Dernier jour avant le départ. Debout derrière la fenêtre de notre chambre, Izabel et moi admirons ensemble le lever d’un soleil annonciateur d’une journée infernale. Nous profitons encore des derniers instants qu’il nous reste Dans quelques heures je partirai, abandonnant ma fiancée pour plus de huit saisons. Par ordre du Roi, Moi, le corsaire Niels Fernandez De Velasquez, est missionné pour assurer la protection du navire qui partira vers les Indes, en quête de trésors culinaires et de tissus uniques. Un ultime voyage, je l’espère. J’aime l’océan, les embruns qui caressent mon visage, l’air frais et humides de flots que peu d’hommes eurent la chance d’humer. Cependant, comme toute grande aventure, la mienne touche bientôt à son épilogue. Lorsque je reviendrai, je serai promu, marié, un homme comblé qui n’attendra plus que d’être appelé « père ».
La main de ma douce dans la mienne, nous marchons vers le port de Cadix où mouille le futur bâtiment que j’occuperai les deux années à venir. La douce fragrance de gentiane s’immisce dans mes narines, comme le dernier souvenir qu’elle me laissera pour les longs mois à venir. Ca, et son mouchoir que je garderais contre mon cœur.
Comme à notre habitude, nous échangeons quelques banalités ; les ragots qu’elle a entendus, mes collaborateurs qui ne méritent pas leur poste, les projets que nous avons pour mon retour. Que de bonnes choses qui ne peuvent empêcher mon sourire d’illuminer mon visage. Je me perds un instant sur le sien, dégageant une mèche de cheveux corbeau qui barrait la porcelaine de son teint.
Le chant des mouettes grandissant s’accompagne des sons de vagues qui se brisent sur les récifs, l'Estralla Fugaz montrera bientôt son mât. Ce vaisseau majestueux à peine revenu d’une bataille a su résister aux plus grosses colères des océans, et fait face aux pirates les plus sanguinaires. Les profondeurs abritent bon nombre d’épaves qu’il a semé. Bientôt, je serai celui qui commandera le feu de ses canons.
Des matelots chargent déjà le navire de lourdes caisses, dont certaines cachent sans aucun doute du rhum malgré l’interdiction. J’ai toutefois assez confiance en ces hommes pour fermer les yeux, sauf si l’un d’eux franchis la ligne, dans ce cas il passera par le fond. Aucune tolérance ne sera de mise envers les ivrognes.
« Nous y voilà. Nous nous quittons ici Izabel.
— Tâche de revenir vivant. »
Son sourire chaleureux va me manquer. Avant de la quitter pour de bon, je lui vole un baiser qu’elle me rend.
« À très bientôt. »
Nos mains se quittent, mais nos âmes resteront connectées.
Mon regard la quitte, et se pose sur Arévalo… capitaine Arévalo comme il aime le faire rappeler chaque fois qu’il inspire son haleine fétide puant l’alcool jusqu’au nouveau continent. Un homme que j’aurais pu apprécier, s’il était resté fidèle à la réputation qu’il s’est forgé par ses faits d’armes passés. Les histoires parlent de lui comme le maître de la guerre, le cauchemar de Poséidon, et aujourd’hui ? Il se contente de faire les courses pour le royaume. Personne ne sait vraiment comment il en est arrivé là, des rumeurs circulent, mais aucune version officielle n’existe.
« Tu sais depuis quand on t’attend ? beugle-il.
— Pas assez, j’ose croire. »
Ses tentatives d’intimidations ne m’inspirent guère de crainte. Contrairement à moi, il ne possède pas la lettre de marque du Roi lui-même autorisant le navire à prendre le large. Je ne peux qu’imaginer l’effet « coup de poing » en pleine figure qu’il subit en voyant qu’un corsaire de la moitié de son âge possède l’ascendant sur lui, néanmoins il s’y fera, s’il tient à sa tête.
Avant de gagner ma cabine pour ouvrir le journal de bord, je me place sur le pont. Pendant que le capitaine ordonne aux marins de déborder, nous, les hommes au cœur pris, faisons nos adieux à nos moitiés. Une bourrasque de vent gonfle les voiles, des mots d’amour fusent entre des sifflements. Sauf pour Izabel et moi qui restons silencieux, le simple échange de notre regard remplace n’importe quel poème. En plus de son parfum, c’est son visage que je scelle précieusement dans ma mémoire. « Au revoir ma chérie. »
Trois février seize cents quatre-vingt-dix, le voyage débute.
Les mois se succèdent. Loin au nord sous la cinquième pleine lune, le cap de bonne espérance se dessine timidement au-dessus de l’horizon. La moitié du trajet est désormais engloutis, mais nous voguons maintenant en eaux inconnus. Entre vaisseaux fantômes, sirènes, ou même kraken, les rapports cités par mes prédécesseurs pourraient presque défier mes croyances. Si de telles créatures devaient exister… mais de telles choses n’existent pas.
Une pleine lune supplémentaire a été notifiée dans mon journal, six mois que nous avons quitté l’Espagne, encore quatre avant d’arriver en Inde. Appuyé sur la rambarde du pont, mon regard se perd sur l’étendue infinie de l’eau, si calme, si plate.
« Déferlante ! »
Ce cri vient d’en haut, le tremblement dans son timbre n’annonce pas une mauvaise blague. « Oh que non ! » Une montagne d’eau perce le ciel nocturne dans notre direction. De tout ce que j’aurais pu imaginer, je ne m’attendais vraiment pas à ça. Tout autour de moi, l’équipage s’active sous les ordres d’Arévalo, qui montre enfin sa connaissance du domaine nautique. Sans quitter des yeux ce mur qui s’approche silencieusement, je rejoins le capitaine à sa barre. Celui-ci trop concentré sur sa tâche ignore complètement ma présence, préférant gueuler ses instructions aux matelots, je ne l’interromprais pas.
Le navire quasiment face à la vague, si proche, si effrayante, ébahis par la grandeur de cet obstacle, je ne me suis même pas aperçu qu’Arévalo me fixait. C’est en croisant son regard que je compris : il a failli à sa mission de tous nous garder en vie.
Quelques secondes. Le monde se renverse, l’eau qui traverse le pont balaie absolument tout sur passage, tonneaux, voiles, cordages, moi… puis plus rien. Je sombre dans le néant, en même temps que les corps se gonflent d'une eau qui les emportent vers leur fin.
Ravi que ça te plaise, pour le moment on est en pause, mais l'écriture devrait reprendre prochainement !
Des le début on sent un changement de ton de la part de Niel, je le sens plus adulte, peu être plus gradé car je n'ai pas souvenir qu'il commandait le vaisseau. Plus "homme" aussi car je le pensais comme un jeune homme sorti depuis pas tres longtemps de l'adolescence, et la je le retrouve fiancé et voulant etre père, mais cette version me plait bien ! Bon, je suis désolée pour Izabel je sens qu'elle ne le reverra peu être pas dans les temps convenus T_T
J'aime beaucoup le fait que bien qu'Arévalo n'est pas décrit et présenté avec le plus grand amour de la part de Niel, il reste un personnage avec des connaissance, et une morale car il "s;en veux" d'avoir failli a sa mission. Alors qu'on se dépeint au premier abord un méchant soulard, c'est un autre homme qu'on découvre.
Le changement a la fin fait tout basculer ( et pas que le navire XD) Je ne m'y attendais pas ! J'ai hate d'avoir la suite, bravo a vous deux pour ce début qui promet !
Oui reprendre cette histoire va faire mûrir des personnages qui n'étaient peut être pas suffisamment approfondi, surtout pour Niels !
Merci encore je suis contente que ça te plaise et j'espère que la suite te plaira encore 💜❤️
J'espère que la suite te plaira tout autant !
Niels !
J'ai adoré ce début de roman, je ne m'attendais pas à la fin, le changement de météorologie brusquement comme ça, les pauvres marins ;; j'ai du me relire (mais je pense que c'est moi qui suis un peu fatiguée) mais j'ai cru cinq secondes qu'Arévalo avait fait exprès, mais bon, j'imagine que non quand même xD
J'ai été très surprise aussi que Niels ait une compagne, et le pire c'est qu'ils sont mignons ensemble : mais genre euh non, i dont want ;;
BREF ! Je suis très impatiente de connaître la suite ! :33
Héhé eh oui ! Isabel a sa petite importance mais je n'en dirai pas plus 👀 tu auras tout le plaisir de le découvrir plus tard !
En tout cas je suis contente que ce chapitre t'ait plu et j'espère que la suite te plaira tout autant 🤭 merci pour ce retour qui nous fait chaud au cœur 💛💙🧡