Chapitre II : les cicatrices du cœur — Partie 1

Par Callie

01.

Il a le cerveau qui vrille, Ezio. Le visage de Naomi qui consume l’âme et l’esprit. Des traits familiers qui se confondent avec ceux d’Orion. S’il n’y avait pas eu Týr à ses côtés, s’il était encore dans cette maudite forêt, peut-être qu’il aurait pris une arme et l’aurait collée contre sa tempe. 

— T’as tout ce qu’il te faut ? 

La voix de son ancien mentor résonna dans le nouveau bâtiment dans lequel ils s’étaient installés un bref instant. Ezio avait eu la possibilité de se changer pour troquer ses vêtements déchirés avec quelque chose de plus propre. Il était en train de nettoyer son arme, assis à une table en métal, quand l’homme le tira de ses pensées en déposant un gilet pare-balles près de lui. Il leva un regard concentré vers lui.

— Ouais. 

Ezio passa un dernier coup de chiffon sur l’arme et replaça le chargeur. Il se leva et rangea l’arme dans l’étui placé à sa jambe puis enfila le gilet pare-balles sans un mot. 

— Tu ne m’as pas dit ce qui était arrivé à la Légion d’Or. 

— Les hommes de la Confédération, fidèles à ton père, ont pris peur pour la plupart quand la Ligue Rouge est devenue une véritable menace. Depuis des années, même si on se préparait au combat contre eux, on ne pensait pas que le mouvement allait monter en puissance aussi rapidement. À l’arrivée de la Ligue Rouge, beaucoup de membres de la Confédération se sont liés à eux pour des raisons multiples : ils croyaient davantage en eux, ils avaient été soudoyés, ils avaient peur. Les plus lâches ont rapidement changé de camp. On avait fait passé la Ligue Rouge pour des grands méchants depuis longtemps. Ils ont réussi à manipuler d’abord les grands bonnets puis ils se sont attaqués à la population en s’infiltrant ici et là sans que personne ne s’en rende compte. Une fois la population conquise, celle-ci a eu l’impression que le Roi Gordon leur avait menti depuis des années. Puis, tu l’sais bien, il était pas spécialement aimé. Après la mort de ta mère puis ta disparition, il est devenu pire que tout. Il laissait les rênes à Konvaelen et s’enfermait comme un ivrogne dans son palais. 

Týr prit une légère pause en sondant le regard de son ancien apprenti. Dans les yeux du gamin régnait une haine brûlante qui ne pouvait être ignorée. Depuis le décès de sa mère, il n’y avait plus que la vengeance dans son sang, attendant son heure pour passer à l’attaque. 

— La Confédération complètement disloquée, ton père perdait espoir. Il n’y a que l’armée, la Légion d’Or, qui lui est restée fidèle pour un temps. Au lieu de partir en mission, les escadrons d’élite, qui possédaient les membres les plus fidèles à ton père et les plus mûrement choisis, sont restés pour le protéger. On sentait la menace grandissante. Plus le temps passait et plus on entendait de rumeurs au sujet de disparition de membres d'escadrons. Jusqu’à ce que l’un de mes coéquipiers ne disparaisse à son tour. Le jour de l’explosion, je donnais cours. Le temps d’arriver au palais, ton père était étrangement décédé - pas de traces de luttes, pas de sang. L’impression d’une mort naturelle. Mais je suppose plutôt un empoisonnement par ton frère. 

— Il ne ferait jamais ça ! Il aimait beaucoup trop notre père pour faire ça. Même s’il était ignoble, ce n’était pas un tueur. 

— Il a pu en donner l’ordre, répondit aussitôt Týr. Mais, voyant qu’Ezio allait riposter, flanqué sur ses positions, il décida de reprendre ses explications. La Légion d’Or a été dissoute à son tour et aujourd’hui, je n’ai pas d’autres choix que de me cacher. 

— Comment est-ce que tu vas sauver Avalon à toi tout seul dans ce cas ? 

Týr lâcha les yeux d’Ezio et attrapa un sac à dos pour y mettre ce dont ils pourraient avoir besoin, laissant un lourd silence peser dans la pièce. Il n’y avait désormais que les bruits d’armes et de fermeture éclair dans l’air et le souffle rauque des deux hommes. À la faible lueur d’un néon, Týr mit son sac sur son dos et s’approcha de la table en métal pour y déposer un petit bijou technologique qui afficha instantanément la carte d’Avalon. Il pointa un bâtiment au nord-est de la ville. 

— Si les fidèles de la Légion d’Or ne sont pas nombreux, j’ai encore quelques personnes qui me doivent des services. On m’a informé qu’elle avait été aperçue par là. Mais Naomi est une ombre, elle est douée pour se fondre dans le décor. Et va falloir qu’on soit prudent. Sans compter les gardes qui rôdent. 

Le silence retomba à nouveau et les deux hommes quittèrent le bâtiment délabré sans un coup d’oeil en arrière.

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