Il était une fois, dans un ranch aux grands prés,
Un cheval, le plus blanc de toute la contrée.
Il avait pour nom Dune et parfois il rêvait,
Tandis que sous son trot les chemins cascadaient,
D’un jour pouvoir aller par delà l’horizon.
Galoper, galoper – çà ! – plus que de raison
Et qu’à force d’effort il lui viendrait des ailes
Pour ouvrir d’un élan l’épaisse mer du ciel.
Ainsi Dune pourrait visiter Belle Lune
Qui brillait chaque soir du haut de sa tribune.
« Elle doit, pensait-il, celer tant de mystères
Que sans doute on y est mieux encor que sur terre ! »
Dune savait très bien que ce n’était qu’un rêve.
Joie au cœur il vivait son quotidien sans trêve,
Mais quelque part en lui persistait ce désir
D’évasion, de savoir, de défis à gravir…
Il parlait quelquefois à ses amis du ranch
De ce que son esprit, fécond de mille branches,
Concevait de jeux et de lieux imaginaires.
Sa parole égayait mille-et-un soirs d’hiver !
Tout récit se transmet – c’est une loi commune.
Un renard donc apprit ce qui animait Dune.
Le rusé animal vint un jour le trouver.
De son habile verbe il sut le captiver :
« Vers la Lune tu peux voler en vérité !
Il ne faut pour cela qu’assez de volonté.
Sais-tu que l’univers est pensée positive ?
Avec un peu d’effort, elle est très intuitive :
Elle rend à chacun les ondes qu’il créé.
En menant ta conscience à son plus haut degré,
Çà ! tes ondes seront une bonne énergie,
Alors ce que tu veux viendra – nulle magie ! »
Dune peinait à croire un miracle pareil,
Mais le fourbe sortit un curieux appareil
Tout de tubes, de flux, et étira la liste
De tous les égarés qui, en grands nihilistes,
Crurent leur avenir débordant de bienfaits
En laissant l’énergie avoir sur eux effet.
« Oh, renard ! Veux-tu me prêter cette machine ?
Et dis ce que dois faire afin qu’elle mouline !
— Rien, cheval, trois fois rien ! Quelques formalités.
Pour la charger d’ondes il me faut concocter
Un philtre énergétique avec les meilleurs fruits
Que tu vas me fournir à partir d’aujourd’hui. »
Dune, très consciencieux, mit alors de côté
Les bons mets dont chaque jour il dût se passer.
Le renard les prenait et à chaque occasion
Rappelait que viendrait la concrétisation
Du rêve que cheval avait de voyager
Sur la Lune là-haut, par des ailes porté.
Mais de faim et de foi, pauvre Dune s’usa.
Malgré tous ces bons fruits, ailes ne poussaient pas.
« Bientôt ! C’est pour bientôt ! promettait le renard.
Tu ne crois pas assez. Délivre-toi encor
Du négatif en toi, et alors seulement
Feras ta volonté dans tout le firmament. »
Et Dune s’épuisait. Ses amis apeurés
Chassèrent le renard au plus loin de leurs prés.
La rumeur cependant était déjà semée
Qu’ici un cheval blanc se laissait déplumer…
Parmi ce que le sol pouvait compter d’ordures,
Un oiseau picorait, entre autre nourriture,
Tous les puants ragots arrangeant ses affaires.
C’était un charognard en son costume austère :
Noir de la tête aux pieds en sa robe de bure.
Au-dessus de Dune il vint à toute vibure.
Se dressait près du ranch un imposant poteau ;
L’oiseau à cet ambon se percha, regard haut.
[Histoire à suivre - 1/3]
Cette première partie est vraiment bien écrite. J'avais oublié que ça pouvait être agréable de lire un texte rimé. Ces bien rythmé et très plaisant à lire. Le renard est fidèle à la réputation qu'on lui donne dans les contes...
Merci beaucoup pour ton passage par ici <3
Mwooo je suis très touchée, si mon texte a pu te remémorer qu'un poème ce n'est pas juste les trucs casse-bonbons de l'école héhé
Grand merci pour tes compliments - et ma foi oui le renard se réinvente au fil des siècles ahah
Ahah, grand merci pour ta lecture et pour ce retour "Ouftiesque" - je les prends pour des compliments :D
Merci beaucoup d'être venu te poser sur côté de cette fable - et pour ta lecture que je devine exigeante.
En effet il y a de la syntaxe presque sciemment étrange par moments, jouant volontiers avec des phrases et expressions réellement lues ou entendues dans des production new-âgeuses, ésotériques et bullshito-ondesques comme il en est ici question.
Je suis ravie que ce début d'histoire t'ait enthousiasmé !
Le récit, tout comme sa forme poétique, restent néanmoins fort plaisants. Et comme ça a su attiser ma curiosité, bah... je poursuis. ^_^
Héhé je reconnais, je suis restée dans le bestiaire et la symbolique traditionnels de la fable avec le rusé renard ! Alors que par ailleurs je trouve ces animaux très beaux <3
Merci pour ta lecture
Je me lance dans ta petite fable avec plaisir, on sent réellement l'inspiration de La Fontaine j'aime beaucoup. Ton langage est aussi très adapté, élégant et nous transporte dans un autre temps.
On voit bien arriver tous les personnages mal intentionnés qui vont se servir de la naïveté du petit cheval pour obtenir ce qu'ils veulent et l'arnaquer, ça fait assez de la peine ;/
On retrouve bien la morale à la La Fontaine, l'idée de se méfier des opportunistes et des gens qui prétendent détenir la solution miracle ^^
P.S. C'était un réel plaisir de te rencontrer, hâte de te retrouver ici ou là <3
Merci beaucoup pour ce gentil message :) Ravie que tu apprécies le ton de ce petit conte et ses rimailles à la La Fontaine.
Moi aussi j'ai été ravie de faire ta connaissance IRL ! C'était trop chouette, on a bien papoté et bien rigolé. J'espère que nous aurons d'autres occasions <3
Quelle surprise de te retrouver dans cet exercice d'écriture de fable. Mais, je ne devrais pas être aussi surprise que cela, ta plume aboutie permet toutes les aventures.
Vouloir à tout prix quelque chose en oubliant la raison, s'y accrocher jusqu'au bout, presque jusqu'à la mort... Pauvre Dune, tombé dans les pattes d'un rusé renard et qui veut jusqu'au bout croire en la concrétisation de son rêve.
J'aime beaucoup les fables qui de manière détournée mettent en avant un travers ou une faiblesse. Il y a toujours leçon à en tirer.
Bravo et toujours un plaisir !
Très heureuse que ces vers t'aient emportée aux côtés de Dune dans cette mésaventure. Ah lala et oui, les rêves inatteignables qui sont la porte ouverte pour les charlatans de tous poils x)
J'espère que la suite de l'histoire de Dune te plaira.
À bientôt !
Je suis une grande fan des contes, et je ne m'attendais pas du tout à en lire sous forme d'alexandrins (c'en est bien, non ? J'ai compté sur mes doigts :D ).
J'ai trouvé que le rythme était hyper agréable à la lecture, et j'ai vraiment aimé la thématique. On peut vraiment y voir une double lecture, entre celle d'un enfant qui peut rester superficielle et celle d'un adulte qui va faire des liens avec les rêves inaccessibles, les fausses promesses, les arnaqueurs et beaux parleurs. Il y a une belle morale sous-jacente, et je file lire le chapitre suivant parce que j'ai peur que Dune se fasse croquer :D
Merci pour ce très agréable chapitre !
Yep, ce sont bien des alexandrins - j'ai voulu écrire un conte mais croisé à de la fable façon La Fontaine.
Merci beaucoup pour ton intérêt, ravie que tu aies été sensible à ce double niveau de lecture - avec tous les dégâts qu'on traverse depuis quelques année côté gourous du new-age, pseudo thérapeutes de la pensée positive et autres charlatans.
Dans la deuxième partie vient l'aspect manipulation et critique que l'on retrouve dans les contes. C'est très bien mené et cela m'a fait sourire à plusieurs reprises. On retrouve cette idée de charlatanisme qui pullule dans notre société et qui nous promet une santé de fer simplement en restant positif...
Et au niveau de l'écriture, les rimes, le rythme, les images sont parfaites !
J'ai hâte de lire la suite !
C'est un plaisir de te croiser par ici et tes impressions me font chaud au cœur - surtout de ta part dont j'aime tant la plume poétique <3
C'est exactement ça, pour la deuxième partie - tous les gourous ou pseudo-coachs du New Age qui promettent l'abondance et la réussite par la pensée positive, les cristaux, les jus de fruits etc.
Ravie que ce petit conte-satire te plaise !
Oh, je m'attendais pas à des alexandrins, que tu manies très joliment. On pense à La Fontaine, à Cyrano et à Renart. Dune ne sait donc pas qu'il faut se méfier des renards ? Heureusement qu'il a des amis qui veillent sur lui. Bravo en tout cas !
Oh, que voilà de références qui me font chaud au coeur et honorent mes rimailles. Merci !
Ahah, Dune est un petit cheval plein d'innocence, il ne savait pas encore pour le renard ~