Chapitre Quatre // Partie Une

Mardi 14 Octobre, Ezra

Je n'ai toujours pas revu Alex depuis le mariage. En trois semaine, je ne pense pas que sa rancune se soit évaporée... Et vu les propos qu'il m'a tenu ce soir là, je pense que je suis parti pour plusieurs semaines encore. Mais je relativise! Si on se voit assez souvent, il m'en voudra moins longtemps, puisqu'il aimera ma formidable personnalité!

Franchement, de qui est-ce que je me moque... Il m'en voudra jusqu'à la fin de ma vie, c'est sûr! D'ailleurs, cette fameuse vie risque bien de se terminer ce soir. C'est bien, ça voudra dire qu'Alexandre ne m'en aurait voulu que trois semaines; on ne peut plus être fâché contre un homme mort. C'est pas beaucoup, au vu de ce que je lui ai fait! Et même si c'est lui qui fini par me tuer pendant la soirée, ça voudrait dire qu'on sera au même niveau, et donc qu'il ne pourra plus m'en vouloir, même s'il le veut - il aura perdu son droit!

Est-ce que je stresse pour ce soir? Oui, parfaitement. Je sais parfaitement pourquoi ma soeur a organisé ce dîner: elle veut qu'Alex et moi, on se réconcilie. Et je ne demande que ça! Notre soirée ensemble, au mariage, était géniale! Je me suis amusé du début jusqu'à la... Enfin non, la fin n'était pas marrante. Mais c'était une bonne soirée quand même! J'ai bien senti que quelque chose se passait entre nous, mais ce quelque chose s'est... Cassé, en quelque sorte, lorsque je lui ai avoué que c'était moi qui avait gâché sa surprise.

Enfin, toujours est-il que ce soir, je vais revoir Alex, et que ça va très probablement mal se passer. Ma soeur voulait certainement bien faire, mais ça ne va pas marcher, j'en suis certain.

J'arrive finalement devant la maison de Denise et Charlie, un peu avant l'heure annoncée. Je me dis que si Alex arrive après moi, il choisira comment il veut me saluer. Je sonne, et ma soeur m'ouvre directement. Comme à chaque fois que je la vois, je me dis qu'on se ressemble comme deux goûtes d'eau, en dehors du fait qu'elle a les cheveux longs, et que j'ai de la barbe. Nos yeux sont identiques, comme la couleur de nos cheveux; couleur qui se passe de génération en génération, chez les Ramirez. Tout le monde, dans notre famille, naît avec cette couleur proche du noir, mais pas totalement noire non plus.

Après avoir salué Denise, je rentre dans la maison. J'entends des voix provenant du salon, j'en tire donc la conclusion qu'Alex est arrivé avant moi - comment est-ce que j'ai pu penser que j'arriverais avant lui? Il m'avait pourtant dit qu'il aimait toujours arriver en avance, peu importe où il allait.

Je. Suis. Foutu.

Comme lui, je fais des plans dans ma tête. Et dans tous mes plans pour ce soir, j'arrivais avant Alex. Je fais comment, maintenant? Je n'ai absolument pas le temps de préparer un nouveau plan, je vais devoir me jeter dans la gueule du loup. Ma soeur voit visiblement que quelque chose ne va pas, car elle passe sa main sur mon bras, puis elle me précède pour entrer dans le salon.

Depuis que Denise et Charles sont revenus de leur voyage, je suis passé plusieurs fois chez eux, pour dire bonjour, prendre des nouvelles, boire un café... J'aime beaucoup leur maison. Contrairement à mon appartement, tout est décoré avec goût, on s'y sent bien. Chez moi, une odeur de renfermé stagne - pourtant, mes fenêtres sont ouvertes la plupart du temps. Mon propriétaire n'est pas trop d'accord que je décore à ma façon, alors les murs sont d'une couleur qui a certainement été posée avant ma naissance. La seule chose qui fait que je vis toujours là, c'est le loyer qui est assez bas que pour que je puisse me le permettre tout en mangeant pendant le mois. Lorsque j'entre dans la maison de Denise, je suis envahi par un sentiment de bien-être qui est indescriptible, et je le ressens à chaque fois que je viens.

Je rejoins tout le monde dans les salon. Alex et Charles sont assis dans le canapé, entrain de parler. Lorsque Denise et moi entrons dans la pièce, ils se tournent vers nous, et le sourire d'Alex disparaît presqu'entièrement. Il n'a pas l'air hyper content de me voir, mais il reste poli, et garde donc un petit sourire. Et je ne sais pas si je dois le prendre bien ou non... Les deux frères se lèvent et me font la bise. Je peux sentir la tension qui émane d'Alexandre lorsqu'il est proche de moi.

Ok, ce n'est donc clairement pas ce soir que je vais pouvoir récupérer mon "pote de mariage". On ne va sûrement pas se rabibocher avant quelques temps...

Pendant l'apéritif, la tension part un petit peu. On ne se parle pas encore - j'ai l'impression qu'il y a une certaine peur, des deux côtés. On se contente de parler avec Charles et Denise sans s'adresser directement la parole, et c'est plus que suffisant.

Avant de passer à table, je laisse les deux frères ensemble et je rejoins ma propre soeur dans sa cuisine. Je la trouve occupée à dresser les assiettes pour l'entrée, elle est très concentrée sur son ouvrage. Je l'observe pendant quelques secondes, puis je commence à l'aider: même si nous ne sommes que quatre, et qu'on est de la même famille, je sais que Denise aura tendance à passer une bonne quinzaine de minutes pour dresser une assiette. Des fois, je me demande pourquoi elle a choisi de devenir vendeuse, alors qu'elle aurait eu un franc succès dans la restauration. Mais bon, Denise n'est pas une Ramirez pour rien: lorsqu'elle décide quelque chose, elle s'y tient, et rien ne pourrait lui faire changer d'avis. Je l'aide à dresser ses assiettes, et à finir la préparation de ses autres plats; pour un simple dîner, elle avait décidé de mettre les petits plats dans les grands, quand un simple plat de spaghetti nous aurait tout autant convenu. Ma soeur aime montrer qu'elle sait cuisiner, et surtout qu'elle aime le faire. Lorsqu'on vivait encore chez nos parents, elle faisait des cookies, des crêpes, ou même des gaufres chaque week-end. Je suis toujours étonné de ne pas avoir gonflé comme un ballon, en fait.

L'entrée est bien vite avalée, une fois qu'on passe à table. Un débat a éclaté entre Alexandre et Charles, dont ma soeur et moi ne connaissons même pas le sujet. En tout cas, les observer nous a ouvert l'appétit, et nos assiettes se sont vidées en quelques minutes.

Je suis à peu près sûr que Denise l'a fait exprès, mais Alex et moi sommes assis l'un en face de l'autre. Même si nous n'avons pas vraiment parlé depuis mon arrivée, j'ai l'impression que la tension s'évapore petit à petit. Il semble plus à l'aise en ma présence, moins sur ses gardes. Peut-être que, finalement, je pourrais avoir une chance de me faire pardonner plus tôt que prévu?

Le plat arrive (en partie dressé par mes soins), et les conversations reprennent de plus belle. Cette fois-ci, ce sont Denise et moi qui avons un débat assez animé: est-ce que, oui ou non, l'espagnol devrait aussi être proposé comme langue à apprendre dès le primaire. Je savais que j'avais raison: l'anglais est l'un des langage les plus parlés au monde, bien plus que l'espagnol, donc il serait bien plus logique que ce soit cette langue là qui soit apprise en première, non ? Après, il sera toujours temps d'apprendre l'espagnol ! Mais non, pour ma soeur, l'anglais s'apprend plus vite que l'espagnol, donc il vaut mieux l'apprendre en premier, puis compléter avec l'anglais.

Charles et Alex se contentent de nous regarder. À certains moments, sans qu'on ne s'en rende vraiment compte, Denise et moi commençons à parler espagnol en passant d'une phrase à l'autre. C'est automatique, on n'y peut rien ! Le seul moyen pour nous de nous en rendre compte, c'est en regardant la tête des deux frères : d'un coup, ils ont l'air complètement perdus, et se regardent en pensant certainement "Mais qu'est ce qui se passe ?" En fait, c'est carrément hilarant à voir. Les joies de connaître des gens d'origine espagnole, je suppose! Notre débat dure encore un certain temps, et cette fois-ci, Charles et Alexandre nous rejoignent. J'ai de la chance: Alex est de mon côté, et Charlie est neutre ("Nan, je me mêle pas de ça moi, je suis la Suisse!"), donc, d'un certain point de vue, je gagne!

Le dessert arrive enfin: de la mousse au chocolat! Cette fois-ci, Denise ne s'est pas amusée à dresser des assiettes: elle a amené le plat, des bols et des cuillères. Je crois qu'elle râle parce que j'ai raison, ou alors elle a compris que, de toute façon, on ne ferait pas attention au dressage, tellement sa mousse au chocolat est bonne!

Je n'ai pas bu d'alcool de la soirée - pas une goutte, je vous assure. Et pourtant, j'ai une envie irrépressible de faire quelque chose de complètement fou. Je veux voir jusqu'où je peux aller avec ce cher Alexandre. Je veux m'amuser un peu avec lui, voir si j'arrive à récupérer un petit peu de l'ambiance du mariage ce soir. Il y a de fortes chances que je me fasse rembarrer, et pas qu'un peu, mais je ne peux pas m'en empêcher! La tension s'est presque totalement évaporée, alors soit ce que je vais faire va dissiper ce qu'il en reste, soit le mur va se reformer, et je devrai tout recommencer la prochaine fois. C'est quitte ou double, en gros. Mais je ne peux pas m'en empêcher!

Lorsqu'Alex sent mon pied sur ma jambe, sa tête se tourne violemment vers moi. Comme il était en plein milieu d'une phrase, il a dû reprendre contenance rapidement, pour ne pas que Charles et Denise se posent des questions. Il recule légèrement sa jambe, de quelques millimètres seulement, donc mon pied reste en contact malgré tout. Lorsque je commence à faire des mouvements de haut en bas, et de bas en haut, il commence à rougir, et bégaye sur quelques mots. Lorsqu'il finit sa phrase, pendant que son frère lui répond, il se tourne vers moi et me lance un regard noir. Puis, il recommence à faire comme si rien ne s'était passé, il continue à faire la conversation.

Ah, il veut donc m'ignorer? Faire comme si je n'étais pas là? Intéressant. Il ne retire pas sa jambe, donc c'est que ça ne le dérange pas tant que ça, au final. Si ça avait été le cas, je crois que j'aurais déjà volé au travers de la pièce, et que j'aurais atterri au milieu du salon des voisins.

Mon pied monte encore un peu plus haut, et j'arrive à son genou. Alexandre tente toujours de faire comme si rien ne se passait sous cette table, mais je vois que le rouge lui monte aux oreilles. Oooh, je commence à le perturber, c'est adorable!

C'est maintenant au tour de Charles et Denise d'avoir un débat animé. Comme j'étais trop occupé à embêter Alex, je ne sais même pas de quoi ils parlent. En tout cas, ils ont exclu, sans le vouloir, le beau blond en face de moi. Ses cheveux sont toujours attachés en chignon, et je me fais la réflexion que j'adorerais les voir relâchés. Il doit être tellement beau, avec ses cheveux tombant sur ses épaules...

Bon sang, jusqu'à Alex, j'aimais pas les blonds... Qu'est-ce qu'il me fait? Pourquoi fallait-il qu'il soit la perfection incarnée? C'est vrai quoi, avec ses cheveux, son sourire, ses yeux... On dirait un ange. Un ange qui me déteste sûrement, certes, mais un ange quand même!

Perdu dans mes pensées angéliques (enfin, avec que je m'imaginais faire avec Alex, je pourrais bien finir en Enfer), je n'ai pas senti qu'Alex bougeait sa jambe. Tout à coup, je sens son pied contre ma jambe droite. Il me jette un rapide regard avec un sourire en coin, comme pour voir ma réaction. Le sang me monte au visage, et son sourire s'élargit. Ah, il veut jouer? Très bien... Mon petit ange a intérêt à être bon perdant, parce qu'il va vivre la pire défaite de sa vie!

 

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
drawmeamoon
Posté le 31/05/2021
« Un ange qui me déteste sûrement, certes, mais un ange quand même! » Et un ange a qui tu fais du pied OKLM sous la table alors qu'il te lance un regard noir mdrr Le culot d'Ezra me fera toujours rire

Je rejoins l'avis d'Ana d'ailleurs sur le faite qu'Alex se prête vite au jeu, mais j'imagine qu'il prépare sa vengeance dans sa tête xD
Saamodeus
Posté le 17/03/2021
Ezra: est dans la merde depuis ce qu'il à fait au mariage
Also Ezra: ET SI je tentais une action ultime de type faire du pied à Alex, quitte à perdre tout ce que j'avais avec lui.
Une idée brillante
Charlie L
Posté le 19/03/2021
C'est quitte ou double x))
Vous lisez