Les jours, les mois et les saisons s'écoulèrent rapidement, et Elwyn atteignit l'âge de quatre ans.
Le petit garçon avait considérablement évolué en si peu de temps, en grande partie grâce à sa nature de demi-Entité.
Son développement physique correspondait à celui d'un enfant de six ans, tandis que sa capacité de communication et son intelligence égalaient celles d'un enfant deux fois plus âgé...
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Durant ces trois dernières années, j’ai appris à parler, à me tenir debout et à marcher sur mes deux pieds, ce qui m’a grandement facilité les choses pour mes explorations.
Malgré tout ce temps écoulé, mes problèmes de vision persistent. Heureusement, maintenant que je sais parler, je peux directement appeler à l’aide père-Ophélia ou père-Volden, même si ce dernier est moins présent en raison de son travail à la garde.
En ce qui concerne mère-Ophélia, je la trouve très gentille et bienveillante. Elle prend souvent de son temps pour m’apprendre de nouvelles choses, comme la lecture à travers des livres d'aventures qu’elle me lisait déjà avant.
Elle m'a également enseigné comment utiliser les gravures magiques de la baignoire pour que je puisse me laver seul. D'après elle, les gravures magiques sont très simples à utiliser.
Il suffit de prononcer l’incantation correspondant à la gravure que l’on veut activer. Il y en a deux pour la baignoire de la maison : une pour créer de l’eau, « Eau, viens à moi », et une autre pour la chauffer, « Eau, chauffe-toi ». Il suffit simplement de dire, « Eau, arrête-toi », pour arrêter l’incantation.
Il est important de savoir qu'une seule gravure ne peut être activée à la fois.
Quant à père-Volden, je trouve qu’il est quelqu’un de fiable et de sérieux, surtout quand il s’agit d’entraînement.
Bien entendu, il m’encourage à continuer son « entraînement physique et martial » tous les jours dans la maison.
D’ailleurs, j’ai reçu il y a peu de temps l’autorisation de mère-Ophélia pour pouvoir le rejoindre dans le jardin, sous sa supervision.
Maintenant que je sais me déplacer avec souplesse, agilité et équilibre, père-Volden peut me corriger dans ma posture et dans mes mouvements.
Il m’a offert une jolie épée en bois sculptée pour m'entraîner à refaire ses mouvements d'épée le mieux possible. Grâce à cet entraînement, je sens que les livres deviennent de plus en plus légers en main et que mon endurance augmente au fil du temps, me permettant de m’entraîner de plus en plus longtemps.
Cependant, il y a quelque chose que je ne comprends pas.
Après plusieurs entraînements avec père-Volden, il m’a un jour dit que j’avais des aptitudes physiques hors du commun.
Qu’est-ce que j’ai de si différent ?
Pendant mes autres occupations journalières, j'aime regarder mère-Ophélia préparer à manger. Elle possède une grande habileté avec le couteau et une grande délicatesse dans ses gestes et découpes.
J'aime aussi la regarder faire le ménage, car il s'agit de l'une de ses activités où elle utilise la magie. Rien que le fait de pouvoir voire la poussière se faire aspirée par un tourbillon d’air sortant de sa baguette en argent, rend la chose si simple et rapide.
La magie est, quand même, quelque chose qui simplifie beaucoup la vie du quotidien. Il suffit juste d’un coup de baguette pour faire sécher des vêtements venant d’être lavés, ou bien pour faire léviter un meuble pour pouvoir nettoyer juste en dessous.
Malheureusement, je suis incapable de faire la même chose qu’elle.
Et ce n’est pas faute d’avoir essayé…
Un jour, lorsque mère-Ophélia faisait la sieste, je lui ai emprunté sa baguette sans sa permission, mais j’avais eu beau faire et refaire ses gestes que j’avais vus tant de fois, aucune magie n’en est sortie…
Sinon, sur ces trois années passées, j’ai pu revoir la Divinité Ogme à chacun de mes anniversaires. C’est une Entité dotée d’une puissance inimaginable, mais il n’est pas méchant. Et à chacune de ses visites, il m’offre de nouveaux livres.
Il s’agit généralement d’écrits sur les différentes espèces peuplant le monde et sur les monstres qui l’habitent. Mais parmi tous ces livres que j’ai reçus, mon préféré reste celui qu’il m’a offert en premier. Ce dernier est uniquement consacré aux dragons et à leurs variantes et sous-espèces. Même si pour le moment j’ai encore beaucoup de mal à lire seul, les différentes illustrations, dessins et croquis détaillés me permettent de comprendre certaines choses.
Pour mère-Ophélia, ces trois années furent bien remplies. En même temps, elle est la seule magicienne et guérisseuse du village.
D’ailleurs, pour prouver sa fonction et son niveau de maîtrise de la magie de guérison, elle porte un pendentif en argent représentant un arbre de vie.
En plus de soigner les gens, elle se sert de la magie afin d’aider dans le quotidien du village. Par exemple, il lui est arrivé de faire tomber de la pluie sur les champs lors de périodes sèches. Ou bien de réparer des objets de valeur cassés ou abîmés accidentellement.
Et pour finir, elle s’occupe de moi. Je l’accompagne tous les jours dans son travail car père-Volden s’occupe de choses bien trop dangereuses pour moi pour le moment.
Mais de ce que j’ai compris, il s’occupe de la sécurité du village et aide à former les gardes. Il chasse aussi les monstres des alentours et il lui arrive d’aider les chasseurs dans leur traque aux gibiers.
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Cela fait maintenant un certain temps que je remarquer un changement dans l’ambiance générale de la maison et du village.
Personnellement, je trouve que père-Volden est devenu bien plus proche de mère-Ophélia que d’habitude. Il part travailler le plus tard possible et rentre le plus tôt possible. En plus de ça, les villageois se comportent de manière bien plus chaleureuse et aimable avec mère-Ophélia, et il m’arrive même d’entendre des « Mes félicitations », « C’est pour quand le grand moment ? » ou bien des, « Je prierais la Divinité Akeso pour vous », quand nous croisions une connaissance ou bien un patient.
Et parfois, après ce genre de phrase, les gens me regardent avec un grand sourire et me félicitent.
Pourtant, je ne fais rien qui mérite ces mots…
Je sens que quelque chose se passe avec tous ces messages, mais j’ignore quoi… Mais bon, je pense juste que mère-Ophélia attend le « bon moment » comme le dit si bien la Divinité Ogme.
— Certaines choses demandent de la patience. D’autres, une certaine maturité d’esprit. Et pour finir, il y en a qui demandent une certaine ouverture d’esprit. Pour obtenir le savoir, il faut pouvoir respecter tout cela, car certaines informations demandent à son possesseur d’être prêt, avant de le partager avec d’autres. Bien entendu, il y en a qui demande à son auditeur d’être prêt, pour pouvoir l’entendre et l’accepter. Mais le plus important dans tout cela, ce sont les mots à employer pour faire passer le message, car chaque mot possède sa signification, son sens et son pouvoir sur l’esprit des gens. Il faut donc bien choisir ses mots, afin de bien se faire comprendre et d’éviter tout malentendu et mauvaise interprétation. Et donc, le « bon moment » arrive, quand tout cela est réuni. Alors, patiente encore un peu Elwyn. Grandis, tu as encore tout le temps, avant de savoir. Et une fois ce savoir acquis, tu auras encore tout le temps qu’il te faudra, pour en apprendre bien plus encore…
Je me souviens qu’il m’avait répondu cela, après que je lui ai demandé des informations sur mes vrais parents.
Je crois que je vais devoir encore attendre un peu…
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Les jours, les semaines, les mois passèrent et je remarquai que le ventre de mère-Ophélia avait commencé à prendre de plus en plus de volume et avec cela, je la voyais aussi faire de moins en moins de déplacements au fil du temps qui passait.
Alors un jour, quand elle était allongée sur le canapé avec un livre en main, je voulus savoir ce qu’elle ne m’avait pas encore dit, en espérant que le « bon moment » soit arrivé.
— Mère-Ophélia ?
La jeune femme aux courts cheveux cendrés reconnut la voix d’Elwyn et posa donc son livre contre sa poitrine, se redressa doucement, puis tourna la tête vers le petit garçon en arborant un grand sourire.
— Oui, mon chéri, qui a-t-il ?
Le petit garçon à la courte chevelure bleu aile de corbeau se tenait droit face à la jeune femme et son visage arborait un air assez sérieux.
— Mère-Ophélia, est-ce que je pourrais savoir ce qu’il t’arrive depuis quelque temps maintenant ?
Ophélia regarda alors le petit garçon avec un air légèrement confus. En même temps, cette dernière n’avait pas directement compris le sens de la question.
Mais une fois qu’elle comprit, après quelques secondes de réflexion et un certain regard insistant sur son ventre, elle prit un air amusé.
En effet, il était rare pour Elwyn d’afficher un air si sérieux sur son visage et le fait qu’il s’inquiète pour elle, malgré son très jeune âge, lui fit aussi très plaisir.
— Oh ! Elwyn, tu t’inquiètes pour moi ?
Elwyn hocha alors positivement la tête en guise de réponse.
Ophélia prit alors le livre posé sur sa poitrine et le déposa sur la table basse, puis elle s’installa confortablement dans le canapé, avant de faire signe à Elwyn de s’installer juste à côté d’elle.
Le petit garçon s'exécuta alors et s'installa juste à sa gauche, puis la jeune femme commença son explication.
— Tu sais Elwyn, quand un homme et une femme s’aiment très fort, il arrive qu’ils décident d’avoir un enfant.
Le petit garçon regarda alors Ophélia avec un air perplexe.
— Alors… tu vas avoir… un bébé ?
La jeune femme acquiesça avec un grand sourire et prit ensuite, avec délicatesse, la main du petit garçon pour la poser délicatement contre son ventre.
— Tu vois, pour le moment, le bébé se trouve ici, dans mon ventre. Il est au chaud et en sécurité, comme tu l’as un jour été.
Le petit garçon caressa doucement le ventre d’Ophélia en faisant de petits cercles avec la main.
— Est-ce qu’il va bien ?
— Pour le moment, oui, et j’espère qu’il le restera jusqu’à la fin.
Le petit garçon s’arrêta de caresser le ventre d’Ophélia et se mit ensuite à le regarder fixement.
— Est-ce que tu sais quand il arrivera chez nous ?
La jeune femme se mit à réfléchir quelques instants avant de donner une réponse qui lui semblait la plus juste.
— Oh… je dirais qu’il lui reste au moins un quart d'année à passer dans mon ventre avant de venir au monde.
À cette réponse, Elwyn écarquilla les yeux de surprise.
— Tant de temps que ça ?
— Eh oui, il faut qu’il prenne son temps pour pouvoir se développer et grandir correctement.
— Je vois… Est-ce que tu sais déjà si ce sera un garçon ou une fille ?
— Oh non, pas encore. Et puis, j’aimerais garder la surprise pour le grand jour, répondit-elle avec un grand sourire.
— Je vois…
Le petit garçon commença alors à se perdre dans ses pensées pendant quelques instants, avant d’être interrompu par une question d’Ophélia.
— Mais sinon, toi, tu préférerais avoir quoi ? Un petit frère ou une petite sœur ?
Elwyn se mit alors à regarder fixement le ventre de la jeune femme pendant quelques secondes avant de répondre le plus honnêtement possible.
— Je ne sais pas. Je crois que… je n’ai pas de préférence…
À ces mots, le silence retomba dans la pièce durant de longues secondes, avant d’être balayé par une question qui taraudait le petit garçon depuis le début de la conversation.
— Mère-Ophélia, puis-je te poser une question ?
— Bien sûr mon chéri, vas-y.
— Tu as dit que quand un homme et une femme s’aimaient, ils peuvent décider d’avoir un enfant.
Ophélia prit alors un air intrigué, car elle ne voyait vraiment pas où le petit garçon voulait en venir.
— Oui, j’ai bien dit cela. Quel est le problème ?
Elwyn leva alors ses yeux directement vers ceux d’Ophélia et la fixa longuement.
— Ça veut dire quoi “aimer“ ?
À cette question inattendue, le visage de la jeune femme se décomposa petit à petit.
En même temps, Elwyn lui avait posé cette question les yeux dans les yeux, et Ophélia avait pu voir que ces mots sortis de sa bouche étaient sincères.
Cependant, cette question de sa part était à prévoir un jour, car les Entités sont connues pour avoir de très grandes difficultés à comprendre les sentiments des autres et à exprimer leurs propres sentiments. Et cela est plus flagrant chez ceux dont le Domaine régissant leur pouvoir n’était pas directement lié à un sentiment.
Voyant que le visage d’Ophélia changea de manière drastique, Elwyn commença à s’inquiéter.
— Mère-Ophélia ? J’ai dit… quelque chose de mal ?
La jeune femme se ressaisit aussitôt et se cacha derrière un sourire, afin de rassurer le petit garçon.
— Non. Tu n’as rien dit de mal. C’est juste que… je ne m’attendais pas à une question aussi difficile.
Le regard d’Elwyn devint alors interrogateur.
— Difficile ?
Ophélia acquiesça de la tête.
— Oui, il est très difficile de décrire précisément ce qu’est “l’amour“ à quelqu’un.
Le petit garçon regarda Ophélia avec perplexité.
— “Amour“ et “aimer“ veulent dire la même chose ?
Cette question estomaqua à nouveau la jeune femme, mais cette dernière réussit à rester le plus imperturbable possible.
— Oui. Enfin, en quelque sorte. Ce sont tous les deux des mots pour définir le même sentiment, mais pas à la même force…
Le regard d’Elwyn resta interrogateur.
— … On utilise “aimer“ quand on veut dire que l’on est attaché à quelque chose, par exemple, les fleurs. J’aime les fleurs. Alors que, on utilise “amour“ pour dire que l’on est très attaché à quelqu’un. Par exemple, je suis amoureuse de Volden.
Cette explication créa un court silence de réflexion de la part du petit garçon.
— Mère-Ophélia, je suis désolé, mais je ne comprends toujours pas.
Ces mots pleins de vérité faillirent faire pleurer la jeune femme, qui réussit quand même à contenir ses larmes, mais pas son expression faciale.
— Mère-Ophélia, tu vas bien ?
La jeune femme acquiesça de la tête, tout en essayant d’effacer cette expression de tristesse de son visage.
— Je vais bien… c’est juste que … c’est très difficile de faire comprendre avec des mots un sentiment que l’on ressent au plus profond de soi…
— Pourquoi c’est si difficile ?
— Parce que l’amour est un sentiment qui se vit. Quand on est amoureux, le ressenti est différent en fonction de chaque personne. Si tu veux, on peut dire que chacun aime à sa propre manière.
Cette réponse rendit Elwyn plus perplexe qu’avant.
Voyant cela, la jeune femme fit un sourire tendre au petit garçon, avant de le prendre dans ses bras et de le serrer fort contre elle, afin de le rassurer et de se rassurer.
— Tu sais Elwyn, je suis sûre qu’un jour tu comprendras ce qu’est “l’amour“. J’en suis persuadée.
— Je l’espère aussi…
Cette discussion permit au petit garçon de se rendre compte qu’il n’était pas encore suffisamment mature pour comprendre certaines choses de la vie et qu’il possédait des lacunes sur des sujets qu’il devrait déjà connaître ou bien comprendre…
Je viens de lire ton troisième chapitre. Je le trouve intéressant dans le développement de ton personnage, qui marque une vraie différence avec le genre humain.
Cependant, quelques passages m'ont laissé pensive.
Voici quelques remontées diverses où je pointe notamment les passages :
- "Malgré le temps écoulé, mes problèmes de vision persistent, mais maintenant" -> L'accumulation de malgré et mais se contrarie.
- "mère-Ophélia ou père Volden" -> oubli du tiret
- "Maintenant que je sais me tenir correctement debout, père-Volden peux me corriger dans ma posture et mes mouvements." -> par souci de réalisme, je me permets de te dire qu'un enfant commence à bien savoir se tenir debout entre un et deux ans, et ici ton protagoniste en a déjà quatre, donc normalement il sait se tenir debout depuis un bout de temps :)
- "père-Volden peux me corriger" -> peut
- "les monstres qui l’y habitent" -> qui l'habitent
- "Cela fait maintenant un certain temps qu’il m’arrive de ressentir un changement dans l’ambiance générale de la maison et du village." -> la structure de la phrase est curieuse. "Cela fait maintenant un certain temps" suggère une continuité, quand "il m'arrive de sentir" est plutôt ponctuel.
"Pourtant, je ne faisais rien qui mérite ces mots…" -> je ne fais rien (concordance de temps, tu es au présent dans ton récit)
"je dirais qu’il lui reste au moins une bonne demi-année" -> le ventre d'une femme s'arrondit assez peu avant le troisième mois. Aussi, il est d'usage (dans notre monde en tout cas !) d'attendre le troisième mois avant de révéler sa grossesse, le premier trimestre étant le plus dangereux. Encore une fois, je te dis ça par simple soucis de réalisme, mais à ton monde ses propres us et coutumes.
Bonne soirée !
Merci beaucoup pour ton retour et tes corrections, ça fait vraiment plaisir (la conjugaison va finir par me tuer).
J'ai pris en compte toutes tes remarques et fais les ajustements nécessaires (en espérant que ça fonctionne mieux maintenant).
En ce qui concerne la "révélation" de la grossesse, je veux bien te croire pour l'attente de trois mois. Le truc que je prends en compte, c'est le fait de ne plus boire d'alcool pendant toute la grossesse (on refuse poliment un verre après/lors d'une visite d'amis, après un service magique rendu et autres occasions de boire, ce qui peut être révélateur de la chose.)
Encore merci pour ton aide.