Point de vue : lui
Ça me fait plaisir que maman m'envoie un sms. C'est gentil de sa part, d'engager la discussion, même par SMS. On ne se parle pas très souvent. On ne se voit que très peu. Un appel par-ci, un autre par-là. Mais on en reste là parce qu'on n'est plus si proches que ça. C'est pas souvent que je les invite mais je me suis dit que c'était peut-être le bon moment pour le faire. Je suis content qu'ils acceptent de venir au resto. Tous les trois réunis.
Ça m'a fait bizarre quand Sarah s'est assise pour me parler. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle me révèle tout ce pan de sa vie. Ça n'a pas dû être facile pour elle. Pourtant, elle est venue d'elle-même... Je n'ai même pas eu à lui forcer la main. De toutes manières, rares sont les fois où j'arrive à lui soutirer une quelconque information. Et cela, même en essayant de l'amener tout doucement à la confidence.
Elle a une vie de famille plutôt compliquée à vrai dire. J'aurais aimé le savoir plus tôt. J'aurais voulu l'aider et la soutenir dans tout ça. Ça me tue de savoir qu'elle souffrait pendant tout ce temps. Et moi, je suis à ses côtés depuis quelques mois et j'ai été incapable de le voir. Je ne l'ai même pas vu venir. Il y a des fois où je m'exaspère moi-même. De voir la stupidité et la naïveté dont j'arrive à faire preuve. Ça semblait pourtant si évident. Je m'en veux de ne pas avoir pu être avec elle dans ces moments-là. Mais d'un autre côté, je ne sais pas comment j'aurais pu le savoir de moi-même. Je ne pouvais pas non plus m'immiscer dans sa vie en un claquement de doigt alors qu'elle ne m'avait rien demandé. A présent, le plus important, c'est que je sois au courant. Et qu'elle sache qu'elle a quelqu'un qui sera toujours là pour elle.
Il n'y a que des émissions de télé-réalité en ce moment. C'est totalement dépourvu d'intérêt. Je mange avant de me mettre un peu au boulot. J'ai quelques devoirs à faire pour demain. Il ne me reste qu'à les mettre au propre. Quelques articles à éplucher et un exercice d'écriture. Ça devrait être fini en deux heures, peut-être moins Je m'installe, une tasse de café à ma droite pour rester éveillé. Il ne faut pas que je me couche trop tard pour éviter de sombrer dans le sommeil.
Il ne faut pas trop que je pense à l'enterrement parce que ça risque de me foutre en l'air. Non ! Pas une fois de plus. J'en ai marre de ces choses qui se répètent, sans arrêt. Il y a les enterrements, puis ces visions qui se passent vraiment. On ajoute Sarah à tout ça. Que de tristesse autour de moi, c'est déprimant. Que tout ça revienne sans cesse malgré moi. Surtout quand ce sont des trucs dont je veux me débarrasser à tout prix, des choses que je veux voir disparaître de ma mémoire. Même si je sais que c'est quasiment impossible. Ce sera toujours là quelque part au fond de moi. Comme une marque, une profonde blessure ou une grosse cicatrice. Et je ne peux rien y faire.
Mon portable vibre. C'est Sarah. Il y a une lettre sous la porte d'entrée. Je ne sais pas quoi faire. Ça n'a rien d'affolant, je ne comprends pas pourquoi elle panique. Mais c'est plutôt louche louche. Elle est comment ? Elle met seulement quelques secondes avant de me répondre. Blanche. Là, ça devient même flippant. Tu peux lire quelque chose ?
Sarah semble hésiter... La carte est à l'envers. Je ne sais pas ce qu'elle attend. Respire doucement et calmement. Tu vas la prendre et la lire tranquillement. Je sens une vibration presque instantanée. Je suis toute seule. Merde, ça ne m'étonne pas qu'elle soit dans cet état. Tout va bien, t'inquiète pas. J'essaie de la rassurer du mieux que je peux. C'est mignon, mais je suis plus une gamine, tu sais.
Elle est marrante, elle. Pourquoi tu m'as envoyé un message alors, si t'as pas besoin d'être rassurée ? J'y suis peut-être allé un peu fort là. C'est ma mère.
« Ma chérie,
Je sais que je peux me confier à toi. Je m'en veux d'être partie alors que ta sœur avait seulement quelques mois. Je m'en veux de vous avoir laissés seuls. Je suis désolée que papa se soit enfermé si longtemps dans son bureau. Je crois qu'il a fait ça quand il m'a aperçue dans ce centre commercial. Je crois qu'il essayait de me retrouver à l'aide des caméras de surveillance.
J'ai fait beaucoup de conneries dans ma vie. J'ai rencontré les mauvaises personnes au mauvais moment. J'ai dû changer de visage pour revenir ici et pour éviter qu'ils me retrouvent. C'est en partie à cause d'eux que j'ai atterri dans à l'hôpital. Je suis passée devant la maison peu de temps avant que ça n'arrive. Je ne savais pas qui prévenir et j'ai pensé à toi, au cas où j'y passe moi aussi..
Ta maman qui t'aime. »
Il y a le cachet de la poste. Elle doit être dans le seul hôpital de cette ville. Sarah m'a envoyé la photo de la lettre. Je ne sais pas quoi dire. Je t'ai envoyé un message parce qu'il m'a semblé important de t'en parler et de te la montrer. Je ne m'attendais pas du tout à ça. Je reste stupide, planté derrière mon écran, encore tout choqué par ce que je viens de lire. J'aurais pu y penser, que sa mère ait pu tenter de la recontacter après la première carte qu'elle lui a laissé. J'ai toujours l'impression d'être ce genre de type à côté de Sarah.
Excuse-moi, j'aurais pas dû réagir comme ça. Tu veux je vienne ? Je ne savais pas quoi dire d'autre. Non merci, ça va. Mais merci quand même. Je te comprends, j'aurais sûrement fait pareil à ta place. Je vais me coucher. On parlera de tout ça demain.
J'ai eu comme une impression de déjà-vu à la lecture de ce chapitre, et effectivement, après vérification, tu as posté deux fois le chapitre XVII. Je n'ai pas une mémoire extraordinaire mais la conversation entre Andrew et Sarah m'a mis la puce à l'oreille, vu qu'elle m'avait marquée à ma première lecture. Du coup, je ne sais pas si c'est corrigé par la suite, s'il manque un chapitre, ou si c'est volontaire (ce serait surprenant !), à voir.
Merci pour cette remarque ! Je vais corriger ça, ce n'était absolument pas volontaire (donc merci pour ton commentaire).