Vingt ans s’étaient passés depuis la chute de l’Empire. Vingt ans pendant lesquelles la Nouvelle République s’était implantée dans la Galaxie, succédant à l’Empereur et à son bras droit. Mon Mothma était devenue la première Chancelière de la République, et Leia avait ensuite hérité de ce titre. Un à un, les derniers refuges des Impériaux avaient été rasés, permettant enfin à d’innombrables peuples de vivre enfin en paix. Le climat s’était apaisé, et l’Armée de l’Alliance, devenue l’Armée de la République, avait diminué, pour ne devenir qu’une petite puissance latente pour défendre le nouveau gouvernement.
La Galaxie était relativement en paix, avec peu de conflits entre les planètes. De son côté, Luke avait reconstruit l’Ordre Jedi, entraînant plusieurs jeunes Padawan avec lui et parcourant la Galaxie à la recherche d’Anciens Textes Jedi. Ses apprentis les plus âgés avaient à peine la vingtaine, mais déjà se montraient dignes de leurs prédécesseurs. Solo était toujours aux côtés de Leia, sa femme, et Chewbacca, son ami Wookie, restait avec son co-pilote également. L’équipage du Faucon Millénium était donc quelque peu dispersé dans toute la Galaxie, avec Skywalker en cavale, Leia qui suivait les mouvements du Sénat, et Lando, qui avait récupéré sa ville minière, où il avait développé un réel marché. La cryogénisation carbonique, que Solo avait subi le premier, s’était même répandue dans la pègre, devenant une méthode courante chez les chasseurs de primes. Orn et Fett avaient eux-mêmes plusieurs fois utilisé cette technique, qui permettait de réduire au silence des Impériaux le temps d’un trajet. Depuis quelques années déjà, le chasseur s’était résolu à remplacer le Vautour Couronné, par un U-Wing qu’il avait peint en noir.
Toujours trop attaché à sa première maison, le Twi’lek avait également placé sur ce nouveau vaisseau son symbole si ancien désormais, en rouge. Un vautour aux ailes étendues et à la couronne fendue ornait donc cet U-Wing qu’il avait nommé la Harpie Royale. Il n’était donc plus obligé de voyager à bord du Slave One de son compagnon, qu’il trouvait toujours aussi ridicule, même après tant d’années passées dans ce vaisseau. Twik avait sauté de joie lorsque son co-pilote lui avait montré le Harpie Royale, heureux de pouvoir à nouveau piloter et d’avoir un endroit où il avait la possibilité de s’isoler s’il en avait envie. Le droïde n’était plus avec son ami de toujours, cependant, et cela, depuis plusieurs années. Malgré la promesse que l’équipage du Vautour Couronné avait faite - celle de ne jamais se séparer - Nasha et Twik étaient partis ensemble explorer les moindres recoins de la Galaxie. Tous deux donnaient régulièrement des nouvelles aux deux chasseurs, mais cela faisait des années qu’ils ne s’étaient plus vus. Aucun ne s’en formalisait. Ils savaient tous que si le besoin s’en faisait ressentir, ils se réuniraient à nouveau.
Orn et Fett, quant à eux, n’étaient pas amateurs des voyages et des explorations. Tous deux avaient établi domicile dans ce qui avait été le Palais de Jabba. S’ils vivaient quelque peu isolés du reste de la Galaxie, ils veillaient sur Tatooine et sur la pègre. De nouveaux chasseurs avaient émergé, mais aucun n’avait réussi à détrôner le Mandalorien et le Rebelle. Ce dernier était d’ailleurs au service de ses frères d’armes, n’hésitant pas à les sortir d’un mauvais pas ou de les protéger au besoin. Orn était donc devenu une sorte de gardien pour les autres Rebelles, mais également pour leurs alliés. Avec la chute de l’Empire, quelques Jedi survivants avaient refait surface, comme Cal Kestis ou encore Quinlan Vos. Le chasseur les avait assistés quelques fois, car certains maîtres du crime payaient toujours très cher pour avoir dans leurs prisonniers un Chevalier Jedi. Si Kestis n’avait pas eu souvent besoin de son aide, ayant abandonné les méthodes pacifiques de son Ordre pour survivre, Vos était resté longtemps sans s’entraîner, et avait donc toujours du mal à se défendre avec efficacité. Si jamais l’un d’entre eux, ou un Rebelle, avait besoin de son aide, Orn restait contactable, ayant un communicateur spécial pour les urgences et les cas de force majeure. Pendant vingt ans donc, lui et son compagnon n’avaient cessé de se battre et de s’entraîner.
Ils avaient vieilli, certes, mais aucun n’était prêt à passer le flambeau à quelqu’un de plus jeune qu’eux. La cinquantaine n’avait pas faibli leurs bras ni atténué leur force, mais avait au contraire enrichi leur expérience. Ces dernières années, cependant, ils n’avaient pas eu besoin de se battre, plus aucune mission ne leur parvenait. Tout s’était calmé, et ils avaient pris leur retraite sur Tatooine, dans le Palais de Jabba, où la sérénité et la tranquillité régnaient en maîtres incontestés. Leurs armes n’étaient jamais loin, mais depuis quelques années déjà, une petite couche de poussière s’installait doucement et discrètement. Leurs armures, quant à elles, brillaient toujours, entretenues par les soins des deux chasseurs, qui avaient tous deux liés leur identité à elles. Loin de l’action et laissant la pègre faire sa vie, ils n’avaient que peu de nouvelles de Leia ou de ses amis. C’était une vie posée qu’ils avaient enfin, un repos mérité qu’ils partageaient. Vieillir était un privilège pour les chasseurs de primes. Voilà qu’ils faisaient cela à deux, dans paisibilité de leur maison.
Orn était dehors, assis sur un rocher rougeâtre, les pieds enfoncés dans le sable fin de Tatooine. Devant lui s’étendait l’immense Mer des Dunes, et, derrière lui, se trouvait le Palais de Jabba, où des petites lumières se faisaient voir à travers les fenêtres. Il poussa un soupir de contentement en observant les étoiles lointaines. Quelque part là-bas se trouvait son ancien co-pilote et Nasha. Ils lui manquaient terriblement, mais il était heureux pour eux. Nasha était bien plus jeune que lui, elle se devait de parcourir la Galaxie. C’était étrange de ne plus avoir Twik à ses côtés, mais le chasseur savait qu’il était en bonne compagnie. Nasha portait toujours son armure, et elle avait développé ses techniques et s’était surpassée. C’était elle qui avait construit le réseau de communication de la Nouvelle République, qui faisait sa fierté. Ce réseau était d’une importance capitale, et permettait aux Sénateurs et au Chancelier de communiquer en toute sécurité, sans que personne ne puisse les écouter à leur insu. Le Twi’lek esquissa un sourire en pensant à cela. Les étoiles de Tatooine étaient les plus belles. Jamais il n’avait trouvé de planète qui avait une aussi belle vue sur le restant de la Galaxie, mis à part, peut-être, Kashyyyk.
Il s’étendit sur le rocher, pouvant presque s’endormir dessus. Cette nuit était particulièrement agréable, loin de la froideur mordante habituelle des soirs de la planète-désert. Il aperçut un vaisseau traverser le ciel, avant de disparaître entre les nuages. Il fut un temps où il aurait souhaité être à bord de ce vaisseau. Plus maintenant. Avec l’âge était venu le désir de tranquillité et de pause. Orn estimait avoir assez vécu de péripéties pour toute une vie. Il avait failli mourir plus d’une fois, avait vu trop de personnes tomber sous ses yeux pour désirer à nouveau s’envoler vers de nouveaux horizons. La retraite lui allait bien, tout comme elle allait bien à son compagnon, resté à l’intérieur. C’était une vie qu’il n’avait pas imaginée avant, mais qu’il aimait plus que tout. Il laissa ses yeux se fermer, acceptant que sa conscience divague vers un léger sommeil agréable. Sa respiration se fit régulière et lente, tandis que ses paupières assombrissaient sa vue et les étoiles. Il lâcha un nouveau soupir. Orn était prêt à s’endormir lorsqu’il sentit une main légère toucher son épaule. Baillant, le chasseur leva la tête vers le nouvel arrivant, sans pour autant daigner bouger.
Boba Fett esquissa un petit sourire à son compagnon, mais son visage restait grave et troublé. Il semblait perturbé. Le chasseur se redressa donc pour lui parler.
"Est-ce que tout va bien ?
— Il serait plus simple que tu viennes voir…," répondit le Mandalorien d’une voix impassible.
Orn se leva immédiatement, suivant Fett à l’intérieur du Palais. En réalité, peu de choses avaient changé dans cet immense monument depuis leur installation. Une couche de sable recouvrait toujours le sol sombre et brunâtre. Les deux chasseurs s’engagèrent dans l’escalier qui descendait, se dirigeant vers l’ancienne salle du trône. Les marches étaient inégales, polies par les innombrables pieds qui les avaient foulés. Leurs pas résonnaient contre les murs en pierre, sonnant presque comme une musique, qui trouva un écho dans l’immense salle vide. Seul le trône de Jabba et l’estrade des chanteurs étaient restés dans cette grande pièce calme, éclairée par des lumières pâles et douces, qui se reflétaient sur les murs jaunâtres. Au sol, il y avait toujours la trappe en grilles d’où de nombreuses victimes de Jabba étaient tombées, pour se faire dévorer par le Rancor, avant que Luke ne le tue. Depuis, cette trappe était inutilisée, et l’arène du Rancor était entièrement vide. Derrière se trouvait le trône, grand et imposant, fait de pierres et de bois. Les chasseurs ne s’en servaient que rarement, car ils y avaient installé ici leur communicateur le plus important. C’était avec ce dernier que les hauts commanditaires de l’Alliance, devenus des personnes influentes et importantes, envoyaient les messages d’urgence à leurs alliés.
En voyant Fett s’en approcher, Orn fronça les sourcils, inquiet. Il comprenait, mais ne savait pas à quoi s’attendre. Il suivit son compagnon, qui activa une commande. Un hologramme apparut soudainement, montrant Leia, qui se tenait debout et regardait devant elle. La tête droite, elle avait une coiffe tressée, mélangeant cheveux et tissu. Ce tissu retombait en une sorte de voile derrière sa tête, enveloppant son dos. Elle portait une robe inspirée de la royauté d’Alderaan, dont le haut couvrait ses épaules pour descendre jusqu’à son ventre, où un corset laissait sa place à une longue traîne qui cachait même ses pieds. Une petite tiare entourait sa tête, rappelant son statut de Reine et de Princesse, bien que sa planète ne fût plus depuis longtemps. Orn l’observa avec affection, n’ayant pas vu son amie Rebelle depuis bien longtemps. Quelques rides enjolivaient son visage doux au regard déterminé mais inquiet.
"Général Orn, Boba Fett. Cela fait des années que nous ne nous sommes pas vus, mais vous m’avez affirmé votre soutien si jamais la Nouvelle République en avait besoin. Je crains que ce jour ne soit arrivé, malgré tous nos efforts. Une organisation vise à rétablir l’Empire, se faisant appeler le "Premier Ordre". Déjà, une grande force armée est à ses ordres, et une planète, Jakku, vient d’être envahie… Le Sénat est divisé, nous empêchant d’agir, mais le temps presse. Une résistance est nécessaire. Nous devons arrêter cet Ordre avant qu’il n’ait trop de pouvoir. J’ai besoin de vous. La Nouvelle République est menacée. Vous retrouvez, attaché à ce message, des coordonnées. Venez aussi vite que vous pouvez, mes amis. Que la Force soit avec vous."
L’hologramme disparut en une fraction de seconde. Les mots de Leia résonnèrent encore dans la grande salle, comme une prière. Orn échangea un regard inquiet avec son compagnon, comprenant enfin l’origine de son trouble. Il semblait que leur retraite était terminée, après des années de calme. Sans perdre de temps, les deux chasseurs se préparèrent, mettant leurs armures et enfilant leurs casques avec appréhension et excitation.
Orn se dirigea vers l’établi en bois, où toutes ses armes étaient posées. Après avoir enlevé la poussière, il prit ses blasters et ses poignards, qu’il accrocha à sa ceinture, sous sa cape noire et ancienne. Lorsqu’il eut pris toutes ses armes, il rejoignit son Mandalorien dehors. Leurs deux vaisseaux étaient devant eux, inutilisés depuis longtemps, mais toujours prêts à partir. La Harpie Royale et le Slave One se tenaient fiers sous la lumière pâle des Lunes de Tatooine, comme s’ils savaient que leur immobilisation venait à son terme. Fett prit la main de son compagnon et la serra, comme pour se donner du courage. Ils échangèrent un énième regard sous leurs casques, avant se diriger vers leurs vaisseaux respectifs. Sous la pâle lumière nocturne qui les enveloppait doucement, le métal d’un sabre-laser doré scintillait légèrement, accroché à la hanche du chasseur à l’armure noire.