Double Jeu

Mais enfin, Sally, vous avez perdu la tête ?! Qu’est-ce qui vous a pris de fricoter avec cette œuvre du mal ?! C’est vous Jeannine qui ne comprenez pas ! Cette brume est inoffensive ! Pourquoi l’avez-vous fait fuir ?! Inoffensive ?! ?! Vous ne pensez pas ce que vous dites ! Ou alors vous avez dû oublier que c’est cette… “chose”... "inoffensive" qui a emporté mon mari ! Comment ça ? Mais enfin, Sally ! Vous n’écoutiez pas ce matin ? Je suis désolée, Jeanine, mais si "être emporté par l’œuvre du démon" est pour vous une définition claire, elle ne ne consiste pas pour moi une description suffisante pour comprendre que vous parliez de la brume. Eh bien maintenant, vous savez. Jeanine avait jeté ces mots pour clore la discussion. Sally tenta une nouvelle approche. Elle radoucit sa voix pour essayer de l’amadouer. "Je comprends tout à fait votre peine et votre rancœur. Néanmoins, ne serait-il pas possible de nous réconcilier ? J’aimerai en savoir davantage sur cette brume…" Pour attirer la foudre des cieux, et puis quoi encore ? Je vous en prie, Jeanine, écoutez-moi… j’ai surpris plus tôt, "monsieur mon mari" qui s’entretenait avec cette “brume”. Il semblait l’appeler. Ne trouvez-vous pas cela étrange ? M. Lockheart ? Vous délirez. C’est impossible. C’est pourtant vrai. Et je vous assure Jeannine que si j’ai perdu la mémoire, j’ai conservé mon excellente vue. Jeanine resta silencieuse. Le curieux comportement de M. Lockheart avait réussi à éclipser sa colère. Mais elle semblait hésiter encore. Sally repris ses arguments : Si vraiment Jeanine vous êtes mon amie, croyez-moi sur parole. Aidez-moi à comprendre… Comment pourrais-je rester liée à quelqu’un qui me fait des cachotteries et qui fricote avec le “malin” comme vous dites ? J’ai besoin de savoir ! Je ne peux pas dire que j’apprécie l’odeur de cette histoire, Sally. Il ne faut pas prendre cette brume à la légère... Je ne sais pas ce que fait M. Lockheart avec cette brume, mais ce n’est pas normal. Elle se tut et resta un moment silencieuse. Ses yeux reflétaient la crainte. Sally insista à nouveau: Allez-vous m’aider ? Jeanine mit un temps avant de répondre. Mais on lisait de la détermination dans son regard. Cela va de soi ! Il en va de votre vie et de celle de Lucy ! Ce n’est pas de gaieté de cœur, mais je refuse d’avoir votre mort sur la conscience et constater que votre âme viendra hanter jour et nuit jusqu’à la fin de ma vie ! Sally sourit jusqu’aux oreilles en entendant la nouvelle. Elle sentait qu’elle avait une alliée fiable à présent. Merci ! Néanmoins, vous devez tout de même prendre du repos. Votre santé est toute aussi importante que cette histoire. Ne négligez pas votre sommeil, je vous prie. Oui, Madame ! Les deux amies se promenaient, l’une servant de canne à l’autre, gaiement. De retour dans sa chambre, Sally s’abandonna au pays des songes. Dans son rêve, il y avait une jeune fille qui semblait pianoter quelque chose. Une suite de notes ? de mots ? Sally n’aurait su le dire puisque la jeune fille n’utilisait aucun instrument. Il y avait bien quelques symboles d’inscrits aux alentours, mais elle n’arrivait pas les déchiffrer… Plus elle tentait de réfléchir, plus l’esprit de Sally se dispersait. Tout devint blanc. Blanc comme une page. Blanc comme la neige. Blanc comme dans un lit d’hôpital. Le sien. C’était déjà le matin. Elle ne se souvenait pas de son rêve, mais l’impression qu'il lui avait laissée était forte.
Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez