Garland - Le roi sans couronne

Notes de l’auteur : Cette première nouvelle fut écrite il y a longtemps. Je compte publier petit à petit dans l'ordre chronologique d'écriture. Bonne lecture à tous !

Garland – Le roi sans couronne

 

Comme à chaque fois que j’étais malade, mon précepteur, Le Maître-Mage Kolodi m’intimait de rester dans ma chambre et me faisait porter cinq livres, des recueils d’historiens compilés de manière contemporaine. C’était sa manière de fonctionner, et ça ne me déplaisait guère, j’adorais lire sur les récits des anciens de ce monde. Mon maître attachait une grande importance à l'Histoire de la magerie, la génèse des spécialisations de mages et les différentes découvertes qui nous ont permis d'en savoir plus sur cet art aujourd'hui bien connu. Mon regard fut attiré par une magnifique reliure, Insedio Guarda, l'une de ces fameuses spécialités, j'en connaissais peu sur la provenance des InGa, les praticants de la magerie Insedio Guarda. Un ouvrage écrit par un scribe du nom de Rader Pilaf. Comme à mon habitude, j’ouvrais le livre en son milieu comme j’aimais à le faire et commençais à parcourir les premières lignes.

mais ceci est sans pareil éclat que le récit suivant, l’histoire de Garland l’Audacieux, affectueusement appelé, après son règne, Garland le roi sans couronne. En effet, ce roi qui n’aimait pas porter sa couronne sous prétexte qu’il la trouvait inconfortable ; chose impensable en ces époques où l’étiquette et la tradition prédominent dans l’image des différentes cours.

Avant de commencer son récit, je dois remettre mon cher lecteur dans le contexte de l’époque. En ces temps ancients, les connaissances sur la magerie demeuraient troubles et inexploitées. Peu de recherches étaient menées car rares étaient les occasions, pour les mages, de mener à terme des expériences. Le lecteur doit donc comprendre que seule, l’Exsedio Violente, magerie utilisée par les utilisateurs de projection d'attaque, était reconnue et exploitée. En ces temps reculés, il n'existait nulles traces de mages utilisant l'Exsedio Guarda et encore moins l'Insedio, la magerie de concentration.

Vu le style de narration, sûrement pas un Histo-scribe officiel...Incroyable de se dire qu’à cette époque-ci, seuls, les ExVo, une spécialisation sur les quatre était reconnue.

Garland, fils de Brassenvir, est un roi Thiméen qui a vécu près de 1500 années avant notre ère et est né sous la dynastie Nolvienne. Jeune et fougueux, il se révèle doué aux arts du maniement de la hâche et de la rapière mais bien piètre utilisateur d’Exsedio Violente, ce qui lui vaudra de garder la vie. Pour rappel, Gaméon Nolf le huitième, en ces temps roi du pays, nommé à cette époque, Nolvia, en hommage à la dynastie, fidèle à la tradition instaurée par Praer Nolf le second convia tous les fils et filles de ses vassaux âgés de 13 à 16 ans pour la cérémonie de la « Praticae Memoria ». Ce rite consistait tout simplement à évaluer la puissance de l’Exsedio Violente, la capacité à user de la projection de la magie offensive, des protagonistes présents, et ainsi éliminer les plus forts, si besoin, au cours d’une cérémonie sacrificielle pour plaire à la déesse Ensidia. Sous-entendu afin de maintenir l’ordre au sein du royaume et limiter les éventuelles insurrections des vassaux.

Brassenvir, seigneur vassal du royaume, était très proche de Maître Titio, une Maître de potions très réputé mais qualifié à l’époque de fantaisiste pour ses théories farfelues sur l’Exsedio qui lui ont valu une mise au ban de la part de ces pairs de l’académie. Ce maître affabulait sur l’existence et la découverte d’une magerie cachée que l’on aurait toujours pas utilisée ou ne serait-ce que compris. Exsedio Violente étant considéré seulement comme une magie d’attaque, la question de la….

Un bruit de porte vint m’arracher à ma lecture.

- Oui entrez !

- Messire Priel, je venais seulement m’assurer que vous ne manquiez de rien

- Tout va bien je vous remercie Marta… Pouvez-vous me porter de l’eau ainsi qu’une miche de pain de seigle d’ici la mi-journée ?

- Avec grand plaisir jeune sire !

Marta ferma la porte et je pu me replonger dans mon agréable besogne.

. Après des mois de pratique et de concentration sur l’éveil, Brassenvir et Titio commencèrent à développer la création d’un halo argenté qui épousait la forme du corps, une utilisation du nimbe jusqu’alors méconnue. Brassenvir ne pouvait le tenir que quelques secondes, mais son utilité leur demeurait pour le moment inconnu. Après plusieurs tests de projection et de modélisation infructueux, le malheureux accident survint. Brassenvir, qui ce jour-là, descendait de la tour d’observation pour se rendre en salle de repos, chuta très lourdement d’une cinquantaine de marches. Les bruits ayant alerté les femmes de chambres, le vassal criait qu’il n'arrivait plus à mouvoir ses jambes mais qu’il n’avait pas mal.

Brassenvir était alité depuis plus d’une semaine. Titio, qui se tenait chaque jour au chevet de son ami compris soudain que le halo avait probablement joué un rôle important dans la nullité de la douleur d’une chute de cinquante marches. Brassenvir lui ayant révélé qu’il avait, par réflexe mécanique, suite aux lourdes sessions d’entraînement, activé son halo lors de son accident, il avait vécu la scène sans pouvoir changer la trajectoire de la chute mais sans douleur, selon ses propres mots « comme un sac de patate vivant ». La douleur étant revenue depuis quelques jours, Titio compris rapidement que le mal causé par la gravité de la chute, qui avait entrainé la totale immobilisation du bas corps du malade, avait été entérinée par la création du halo, et l’entraînement qui avait précédé la chute.

Le seigneur vassal mourut quelques jours plus tard en ayant fait promettre à Titio de continuer la pratique avec son fils, Garland, qui avait sensiblement les mêmes aptitudes à la magerie que son père.

L’entraînement commença et Garland, du fait de sa jeunesse, développa assez vite la création du halo pour le tenir toujours plus longtemps au fil des matinées passées dans la désormais très célèbre salle d'arme Thiméenne portant son propre sobriquet « La salle du sans couronne ».

Il était temps de mettre cette magie à l’épreuve et la concoction de quelques potions se révéla porter ses fruits. Après avoir ingéré la boisson du Maître, le halo se solidifiait pour devenir une membrane. L’étude de cette membrane, que l'on appelle aujourd'hui le nimbe, ne permettait pas aux individus de décrire autrement que la densité de l’air, au sein de cette même membrane, semblait se solidifier et, selon leur dire, inverser la force d’attraction.

Après avoir trouvé le plus grand mal à convaincre Blassior, le chef de la garde, d’asséner un coup d’épée à son nouveau roi pour étudier le phénomène, il fut constaté que l’arme, traversait bien la membrane mais était comme ralentie pour au final causer une blessure beaucoup moins grave qu’elle ne l’aurait dû. Une découverte incroyable qui lui permit d’effectuer le pari la plus impensable de l’histoire de cette dynastie.

Pour remettre les choses dans leur contexte, cette époque contraste énormément avec la nôtre sur plusieurs points, et notamment les différentes traditions et le respect qui en incombe. La dynastie Nolvienne était toujours gouvernée par un premier né Nolf n’ayant aucune aptitude pour l’Exsedio, ses frères et sœurs peu important l’ordre de naissance et possédant le don de magerie étaient ses protecteurs et ses mages duellistes.

L'idée lui vint d'invoquer son droit à la tradition du "Duel Divinae" avait été instaurée peu après la "Praticae Memoria". Selon Nolf le second, il convenait, dans la miséricorde accordée par les dieux, de donner sa chance aux vassaux de défier le représentant de la dynastie nolvienne en place ainsi que ses duellistes pour prendre le pouvoir.

Bien entendu, après la mise en place de la "Praticae Memoria", aucun mage parmi les vassaux n’avait le pouvoir de battre en duel les pratiquants d’Exsedio Violente, les ExVo, de la famille Nolf qui ont toujours été, selon eux, nés sous les bonnes grâce de la déesse Ensedia, et donc doués de pouvoirs puissants. Cette affirmation ayant été testée à plusieurs reprises sous les différents héritiers Nolf, les vassaux ayant toujours été vaincu, cette pratique est depuis restée dans les mémoires mais plus jamais envisagée.

Les règles de cette singulière tradition sont simple, l’individu doit avoir moins de 20 ans, être le fils ou la fille légitime d’un suzerain vassal à la famille, et doit vaincre en combat singulier le ou les mages duellistes en place désignés par le roi.

Dans le cas de Gaméon Nolf le huitième, il y avait son grand frère, Dreest le fourbe, et sa grande sœur, Shim la clémente. Surnoms qu’ils ont acquis autour de l’arène de combat de la famille qui organise des tournois annuels. Cette Arène qui fut ouverte par Nolf le cinquième, permettait aux duellistes de la famille royale de s’exercer, étant donné que plus aucun descendant des différents vassaux n’invoquaient la tradition du Duel Divinae.

Garland reçut une ancienne amie de son père pour ses 18 ans et son couronnement. Il demanda symboliquement à cette mage qui était également sa marraine, de lui déposer la couronne sur la tête lors de la cérémonie, couronne qu’il ne porta qu’une fois d’ailleurs. Sa marraine, Breev, était, de surcroît, une mage de combat accompli. Son père lui avait vanté ses mérites et lui avait narré plus d’une fois les différentes batailles auxquelles elle avait pris part en tant que mercenaire lorsqu’elle avait quitté le royaume.

Quelques jours après les festivités, Garland se trouvait au sommet de la tour d’observation accompagné de Breev et lui expliqua la situation. Suite à son couronnement, il devait, sous peu, aller prêter allégeance au roi Gaméon Nolf. A cette occasion, il comptait invoquer le Duel Divinae pour prendre le pouvoir. Devant l’incrédulité de son interlocutrice, il lui expliqua qu’il avait un atout et lui transmit une lettre signée de feu Maître Titio, éteint il y a peu, expliquant la situation. Tout ce que la mage avait à faire était de lancer une attaque mortelle sur Garland lorsque celui-ci le demanderait et sans poser de questions.

Cet événement pris place trois jours plus tard, dans le plus grand secret, dans l'une des salles secondaires du nouveau laboratoire nouvellement aménagé par Breev et ses apprentis suite à l'incendie ayant détruit le précédent. En préambule, Garland expliqua à Breev qu’il n’avait en sa possession que deux fioles de ce que Titio avait appelé « Ange Gardien », la vérole l’ayant foudroyé avant qu’il ait pu transmettre son savoir, le feu ayant définitivement effacé ses travaux, ou faire des réserves. C’était donc sa seule chance de mettre son halo à l’épreuve.

Après avoir bu l’une des deux dernières fioles, Breev projeta son Exsedio Violente sous forme d’eau transformée en poignard de glace. Le poignard glacé, lancé en direction du buste du roi fut violemment stoppé après être entré en contact avec la membrane et brisé net comme une roche tombant d’une falaise.

Une huitaine plus tard au palais de Nolvia et sous la présence de la famille royale et d’un représentant des autres vassaux, Garland saisit sa chance et provoqua en duel Divinae les combattants de la famille Nolf. L’incrédulité du roi ainsi que de ses duellistes les avait rendus hilares tant ils étaient persuadés de leur supériorité.

Ils avaient probablement raison de penser qu’en Exsedio Violente, ils n’auraient aucun mal à se défaire du jeune effronté, mais ils n'étaient absolument pas préparés à l'utilisation d'une nouvelle forme de magerie. Shim la clémente fut terrassée en première par une attaque rapide du jeune Garland à la rapière. La projection de feu de la soeur ainée su roi avait comme fondue sur le halo du roi Thiméen qui avait transpercé le ventre de la première duelliste. Vint le tour de Dreest le fourbe, qui ne manqua pas d’essayer de venger directement sa sœur avant même le début du second duel en lançant une attaque sous forme d’un torrent d’eau aqueux brûlant sur son adversaire qui, encore une fois, laissa de marbre l’étrange membrane argentée du jeune roi. Garland fondit sur sa proie pour décapiter le second duelliste, impuissant, à l’aide de sa rapière.

L’histoire retiendra de ces duels comme le coup d’éclat de Garland plutôt que le fait qu’il éventra Nolf le huitième pour éteindre, selon ses dires, toute velléité de non-respect de la tradition. Les enfants du huitième furent portés disparus puis Garland fut une nouvelle fois couronné, mais seulement de façon cérémonieuse, car il ne dénia même pas porter sa couronne. La dynastie Nolvienne éteinte, ce fut le début de l’ère Thiméenne.

Il est intéressant de préciser que, dans les mémoires du roi Garland, qui furent éditée, comme le veut la tradition, après la mort du souverain, il est dit que sa chance fut de parier sur le fait que Dreest, qui portait bien son nom de fourbe, n’attendrait pas pour débuter un nouveau duel. Le second duelliste allait ainsi permettre au jeune roi de pouvoir le frapper mortellement, dans les règles, suite à cette attaque. Audace qui lui valut son surnom de son vivant car il précisa qu’il n’était capable de maintenir son "Ange Gardien" que deux minutes au mieux, il n’avait donc techniquement pas le temps d’attendre le début protocolaire d’un nouveau duel.

Voici la première utilisation connue, en combat, de Insedio Guarda et de son invocation la plus désormais commune, le "Bouclier Gardien".

Je refermais le livre des images plein la tête. Garland, le premier InGa, utilisateur de l'Insedio Guarda, officiel de l’histoire. Incroyable… Je savais que les ExGa furent la dernière spécialisation à avoir été découverte, je l’avais déjà lu. Je me demandais juste ce que devenaient le spraticants de la magerie de concentration offensive, les InVo, à cette époque. Ah ! Mais c'était eux qui étaient probablement sacrifiés à la déesse…. Un sort horrible ! Et dire que ça aurait pu être le mien…

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OphelieDlc
Posté le 28/04/2021
Maintenant que j'ai terminé la lecture des trois nouvelles, je tente un retour plus étoffé que mon commentaire spontané sur le dernier "chapitre". J'avoue que dans un premier temps, j'ai eu un peu peur puisque, au même titre que Morgane64, je ne suis pas une experte de la fantasy ni du domaine de la nouvelle, cette énorme quantité d'informations et le format choisi (le récit lu au sein même du récit) m'a fait un poil douté de ma capacité à réellement apprécier à sa juste mesure ton talent.

En réalité, chaque nouvelle possède son propre style, comme si tu switchais de plume à chaque fois que tu pénètres dans la tête d'un nouveau protagoniste. J'ai vraiment apprécié Kero, et j'ai adoré Noem. Je tiens à le préciser ici, car vraiment on sent le gain en maturité rien qu'entre la première et la deuxième nouvelle. Garland est une bonne entrée en matière au niveau de l'univers, mais elle n'est pas représentative du style sur la durée.

Du coup, si je pouvais donner un conseil aux futurs lecteurs : poursuivez.
Et si je pouvais te demander une faveur : poursuis aussi (parce que j'ai hâte d'avoir accès à d'autres pans de cet univers de dingue !)
Zevou
Posté le 28/04/2021
WOW ! un très grand merci pour ce retour qui fait vraiment chaud au cœur. En effet, j'ai beaucoup appris pendant les autres nouvelles et je pense qu'elles sont objectivement de meilleure qualité. Je vais continuer à écrire, et je ne manquerai pas d'attendre tes retours très constructifs !

Encore Merci
Morgane64
Posté le 16/04/2021
Coucou. Bravo pour ce chapitre. Alors, je ne suis pas l'amatrice la plus éclairée en fantasy, mais j'ai apprécié cette floraison d'idées, je suis incapable d'en avoir autant en si peu de pages.
On sent tout un monde derrière, c'est prometteur ! Je sui intriguée et continuerai avec plaisir.
Ah, j'ai noté de petites coquilles. compris(t)/éteint il y a peu (concordance des tejmps)/qui furent éditée/refermais (je crois qu'il faudrait le passé simple
Zevou
Posté le 17/04/2021
Merci pour ce retour super positif !
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