Embuscade

L’embuscade est une tactique militaire dans laquelle des belligérants se dissimulent pour attaquer les forces ennemies par surprise lorsqu'il passe devant leur position. Cette vile stratégie de la guerre est principalement pratiquée par les orcs et les satyres et les fées. En effet, montagnes, forêts et marécages offrent un terrain parfait pour pratiquer l’embuscade. Depuis l’arrivée des derniers nés de Nunn, on remarque une recrudescence de la briganderie de grand chemin. Les embuscades sur les grands axes de l’empire elfe se multiplient.

La tactique de l’embuscade

Encyclodedia Gnomnica

Le baron Ugmar conservait en toute circonstance un visage impassible, pourtant il ne put s’empêcher à cet instant d’esquisser un sourire en coin. Il venait de forcer le maire du Palais à adopter sa vision politique du problème des derniers nés de Nunn. Et il parvenait à ses fins sans intervenir outre mesure. Et comble du bonheur, c’est son rival qui devrait se charger de l’exécution du projet. Certes, il ne manquerait pas de s’immiscer dans cette affaire par l’intermédiaire de son fidèle bras droit, Symock, mais aux yeux du monde, il était étranger à toutes ces décisions politiques.

Alors que tout le monde se levait pour quitter la séance du conseil, l’espion surgit et parla discrètement à l’oreille de son stoïque et impassible maître.

« Seigneur, je viens d’apprendre que Aristide, le cousin du roi envisage de se rendre à Miul. C’est la première fois depuis un millénaire que le baron quitte la cours pour sa baronnie. Le voyage étant long, j’ai cru comprendre que sieur Aristide comptait voyager léger. Six gardes l’accompagneraient. L’escorte devrait monter à dix avec les serviteurs. Ne trouvez-vous pas dangereux de traverser ainsi les campagnes sachant la recrudescence de derniers nés se faisant bandits de grands chemins ? Sans compter les raids orcs qui multiplient les rapts dans l’objectif de trouver de nouveaux esclaves. »

« Suggères-tu que le baron Aristide pourrait rencontrer une malencontreuse et meurtrière embuscade ? Comme se serait dommage pour mon cousin qui me précède dans l’ordre de succession ! »

« C’est pourquoi j’ai déjà pris les dispositions adéquates, maître. Je commanderai à distance une escorte d’une trentaine des hussards noirs de la chambellerie. »

« Je constate que comme toujours, tu anticipes mes pensées, mon bon Slymock. Puisses-tu arriver à temps s’il arrive quelque chose à mon cousin ! »

Ugmar trouvait vraiment cette matinée parfaite ! Après avoir manigancé pour imposer sa vision politique, voilà que son éminence grise lui offrait sur un plateau la tête du concurrent redoutable en cas de conflit de succession à la couronne. Le grand comprenait parfaitement ce que son espion projetait. A la première opportunité, certainement au cœur de la nuit, Slymock et ses hussards noirs attaqueraient le campement d’Aristide. A trois contre un, les victimes n’auraient aucune chance. Et pour éliminer toutes les preuves, il utiliserait le « sac ». Aristide et son escorte disparaîtraient de la surface du bouclier-monde comme s’ils n’avaient jamais existé ! Oui, cette matinée s’avérait pafaite.

Les jours suivants furent intenses pour la mairie du palais. Les membres du conseil avaient pratiquement pris leurs quartiers dans le bureau du baron Otto. Par son investissement, le général Ull faisait de l’ombre au représentant des fonctionnaires. C’est celui-ci qui avait la charge de porter le projet, mais les requêtes incessantes bien que légitimes du chef des armées captaient toute la lumière. Le maître agronome Sully et l’intendante générale Célestine approuvaient les réformes entreprises car ils y voyaient une lueur d’espoir, une solution aux maux qui depuis trop longtemps accablaient leurs castes. Le maître architecte Sully était également enivré par le flot de projets d’infrastructures qui déferlait depuis la décision du conseil du roi. Pour ne pas perdre ses alliés politiques, le maire du palais devait approuver ces mesures exceptionnelles qu’il n’avait en rien décidées. Ugmar triomphait encore une fois.

Les décrets royaux furent signés à peine quinze jours après la décision prise par le roi Roll. Ce fut le temps qu’il fallut pour que Ugmar reçoive une missive par pigeon voyageur. Le texte laconique disait. « L’affaire est dans le sac ! ». La signature représentait une plume de corbeau stylisée. Le grand chambellan seul savait décrypter ce mystérieux message. Slymock signalait à son maître que sa tâche s‘était achevée avec succès. Le baron faisait un pas de plus vers la couronne tout en dirigeant le pays de sa main de fer.

Suite à la ratification des décrets, tout était allé très vite. Le général Ull avait rapidement lancé une campagne de recrutement et la majorité des derniers nés appartenant à la caste des proscrits s’étaient engagés avec enthousiasme, voyant dans la maigre solde promise une possibilité d’améliorer leur quotidien. Un nombre incalculable de lances et de boucliers de bois avait été commandé par la couronne. Mais les demandes ne s’arrêtaient pas là. On avait également besoin de matériel de terrassement, de matériaux de construction, de bottes de marche, de charrettes à bras et bien d’autres choses. Pour faire face à une telle demande, la sixième caste, celle des artisans avait dû solliciter le renfort de la neuvième caste, celle des serviteurs contre rétribution. Ceux-ci devaient même parfois sous-traiter une part de leur travail aux rares proscrits qui ne s’étaient pas engagés. Le privilège accordé aux gens de peu donnait ainsi ses premiers fruits. De même, les gens de la terre et ceux de la mer y trouvaient leur compte. En effet, l’armée commandait également d’énormes quantités de denrées alimentaires. La gronde s’était ainsi apaisée.

Pour encadrer cette nouvelle infanterie, le général Ul promut officier nombre de benjamins et benjamines de la noblesse qui venaient d’entrer dans la caste des gens d’arme. La plupart étaient révulsés à l’idée de côtoyer des proscrits, qui plus est des derniers nés de Nunn. Cependant, une telle opportunité ne pouvait pas se refuser lorsqu’on avait décidé de s’engager dans une carrière militaire et que l’on connaissait la difficulté d’être promu, surtout en temps de paix. La répartition s’était arrêtée sur soixante soldats pour un caporal, cent vingt pour un sergent, mille deux cents pour un capitaine et douze mille, soit une légion pour un colonel. Un général se retrouvait à la tête de cinq légions. Ainsi, le nouveau corps d’armée disposait de deux cent quarante mille fantassins divisés en vingt légions. Les officiers étaient aussi inexpérimentés que leurs troupes mais une instruction s’avérait inutile. La réalisation des grandes infrastructures constituait l’objectif principal et unique. Les puînés de la noblesse elfe se sentirent encore plus dévalorisés lorsqu’ils se virent assignés ces chantiers de terrassement de route pavées ou de construction de mur de rempart. Ce genre de tache était d’ordinaire assurer par les membres de la sixième caste. Le ressentiment de ces jeunes officiers rejaillit sur leur manière de diriger leurs troupes car ils les jugeaient en partie responsable de cet état de fait. La discipline était implacable et les sanctions exemplaires. Les derniers nés de Nunn s’en accommodaient car si les conditions de travail étaient dures et leur hiérarchie rigide, ils avaient la sécurité de l’emploi et le ventre plein.

Cinq légions furent affectées à chacune des quatre grandes cités du royaume, la capitale Zulla à l’Est, Miul à l’Ouest, Paramantra au Nord et Baroma au Sud. Ces villes permettaient déjà de contrôler toute la partie centrale du bouclier-monde tout en étant assez éloigné des montagnes pour ne pas subir les raids des orques, des trolls et des minotaures. Lorsque les routes sillonneraient l’ensemble du territoire de Batumia, l’empire de Batum-Khal, l’armée aurait une capacité d’intervention quasi immédiate. La frontière pourrait même encore être repoussée. Le rêve d’étendre son territoire côtier au bord de la mer annulaire ainsi que de contrôler une partie de la ceinture montagneuse devenait possible. Une ère de prospérité s’annonçait pour la nation elfe.