Le cœur de Galatée battait à tout rompre. Elle se dirigeait avec Méline vers les grottes des démons, qu’elle allait voir pour la première fois ! Elle allait servir d’interprète : il était hors de question que Méline n’apporte pas toute l’aide qu’elle pouvait, même avec des pouvoirs magiques diminués. Myrtille, toujours sur son épaule, frétillait d’excitation. La petite souris n’arrivait pas à détacher son regard des mains de la fée. Les écailles avaient progressé et remontaient déjà sur ses avant-bras.
L’entrée de la grotte se trouvait au flanc de la montagne, à quelques mètres au-dessus du sol. Ensuite, le petit groupe se retrouva face à des couloirs sombres. Hansi se retourna vers ses invitées.
— Moi, je peux voir dans le noir, expliqua-t-il, mais j’ai une solution pour vous.
Il se frotta les mains et souffla. Des grains de poussière lumineux se répandirent alors dans l’air et se fixèrent aux parois, illuminant un sentier aux marches grossièrement taillées qui descendait sous terre. Galatée se tourna vers Méline, qui avait l’air calme, et arborait même un grand sourire.
— Allons-y, dit la fée.
Après de longues minutes, elles arrivèrent jusqu’à une grande salle où il faisait agréablement tiède. Plusieurs démons y étaient rassemblés. Certains peignaient sur les murs, d’autres cuisinaient une grosse marmite de chocolat chaud, d’autres encore observaient un couloir d’où émanait un bruit grandissant de clapotis et d’où débordait un mince filet d’eau.
Une démone aperçut la fée et Hansi, et prévint les autres. Les démons s’avancèrent alors pour saluer chaleureusement la fée, mais aussi Galatée et Myrtille. Des exclamations de surprise fusèrent à la vue des mains et des bras de Méline.
Les yeux des visiteuses s’habituaient petit à petit à la pénombre, mais les démons prirent quelques des brandons du feu pour en faire des torches qu’ils placèrent à des emplacements stratégiques dans la salle, qui se retrouva baignée d’une douce lumière ambrée.
— Malheureusement, avoua cette dernière, j’ai perdu le diadème et mes pouvoirs magiques diminuent. Mais j’ai tenu à venir car l’alliance entre les fées et les démons est plus importante que des soucis passagers. Je vais faire tout mon possible pour vous aider.
Un démon s’avança alors pour lui expliquer.
— Nous habitons dans ces grottes depuis des milliers d’années, expliqua-t-il. Nous les avons parfois partagées avec des ours pendant l’hiver, et des humains aux temps très anciens, mais aujourd’hui nous sommes très inquiets. Des enfants viennent et crient.
— D’où viennent les bruits ? demanda Méline.
Il lui désigna le couloir que regardaient certains démons peu de temps auparavant. Une flaque s’étendait déjà par terre.
— On dirait qu’il y a un objet là-dedans, fit-elle observer. Une sorte de coffre.
— Oui, et impossible de le décoincer !
La fée remonta alors sa robe et s’engagea dans le passage étroit. Avec ses mains griffues de vouivre, elle dégagea des cailloux et élargit un peu le couloir.
— Je vais essayer de le tirer de là… expliqua-t-elle, la voix un peu étouffée par le bruit de l’eau.
Au bout de quelques instants, elle dut ressortir, à bout de souffle. La flaque s’était légèrement élargie.
— Mes mains sont trop grosses pour le dégager, avoua-t-elle. J’y étais presque !
Galatée sentit alors une petite étincelle dans son ventre et, avant d’avoir pu réfléchir, elle avait rangé ses lunettes dans la poche de sa robe et s’était élancée à son tour dans le couloir. Myrtille sauta par terre avec un couinement surpris.
— J’y vais ! lança-t-elle au groupe médusé.
Elle ne voyait pas grand-chose. Grâce à sa petite taille, elle se faufila jusqu’au bout du couloir, Elle le saisit sans peine, mais n’arriva pas à le faire sortir tout de suite. Elle s’arrêta un instant pour reprendre son souffle.
Le côté du coffre qui lui faisait face était trop long pour qu’elle le fasse passer par le couloir, et elle n’avait pas de grosses griffes pour l’élargir davantage. Mais la plupart des coffres étaient rectangulaires, ce qui signifiaient qu’un côté était plus court que l’autre… Et si elle tentait de retourner l’objet ?
À tâtons, elle trouva le bord. Ses doigts s’aventurèrent un peu plus loin sur la surface.
Gagné ! L’autre côté était plus court. Elle entreprit donc de le faire pivoter et l’attira petit à petit vers elle.
De l’eau coula et lui trempa les genoux. Le filet de liquide se transforma en cascade quand le coffre pivota. Elle le tira vers elle et descendit le couloir en serrant l’objet, comme sur un toboggan !
Elle se retrouva assise sur le sol, dans la grande salle, le coffre sur les genoux, et adressa un grand sourire aux démons, à Méline et à Myrtille. Ensuite, elle posa l’objet sur le sol et remit ses lunettes.
Le clapotis était redevenu un doux murmure, car le ruisseau pouvait passer sans encombre dans son couloir.
Mais avant que les démons, la fée et la souris ne puissent manifester leur joie, des voix étouffées s’élevèrent de l’autre côté du ruisseau.
— Hé, les gars ! Notre cachette au trésor a disparu !
— C’est pas vrai !
Galatée les reconnut tout de suite. C’étaient les Trobêtes.