêta devant une porte verte qu’il poussa. Des cris et des voix l’enveloppèrent instantanément. “ On est vraiment de retour ” se murmura-t-il.
— T’aurais pût te dépêcher quand même.
Il esquiva sans peine le coussin que Lou lui lança. Les jumeaux se disputaient à table pour savoir qui avait copié l’autre.
— Je te dis que c’est toi.
— Ah bon et pourquoi ce serait moi ?
— Parce que mon pull je l’ai prit à dix heure onze et toi à dix heures quatorze.
— Oui mais moi j’avais décidé avant de quel pull j’allais prendre.
Lucie s’approche d’eux avec une mine dépitée.
— Vous pouvez pas arrêter de vous disputer. Vous avez toujours eut les même vêtements et c’est pour tous les deux votre pull du matin.
Les jumeaux lui sourire et entamèrent une discussion plus calme.
Django ne vit pas arriver le deuxième coussin, il se le prit en pleine face. Lou hurlait de joie dans toute la cantine.
— A part ça, vous êtes censés gérer la planète, c’est ça ?
Jacques le regardait, assis sur un banc. Il déjeunait avec les anges gardiens et leurs professeurs. Il jeta sur la salle un regard amusé.
— Oui mais on est que des enfants.
Ces mots sonnèrent comme une piqûre de rappel. Jacques avait tendance a oublié qu’il s’occupait d’enfants et non d’adultes.
— Oui c’est vrai.
Django s’assit sur un banc contre le mur, un poste d’observatoire parfait du quel il pouvait voir toute la salle.
Il ne bougea pas quand Sarah lui apporta un bol de lait et encore moins quand Pierre revint avec des tartines. Lou arrêta sa course devant lui.
— Tu manges pas ?
— Si pourquoi ?
— J’avais encore faim mais c’est pas grave.
Django déjeuna rapidement pour être sûr que personne ne lui vole son repas. Il laissa par mégarde trainer un fond de jus de fruit que Sarah s’empressa de finir.
— Désolée j’avais soif.
Ils étaient, pour la plus part, au tout début de leur adolescence et ils mangeaient deux fois plus qu’avant, si bien qu’à la cantine, les repas n’étaient plus prévus pour six mais pour dix.
Les enfants sortirent pour se rendre dans leurs chambres. Django les rejoint avec cinq minutes de retard. Il ouvrit la porte sur laquelle son nom était inscrit. Les rideaux baissés laissaient passer une lumière orangée. Il ouvrit la fenêtre et un courant d’air frais s’engouffra dans la pièce. Sa porte claqua et des cris montèrent dans les chambres voisines. Ses amis avaient apparemment eut la même idée que lui. Il observa sa chambre. Les affiches, la peinture et les dessins ne s’étaient pas décolorés. Son lit avait été fait et ses vêtements étaient pliés dans sa penderie.
Il s’assit sur son lit et passa sa main sur les draps parfaitement tendu. Aucun pli n’était visible à la surface.
Une sorte de nostalgie le submergea rapidement. Il ne comprenait pas comment il avait fait pour passer autant de temps sans voir ses amis. Il regrettait presque le temps où il vivait comme les autres enfants.
Jacques tapa à sa porte.
— Tu t’es habillé ?
Sans attendre la réponse, il entra. Il trouva Django assis sur son lit dans sa tenue de Sommeil.
— Bah alors mon grand, tu ne te prépares pas ?
Ses yeux se remplirent de larmes et elles coulèrent sans qu’il puisse expliquer pourquoi. Jacques s’assit à côté de lui et le serra dans ses bras.
— C’est normal d’avoir peur.
Jacques faisait partie des seules personnes au courant des problèmes de santé de Django. Il ne prenait que rarement de ses nouvelles oralement, préférant juger de lui-même.
— Monsieur Laflaut m’a dit que tes résultats étaient meilleurs, c’est au moins une bonne nouvelle, non ? Et puis tu sais, tu n’es pas le seul à avoir des coups de mou comme ça. Mon neveu qui avait votre âge il y a quelques années, pleurait souvent sans raison. Vous vous devez gérer beaucoup plus de choses que les autres, premièrement parce que vous êtes surdoués, mais aussi parce que vous traitez des affaires qu’aucun enfant de votre âge ne penserait avoir à gérer.
Ces paroles stoppèrent ses larmes. Il serra Jacques un peu plus fort dans ses bras.
— Ca va aller mon grand ?
— Oui je crois.
— Tu devrais rejoindre les autres. Ils t’attendent dans la salle de classe pour votre cours de mathématiques.
— D’accord.
Jacques détacha les mains de Django, lui adressa un dernier sourire et sortit de la chambre. Django se dépêcha de s’habiller et courut jusqu’à leur salle de cours. Ses amis étaient assis à leurs places respectives. Un nouveau professeur accrochait des affiches aux murs. Il se retourna à son entrée.
— Tu dois être Django, c’est ça ?
— Oui bonjour monsieur.
— Moi, je suis votre nouveau professeur de mathématiques. Assis-toi à ta place, le cours va commencer.
Les enfants le regardèrent se débattre avec une punaise pendant plusieurs minutes. Les murs blancs étaient maintenant couverts d’affiches colorées.
— Je pensais que ça vous plairait, ajout-t-il devant leurs mines étonnées.
Il sortit son livre et commença la lecture.
“ On va apprendre le théorème de Pythagore qui sert à calculer l’hypoténuse d’un triangle rectangle. L’hypoténuse c’est … ”
Pierre venait de laisser sa tête tomber lourdement contre son bureau. Aucun des six élèves de la classe ne cachaient leur ennuie grandissante. Même avec la plus grande volonté, il n’y serait parvenu.
— Pierre tiens-toi correctement.
Il releva la tête et adressa au professeur un regard plein d’ennui.
— Vous savez qu’on connaît ça depuis nos quatre ans. On est surdoués, vous n’allez pas nous occuper avec ces problèmes minables.
Leur nouveau professeur prit son livre de cours et son sac.
— Puisque c’est comme ça, faites sans moi.
Il sortit en criant, affirmant que ce n’était pas de petits morveux qui allaient lui faire la morale, qu’ils n’avaient qu’à se faire cours eux-mêmes, …
Anastasia ferma la porte doucement. Elle observa d’un regard complice tous ses camarades. D’un geste commun, ils explosèrent de rire.
— Vous pensez qu’on va en faire craquer combien ? demanda Lou.
— On en est à dix je crois.
Lucie sortit son cahier pour vérifier. Elle rigolait tellement qu’elle eut toute les peines à le retrouver dans son sac. Ses doigts survolèrent des formules et des calculs et s’arrêtèrent sur une page sur laquelle des carrés avaient été tracés.
— Dix c’est ça.
Elle prit son crayon et traça un nouveau trait.
Pauline, une de leurs anges-gardiens entra. Elle paraissait furieuse. Ses poings étaient serrés et ses cheveux décoiffés.
— Vous croyez que c’est drôle d’embêter un professeur comme ça ?
Un silence s’installa rapidement dans la petite classe. Plus un enfant ne bougeait. Ils baissaient tous le regard, n’osant pas croiser celui de Pauline.
— Vous… vous n’êtes que de petits morveux.
La porte claqua dans un grand bruit. Sarah rompit le calme de la scène en faisant tomber son stylo.
— Vous croyez qu’on a fait un truc pas bien ?
Elle le ramassa et regarda ses camarades.
— Quoi, c’est vrai, c’est quand même pas très gentil comme jeu.
Lou lui fit signe de venir. Il la souleva et l’assit sur ses genoux.
— Tu crois que les tueurs sont gentils ?
— Non mais…
— Et les personnes qui participent à des génocides. Elles pensent aux morts qu’elles vont faire ?
— Non.
— Alors tu vois, au final, ce n’est pas si méchant comme jeu.
Stressée par le doute qui commençait à s’installer en elle, Lucie couvrit des pages de calculs et de formules qu’elle récitait à voix basse.
Django et Pierre s’étaient mis à compter les livres de la bibliothèque pendant qu’Anastasia faisait un dessin d’un réalisme étonnant.
— J’ai pas raison les gars ?
Personne ne répondit. Ils étaient tous arrivés au même stade de réflexion que Sarah. Ils doutaient de la bienveillance de leur acte.
— Alors j’ai raison ou pas ?
Lou commençait à s’impatienter. Il ne voulait pas que ses amis se dérobent devant les plus petits du groupe.
— Tu sais, commença Anastasia, ce n’était pas vraiment gentil en fait.
Puis :
— Voir pas du tout. Il a sûrement eut de la peine qu’on le traite comme ça.
Lou les regarda, déçu de leur comportement. Il reposa Sarah au sol, se leva et quitta la pièce, non sans avoir fait claquer la porte.
— Et de deux, commenta Lucie.
Django arrêta de compter pour se retourner vers elle.
— Deux quoi ?
— Deux portes qui claquent aujourd’hui.
Il soupira, exaspéré par l’habitude qu’avait Lucie de compter tout et n’importe quoi.
— T’as vraiment noté ça sur ton cahier.
— Bah oui, regardes.
Elle brandit bien haut une page dont le titre était : “ portes qui claquent ”.
Cette acte fit sourire tout le monde. Ils reprirent leurs activités en attendant que Lou se soit calmé.
J'aime beaucoup l'idée de départ, ça laisse présager de pleins d'aventures.
Alors quelques petites remarques : je suis loin d'être une spécialiste mais je crois qu'il y a pas mal de fautes d'accords et de temps.
Ensuite, au début j'ai eu du mal à savoir qui sont les enfants et qui sont les adultes. Ce n'est que mon avis, mais pour moi il manque cruellement de descriptions, je crois que tu vas trop vite en écrivant, j'ai le même problème, comme j'ai tout dans ma tête, je crois que le lecteur l'est aussi et qu'il va tout comprendre d'emblée. Je ne sais pas si je suis très claire...
En tout cas, je lirais la suite avec intérêt.
Je relirai le texte pour corriger les fautes. Merci de l'avoir signalé.
Pour les descriptions, je vais essayer d'en rajouter pour que ce soit plus clair. C'est vrai que comme je sais qui sont le personnages, quel âge ils ont, quel prénom, … je n'ai pas vraiment donner d'indices qui permettraient de comprendre.
Merci pour ton commentaire.