Mon très cher Basile,
J’espère que tu te portes bien, de même que les affaires dont tu as la charge. Je ne me fais point trop de souci pour ta santé : tu as toujours été d’une constitution supérieure à la mienne, je te jalouse ce don de la nature depuis notre enfance. Pour ce qui est de l’administration, je n’ose imaginer qu’il ait pu se présenter un problème auquel tu n’aies su immédiatement trouver la meilleure solution qui soit.
Cela fait une éternité que je pensais à t’écrire, je suis si heureuse d’enfin m’y atteler. Comme tu peux t’en douter, ce voyage ne nous a guère laissés de répit depuis notre départ de Paris. Nous avons quitté la terre des tsars la semaine dernière, et à la suite de notre présent séjour en Chine, nous devons traverser la mer jusqu’à l’île japonaise. Ces régions gigantesques et leurs dynasties aux innombrables personnalités me font sincèrement regretter notre petit royaume qui m’est si familier. Ceci dit, je te souhaite vraiment de quitter cette île un jour pour découvrir le monde, c’est une expérience inimaginable.
Comme je te connais et que je sais pertinemment que tu ne prévois pas de partir où que ce soit avant un certain nombre d’années, je me permets de t’envoyer un tant soit peu d’aventures par le biais de ce paquet. Tu ne pourras pas m’en vouloir cette fois-ci de ne pas faire preuve d’originalité : ce cadeau ne viendra pas grossir ta bibliothèque. J’ose espérer cependant qu’il te distraira tout autant qu’un livre, et d’une manière bien différente.
On me l’a cédé sur un marché itinérant, dont la foule combinée de vendeurs et de visiteurs t’aurait assurément donné le tournis. Mon charmant mari était d’avis que je me faisais joliment embobiner en dépensant mon argent pour un objet si commun, et dont je n’avais nul besoin. Mais tu sais que je perçois parfois des choses indiscernables par la plupart des gens, et surtout par Léon qui a déjà quelque difficulté à utiliser convenablement ses cinq sens.
On m’a dit que cet objet n’était pas ce qu’il semblait être, car il était l’ouvrage d’une divinité capable d’incroyables métamorphoses. Ce talisman aurait le pouvoir de sonder le cœur de quiconque en devient le propriétaire, et de prendre la forme la plus à même de combler ses besoins. Tu dois sourire en lisant ces mots qui paraissent tout droit tirés d’un conte de fées. Je peux toutefois t’assurer qu’au beau milieu de ce marché, j’ai pressenti à quel point cette fable était vraie. J’en ai eu la confirmation peu de temps après.
Bien sûr, Léon était encore plus sidéré que moi de constater que le collier de bronze qu’il m’avait vu acheter et ramener à la maison s’était changé en un stylo-plume des plus élégants. C’est d’ailleurs avec ce magnifique objet que je t’écris, et c’est donc sous cette forme que je te l’envoie.
Je crois bien te connaître mieux que personne, mon Basile, et pourtant j’ai bien du mal à imaginer ce que pourrait devenir ce talisman dans tes mains. Il me semble que tu ne manques de rien. Tu es pourvu matériellement bien sûr, mais surtout tu te suffis à toi-même de la manière la plus admirable qui soit. Je m’amuse à rire de mon cher Léon, mais il faut bien avouer que sans lui et notre mariage, je ne me serais peut-être pas sentie assez courageuse pour partir accomplir le voyage de mes rêves. Je sais que tu n’es pas intéressé par une relation amoureuse quelle qu’elle soit, et je serais bien la dernière à te reprocher cette indépendance d’esprit. Néanmoins, cela me rend curieuse depuis des années : à quoi aspires-tu donc au plus profond de toi ?
Je t’entends déjà me répondre, plein de bonne volonté, que tu ne souhaites rien de plus que vivre un quotidien paisible, tout en faisant le bonheur de tes proches. En vérité, je crois que tu ne connais pas la réponse toi-même, mais peut-être que ce talisman pourra t’aider à en apprendre plus sur tes propres désirs. Je suis déjà impatiente que tu m’écrives pour me raconter ce qu’il en est !
Le temps me manque, je dois clore cette lettre. Prends soin de toi, mon très cher Basile, je te garde affectueusement dans mes pensées malgré la distance faramineuse qui nous sépare présentement.
Je t’embrasse,
Ta merveilleuse cousine,
Hermine
Je pense que tous les textes, y compris les nouvelles, tirent beaucoup de leurs richesses dans ce que comprend chacun.e qui le lit :)
J'espère que la suite a pu un peu t'éclairer (si tu es allé.e la lire).
Merci d'avoir pris le temps de commenter, j'apprécie beaucoup !
Effectivement, c'est une bonne idée de couper en deux chapitres, cela laisse le temps de se poser des questions... :D
Sur ce chapitre, j'ai juste une petite remarque sur un passage que je ne suis pas certaine d'avoir bien compris :
"C’est avec ce magnifique objet que je t’écris, et c’est donc sous cette forme que je te l’envoie" : Elle écrit avec le stylo plume, mais lui envoie le talisman c'est bien ça ? Si oui, alors je trouve que cette phrase n'est pas très claire. Si non, c'est que je n'ai pas compris ?
Oui j'avais hésité à découper, je suis contente que mon choix te convienne ^^
Alors en fait le talisman a pris la forme d'un stylo pour Hermine alors elle l'utilise pour écrire la lettre puis elle le glisse avec l'enveloppe dans le paquet :)
Je sais pas si c'est ce que tu avais compris ou non du coup ^^"
Merci pour ce premier commentaire ;)
J'adore le style de ton texte, le format de la lettre et la façon très classe utilisée qu'à Hermine de rédiger !
J'avoue que tes dessins m'ont tellement intrigués que c'est aussi un peu pour ça que je suis ici ;)
A présent, je suis intriguée par cette histoire de talisman et je ne peux pas m'arrêter à cette première lettre !
Des bisous :*
Ah mais je t'en prie, c'est un honneur de pouvoir combler ton ennui XD (il en faut plus que ça pour me faire flipper, et rappelle toi jusqu'où je suis allée pour KEM mdr, je suis la pire XD)
Je suis très contente que es dessins t'aient donné envie de venir lire, et très heureuse surtout que cette nouvelle te plaise !