Épilogue

 

L’été s’est achevé. Cela fait cinquante-quatre jours que Louis et Ophélie se sont quittés. Le reste des vacances a filé. Ethan a retrouvé ses amis et une nouvelle copine…qu’il n’a pas présenté à son cadet.

Demain, ce sera la rentrée et Louis appréhende déjà de revoir ses persécuteurs et Chloé. Il s’inquiète de savoir si elle a parlé de leur rencontre.

-Louis ! crie sa mère, interrompant le fil de ses pensées.

-Oui, m’man !

-Tu sais ce que tu mets demain ?

-Le jean bleu marine et le polo ! fait-il toujours en criant, peu enclin à sortir de sa chambre maintenant.

Sa mère semble se contenter de cette réponse, lui permettant de reprendre ses pensées et le fil de ses angoisses.

Mais une vingtaine de minutes plus tard, son téléphone sonne. Aussitôt un large sourire se dessine sur son visage. Enfin. Il sait qui appelle et répond immédiatement.

Depuis leur séparation, ils se téléphonent quotidiennement. La jeune fille lui envoie également des photos de ce qu’elle fait ou d’elle-même. Son concours a lieu dans quelques jours et bien qu’elle ait passé l’essentiel de ses vacances à travailler, au grand plaisir de ses parents, Ophélie doute de le réussir et se tourne régulièrement vers Louis pour la rassurer. Celui-ci fait de son mieux, ne doutant pas un instant de son succès.

Et, ce soir encore, après avoir longuement parlés ensemble, ils ont du mal à raccrocher. Passant d’un sujet à l’autre, ils meublent pour ne pas devoir rompre leur contact quotidien.

-Au fait, reprend alors Ophélie, je ne t’ai pas dit, mais papa va vider la mare.

-Quand ça ?

-Lundi prochain. Ça l’a un peu pris d’un coup, mais il a contacté une entreprise et nous l’a annoncé hier soir après ton appel…

C’est une de leurs petites manies. Ils s’appellent par alternance, un soir sur deux.

Malheureusement, la conversation s’éteint sur cette information et ils doivent se résoudre à conclure. Un déchirement pour le jeune homme…

 

Le lendemain, Louis a repris le chemin du lycée. Il n’attend que d’être au soir et s’aperçoit que penser à Ophélie l’aide à passer outre les moqueries et regards en coin de Maxence, le copain de Chloé. Apparemment, elle a bien parlé de sa rencontre estivale avec lui, puisqu’on lui fait de nombreuses allusions. Certains pensent qu’il s’agit d’une cousine, d’autre qu’il a payé une fille… Mais, il ne se préoccupe pas de ces imbéciles et puise du réconfort dans les photos que lui a envoyé Ophélie. Il les consulte discrètement aux toilettes pour ne pas se faire remarquer d’eux.

Mais, curieusement, le lundi suivant, il sent son portable vibrer à plusieurs reprises pendant la journée. Toujours le même SMS : Rappelles moi, c’est urgent !

Bien que très intrigué, Louis ne peut se résoudre à enfreindre le règlement de l’école interdisant l’usage du portable dans l’enceinte du lycée. Bien qu’il soit apparemment le seul à le respecter…

Il doit néanmoins se faire violence car l’insistance d’Ophélie le surprend. À peine la journée de cours finie, il se précipite chez lui et appelle son amie.

Celle-ci décroche à la première sonnerie :

-Louis, enfin…

-Excuse-moi, j’étais au lycée, qu’est-ce qui se passe ?

-On a… trouvé Sylvestre, fait-elle doucement, d’une voix basse.

-Trouvé ? Où ? demande Louis sentant son sang se glacer.

Soudain, il se souvient du dernier appel de la jeune fille :

-La…mare ?

-Oui, les ouvriers l’ont drainé et ils sont tombés sur une espèce de plaque de métal. Sylvestre était en dessous…

Louis sent son estomac se tordre.

-Il a été tué alors.

-Sans l’ombre d’un doute. J’étais là et j’ai clairement vu une grosse entaille à l’arrière du crâne. Oh Louis, tu l’aurais vu… Ce n’était plus qu’un squelette avec de vieux habits, il m’a fait tellement de peine.

-Il faudrait prévenir la mère supérieure, fait Louis ne sachant que dire et qui aurait tant voulu être avec elle, pour la soutenir.

-C’est fait, précise-t-elle. Elle a dit qu’elle passerait bientôt.

-Et Sylvestre ?

-Forcément, on a appelé la police. Ils ont emmené le corps à l’institut médico-légal pour une autopsie. Même si je n’ai aucun doute sur son identité. Papa fait des démarches pour qu’on puisse l’enterrer près du vieux banc.

-C’est vrai ? s’exclame Louis.

-C’est une idée de maman. Après tout, c’est là qu’il a été le plus heureux…

Il y a un instant de silence avant qu’elle ne reprenne d’une petite voix :

-En fait, tu avais raison. 

-À quel sujet ?

-Le fantôme de Sylvestre était bien lié à l’eau. D’ailleurs, j’ai même trouvé l’explication du parfum…

-Je t’écoute.

-Autour de la mare, il y a de minuscules petites fleurs bleues.

-Oui, je les aient remarqué, mais elles ne sentent pas.

-En fait, si. Mais il faut vraiment en être très près et là, je t’assure que c’est le même parfum. Sans l’ombre d’un doute.

-Elles veillaient sur lui, murmure Louis.

-Peut-être voulaient-elles qu’on se souvienne de cette histoire…

-Tu crois que les fleurs aussi ont des souvenirs ?

-Qui sait…murmure-t-elle avant de reprendre d’une voix tremblante, après un court silence. C’est tellement triste. Et, je t’avoue que j’ai du mal à me remettre.

-Ils ne sont pas nés à la bonne époque, murmure Louis. Mais nous avons pu les réunir…

-J’aimerais que tu sois avec moi, fait alors Ophélie.

-Moi aussi, si tu savais à quel point…

-En fait, tu me manques vraiment. Je pense tout le temps à toi. Et ça ne me ressemble pas.

-Toi aussi, à chaque seconde.

Il l’entendit soupirer :

-J’aimerais qu’on puisse se revoir avant l’été prochain...

-Ce serait bien… murmure Louis, touché et ne sachant que dire.

-Je pourrais peut-être monter à Paris…

-Tu… tu es sérieuse ?

-Pas tous les week-ends, mais une fois de temps en temps…

-J’adorerais, mais…

-Ouais, je sais, c’est pas faisable, j’ai nulle part où dormir et il y a au moins six heures de voiture…  et quatre de train… N’empêche, ce serait sympa.

-Tu te doutes que je ne peux qu’être d’accord…

-Bon, je dois te laisser, mais je t’appelle demain soir, d’accord ?

-Bien sûr.

-La vache, j’ai pas envie de raccrocher ! Tu t’en charges ?

-Oui, répond Louis qui pourtant ne bouge pas. Incapable de rompre leur lien.

-Bon, je sais que ça fait très niais, mais on raccroche ensemble ?

Louis murmure un « oui ».

Il y a un silence avant qu’ils ne raccrochent finalement.

 

Le jeune homme reste un moment immobile tandis qu’une vague de tristesse le submerge. Sylvestre et Angeline n’ont pu vivre pleinement leur histoire, mais, lui a cette chance. Il sourit, ce qui chasse ses idées noires. Ophélie l’aime, il l’aime et leurs parents ne voient aucun inconvénient à leur couple.

Quand ses parents reviennent du travail, il leur résument l’appel d’Ophélie et raconte la fin de l’histoire. Ceux-ci se montrent émus. Puis, le père de Louis regarde son fils :

-Pourquoi Ophélie ne viendrait pas un week-end ?

Incrédule, Louis le regarde puis regarde sa mère :

-Tu es sérieux ?

-Bien sûr.

Le jeune homme est surpris. Ses parents n’ont jamais acceptés que les conquêtes d’Ethan passent ne seraient-ce que le seuil de la porte.

-Mais il est hors de question que vous partagiez la même chambre, fait sa mère. Et il n’est pas question qu’elle dorme dans la chambre de ton frère.

-Elle prendra le vieux clic-clac, c’est tout, reprend son père. On l’installera dans le salon, si ce n’est que pour deux jours…

Mais, Louis s’insurge :

-Hors de question qu’elle dorme dans ce machin ! Elle prendra ma chambre et j’irais dans le clic-clac.

Ses parents sourient de le voir si galant, mais n’en sont pas vraiment surpris.

-Allez, va l’appeler, conclut sa mère.

Louis bondit à l’étage.

 

Et, un vendredi soir veille de vacances, quelques semaines plus tard, après une journée effroyablement longue, il la voit qui l'attend, adossée à la petite voiture bleue, symbole de tant de souvenirs. Un instant figé de la voir devant son lycée, dans son décor si familier, il se ressaisit vite et vient l'embrasser, fou de joie de la retrouver. Elle est bel et bien là, pour lui. Devant les regards médusés et envieux de ses camarades, il serre dans ses bras la superbe jeune femme qui se presse contre lui.

-Enfin ! lui murmure-t-elle doucement avant de l’embrasser.

 

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Jowie
Posté le 21/10/2018
Oh c'est si triste, ce qui est arrivé à Sylvelstre ! J'avoue que je pensais qu'il avait été noyé, mais en fait il a été tué par un coup sur la tête puis jeté dans la mare, c'est ça ? Et quelqu'un lui a posé une plaque de métal dessus pour pas qu'il remonte à la surface c'est ça ? Et celui qui l'a tué, c'est le père ? Je crois que j'aurais aimé plus de détails, parce que c'est une histoire si intéressante et tragique ! D'ailleurs, qu'est-ce qu'est devenu le père d'Angeline ? Sa mère a sombré dans la folie, c'est ça, non ?
En tout cas, c'était satisfaisant d'apprendre le lien entre les fleurs de la mare, le parfum, Sylvestre et le titre de ton histoire !
C'est vraiment aussi super de voir qu'Ophélie et Louis continuent à se voir, malgré la distance ! Et c'est rassurant de voir que les choses se passent assez bien pour lui à l'école. J'avoue que la fin est arrivée si vite que j'ai cru qu'il manquait un chapitre! J'aime bien la fin mais je sens qu'il manque quelque chose pour « boucler la boucle », comme on dit. Peut-être une phrase qui tire une parallèle entre la relation Ophélie-Louis et Angeline-Sylvestre ou un truc de ce genre.
Je n'arrive pas à croire que je suis déjà arrivée à la fin ! Te lire hebdomadairement va me manquer ! Merci pour avoir partagé cette belle histoire sur Plume d'Argent, j'ai eu beaucoup de plaisir à suivre cette enquête fouillant le passé de famille d'Ophélie. Il existe beaucoup d'histoires sur les fantômes, mais tu as réussi à rendre la tienne originale et douce, par exemple en associant des parfums aux fantômes, ainsi que cette histoire d'eau qui coule. À mon avis, les points à revoir sont ceux que j'ai mentionnés dans mes commentaires au fur et à mesure. J'espère que me remarques ont pu t'être utiles ^^
Bravo pour ce projet et tout de bon dans tes aventures scribouillardes;-) Si tu as des questions sur mes remarques ou comme ça, n'hésite pas à me demander:)
Remarque :
qu’il n’a pas présenté à son cadet → présentée
après avoir longuement parlés ensemble, → parlé
Rappelles moi → rappelle-moi
les ouvriers l’ont drainé → drainée
Oui, je les aient remarqué → je les ai remarquées
à plus sur le fofo !
 
Jowie
<br />
sidmizar
Posté le 21/10/2018
Bon, tu as tout compris ! le père ne voulais pas que Sylvestre puisse revoir sa fille et a pris des mesures radicales ! C'est lui ou sans doute un voyou local qui s'est chargé de la besogne. je comprends ta frustration que tout ne soit pas parfaitement clair, mais je voulais garder à l'esprit que tout s'est passé il y a 180 ans, certaines choses ne seront jamais claires. le père n'a pas avoué sa culpabilité dans un livre de compte et je voulais garder de la crédibilité au vu de l'ancienneté du drame.
D'ailleurs, dans l'histoire, je précise que le père a succombé à une crise cardiaque. Christine le dit à Louis quand il tombe sur la photo du cercueil exposé dans la maison. et la mère a effectivement sombré dans la folie, ne supportant pas le décès de sa fille.
je suis très content que tu apprécies mon titre et le lien avec toute l'histoire, je ne voulais pas que ce soit trop évident.
C'est vrai que la fin est un peu abrupte, mais n'est-ce pas aussi le signe qu'on s'est attaché aux personnages, qu'on ne veut pas les quitter ? j'extrapole un peu là... ;)
je te remercie également pour tes com' hebdomadaires qui vont également me manquer et pour ta fidélité, c'est très gratifiant d'être suivi à ce point. Et je te rassure, tes remarques et conseils me seront extrêmement utiles. N'en doutes pas ! 
À bientôt !  
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