Pour conserver son calme, il abaissa ses paupières un instant afin de ressentir son environnement qui lui parut amical, l’odeur de brûlé s'estompa, laissant place à celle… Du bois en pleine forêt et de l’humus. Il ouvrit alors les yeux, leva la tête et distingua une nuée de lucioles venir à sa rencontre, illuminant l’immense cavité.
Il était dans un arbre, un arbre gigantesque dont les branches s'étiraient jusqu'aux étoiles, entourées de lucioles qui virevoltaient et paraissaient le saluer.
Il sourit, ouvrit une de ses mains à plat et l’une d’entre elles vint s’y poser.
Elle semblait le regarder, son abdomen lumineux grossit rapidement, lui laissant deviner une image floutée.
Épiphyte approcha son doigt, le contact était chaud et doux, la vision se fit plus nette…
… Il se vit dans la taverne du village, en face de Madenn, qui lui parlait, mais il n’entendait pas ce qu’elle disait. Il la trouvait belle et vivante, ce sentiment ou cette idée qui lui faisait tellement défaut depuis… depuis qu’il avait perdu son épouse et cessé de penser…
L'insecte bioluminescent parti de sa main en s’envolant, elle semblait heureuse. Épiphyte sourit, un bonheur intense l’envahit. Il sentit ses pieds décoller du sol avec lenteur. Une deuxième luciole s’approcha de lui ; il ouvrit sa main, elle s’y posa.
… Il marchait sur une grande esplanade en forme de cercle, avec, en son centre, une Obélisque immense. Des vents tourbillonnants et improbables hantaient l’endroit. Une chose lui parut soudainement étrange : il n’y avait pas de couleur ni dans le ciel ni sur les pierres ou les pavés qui composaient l’ensemble… Sauf au pied de l’obélisque où une tache rouge et or insolente semblait défier l’endroit. Il décida de s’en approcher et marcha dans sa direction, sans avoir l’impression d’avancer. Il accéléra le pas et réussit à distinguer de loin une forme oblongue qui lévitait au pied de l’obélisque. Il ouvrit grand ses yeux, c’était une coiffe, une tiare…
Mais la luciole partit sans prévenir. Il avait continué à s’élever dans l’arbre sans même s’en rendre compte. Les lucioles l’entouraient toujours, mais quelque chose avait changé. Elles commençaient à s’agiter quand une nouvelle s’approcha d’Épiphyte, qui lui tendit la main à nouveau. Elle s’y posa… Son abdomen gonfla et une image trouble apparut, il patienta la caressa le temps que celle-ci s’éclaircisse et colla son regard.
… Il découvrit l’intérieur d’une maison, tout semblait calme, un feu crépitait dans l’âtre, un chat y dormait devant sur un fauteuil et un homme gardait la tête penchée sur la table, il écrivait… Une peur immense s’empara de lui en reconnaissant la personne, qui leva les yeux. Leurs regards se croisèrent. Il l’entendit hurler.
— TU DOIS PARTIR MAINTENANT !
Épiphyte cria à son tour, la luciole s’envola pour se mettre à tourner avec toutes les autres dans un Maelstrom effrayant.
La magie avait disparu, les lois de la physique reprirent aussitôt leur droit, ce qui fit le fit chuter de cinq mètres dans l’eau glacée. Il comprit en sortant la tête que la marée montait. Il avait dû rester des heures là-haut, perdant la notion du temps.
Il nagea pour remonter à contre-courant afin de trouver la sortie dans l’obscurité. Il réalisa que la hauteur du plafond avait effectivement une utilité. Il finit tout de même par boire la tasse en réussissant à s’extraire, puis une deuxième, malmené par les flots, avant de perdre connaissance, emporté par les vagues sur la grève.