Trois ans plus tard.
Arthur passa par l’entrée en forme d’arc si caractéristique de la prison des femmes de Rennes. L’immense bâtiment en pierre de forme hexagonale était bordé d’arcades. Il traversa la cour centrale où l’on remarquait une belle fontaine et se dirigea vers l’accueil. On aurait presque pu croire à un joli ensemble si les fenêtres n’étaient pas parées de grillages ou de barreaux.
Il s’arrêta devant la baie vitrée pour jeter un coup d’œil à son reflet. En habit de civils, rasé à blanc, les cheveux bien plus courts que trois ans auparavant, il semblait s’être fondu dans le moule : Carla Cole n’allait pas aimer…
Il se présenta et obtint son heure de visite. Un surveillant pénitentiaire lui proposa de le suivre et il s’attacha à ses pas avec la précision d’un maître d’œuvre, ne souhaitant pas se perdre dans les dédales de la prison. À mesure qu’il approchait de la salle, l’anxiété montait en lui. Il avait tant imaginé ce moment ! Le surveillant le fit pénétrer dans une salle pavée où il repéra plusieurs tables et quelques personnes en discussion.
Il la reconnut dès son entrée. Debout près de la fenêtre, elle regardait l’horizon. Les souvenirs de sa première rencontre se superposèrent à sa vision actuelle. Elle avait très peu changé. Même silhouette, même coupe de cheveux, même style de tenue. À croire que la prison la maintenait dans une faille spatio-temporelle.
Arthur déglutit. La voir remua les vestiges du passé. Toute l’enquête d’abord, puis son procès. Il s’était tant battu pour fournir à son avocat les pièces prouvant son érotomanie, pour que sa peine soit réduite au minimum. Il avait insisté pour que plusieurs témoins soient entendus, Lucie Cruzet, Halima, Marco Cournat, Stéphane. Son carnet de notes fut aussi une preuve flagrante de son obsession pour Justin Cruzet. Une obsession qui aurait pu lui brûler les ailes, qui aurait pu la détruire.
Elle risquait plus de dix d’emprisonnement, et le tribunal statua sur trois années de réclusion criminelle. Il n’aurait pas pu obtenir moins, à cause de la récidive, mais il avait tout de même été déçu, lui qui croyait à l’acquittement.
— Mademoiselle Cole ?
La jeune femme se retourna et Arthur fut à nouveau saisi par son regard abyssal qui semblait sonder votre âme.
Un sourire apparut sur les lèvres de la détenue et Arthur sentit son cœur, pourtant usé par l’attente, battre plus fort.
— Inspecteur.
Ils se contemplèrent sans un mot, comme si chacun cherchait à déceler chez l’autre les changements que le temps avait opérés ; puis, elle se déplaça jusqu’à une petite table en fer et s’assit, droite, solide. Le lieutenant la rejoignit.
Il hésita à la vouvoyer, mais décida qu’il n’était pas là en tant qu’inspecteur, mais bien en tant qu’ami.
— Je suis content de te voir. Tu as l’air en forme.
— Je le suis.
— Pourquoi n’as-tu jamais accepté mes visites ? demanda Arthur.
Carla baissa les yeux, gênée.
— Désolée. J’en étais incapable. Osiris va bien ?
— Oui. Très bien.
— Et ton frère ?
— Très bien aussi. Il s’est marié, il y a deux ans. Je suis tonton maintenant d’une petite Emma.
Carla sourit en entendant l’annonce. Arthur haussa les sourcils, surpris que les bonnes nouvelles la fassent réagir. Où était donc cette femme désagréable qui se préoccupait seulement d’elle-même et de Justin ?
— Et toi ? Tu t’es marié ? poursuivit-elle en arrimant son regard au sien.
Arthur esquissa une mimique énigmatique et finit par avouer.
— Non, le mariage, les gamins, ça n’a jamais été une finalité pour moi. Je bosse à Nantes maintenant, mais certains collègues de Peillac me manquent. Ils viennent me voir parfois. Stéphane a eu son sixième enfant !
— Ah oui. C’est impressionnant, dit-elle avec un mince rictus. T’es toujours flic ?
— Non. J’ai démissionné. Je suis détective privé maintenant.
En disant ces derniers mots, il lissa le col de chemise en relevant le menton.
— Détective Privé, Arthur Jakes investigations.
Un silence accompagna sa dernière phrase et elle sourit. Elle entremêla ses doigts entre eux. Arthur savait qu’elle souhaitait prendre des nouvelles d’une autre personne alors il attendit qu’elle ait le courage de le faire.
— Tu sais ce que devient Halima ? s’enquit-elle d’une petite voix.
— Oui. Elle va très bien. Je suis allé la voir au gala de l’école de danse de l’opéra Garnier la semaine dernière. Regarde.
Arthur lui tendit son portable. La jeune femme se pencha en avant et récupéra fébrilement l’objet. Elle le posa sur la table entre eux deux. À l’écran, une jeune fille apparut : Halima, avec quelques dizaines de centimètres et kilos en plus. Elle était revêtue d’un juste au corps bleu nuit à manche longue. Une jupe fluide de la même teinte tombait sur ses jambes musclées.
Carla se pétrifia au moment où la musique résonna dans la pièce, ses lèvres blêmes se serrèrent l’une contre l’autre. L’adolescente se mit sur la pointe des pieds et leva doucement ses bras. Elle dansait avec une agilité et une grâce qui l’avait lui aussi subjuguée. Les doigts de Carla se mirent soudain à trembler et son visage s’assombrit, ses prunelles s’écarquillèrent, sa mâchoire frémit. Halima effectuait les sauts, les rotations, les pas de côtés tout en délicatesse et en force. Chaque partie de son corps semblait au diapason de la musique. Elle incarnait à merveille, la poésie du mouvement.
— Elle a le premier rôle, chuchota-t-il.
Carla porta un doigt contre sa bouche pour lui faire signe de se taire. Son regard ne quittait pas les figures de la petite, les arabesques et les pirouettes. Un jeune homme rejoignit l’adolescente sur la scène, positionna ses mains sous ses aisselles et la souleva comme si elle ne pesait rien. La jeune fille parut s’envoler. Il la fit tournoyer avec lui pendant de longs instants. Les volants de sa robe voletaient autour d’eux comme des pétales. Arthur, toujours fasciné par la scène, finit par remarquer les larmes qui coulaient sur les joues de Carla. Sans un mot, il chercha un mouchoir dans sa chemise et le lui tendit. La jeune femme le récupéra sans quitter du regard le couple de danseurs. Elle sécha à peine ses larmes. L’inspecteur l’observa un long moment. Il était témoin de sa mélancolie, de ses émotions à fleur de peau et cela l’éclaboussait et lui retournait le cœur. Parfois, selon les figures, le visage de Carla s’éclairait d’une joie immense puis la tristesse déposait son empreinte sur ses traits.
Lorsque la vidéo se termina, Carla posa ses mains en coupe autour du portable, presque dans une position de prière. Ses lèvres tremblaient lorsqu’elle murmura, sans quitter de ses yeux mouillés, la surface noire du téléphone :
— Comment je peux avoir le film ?
— Je te l’enverrai quand tu seras sortie. Il y a la suite. Plus de trois heures de visionnage.
Elle sourit.
— Merci, Arthur.
Ils se fixèrent un instant alors que le lieutenant reprenait son bien. Il éprouvait, à se voir si près d’elle, une douce sensation dont il voulait pleinement jouir avant que cet instant unique, mais trop court, ne s’envolât, avant qu’on ne l’exhorte à quitter le lieu.
— Quel est le thème du ballet ? demanda-t-elle pour tenter de dissiper le trouble qui les entourait.
— C’est une revisite d’un mythe médiéval. Tristan et Iseut, je crois.
Les prunelles de Carla s’écarquillèrent et tout son corps se pétrifia. L’émotion la gagna à nouveau, mais il ignorait pourquoi. Elle se redressa subitement.
— Tu devrais partir.
— Je sais.
Il se leva et la suivit près de la fenêtre. Le regard de Carla sondait le paysage les environnant. Comment lui dire qu’il voulait faire partie de cet horizon ? Qu’il souhaitait la revoir à l’extérieur ? La collision des sentiments l’empêchait de trouver des mots, de formuler une phrase simple, lui si loquace d’habitude.
— Carla… Je… te donne ma carte, au cas où tu as besoin de… mes services.
La jeune femme s’empara du document et en lut les éléments.
— L’adresse de ton bureau, c’est trois Rue des Lilas ?
— Oui, pourquoi ?
— C’est pourri comme nom de rue. Ça fait pas du tout sérieux. Aucune chance que j’aille là-bas.
— C’est dommage, car je pensais que nous pourrions devenir collaborateurs…
— Moi ? Détective privée ? T’es toujours autant malade !
— Tu as des compétences dont je pourrai me servir…
— Tu délires, mon pauvre Arthur. C’est la vieillesse certainement.
— Oui. Ou l’espoir…
— Pourquoi tu ne me donnes pas ton adresse plutôt ? Moi, j’ai bien envie de revoir Osiris.
Le lieutenant sourit et lui demanda :
— T’as de quoi noter ?
FIN
Belle fin joyeuse mais,un peu tristounette.Je serais ravie que tu suive mon conseil;
Je pense que tu devrais écrire une suite avec Halima comme Héroïne ou bien quelqu'un dont on a jmais entendu parler qui vient en touriste et qui devient super pote avec le reste. je te donnes des arguments au cas où tu n'est pas convaincue:
•Beaucoup de gensont lu ton roman,et ils seraient enchantés de savoir quil y a une suite,sachant que ton histoire donne envie.
•Tu pourrais en faire une saga,ça marcherai bien.
•Ta fin est cool et peut terminer un livre mais,je suis sûre qu'un en pmus ne serait pas de trop.
•Argument le plus convainquant,je le lirais!!!
Mon autre histoire "Sillages" est plus cataloguée "jeunesse" que celle-ci, peut-être qu'elle te plaira aussi (et celle là possède une suite ;) )
En ce qui concerne l'obsession du papillon, écrire une suite serait tout à fait envisageable mais je dois d'abord le relire car il y a encore des choses à retravailler^^. Je garde en tout cas ta proposition en mémoire !
Quelle est ton personnage préféré dans cette histoire ?
A bientôt :)
À bientot.
Eeeeh bien, que dire ? Tout d'abord que les développements des personnages sont très intéressants, tu as bien construit le trio principal et on les suit avec beaucoup de plaisir je dois dire ! De même pour ta plume, efficace et propre, que je retrouve avec plaisir et qui embarque pile comme il faut
Dans les points un peu négatif, je trouve que ça manque un peu de pression. On a pas tellement peur pour les personnages ou pour l'enquête, on sait que le coupable sera trouvé et que Carla sera "libérée", du coup je dois dire que je suis un peu moins entrée dans l'histoire. Ça et quelques passages que j'ai trouvé un peu forcés au niveau "émotions" en mode un poil clichés, mais pourquoi pas ! Comme la relation un peu trop idéalisée Halima/Carla à des moments
Merci en tout cas pour la lecture <3 c'était un plaisir !
"Tout d'abord que les développements des personnages sont très intéressants, tu as bien construit le trio principal et on les suit avec beaucoup de plaisir je dois dire ! "=> Bon ça c'est déjà top :). Pareil pour tes remarques sur ma plume, cela me fait plaisir (même si je sais que j'ai encore de la manœuvre dans ce bouquin pour quelques fantaisies :p)
Je note pour les points négatifs, tu as raison, je vais essayer de plus travailler l'enquête et mettre un peu plus d'embûches pour Halima-Carla, histoire que cela ne soit pas trop cliché :p
Merci de ta lecture en tout cas ! Tes remarques étaient super intéressantes et je pense que je vais pouvoir bien retravailler le bouquin :p
Merci encore pour tes conseils, j’espère continuer à te lire.
Merci d'avoir lu mon histoire jusqu'au bout ! Je suis contente si l'histoire est plaisante :)
Pourrais-tu à me dire à quels moments tu as ressentis des longueurs ?
De rien pour les conseils ! Au plaisir :)
En ce qui concerne les passages de discussions entre les personnages, c'est sûr que ce ne sont pas des moments de grande action mais ce qui m'importaient surtout dans cette histoire, au delà de l'enquête policière, c'est de tisser des liens entre les personnages, de les faire évoluer ! :)
Cela fait maintenant quelques jours que j'ai lu cet épilogue, mais je tenais, malgré un certain manque de temps, à t'adresser ce commentaire <3 La fin de l'Obsession du Papillon ? Eblouissante, évidemment. Je suis tellement contente que Halima va mieux, et joue à présent le premier rôle de Tristan et Iseult ! (joli clin d'œil !) C'est en fait un sacré soulagement.
Et Carla <3
Avant de "refermer" définitivement ce livre, j'aimerais juste te dire que je trouve en cette histoire un réel potentiel à l'édition ; franchement, tu as toutes tes chances ! Quelques modifications notamment dans la "structure" du roman (et s'essayer davantage dans des tournures de phrases plus farfelues, moins "communes") et cette histoire aura atteint une certaine perfection, j'en suis certaine. Si tu cherches d'autres remarques et conseils, désolée, je ne saurais pas vraiment quoi répondre ;) (c'est plutôt bon signe, dans un sens, non ?) et c'est pourquoi je te renvoie à mes précédents commentaires...
Mais bon, bref, enfin...
Ils arrivent, les compliments ?
...Parce que je te tire mon chapeau, indubitablement ! XD Bravo, bravo, bravo pour ce merveilleux récit riche en suspens, en personnages profonds et en retournements de situations <3 (Tonnerre d'applaudissements) Tu as vraiment un don pour entraîner ton lecteur ; dès le premier chapitre, tu peux presque être certaine de le voir rejaillir à la fin ! Et, nom d'une soupière en ébullition, quelle fluidité de textes... <3 Le naturel des dialogues, le visuel des descriptions (peut-être pas assez régulières, d'ailleurs ;)) tu as une trèèèèès jolie plume, Makara, à déguster sans modération <3
Je pense que je n'ai pas fini de t'embêter, d'ailleurs... "Sillage" me tente bien ! ;)
De l'inspiration incarnée en étoiles filantes !
Pluma.
Ce com est beau cadeau de Noël dis donc <3
Tu es adorable et tes mots me touchent beaucoup <3
Je suis super contente si tu penses que l'histoire a un potentiel editorial !
Alors ça reste du 1er jet donc je vais relire et retravailler tout ça en relisant avec rigueur tes commentaires <3
Je suis contente si les persos et la fin t'ont plu ! Ça me rassure ! (hé maintenant j'ai envie d'écrire une suite qui se passerait 7-8 and plus tard avec halima danseuse étoile :p) . Je voulais terminer sur une note positive mais en même temps réaliste :)
Ohhh oui, reviens m'embêter pour Sillages :p
Je mets ma main à couper que l'histoire va te plaire !! En plus tu es pile le public cible donc je prendrai ton avis avec plaisir :)
Merci encore pour tes messages toujours encourageants et motivants, ils sont un vrai élixir de motivation !!
Pleins de bisous volants !
Makara
"Halima qui danse Tristan et Iseult ! "=> Oui, je le garde alors ? J'avais peur que ça fasse un peu too much (genre, faire pleurer dans les chaumières^^). Ahaha.
"Bravo pour cette belle histoire !" => Merci <3 C'était bien plus facile à écrire que Sillages ! mdr