" Nuit d'effervescence. "
Minuit passé. Lumière tamisée et mouvements contrôlés, j'ai le visage d'un ange aux instincts diaboliques alors que je m'épuise dans la danse. De fil en aiguille, je danse, encore et encore. L'alcool me fait vaciller et mes yeux sont envoûtés par la drogue de l'amour.
Sans trop tarder, j'aperçois Freya se frayant un passage jusqu'à moi, comme une jolie fleur d'été..., furieuse.
— Mais t'es une grande malade de disparaître sans prévenir !, s'écrit-elle alors que j'éclate de rire. Arrête de rire, Olivia, il n'y a rien de drôle !
Dit-elle ? Sérieusement ? Celle qui me lâche pour les bras chaleureux d'un mec inconnu ?
L'indignation se lit sur son visage pendant qu'elle s'empresse d'empoigner ma veste noir, me stoppant net dans ma danse lascive. Heureusement, j'ai encore un peu d'humour, même à cette heure-là de la nuit.
— Ne tire pas une telle tête ! Regarde ce que j'ai pour nous.
En fouillant dans mon sac, je sors un sachet contenant la moitié d'un comprimé bleu et un autre en entier de couleur rose. Merci, Justin. La drogue de l'amour se trouve juste là, sous nos yeux. Mon amie fronce les sourcils mais un air taquin se relève à la plissure de ses lèvres.
— Tu es folle, déclare-t-elle dans un rire. Où t'as eu ça ?
— Disons que j'ai sauté sur l'occasion.
Je fais sautiller mes sourcils plusieurs fois.
— T'as baissé ta culotte ? demande-t-elle avec sous entendu, me scrutant d'un air filou.
Mes lèvres laissent échapper un rire grave qui se casse. Amusée, je ne réplique pas, préférant la laisser dans le doute. Je pose mon sac à mes pieds et ouvre le sachet. Difficulté à se procurer quoi que ce soit, je ne peux m'empêcher de sourire en repensant à Justin.
— T'es prête ?
— Toujours.
— Tu ne veux pas connaître les effets avant d'en prendre ?, je la questionne, tout posant mon regard stupéfait sur elle.
— Non, j'en ai à foutre.
Instinctivement, mon amie attrape la moitié du cachet, le dépose sur sa langue et l'avale du mieux qu'elle le peut, sous mes yeux amusés.
Une fois ingurgités, nous avons préparé un plateau aux tentations liquoreuses avant la montée des effets. Le shot que je dévore des yeux, je ne tarde pas à m'accaparer de ce dernier. Un tout premier shot que l'on engloutit ensemble.
— Tes parents sont encore absents ?
Ma question le fait grimacer. Freya s'enfile un deuxième shot, comme pour mieux la digérer.
— Comme d'habitude, en voyage et cette fois-ci, ils ont opté pour la Thaïlande.
Souvent toute seule dans sa grande maison, elle s'adapte à la solitude. Le tableau est déchirant. Une mère qui ne pense qu'à l'argent. Un père qui se torture à satisfaire sa conjointe afin que le navire familial ne coule pas.
Mon amie a pour ordre de ne pas gâcher son avenir, ni de salir la réputation de son nom. Princesse isolée dans sa tour d'ivoire qui comble un manque d'amour dans les festivités et les relations sans lendemain.
— Je suis désolé que t'aies eu une année de merde, ai-je finis par répondre simplement, un sourire compatissant aux lèvres.
L'absence de ses parents lui fait éprouver une souffrance constante. La maladie de ma mère m'a rendue malheureuse. Nos tourments ne sont pas les mêmes, pourtant, nous ressentons la même douleur dans le creux de notre cœur.
— On a peut-être la possibilité de prendre un virage à 180 degrés d'ici la fin de l'année, histoire de la rendre meilleure, annonce-t-elle en attrapant un troisième shot.
Son verre tinte contre le mien en guise de promesse silencieuse que nous faisons toutes les deux ; affronter l'année ensemble.
— Evan m'a dit que ta mère était revenue..., comment tu te sens ?
— Elle a tenté de voler nous bouffe, alors... je me suis sentie en colère aujourd'hui.
— Pourquoi elle a fait ça ?
— Aucune idée.
Haussement d'épaules que j'ajoute avant de me pincer les lèvres.
Le conflit et les vices sont ancrés dans nos veines. C'est la génétique des Ivywreath. Nous avons beau tout faire, il y aura toujours un drame, quelque chose qui bouleverse tout. Vivre chez moi, c'est s'enraciner avec le chaos. C'est apprendre à garder la tête haute et à se défendre contre des fantômes impossibles à saisir.
La fin de l'été approche, tout va finalement se conclure dans les mois mois. J'appréhende la fin du lycée, comme on appréhende un chat sauvage : tout en douceur et patience.
Sous mes yeux vitreux, Freya disparaît avec jeune homme, me laissant planter là. Je la cherche du regard, mais c'est peine perdue, elle n'est plus là. Vu notre état, je m'inquiète. Inévitablement, j'attire d'autant plus les mecs, étant seule. Alors je choisis une solution de repli.
Dans l'espoir de retrouver Evan, je me dirige, tant bien que mal vers la cuisine, me frayant un passage dans la masse de gens. On m'aborde plusieurs fois, en s'attardant un peu trop autour de moi.
Je ne me sens pas si bien que ça, finalement. Ma tête tourne légèrement, alors je tente de m'extirper de tous ces mâles en chaleur. Toutefois, une silhouette masculine me barre le passage.
— Laisse moi passer ! me suis-je exclamée froidement, les dents serrées, tandis que je reconnais All Black.
Seulement, la musique ambiante couvre mes mots, et le type ne bouge pas d'un poil. Je déteste me sentir faible face à quelqu'un et l'ecstasy dans mes veines ne m'aidera pas à réagir, je le sais.
Dans mon état normal, il aurait pris une gifle et aurait fait trois tours dans son slip. Quoi qu'il, je n'arrive pas à faire ressortir mon côté sauvage, impulsif. Je suis bloquée.
— On n'a pas terminé notre conversation, m'annonce-t-il, une main dans la poche de son veston grande marque, l'autre tenant un contenant en verre ou danse un liquide ambré.
A cet instant, je me retrouve dans une situation de tension nerveuse. Mes mains tremblent, mon myocarde s'affole et mon corps est endolori. L'exaspération se lit aussitôt sur son visage, tandis que je mords l'intérieur de mes joues.
— Tu sais, tu m'as donné chaud tout à l'heure, déclare-t-il, en se mordant les lèvres.
Mon sang se glace. J'ai littéralement envie de lui crever les yeux.
— Espèce d'abject et répugnant cafard ! ai-je pesté, alors que je commence à devenir faible, tenant à peine debout.
Quand derrière All Black surgit un visage qui ne m'est pas du tout inconnu, celui de Justin.
— Est-ce que tout va bien ? me demande-t-il alors que je ne réponds pas, puis il regarde All Black et inspire fortement.
— Et t'es qui toi pour interrompre notre conversation ? Son père peut-être ?
Justin se contente de sourire, mais c'est un sourire à vous faire froid dans le dos, le genre de sourire qui ressemble plus à une menace qu'à une invitation.
— T'es peut-être un trou du cul de fils à papa, Logan, mais si tu tentes quoi que ce soit, je te jure que ça ne se passera pas aussi bien.
Muette, et surtout rétamée par l'euphorie, mon corps est présent, mais mon esprit est bien loin. Loin des conflits que je fuis, malgré que je puisse souvent les provoquer.
Est-ce que je suis lâche ? C'est fort probable.
Soudain, je me rends compte que les conversations autour de nous se tiennent désormais à voix basse, comme pour ne rien rater du spectacle. Je suis gênée. Mon propre reflet m'échappe, se perdant dans mes pires travers.
— Je te conseille vivement d'aller voir ailleurs, menace Justin.
Et il s'avance vers All Black, comme une hyène qui encercle un lion.
— Ferme ta putain d'gueule, Justin ! s'écrit All Black.
— Hé les mecs, relax, on se calme ! suggère une voix qui éclate dans la cuisine en les interrompant.
Mike Detrova, ami de Justin, qui a généralement un comportement intolérable envers l'être humain, vient de faire son entrée. Un physique légèrement trapu, il a les cheveux blonds courts et les joues légèrement roses. Issu d'une riche famille, son grand patrimoine lui permet de faire tout, et surtout n'importe quoi, notamment se prendre pour dieu. Je n'éprouve pas une compassion astronomique à son égard.
— Les gars, vous savez que ce genre de comportement pourrait vous attirer des ennuis ?
Mike joue. Un petit sourire se dessine au coin de ses lèvres tandis qu'il se déplace pour leur laisser quelques centimètres de libres à ses côtés.
— Et si chacun retournait à ses préoccupations, hein ? insiste Mike en posant sa main sur l'épaule de Justin.
Logan, alias All Black, me toise du regard, prenant le temps de m'observer de haut en bas.Puis il fait demi-tour, traverse le couloir et se perd à travers la foule.
— T'as déjà envie de te battre ?
— Cet enfoiré me sort par les yeux!, siffle Justin, prêt à contourner la silhouette de son ami.
— Je sais. Malheureusement, je compte sur toi pour te comporter correctement cette année. Et pas seulement que sur le terrain, riposte calmement Mike, en passant son bras autour de son cou.
Par politesse, j'aimerais rester juste pour remercier Justin, mais je me sens de trop, et ça ne me regarde pas. Alors que la conversation demeure, je me faufile derrière eux comme une petite souris et m'éclipse rapidement au salon.
— T'attires déjà les foudres ?
Automatiquement, je pivote vers cette voix élancée et je ne suis surprise de découvrir mon jumeau, le sourire hébété au bord des lèvres.
— Tu parles de All Black ?
Son regard est confus, dans l'incompréhension que je laisse planer et ça me distrait que chercher à le duper.
— Et toi tu parles de Logan ?
Je lui jette un regard égayé alors que le sien se fronce.
— Oui, je parle de lui. Un vrai enfoiré.
C'est avec un sourire amusé que je balaye mes mots d'un geste de la main.
— Ça fait un moment que je ressens l'envie de lui péter la gueule.
Un léger rire s'échappe de ma bouche. Décidément, Logan n'est pas apprécié et je risque, moi aussi, de me le faire avant la fin de l'année.
— Dis-moi tout alors, comment vas-tu ? À quel point la vie mondaine du quartier était morne durant mon absence ?
— Je vais toujours mieux quand tu es là.
Vérité écrasante et large sourire, parce que sans mon frère jumeau, j'ai du mal à vivre et à sourire.
Il a un style grunge très affirmé, influencé par des groupes comme Nirvana. Il porte souvent de gros pulls et des jeans déchirés. Ses cheveux sont courts, bouclés et bruns. Ses traits sont toujours fatigués, entourés de cernes. Il a une mâchoire carrée, mais un sourire charmant. Son regard est azur et profond.
— Tu as décidé de gonfler mon égo aujourd'hui, Olivia ? Ou bien vais-je finir par croire que je t'ai vraiment manqué, annonce-t-il avec une fossette qui s'étire à sa joue rose.
Toujours dans l'amusement, sourire en coin, bien qu'il y ait beaucoup de vrai dans ces paroles.
— Oh, au fait ! s'exclame-t-il en fouillant dans sa sacoche. Je t'ai pris ça, pour fêter nos retrouvailles.
— Un cadeau ? Décidément, l'université te réussit bien.
Paquet transmit. Un cadeau évident de par l'emballage que je déchire sans me faire prier. "Orgueil et préjugés", une œuvre de Jane Austen. Un grand classique de la littérature anglaise. Un roman émouvant et magnifique où la romance entre les différents personnages en fait quelque chose d'attachant.
Un présent hors du commun, loin de ce qu'il aurait pu offrir depuis sa naissance.
— Mais Cillian ! Tu as perdu la raison ?
La protestation se lit au fond de mes yeux tandis que la gêne prend petit à petit le pas sur mes pommettes. Mais Cillian n'en attend pas moins.
— Tant que ça sera possible, Oli, c'est à toi que j'offrirai des cadeaux, déclare-t-il avec un hochement de tête, certain de ce qu'il avance. Et n'en fais pas tout un foin, je l'ai volé à la bibliothèque. Lis-le et raconte-moi toute l'histoire.
Clin d'œil malicieux qu'il glisse avant de prendre une gorgée dans son verre.
— Comment se passe ta pré-rentrée ?
— Ne parlons pas de ça. Pour l'instant, je veux juste m'amuser et oublier cette putain d'université.
Si Cillian a un don pour tout retenir, que ce soit les cours, ou des souvenirs, à contrario, il n'aime pas beaucoup parler de lui. Et j'ai cette sensation étrange qui me submerge au moment où il me fuit du regard.
— Ca va ? ose-t-il me demander, pinçant avec douceur l'arrête de mon nez. Avec la rentrée, les problèmes financiers, et maman est revenue. Est-ce que tu tiens le coup ?
A peine revenue à la maison, il est au courant de tout. Je ne réponds pas tout de suite, préférant respirer avec lenteur.
— Il y a des jours sans et des jours avec, mais celui-ci vient de devenir un jour avec.
Je hausse les épaules avec nonchalance.
Le ressentiment d'abandon de nos parents qui est né ne s'est jamais tari. Et pourtant, hier, j'ai recherché ma mère dans toute la ville, comme une main tendue, presque incertaine, tremblante. Alors qu'elle n'en a rien à faire de nous.
Malgré les quelques coquilles, l'histoire m'intéresse beaucoup. Elle est intéressante et on plonge dedans, complètement. J'ai bien son jumeau, elle a redoublé, elle, pour ne pas être avec lui ? Ou peut-être ai-je mal comprit.
Hâte de voir la suite !
Oui effectivement, elle a redoublé, tu as tout bien compris. Encore merci et partage avec moi les coquilles hehe