DLP - Défi 4 - L'enfant et le froid

- Hé, Dwali !

- Qu’est-ce qu’il y a ?

- Tu trouves ça normal cette brume ?

- Qu’est-ce que j’en sais, moi ? Je ne suis pas devin.

Dwali et Sonnea arpentaient seuls la forêt. Dimyx les avait quittés en urgence pour se rendre sur le front, où la situation s’était détériorée depuis leur aventure avec le gardien de la forêt précédente. 

L’archer et l’épéiste marchaient seuls, au milieu de toute cette brume. Quelques fois, une feuille crissait sous leur pas. Non pas un visage, mais un bout de végétation. Quelque chose de mort, et non de vivant.

Au bout d’un moment, Dwali prit la parole.

- Tu as raison. Ce n’est pas normal cette brume. C’est vrai que nous sommes dans les montagnes, à proximité de la ville refuge de Crawford, mais quand même.

À ses côtés, la jeune femme réfléchissait.

- Peut-être qu’on se fait du souci pour rien et que c’est tout à fait normal, se risqua-t-elle. Le conflit actuel nous aura déformé la vue.

Dwali failli tiquer.

- Franchement, dit-il à la limite du rire, c’est bien la peine de me le faire remarquer si c’est pour dire le contraire ! Et je …

Une main vint l’interrompre dans sa lancée. L’épéiste venait d’apposer son gantelet de métal sur sa bouche, tandis que de son bras de libre, elle lui intimait le silence.

- Je crois que j’ai entendu du bruit, chuchota-t-elle.

Tout autour d’eux résonnaient une douce mélodie. Elle n’était pas tant audible que cela. Mais si on se taisait, il était possible de l’entendre en arrière-plan. C’était à se demander pourquoi ils ne l’avaient pas perçue plus tôt.

Dwali acquiesça, et Sonnea libéra sa bouche. Ensemble, ils s’approchèrent à pas feutrés de la source de cette musique inconnue, vers la partie de la forêt où la brume se faisait de plus en plus dense.

- Quelle poisse, lâcha l’épéiste. C’est à peine si je te devine dans tout ce brouillard.

Instinctivement, leurs corps se rapprochèrent tandis qu’ils avançaient au rythme de la musique. Lente, funèbre, comme une complainte. Mais sur qui ? Après de longues minutes, les deux soldats débouchèrent enfin sur une trouée dans la forêt, où une vision incroyable s’offrit à eux.

La brume s’était brusquement éclaircie, et laissait voir un immense lac gelé, au centre duquel se tenait une masse informe qu’ils n’arrivaient pas à distinguer à cause de la blancheur de la glace. Dwali maugréa intérieurement contre le brouillard, il amplifiait la réverbération de la lumière dégagée par la glace, comme si le lac tout entier brillait d’une intense lumière. La musique se faisait de plus en plus proche.

Ils s’avancèrent à pas lents et prudents. Leurs pieds parcouraient l’immense plaque de glace, laquelle émettait de petits grincements, semblables à ceux qu’il nous arrive d’entendre, la nuit, seul dans notre chambre. Sonnea eut un mouvement de surprise. Elle pointa le centre du lac.

- Regarde, chuchota-t-elle. C’est une personne.

­­L’archer approuva. C’était bien ce qu’il avait pressenti. Mais cela n’expliquait pas le caractère étrange de ce lac. Ils s’approchèrent un peu plus et découvrirent que c’était un enfant, vêtu d’un haut dépourvu de manches, de couleur rouge. Il semblait chanter, alors qu’immobile.

- Quel est ce prodige ? lâcha Dwali, étonné.

Comme en réponse, la musique augmenta en intensité. Non plus triste, mais poignante. Non pas bruyante, mais pénétrante. Déchiré par l’émotion qui l’assaillait, l’archer tomba sur sa face. À côté de lui, l’épéiste essuyait une larme du coin de l’œil.

L’enfant semblait tenir ses bras au-dessus de sa tête. Était-ce une position de danse, d’étirement ? Ils ne savaient qu’en penser. C’est alors que la musique s’arrêta, et qu’un long silence s’ensuivit. Le soldat se releva, aidé par sa compagnonne d’arme.

- Était-ce un codex, lui demanda-t-elle, un sort contenu dans la musique ?

Dwali regarda l’enfant droit dans les yeux. Alors il sut. Lentement, il déclara :

- En effet. Mais ce n’était pas ce que nous croyions …

- Comment cela ? l’interrogea l’épéiste, étonnée.

- Il m’a transmis un message.

- Lequel ?

L’archer inspira profondément. Le message était tellement simple qu’il relevait presque de la mauvaise blague.

- La glace, c’est dangereux.