Coeur doré.

Par Claire

Deux mois ? Trois ? Ou même plus ? Sûrement ? Ou alors peut-être ? Mathilde ne le sait même plus. Depuis quand vit-elle seule dans le noir ? Depuis quand est-ce qu'elle n'embrasse plus Louna avec la même intensité ? Depuis quand n'entend t'elle plus sa voix que comme on entend un echo ? Depuis quand a t'elle bien plus peur qu'avant que quelqu'un ne les voit derrière le gymnase en train de s'embrasser ? Depuis combien de temps son Soleil n'est plus apparu ? Et c'est quand la dernière fois qu'elle n'a pas fait de cauchemar du placard ? 

Toutes les nuits, elle redoute. Parce qu'il rétrécit, parce qu'il est de plus en plus sombre, de plus en plus éttouffant et surtout parce que c'est son propre père qui le bloque, c'est de pire en pire. Elle se rend compte que même lorsqu'on a touché le fond, on peut encore creuser (son père démarant la pelteuse).

Mais ce soir, ce sera définitivement fini. Ce soir, Mathilde a décidé que même si elle devrait y passer des heures, elle sortirait de son placard une bonne fois pour toutes, même s'il fallait l'éclater pour ça; cette nuit, l'éclipse lunaire serait finie, enfin.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Enfin, elle s'endort.

Et elle y est. Le placard est tellement petit qu'elle doit se mettre en position foetale, la tête dans les creux de ses genoux pour contenir. Il n'a jamais été aussi éttouffant. Mathilde fait de petites respirations pour économiser l'oxygène, et ça siffle comme un petit animal blessé. Son corps l'a fait encore plus souffrir que toutes les autres fois. Du bout de ses doigts endoloris, elle palpe le bois de la porte noueuse, et se prépare. Elle ferme les yeux, se dit qu'il faut juste qu'elle fasse barrière à la douleur qui la submerge, elle rassemble toutes ses forces, bloque sa respiration, l'air fait des tourbillons en boucles folles dans ses poumons, des petites tornades de volontés dans ses alvéoles pulmonaires et: 

 

La porte s'ouvre.

 

Toute seule.

 

Elle ne l'a pas touchée.

 

Vraiment. Toute. Seule.

 

Une bourrasque chaude et luisante en or l'enveloppe: la lumière.

Mathilde sort à quatre pattes, se relève malgré ses genoux tordus souffrants, baignant dans la lumière: ça y est, elle a vaincu son père, elle a retrouvé son Soleil.

Tout est écliairé par lui, qui de part ses flèches d'or, dépose de chaux baisers sur son corps meurtri qui en a tellement manqué.

Mais elle a beau regarder autour d'elle, elle ne voit pas son père. Elle fait le tour du placard minuscule: Comment j'ai fait pour tenir là dedans ?

Son soleil éclaire pourtant tout, mais elle ne le voit pas, il n'est pas ici... Se serait-il enfuit ?

Gling !

Mathilde sent quelque chose tomber de son cou. Elle le ramasse, plisse les yeux, la lumière rend l'objet doré brillant: c'est une clé.

 

D'un coup, elle comprend. Mathilde tombe à terre, les mains tremblantes: jamais son père n'a bloqué le placard. Jamais personne ne s'est appuyé contre cette fichue porte pour l'empêcher de sortir... Enfin si... Elle.

Mathilde avait la clé depuis le début. Ce n'est pas son père qui a volé son soleil, mais elle-même. La peur, le dégoût, tout l'a poussé à se mentir, alors qu'elle avait la clé depuis le début autour de son cou. Elle ne s'est pas sauvée d'elle même, de cette attirance étrangement agréable qu'elle se devait de trouver ideuse et culpabilisante: Mathilde est sortie du placard toute seule, personne ne pouvait l'y aider. Personne ne pouvait lui rendre son soleil, puisqu'elle l'avait déjà.

Au final, elle le savait sans être au courant.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mathilde se réveille, son réveil affiche minuit. Jasper entre dans la chambre, se pose contre son ventre, ronronne à en emplir l'endroit de ce bruit qui évoque le réconfort. Mathilde pleure, puis rit, et à l'impression que c'est  la toute première fois, comme si elle le redécouvrait; c'est comme un rêve lointain maintenant. Mathilde inspire, sourit, elle se sent bien, si bien, jamais elle ne l'a autant été ces derniers mois que là. Jasper n'a pas besoin d'arrondir ses pupilles pour voir dans le noir de la chambre chaude, puisqu'une chose l'éclaire fort: au creu de la poitrine de Mathilde, juste entre ses seins, une lumière rend dorée sa peau, comme avant.

Elle caresse le chat, la chaleur de sa main fait s'endormir l'adorable félin qui n'a de cesse de ronronner.

Mathilde se lève, main sur son coeur doré retrouvé: "Papa, j'ai quelque chose à te dire."

 

Elle ne sait pas ce qu'il va lui répondre, que pourra être sa réaction, s'il va être choqué (oui forcément), s'il va s'en ficher (peu probable), s'il va crier, ou pire ne rien dire du tout, mais elle s'en moque. Son soleil est là, son coeur brille de mille feux, comme cent mille lucioles, et rien ni personne ne pourra plus jamais l'éteindre.

Jamais.

 

Pas même les autres.

 

Pas même lui.

 

Pas même elle.

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Romane_Arène
Posté le 30/07/2025
Bonjour Claire !
Je suis toute nouvelle ici... et j’ai choisi ton texte comme première lecture :-)
Je l’ai trouvé très vivant et très incarné, avec de jolies formules (par exemple : "l'air fait des tourbillons en boucles folles dans ses poumons",)
A la lecture des commentaires, je découvre avec surprise ton jeune âge, et je ne peux que t’encourager à continuer d’écrire, car tu as déjà une voix.
Mon petit conseil si je peux me permettre : relis-toi ou fait toi relire pour corriger les coquilles et petits soucis d’orthographe (on en a tous !) mais c’est aussi comme cela qu’on affute sa plume.
Je te souhaite de plein de moments d’écriture à venir, avec beaucoup de soleil.
ClaraDiane
Posté le 24/07/2025
Coucou Claire ! J'apprécie beaucoup le choix de l'allégorie du coming out pour traiter le thème du soleil, c'est original ^^ ta nouvelle est forte et douce à la fois et, même si je n'ai jamais été victime d'homophobie, j'ai un mal et j'ai espéré avec Mathilde <3
Em Sharm
Posté le 21/07/2025
Coucou Claire,

Tout comme Synaelys, je te remercie pour l'expression "avoir le soleil" que je trouve très jolie ☀️

Je n'avais pas compris non plus avant de lire les commentaires qu'il s'agissait de cauchemars. 😅 Toutefois, j'ai beaucoup aimé que tu te réappropries le fait de sortir du placard, presque au sens physique finalement. C'est trop beau 💖

Ma lecture a été rendue difficile par les nombreuses coquilles et certaines formulations du coup, pour moi, l'écriture peut encore être retravaillée pour rendre ce texte encore plus fluide et puissant ✨

Je pense qu'il s'appuie sur ton vécu personnel et comme Rimeko, j'espère qu'aujourd'hui tu es épanouie et que tu peux assumer et vivre pleinement ton identité et tes amours ! 🥰

Je te souhaite une bonne continuation,
Em 🌸
Rimeko
Posté le 18/07/2025
Hello Claire !
Quelques remarques au fil de ma lecture :
- Déjà, cette note de l’auteur est beaucoup trop chou !
« fait sortir Jasper de son lit -sort de son roupillement quotidien de six heures et demie, à faire deux fois par jour- » -> le verbe (« sort ») est un peu flou...
« Papa, 'l’heureux élu' s’ap(p)elle Louna. » -> oui, je m’y attendais, mais... :’)
« Si tu savais papa, moi et elle derrière le gymnase c’est le show son et lumière. » -> oh ça m’a fait sourire, c’est grandiloquent et un peu ridicule, tellement adolescent, tellement touchant...
« et personnes (personne) ne regardaient (regardait) »
« Depuis combien de temps n'a-t-elle (n’a-t-elle) pas vu la lumière ? » -> houla, j’espère qu’on est dans le métaphorique... (quoique, ça serait pas ouf non plus)
« sa propre odeur corporel(le), preuve qu'elle est coincée dans cette (cet) endroit »
« Elle est dans un placard. » -> ooookay, je l’ai :’))
« Elle appuit (appuie) de toutes ses forces »
« elle s'éveille en sueurs (sueur) comme si son corps avait pleuré pour elle » -> OUCH, l’image est si bien trouvée...
« Depuis quand a-t-elle (a-t-elle) bien plus peur qu'avant que quelqu'un ne les voit (voie) » -> un peu lourd, comme tournure, d’ailleurs...
« éttouffant (étouffant) »
« Son corps l'a (la) fait encore plus souffrir »
« Tout est écliairé (éclairé) par lui, qui de part (par) ses flèches d'or »
« tout l'a poussé(e) à se mentir »
« au creu(x) de la poitrine de Mathilde »
« Mathilde se lève, main sur son coeur doré retrouvé: "Papa, j'ai quelque chose à te dire." » -> les guillemets en français ce sont ceux-là : « » (et j’aime beaucoup l’image du cœur doré d’ailleurs !)

Ah ouais, en parcourant les commentaires, je lis que le premier chapitre était aussi un cauchemar ! Je n’avais pas capté ça du tout, du coup j’ai eu une lecture bien différente du texte, puisque le risque que son père ne l’accepte pas était plus tangible.
Je préférerai presque que ce ne soit pas un rêve, tiens, parce que ce moment où un’e proche râle sur quelqu’un d’autre, sans savoir qu’indirectement ça touche celleux qu’iels aiment, c’est... vrai, et fort. Ça ne veut pas forcément dire, d’ailleurs, qu’iels n’accepteront pas... c’est différent quand ça touche quelqu’un qu’on connaît et qu’on aime, dans un sens comme dans l’autre.
(bon, ok, là en l’occurrence les propos du père sont hyper violentes... Il n’y a peut-être pas besoin de renforcer ça avec les majuscules, d’ailleurs, là ça m’a rendu la lecture un peu difficile sur cette réplique. Mais avec une remarque un peu plus ambiguë, peut-être, du style « ah mais on en voit trop à la télé, c’est un mode »...)

Je me suis tellement reconnue dans la gamine qui embrasse sa copine derrière le gymnase, entre des portes, tout à ces premiers élans d’amour adolescent mais attention, pas « tout à » quand même, il faut toujours s’assurer qu’on ne nous voie pas... pas tout de suite, du moins... :’) Ça sonnait très vrai.
Et si l’image du placard n’est pas nouvelle, ni l’idée qu’on ne peut se libérer que nous-mêmes en disant la vérité, et l’avis des autres ne pourra jamais faire aussi mal que les chaînes qu’on s’impose... ça aussi, ça sonne toujours vrai. Ton texte est touchant, même si à mon humble avis ton écriture peut encore évoluer et maturer un peu.
J’espère que, si ce texte n’était même qu’un petit peu inspiré de ta vie, que tu te sens bien dans ton identité et tes amours maintenant :) Et merci du partage !
Claire
Posté le 21/07/2025
Merci beaucoup pour vos retours ! J'ai 15 ans et je débute dans l'écriture, donc je suis contente que ce texte vous ait plu :).
Au plaisir de vous revoir bientôt !
RoseDL
Posté le 16/07/2025
Salut,
Tu as proposé un texte très fort, j'espère qu'il n'est pas (complètement) inspiré de ton vécu.
Lors du 2e chapitre on ne comprend pas tout dessus suite que c'est un cauchemar, c'est vraiment bien fait. J'ai vu dans les commentaires que le 1er c'était aussi un cauchemar, peut-être aurait il fallu que ça soit plus évident, que vraiment Mathilde s'est enfermée dans sa peur sans même tâter le terrain. Mais en tout cas c'est très fort et très réussi. Bravo
Syanelys
Posté le 10/07/2025
Coucou Claire,

Je ne connaissais pas l'expression "avoir le soleil". Je commence donc par te remercier pour sa signifcation. Ton récit révèle beaucoup d'angoisses et de thématiques pour lesquels la parole tarde toujours trop à se libérer.

L'histoire de Mathilde, tant sur son ressenti que le fond de ses pensées distillées entre la métaphore du placard et celle de la clé, est très percutante. L'enfermement sur soi, cette lourde sensation de ne pas avoir la légitimité de savourer son propre bonheur... Tout est très bien retranscrit.

Ton introspection est si réaliste que j'espère seulement qu'il ne s'agit pas d'une part de ton propre vécu. Que ton Soleil à toi continue d'éclairer tes cieux, quoi qu'il en soit !

Merci pour ton partage !

Au plaisir :)
Chris Falcoz
Posté le 10/07/2025
Coucou,
Et bien du coup, à la lecture de ces deux autres chapitres, j'ai l'impression que le premier chapitre également n'était qu'un cauchemar, pas seulement le deuxième ?
Si c'est le cas, alors c'est vraiment très bien vu, bravo ! :)
Si ce n'est pas le cas, c'est bien également, mais dans ce cas l'histoire aurait pu s'achever au premier chapitre, de mon point de vue (même si plus triste du coup).
Claire
Posté le 11/07/2025
Oui, le premier aussi était un cauchemar, retranscrivant sa peur initiale, qui se métamorphose par l'enfermement dans ses autres mauvais rêves.
Mer ci beaucoup pour votre commentaires :)
Raza
Posté le 09/07/2025
Fiouf, bonjour déjà!
Que voilà une histoire qui respire le ressenti avec une grande force. Que dire d'utile ? Je peux relever la typo "éttouffant" ne s'écrit qu'avec un seul t, mais n'est ce pas un peu dérisoire par rapport à ta proposition ?
Je trouve que tu as très bien utilisé les vides aussi, c'est très réussi.
Mon coeur encore serré te dis à bientôt, rt te souhaite tout le soleil des mondes !
<3
Claire
Posté le 10/07/2025
Merci beaucoup pour vos retours, je souhaite que vos soleils ne s'effacent jamais : )
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