II – L'ambition des troupeaux

Par Dan
Notes de l’auteur : Slim Harpo – Rainin' in my Heart

L’ambition des troupeaux

Valhalla, Callisto, satellite de Jupiter

 

Guevara ne s’était pas embarrassée d’appétit en se mettant à table ; elle avait englouti sa part, puis celle d’Hadid, et elle picorait désormais dans l’assiette de Disney sans s’inquiéter de savoir ce qu’elle mangeait. Manier ses couverts lui occupait les mains et le bruit de sa mastication avait le mérite de meubler le silence, seulement troublé sinon par le crépitement de la pluie sur la tôle ondulée et la rumeur de la tridivision en sourdine.

Elle savait qu’il était périlleux de se réfugier ici en pareilles circonstances, qu’il aurait été plus avisé de se cacher en pleine vue dans l’effervescence d’Europe, mais Guevara avait besoin de tout le réconfort possible pour ne pas faiblir.

— Qu’est-ce que vous allez faire, milady ?

Elle ne répondit rien à l’hologramme vrombissant de Napoléon.

— Faut qu’on aille la chercher, lâcha Disney.

Hadid ne pipa mot, mais Guevara savait qu’il approuvait ; elle approuvait aussi, car l’idée d’abandonner Teresa lui avait été intolérable et elle continuait à l’être tandis que sa hantise faisait naître un millier d’atroces scénarii dans son esprit. Chaque seconde en son absence resserrait l’étau de la honte autour du cœur de Guevara et chaque seconde d’inaction lui réclamait davantage d’énergie.

— On peut pas la laisser là-bas ! s’exclama Disney, qui commençait à réaliser l’étendue de leur lâcheté et qui, de frustration, avait déjà fumé cinq cigarettes au cours des dix minutes passées. On aurait dû… Fallait juste… Elle devait pas être loin, on peut encore…

Seule Guevara était lâche, en réalité ; Disney et Hadid, eux, s’étaient contentés d’être loyaux lorsqu’elle leur avait ordonné de monter à bord du Mouton électrique sans se retourner. Elle n’était d’ailleurs pas certaine qu’il faille en appeler à la couardise : son repli avait été réfléchi et mesuré, aucunement dicté par la frayeur. Elle avait fait le même choix qu’au large de Miranda, un an plus tôt, quand le marché s’était ébranlé sous ses yeux écarquillés.

« S’ils nous attaquent tous, ils gouteront à notre résistance commune », disait Aessa Menkalinan à la tridivision.

— Je crois pas qu’ils vous soupçonnent d’avoir fait péter le cargo, dit Napoléon. Ils savent que ça aurait aucun intérêt pour vous. Mais ils vont vous chercher activement. J’ai essayé d’alléger l’atmosphère comme je pouvais, mais bon…

Guevara fit un geste désintéressé de la louche en direction de l’hologramme. Non loin, l’écran devait dessiner les contours de la ministre déléguée aux Satellites jupitériens ; sa voix grave froufroutant en bout de table, elle semblait présider leur repas plutôt qu’une allocution historique.

— C’est bien aimable à vous, dear, répondit Guevara, mais ne vous tourmentez pas. Il n’y avait rien à accomplir là.

— Si c’était vraiment pas un accident… vous avez une idée de qui a pu faire ça ? demanda Napoléon.

Guevara se tourna vers Disney, qui manqua son appel muet ou choisit de l’ignorer. Leur chimiste n’avait pas su dire s’il penchait pour le sabotage ou la bête erreur mécanique, peut-être trop obsédé par ce qu’il estimait être une crasse incompétence de sa part : il n’avait pas su percevoir le danger qui avait blessé Teresa. Le singulier panache échappé de la cuve en avait-il été le signal ? L’élément déclencheur ?

— None, répondit Guevara. Les gouvernements n’obtiendraient rien à piéger un cargo de commerce, au contraire. L’hydrogène jupitérien raffiné est précieux pour tout le monde puisque c’est la seule source exploitée du système.

— D’autres luniens, alors ? Vous avez peut-être des concurrents jaloux.

— Vil flatteur.

Napoléon ricana. Guevara chercha quelque chose à ajouter, ne serait-ce que pour garder le gageur en ligne et éviter de se retrouver seule face aux attentes refrénées d’Hadid et Disney, mais elle avait l’esprit trop absorbé pour songer à une diversion.

L’hypothèse de Napoléon n’avait guère de sens : les pirates capables de détourner un vaisseau étaient rares, mais il y avait moult autres façons de se procurer illégalement de l’hydrogène. De plus, ces potentiels rivaux n’auraient eu nulle raison d’attaquer maintenant, ni d’orchestrer une revanche aussi injuste et violente ; les moonshiners qui avaient perdu la vie au chantier naval étaient totalement étrangers à leur soi-disant compétition et personne, pas même le plus jaloux des forbans, n’aurait sacrifié des innocents au nom du profit.

Non, plus Guevara y pensait et plus elle était persuadée que l’explosion avait un rapport avec le panache soufflé par la cuve de contrôle : c’était le seul élément nouveau auquel ils s’étaient heurtés lors de cet abordage et elle ne pouvait croire qu’il se soit agi d’une coïncidence.

Elle ignorait quoi en déduire, cependant. Les analyses de Disney n’avaient rien révélé de dangereux, sinon Guevara n’aurait jamais remorqué ce cargo, surtout pas en zone occupée. Elle voyait encore l’empreinte des morts, et pire : celle des vivants en flammes qui couraient en hurlant avant de s’effondrer ; elle sentait les chairs calcinées, elle entendait les cris.

Elle n’était peut-être pas terroriste, mais elle était responsable du désastre.

Guevara laissa passer quelques secondes pour calmer sa nausée avant d’enfourner une nouvelle bouchée sans saveur. Il n’était pas question de se faire plaisir en mangeant, de toute façon ; seulement de s’abîmer l’estomac et de se punir.

— Peut-être que la PI va trouver autre chose…, fit Napoléon.

— Je crains qu’il faille attendre que les auteurs se manifestent pour découvrir leur identité, dit Guevara. S’ils n’ont pas signé cette œuvre sanglante, c’est qu’ils préfèrent l’anonymat et que nous n’avons probablement aucune chance de percer leur secret.

— Ça risque pas de poser problème pour vos… plans… ? continua Napoléon. Je veux dire, toute la PI va vous filer le train, ne serait-ce que pour avoir votre témoignage…

La fourchette de Guevara se suspendit à mi-chemin entre son assiette et sa bouche. Toute aveugle qu’elle soit, elle sentait les regards d’Hadid et Disney peser sur elle et leur silence était plus éloquent que leurs questions : ils se doutaient de ses manigances depuis fort longtemps.

— Ça risque de les compliquer grandement, dear, dit-elle évasivement.

— Et vous voulez quand même continuer ?

— Aye. Justement parce que la PI va s’activer et sévir. Mon unique chance désormais est d’accélérer le processus avant que le système fourmille d’escadrons. Si je me terre, je vais manquer ma chance et mes plans seront voués à l’échec.

— Et si les vrais terroristes s’amusent à vous mettre leurs attentats sur le dos, même si ça aurait aucun sens que vous dégommiez des collaborateurs et que vous perdiez un matelot dans la bataille ? S’ils essayent de faire croire à tout le monde que c’est bien vous qui avez fait sauter ce cargo ?

— Eh bien, au moins, les gouvernements me prendront au sérieux.

« Nous allons tout mettre en œuvre pour trouver les coupables et les traduire en justice. C’est désormais la priorité de la gouvernance jupitérienne, mais également la priorité du système au complet. » continuait Menkalinan.

— Je transmets à Leia que le rendez-vous est maintenu, alors ? demanda Napoléon.

— Dites-lui qu’il est avancé à aujourd’hui. Je suis sur Callisto.

— D’accord. Mais j’insiste : une fois que vous l’aurez rencontrée, je disparais…

— Vous n’avez rien à craindre de nous, Napoléon. Vous avez fait un travail exemplaire pour nous mettre en relation. Mais je comprends et vous avez raison de prendre vos précautions.

— Soyez prudente aussi, milady. C’est un chouette projet que vous avez là. J’aimerais vraiment que vous y arriviez.

Le ronronnement de l’hologramme se tut et celui des chenilles de Marvin s’intensifia alors qu’il débarrassait les plats nettoyés par la boulimie de Guevara. Les quantités faramineuses de semoule et de pois qu’elle avait ingurgitées lui coupaient presque le souffle. Elle entendit Disney s’asseoir à la place de la marmite que Marvin lâchait dans l’évier et la chaise d’Hadid grinça lorsqu’il se rapprocha.

— Messieurs, je crois qu’il est temps, déclara Guevara.

La fébrilité lui fit dresser les poils sur les avant-bras. Aujourd’hui plus que jamais, elle n’avait pas le droit de les prendre au piège ; elle avait déjà trop blessé et déçu son équipage.

— Pas temps de tout vous avouer, corrigea-t-elle en voyant leurs empreintes s’agiter. Temps de vous sauver avant qu’il soit trop tard. Mes plans peuvent s’avérer très dangereux. Ils étaient risqués au départ, mais après ce qui s’est produit sur Europe, je ne pourrais pas vous reprocher de partir – par Hawking, je vous y encourage même.

— Vous le crachez, votre morceau ?

— Disney, dear, je ne…

— Sérieusement, faut nous raconter. Faut nous dire qu’y a une khorochaia raison à ce que Teresa… À ce qu’on l’ait… On vous fait confiance, kapitan, vous savez ? On sait que vous êtes pas sans-cœur. Faut juste nous expliquer. On sera assez grands pour choisir ce qu’on fait.

La panse trop pleine de Guevara se noua en émettant un gargouillis caverneux. C’était touchant, mais Disney n’avait aucune idée des répercussions auxquelles il s’exposait. Il avait néanmoins raison sur un point : Guevara leur devait des réponses, en l’honneur de Teresa et des risques qu’ils avaient eux-mêmes encourus en participant involontairement à la campagne de leur capitaine.

— Je ne vais pas vous expliquer, dit-elle.

Disney et Hadid se redressèrent, mais elle les coupa :

— Je vais vous montrer.

Guevara se leva péniblement, referma les agrafes de sa grenouillère en rentrant le ventre et arracha Marvin à sa vaisselle. Les empreintes palpitèrent quand elle traversa le séjour encombré pour pousser la double porte menant au jardin battu par l’averse ; Guevara entendit ses employés hésiter sur le pas, mais elle connaissait trop bien la météo de Callisto pour s’en formaliser.

Les trombes lui tombèrent dessus comme un coup de massue et elle ouvrit les bras pour embrasser l’eau sale – comme l’hydrogène jupitérien, l’eau uranienne était la seule prélevée, conditionnée et utilisée dans le système solaire. Sur Callisto, le mordillement des gouttes teintées d’ammoniac lui rappelait d’anciens automnes, d’anciennes inondations dans le bassin multi-annulaire de Valhalla, d’anciennes parties de glisse avec Trotsky et Franklin.

À la fraîcheur de l’air et aux nuances du ciel, Guevara devinait que le long crépuscule touchait à sa fin après seize journées interastrales. Ce n’était rien d’aussi oppressant que les nuits uraniennes de quarante-deux ans, bien entendu, mais à la manière du changement de saisons subi en migrant d’une lune à l’autre, cette spécificité physique nécessitait une certaine capacité d’adaptation. Guevara frissonna, aussi touchée par le froid et l’humidité qu’elle ne l’était par l’affluence des souvenirs ; aucune carrière de baroudeur, aucun système immunitaire ne pouvait préparer à ce bouleversement-là.

Hadid et Disney l’encadrèrent pendant que Marvin sondait l’atmosphère au guet de vaisseaux de la PI qui les auraient débusqués. Guevara avança dans la boue jusqu’à ce que le relief s’élève sous ses pieds, jusqu’à ce que le sol devienne moins spongieux sur le versant intérieur de l’anneau, jusqu’à ce que le jardin laisse place au cimetière.

— Dears, je vous présente ma mère, mon père et mes petits frères, dit-elle en désignant les empreintes tortueuses des caveaux.

Le crépitement de la pluie sur les plaques tombales était très différent de celui de la pluie sur le toit. Ici, il ricochait à flanc de terre et reprenait en canon le clapotis des flaques et l’écoulement des ruisseaux auxquels on ne buvait pas ; c’était le bruit du dehors et de l’aventure. Là-bas, c’était le bruit de la chaleur et du foyer : une bicoque de métaux assemblés en patchwork par des générations de malvoyants appliqués.

Ces deux sons particuliers, Guevara ne les avait plus entendus nulle part depuis qu’elle était partie de Callisto, embarquée par Shelley, Lennon, Elion et Cézanne trente ans plus tôt. Elle n’en avait que vingt, à l’époque, et elle n’avait jamais imaginé que le chant de la pluie serait la seule voix familière à résonner entre les murs de la maison et de l’anneau pour fêter son retour au pays.

— Ayant outrepassé le quota de deux enfants par couple instauré par l’Union, ils n’étaient pas prioritaires pour les traitements médicaux, dit-elle. Ils sont décédés l’un après l’autre d’un virus jupitérien, il y a fort longtemps.

La maladie avait rendu leurs corps inutiles, impropres au recyclage et à la réutilisation. La famille étendue les avait alors inhumés selon des coutumes primitives, censurées, inscrivant ainsi leur affront contre l’Union dans l’éternité de la mort ; inscrivant aussi la vanité de leur vie dans la mémoire de tous ceux qui pouvaient visiter leur sépulture et deviner leurs dépouilles sous leurs pieds.

— Kapitan

— Venez, la promenade ne fait que commencer.

Guevara ne percevait plus d’impatience chez Hadid et Disney, mais elle décelait de l’embarras et peut-être un fond de courroux alors qu’elle les conduisait à bord du Mouton électrique et loin de chez elle. Ils survolèrent l’immense faubourg de Valhalla jusqu’au centre du cratère ; à chaque nouveau quartier, en bordure de chaque place, Guevara citait les morts ou les blessés, les démunis, les oubliés ; tous des luniens honnêtes.

Callisto ne ressemblait guère à Europe, ou même à Miranda : ici, l’on vivait du mieux possible selon les préceptes planétiens et aucune illégalité n’avait jamais été à déplorer ; pas le moindre établissement fournisseur de spiritueux, pas le plus petit marché, et personne pour se plaindre de leur absence. L’on œuvrait pour la métallurgie jupitérienne et l’on guettait les cargos d’hydrogène de la planète mère en toute légitimité. Avec l’ingénierie droïdique d’Io, les usines de reconversion de Ganymède et les spécialisations mécaniques des autres lunes, l’on était fier de fournir l’Union entier en métaux et en alliages, en robots et en vaisseaux, en autocuiseurs et en rouages.

Guevara n’avait jamais su se contenter de ça ; elle avait pourtant posé un « œil » compréhensif sur le métier de ses parents et sur l’envie de ses frères de prendre le relais. Elle n’était pas importunée par la rouille, elle aurait même pu prendre goût aux travaux manuels et se faire une place dans le milieu, mais elle avait toujours eu la sensation que quelque chose de différent l’attendait loin de Callisto, que quelque chose de mieux pouvait attendre tous les luniens. Elle ne s’était pas fourvoyée, d’ailleurs : la différence, le voyage et la découverte, elle les avait expérimentés sous toutes leurs formes, pendant des années, en compagnie d’autres avides insatisfaits.

Rien de tout ceci ne semblait exister sur Callisto ; les pirates et les attentats appartenaient à une autre dimension, c’était donc pour cela que les rebelles audacieux se cachaient dans les environs et pour cela qu’on pouvait trouver une révolutionnaire aussi discrète et dévouée que Leia dans l’arrière-cour du magasin central.

Guevara supposait que les dehors de Leia ne laissaient rien paraître de ses convictions politiques, camouflées sous un quelconque uniforme de rangeuse ou de vendeuse, mais la fébrilité de son empreinte ne laissait aucun doute.

Leia se crispa davantage lorsque Guevara la salua d’une étreinte et de quelques tapes dans le dos – une tradition des luniens de Jupiter que l’affection avait poussée à l’extrême dans le cas de Shelley. Leia se plia à cette convention sociale avec une certaine précipitation et recula quand Guevara demanda :

— Sauriez-vous où je pourrais acheter une poire à lavement ?

Elle maudissait Napoléon de toujours choisir des noms de code déplorables.

Guevara sut qu’Hadid et Disney échangeaient un regard, sans doute circonspect, tandis que Leia les observait certainement. Marvin y alla de son propre scan et, quand il fut établi qu’ils ne représentaient respectivement aucune menace, Leia émit un faible :

— Oh, bonjour.

La provenance de sa voix flûtée indiquait à Guevara qu’elle ne faisait face à aucun des Moutons, une esquive peut-être due à son handicap visuel de lunienne locale, peut-être à sa réserve naturelle de plus en plus perceptible. Guevara ne pensait pas que Leia se méfiait d’eux, simplement qu’elle n’était pas tout à fait à son aise dans les complots – ou dans les rapports humains de manière générale : par messages interposés, elle avait toujours semblé solide et avisée, mais cette confrontation ne paraissait pas beaucoup lui plaire. Sans doute préférait-elle la solitude du magasin à travers lequel ils la suivirent, son empreinte la précédant d’une démarche un brin raide et saccadée.

Guevara avait travaillé dans une coopérative semblable pour gagner quelques coupons lors de ses études secondaires. Callisto en était pleine : partout, dans toutes les villes, d’immenses entrepôts alignaient leurs rayonnages d’autolaveurs, autosécheurs et autres autobjets indispensables au quotidien des habitants du système. Leurs dédales offraient des terrains de cache-cache formidables aux enfants du coin et des repaires parfaits pour les canailles plus âgées.

Leia et ses invités quittèrent le dépôt, passèrent sous un filet de pluie mourante et gagnèrent les baraquements des employés, vides à l’heure où le tour reprenait. Là, Leia les fit asseoir et leur servit maladroitement un café tellement dilué qu’on y goûtait davantage l’eau ferreuse que les fèves rôties.

— Vous voulez du sucre ? Du lait ? Des biscuits ? proposa-t-elle avec une diligence toute anxieuse. Peut-être que vous préférez du thé, en fait ? Je dois avoir un peu de cidre quelque part, si jamais…

— Des biscuits, bien volontiers, coupa Guevara devant les efforts que cette hospitalité semblait coûter à Leia et le mutisme crispant de son équipage.

Elle les pourvut en crackers et reprit :

— Napoléon m’a…

— Avant toute chose, nous devrions faire connaissance, ne croyez-vous pas ? interrompit Guevara. Voudriez-vous commencer, Leia ? Rien de préjudiciable, évidemment, je ne souhaite pas vous placer dans une quelconque situation inconfortable. Il s’agit simplement de… se mettre en confiance.

Le frottement des paquets de gâteaux qu’elle empilait et réarrangeait cessa subitement ; de toute évidence, la perspective du tour de table la plongeait déjà dans un inconfort sans nom et Guevara s’en voulut quelque peu de ne pas l’épargner. Elle avait besoin de rassurer son équipage, cependant : de les rassurer pour les entraîner plus avant dans ses projets. Elle esquissa un sourire encourageant à l’adresse de Leia, dont la respiration s’était serrée lorsqu’elle parla enfin :

— Oh, je… Je ne suis personne, en réalité.

— Ne soyez pas si modeste, fit Guevara, puis, se tournant vers ses hommes : Leia a fait de longues études de commerce à la faculté de Nehara. Le fonctionnement des échanges systémaires n’a pas de secrets pour elle. Ses limites non plus. Ses idées pour les dépasser n’ont pas ravi les planétiens à qui elle les a soumises, cela dit.

— Ils ont essayé de vous couper la chique ? Pardon : je suis Disney, chimiste.

— Oh, non, rien d’aussi frontal, répondit Leia. Ils se sont simplement arrangés pour que j’aie très envie de renoncer à mes recherches et de rentrer chez moi.

Ce qu’elle avait fait : une experte des transactions retranchée par la honte dans les ombres d’un magasin de banlieue, jusqu’à ce que Guevara découvre ses travaux et demande à Napoléon de les mettre en contact. Face à eux, Leia avait recommencé à ordonner ses victuailles, qu’elle semblait compter et recompter sans relâche, et Guevara remercia intérieurement Hadid lorsqu’il se présenta et compatit :

— Ils ont un don pour ça.

— Maintenant, Leia, fit la capitaine, pourriez-vous nous montrer votre simulation ? Ces messieurs sont curieux de découvrir nos ambitions et nos arrangements.

— Vous êtes sûre que…

— J’ai une entière foi en eux.

Leia s’agita, mais n’émit aucune protestation ; après tout, elle était au service de Guevara dans cette entreprise, et si elle voulait tout risquer, cela relevait de sa seule responsabilité. Leia disparut un instant, puis une série de bips annonça son retour avec un écran qu’elle leur présenta en pianotant sur le clavier intégré. Quelques secondes plus tard, Disney laissa échapper un sifflement impressionné et Guevara imagina les graphiques animés danser entre eux dans la vapeur du café.

— C’est quoi ? fit Disney.

Comme Leia se bornait à secouer nerveusement les jambes sous la table, Guevara se chargea de la déclaration :

— Ceci, dear, est la révolution.

Cette fois, Disney laissa le silence dubitatif d’Hadid parler pour lui.

— Leia, vous voulez bien leur expliquer ? fit Guevara.

Sa tasse tinta entre ses doigts avant qu’elle bredouille :

— Moi ? Oh, no…

— C’est en grande partie votre œuvre. À vous l’honneur.

Leia prit une longue lampée de café avant de se jeter à l’eau :

— Eh bien, c’est… C’est un schéma économique. Basé sur les quantités d’hydrogène que Guevara a été capable de piller ces trente dernières semaines, avec un réseau de distribution théorique. On s’est aperçu que si Jupiter nous laissait nous procurer et reverser légalement l’hydrogène pour gagner l’autonomie et développer le commerce local, ce que le planétat refuse actuellement, on aurait un modèle viable en moins de deux ans. Vingt-deux mois, exactement. Guevara pense le présenter soon.

Sa tirade la laissa légèrement essoufflée et, sous l’attention perçante de ses auditeurs, Guevara pouvait presque voir son empreinte rougir. La passion était aussi palpable que le malaise l’avait été.

— J’ai rien compris, lâcha alors Disney.

— Ça viendra, assura Guevara. Vous aurez bientôt toutes les explications et toutes les cartes en mains.

— Désolé, hein, mais… qu’est-ce que ça va révolutionner, au juste ?

Guevara discernait une pointe de déception dans sa voix et elle comprenait sa réaction : dans les bribes d’archives qui circulaient sous le manteau, la révolution, c’était les armes, la dissidence et la rébellion ; c’était les édifices effondrés et le tyran exécuté par V, ou les cargos réduits en cendres pour la transmission d’un message crucial. Mais l’Union n’était ni un despote ni un oppresseur violent, les luniens en règle ne subissaient aucun joug et même les moonshiners les plus provocateurs n’étaient pas persécutés avec l’acharnement et la rigueur des anciens temps.

La seule faute de l’Union était de considérer la consommation de bière ou de burgers délictueuse sans jamais prendre en considération les avis divergents. Les luniens vivaient dans un monde gouverné par des individus qui ne leur ressemblaient plus et qui ne les comprenaient pas. Il ne s’agissait pas de combattre cet état de fait, en réalité ; seulement de faire accepter leur différence.

— Cela révolutionnera notre position vis-à-vis des planètes, dit Guevara. Ceci, c’est notre marge de manœuvre, notre liberté. C’est notre…

— Déclaration d’indépendance, dit Hadid.

Tous les regards convergèrent sur lui. Guevara n’avait jamais autant apprécié l’économie de ses mots. Tournant vers lui ses yeux humides, elle lui sourit.

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Léthé
Posté le 15/12/2016
C'était donc ça ! Eh beh, ils vont être contents les planétiens xD
Du coup je n'avais pas grand-chose à dire sur ce chapitre, parce que globalement je le trouvais bon et que je n'avais aucune information complémentaire à t'apporter. Du coup je suis allée lire les commentaires des autres, et j'ai découvert qu'après le passage d'Erybou tu avais rajouté deux paragraphes et... ils marchent vraiment à merveille !
Je trouve qu'ils font tout le boulot et effectivement je n'aurais pas vu cette fin de chapitre sans cette phrases : "Les luniens vivaient dans un monde gouverné par des gens qui ne leur ressemblaient plus et qui ne les comprenaient pas" <br />C'est véridique cette déclaration, d'ailleurs on retrouve cette thématique de "peuples différents" dans des textes de colonisations et de déclarations d'indépendance effectivement, du coup moi je n'ai pas été choquée par cette révolte trop sage, au contraire.
C'est carrément classe que les gens aient conscience des erreurs passées (alias la guerre, destruction (?) de la terre, mise en danger de l'humanité, etc), et que même les "bad guy" se disent que le mieux reste de la jouer gentillet pour éviter de faire des morts ou de déclencher une guerre.
Au-delà de ça, je pense que Guevara va avoir beaucoup de mal à obtenir l'indépendance de cette lune maintenant qu'elle est embarquée dans un attentat... J'espère qu'elle a un plan de secours parce que là elle pourra pas faire tout ça sans se faire coincer (sauf si elle choisit de rester dans l'ombre et que Yoda s'occupe du reste).
Sinon tout était fort chouette, j'ai passé un super moment et j'ai fini la partie II ! wéééé
Du coup je me fais une pause, j'essayerais de reprendre ma lecture semaine prochaine (ce week-end si je trouve du temps)
Des bisouuuuuilleeeees ! Merci pour cette chouette lecture, j'apprends beaucoup en te lisant ! <3 
Dan Administratrice
Posté le 15/12/2016
Ah ça oui, ils vont être ravis :P
Eh ben tant mieux pour les ajouts ! Je pense aussi qu'il manquait pas grand-chose mais qu'avec ça au moins c'est parfaitement clair pour tout le monde et je mens pas sur la marchandise. Ca aurait été dommage que tout le monde s'imagine une grosse révolution armée et sanglante alors que c'est pas du tout ce qui est prévu au programme x'D
C'est un sujet qui me passionne, en fait, la colonisation et l'indépendance (le dernier truc de SF que j'ai fait, j'ai en pleine guerre d'indépendance aussi, comme quoi ça vire à l'obsession) ; surtout parce que c'est quelque chose qui se répète dans l'Histoire aussi, et sans progrès, comme si on était voués à répéter les mêmes erreurs. Du coup ça rejoint ce que je veux dire avec cette nouvelle civilisation qui essaye à tout prix d'apprendre de son passé chaotique pour faire mieux. Après reste la question du "jusqu'où ?" Jusqu'où on peut forcer les gens à rentrer dans un moule pour être plus sages, jusqu'à quel point on peut interférer en ayant une excellente intention (apprendre de ses erreurs) avant que ça devienne criticable en soi ? Vaste programme lol.
C'est clair que ça se fera pas tout seul, du côté de Guevara, et que les fausses accusations qui pèsent sur elle vont pas l'aider ; mais elle a la couenne épaisse :P
Fais donc une pause ! Tu dois en avoir plein la tête xDD Je te remercie encore pour ta lecture et tes commentaires ! Je suis ravie si tu as apprécié cette partie II et j'espère que la III sera à la hauteur ♥
Rimeko
Posté le 25/07/2016
Allez, on va dire qu'aujoud'hui je suis motivée. Si si. En plus, je ne sais pas, j'adore lire Moonshine, mais... J'ai toujours plus de mal à me mettre à la lecture sur FPA qu'à la lecture "normale", c'est bizarre. Mais bref.
Bon, avant que j'oublie : la poire à lavement m'a achevée x'D
Retournons à un commentaire normal. Déjà, j'aime beaucoup la façon dont Guevara "voit" (ou ne voit pas, plutôt...). Je trouve ça hyper bien décrit, qu'on puisse la considérer comme une aveugle mais pas comme une handicapée... Et avec cette vue dans le futur... C'est perturbant et intéressant, ça ouvre des perspectives à imaginer. Je trouve que les auteurs qui joue sur ces "sens différents" sont trop rares ! (Et là, par contre, son pouvoir me semble très clair...)
Et puis ghykwft, cette ambiance ! Entre le cimetière, la pluie dans la nuit, la nostalgie à travers les sons... C'est tellement beau et tellement triste !
Oh, et le retour de Napoléon... Décidément, il est partout celui-là ! (Tout est lié ! Ahem, pardon.)
J'ai beaucoup aimé cette "révolution". D'abord, tu amènes subtilement les motifs de constestations, avec cette démabulation dans cette ville qui paraît fantôme et ce qu'on devine du récit que Guévara fait à ses acolytes... D'ailleurs, c'était un bon choix de nous laisser l'imaginer, c'est bien plus efficace ! (Un peu comme dans le chapitre précédent...) Et puis la révélation de ce dont il s'agit vraiment, la réaction de Disney qui épouse pour un temps celle du lecteur, vite dissipée par la suite... Parce que oui effectivement, il n'y a pas de raison de mener un combat contre l'Union. Et ça, c'est très rare de le trouver dans des romans, ce juste milieu bien plus "réaliste"... Parce qu'il paraît que la révolution armée, c'est bien plus épique. Ouais. Bien plus réchauffé, surtout, et souvent un peu déplacé/extrême. Et franchement, cette conclusion, je l'ai trouvée épique à souhait ! <3 J'étais totalement d'accord avec Guevara sur ce point - et j'adore ça, quand les émotions des personnages correspondent à celles des lecteurs et qu'on peut faire les montagnes russes avec eux...
Cette histoire est décidément géniale, Danah ^^ Je vais voir si je trouve le temps de lire le dernier chapitre en ligne avant le PaCNo !
Dan Administratrice
Posté le 25/07/2016
Re-coucou =D
Ne t'inquiète pas, je crois que la lecture en ligne a à peu près le même effet sur tout le monde, promis je ne me vexe pas :P
Oui, petite dédicace à PA en passant, ça ne fait jamais de mal !
Merci beaucoup pour Guevara, je remarque que par la suite je perds un peu l'habitude de la faire voir différemment, alors je suis contente si ici ça fonctionne ; si la différence est perceptible, parce que j'ai vraiment vraiment galéré à expliquer et montrer son pouvoir. Ca reste quand même handicapant sur certains aspects, mais pour Bowie aussi ça l'est de ne pas ressentir la douleur (alors que d'entrée de jeu on pourrait croire que c'est un avantage et que ça le rend invincible). Merci beaucoup du coup !
Et aussi pour l'ambiance =') Je suis vraiment contente si ça parle au lecteur ; j'ai finalement peu d'occasion de les ramener sur leur lune natale et de montrer quelque chose qui soit marquant d'emblée (c'est le problème quand on passe de lune en lune aussi rapidement, on s'empreigne moins du décor je trouve). Mais oui, Napopo est de toutes les fiestas :P
Ca me rassure beaucoup ce que tu dis sur la révolution et je suis contente que tu aies cette réaction après que j'aie modifié un peu le chapitre ; je pense que les commentaires de Rach et Ery m'ont bien aidée à éclaircir mon propos, du coup. C'est tout à fait ça : il n'y a pas lieu de prendre les armes et de s'insurger ; d'ailleurs ça ne leur viendrait même pas à l'idée et ce serait complètement disproportionné par rapport à "l'oppression" réelle de l'Union. Après, comme je disais à Ery, on est au début de l'histoire, et un de mes propos ici c'est de montrer comment on (les Hommes en général) arrive à se tirer des balles dans le pied ; comment tout se répète inexorablement, et comment parfois les meilleures intentions du monde amènent aux mêmes résultats.
Je suis vraiment contente que ça te plaise en tout cas ! Je fais très attention à pas dessiner de camp de gentils et de méchants alors ça me rassure toujours quand ça se remarque et que ça paraît cohérent. Et merci tout tout plein pour tes compliments ! ♥
A bientôt dans ce cas, j'espère que la suite te plaira =D 
Laure
Posté le 28/06/2016
Coucou Danette ! J'ai lu ceci tout à l'heure et hier au travail pendant mes courtes pauses de midi. 
J'aime bien ! Guevara est amusante. Tout m'amuse, c'est un problème, je vois de l'humour partout où il n'y en a pas ! C'est un peu nuisible. À cause de ça je ne sais plus ce qui est drôle objectivement et je ris dans des moments inopportuns. Bref.
Quand j'étais toute perdue au début, tu me disais que c'était censé s'améliorer avec la suite, eh bien voilà, je suis arrivée au stade où je crois que je comprends tout. J'ai juste un peu de mal avec le titre d'Haccan, mais pour le reste je crois que ça va à peu près. Ah et je sais pas Kant est dans quelle tranche d'âge. Mais bon, c'est mineur, il me semble. Donc youpi ! Je ne suis plus perdue du tout du tout.
Et oh là là, c'est mystérieux tout ce qui se passe. Moi je pense que c'est Aessa qui est derrière tout ça, elle a dû élaborer un plan avec les dignitaires et ça a mal tourné. On sait déjà qu'elle nous cache quelque chose et qu'elle est moins innocente que ce qu'elle laisse croire au public... Par rapport à ce que Rachael disait il y a pas trop longtemps sur ton jdb, je pense que ça me dérange aussi un peu que les personnages-narrateurs nous cachent des choses comme ça. Mais c'est pas parce que ça me met mal à l'aise de pas tout savoir, c'est plutôt que je crois systématiquement avoir raté des infos sur les mystères qu'on effleure et ça accentue un peu mon impression d'être perdue... Je sais pas quoi te conseiller là-dessus et je sais pas si tu es censée modifier quoi que ce soit dans ce sens-là. En tout cas maintenant que je sais que les narrateurs peuvent nous cacher des choses, ça va mieux.
C'est une bonne nouvelle, cette révolution ! Je leur souhaite tellement que ça fonctionne ! Horrible, une vie sans burgers ni bière. D'ailleurs, la bière, maintenant j'aime et j'en bois parfois l'après-midi avec mon père et mon frère. Mon père était surpris au début que maintenant j'aime ! Je lui ai dit que c'était que j'avais une amie qui en parlait souvent et que ça m'avait comme appris à aimer. C'est vrai, tu en parles avec une telle passion que maintenant j'associe le goût à du très positif :D
Bref j'ai beaucoup aimé ce chapitre, dont il me semble avoir peut-être trop peu parlé dans ce commentaire. Je l'ai trouvé bien rythmé et très agréable à lire, en particulier dans les dialogues, très vivants. La poire à lavement m'a fait rire. Vivement la suiiiite ♥  
Dan Administratrice
Posté le 28/06/2016
Oh désolée Ethel, j'ai mis tellement de temps à venir te répondre T.T
Aha oui ça peut finir par devenir problématique si tout te fait rire xD Je mentirais si je disais que je voulais faire aucune blague, mais j'espère quand même que les vrais sujets graves réussiront à te parler... gravement ^^' C'est vrai que c'est peut-être un peu risqué de glisser de l'humour partout ; au fond, il se passe des choses sérieuses et pas jojo.
Je suis contente en tout cas si certaines choses de mettent en place et que ton impression de flottement se dissipe enfin ! C'est quoi qui te pose problème avec le titre d'Haccan, exactement ? Le fait qu'il soit officier ? Son rang dans la police ? Pour Kant, il me semblait l'avoir dit, elle est assez jeune, la vingtaine, mais effectivement ça n'est pas forcément crucial comme information =D
Je ne dirai rien sur l'implication ou pas d'Aessa ! Elle manigance des trucs, c'est clair, mais je resterai muette comme une tombe sur la nature desdits trucs :P Pour ce qui est des narrateurs très secrets, j'en ai bien discuté avec Cricri ; le problème je pense est qu'il n'y a pas un narrateur qui soit vraiment au même niveau que le lecteur. Il y aurait Bowie, à la limite, mais il ne trempe pas trop dans les histoires politiques et terroristes pour le moment. J'essaye de me servir d'Haccan pour poser les bonnes questions vis-à-vis de ce que font Aessa et Guevara, mais le problème c'est qu'il cache lui-même d'autres secrets, du coup ça complexifie... Je suis bien consciente que c'est pas la technique la plus confortable, mais du coup je ne vois pas trop comment y remédier si ce n'est créer un nouveau personnage qui n'aurait aucune réelle utilité dans l'histoire, juste pour jouer le naïf.
Ne te fais pas de souci en tout cas ; c'est normal que des choses t'échappent encore. Tant mieux d'ailleurs ! Mais c'est vrai que moi, personnellement, quand je lis sur internet, comme j'ai l'auteur à portée de main, j'ai envie de tout comprendre tout de suite et de tout décortiquer ; alors qu'en livre papier, je me laisse plus porter et je fais confiance à l'auteur pour éclairer ma lanterne au bon moment. J'espère donc que ça se passera de cette façon dans le cas de Moonshine...
Je ne sais pas si c'est vraiment une bonne nouvelle, la révolution ^^' Même si on est d'accord qu'une vie sans burgers ni bière, c'est pas une vie. Je suis très fière de t'avoir fait aimer, d'ailleurs ! C'est un accomplissement que je mettrai sur mon CV :P
Je suis vraiment très contente que tu aies aimé ce chapitre, et que la poire ait fait son effet, huhu ! Je te remercie pour ta lecture et ton commentaire Ethelounette, et j'espère que la suite te plaira ! ♥ 
Rachael
Posté le 25/06/2016
Ah, ah, mais alors ils veulent faire la révolution ! Fondamentalement je ne suis pas sûre d’avoir compris en quoi consistait cette « révolution » pacifique. Un rapport avec la vente de l’hydrogène piraté par Guevarra ? Mais pour financer quoi ? C’est peut-être un peu rapide ici.
Je rejoins Ery, ça aurait été bien qu’on comprenne plus tôt à quel point les luniens sont oppressés et rêvent de liberté, ça aurait aidé à mieux saisir les enjeux de cette « révolution » et leur envie de vivre autrement, mieux, avec plus de perspective. C’est vrai qu’ils ont l’air de vivre une vie difficile, mais ça reste un peu flou.
Sinon, il y a toujours une ambiance magnifique, avec cette pluie et le crépuscule sans fin, le cimetière et cette nostalgie de Guevarra.
 
Détails
Guevara ne s'était pas embarrassée d'appétit en se mettant à table : je ne comprends pas la tournure « embarrassée d’appétit »
c'est bien vous qui avait fait sauter ce cargo ? : avez
qu'elle l'était par l'affluence des souvenirs :  le flux ?
Ayant surpassé le quota de deux enfants : outrepassé ?
de toujours choisir des noms de code déplorables : c’est une phrase plutôt qu’un nom...
Dan Administratrice
Posté le 25/06/2016
Coucou Rach'
Alors pour reprendre ce que j'ai dit à Ery, concernant le plan, je ne voulais pas trop en dire à ce moment-là parce que ça fera l'objet d'un chapitre entier plus tard ; je voulais poser les enjeux et les objectifs sans détailler toute la machinerie, il me semblait qu'il y avait déjà pas mal d'infos dans ce chapitre et que ça pouvait bénéficier d'un petit essaimage...
Après, au sujet de l'oppression, je t'invite à lire la réponse que j'ai faite à Ery sur le sujet ^^ Je me doute que ça ne va peut-être pas trop vous plaire, comme parti-pris, mais c'est celui-là que je tiens ; faire des planétiens de vilains oppresseurs, ça serait dénaturer ce que j'ai imaginé, en fait. J'espère que cette incertitude passera avec la suite et les rebondissements (j'ai rajouté un petit bout pour dissiper les doutes, mais ça peut ne pas suffire...)
Merci pour l'ambiance, en tout cas ; j'aurais pas tout-tout raté x'D Et merci pour la traque aux coquilles et aux tournures bizarres ! J'espère que la partie III te plaira ! =D
EryBlack
Posté le 25/06/2016
Je sais pas par où commenceeeer.
Bon, si, d'abord : ILS SONT TOUS VIVANTS. En fait si je me souviens bien, je le savais déjà grâce au Nouvel An, mais j'avais oublié :'D Du coup c'est cool, j'étais à nouveau surprise et heureuse de l'apprendre. Et alors je sais pas si je psychote mais Dabos, par son économie de parole, me fait penser à Thorn xD
Bon, un petit peu de sérieux maintenant. On est donc à la fin de la première partie, et je la trouve extrêmement bien construite et rythmée. Il y a juste une chose que je dois t'avouer : j'ai eu un peu la même réaction que Disney. Genre "kwa, c'est ça la révolution ?" Alors attention, je ne suis pas en train de dire que je suis déçue, parce que ce que Guevara présente, c'est de toute façon un projet seulement, et c'est dans sa réalisation qu'on va voir plein de trucs intéressants, je pense. Mais je crois qu'il y aurait moyen de rendre ça, comment dire, plus exaltant ? C'est sans doute à cause de ma lecture décousue, mais je n'ai pas pris suffisamment conscience du joug que les planètes font peser sur leurs lunes et du coup, je ne peux pas être aussi enthousiaste que les personnages en apprenant qu'il y a peut-être un moyen de s'en libérer. Pourtant, je me souviens de la rafle d'Inverness, et il y a aussi les explications de Guevara au sujet de sa famille qui me révoltent ; mais je me dis que ça pourrait être encore appuyé, en fait. Les luniens ont l'air très, très libres, j'ai eu l'impression qu'ils se fichaient complètement des règlements planétiens et qu'ils faisaient ce qu'ils voulaient sans que ça ait de très graves conséquences... Et là bien sûr, il y a l'exemple de Wilde pour me contredire, mais ça a l'air d'être un événement isolé, tu vois ce que je veux dire ? 
Bref, pour résumer, j'ai hâte de voir ce que le projet de Guevara va donner mais j'aurais aimé être plus "proche" d'elle et des autres, mieux comprendre ce que ça changerait pour eux. Je pense que ça peut tenir à pas grand-chose... Quelques touches de ras-le-bol des luniens envers les planétiens ici et là (enfin, encore plus !) - et je pense aussi, je le répète, que ma lecture éparse des premiers chapitres n'a pas aidé. 
Et je t'avoue aussi que je pige pas bien le plan, mais bon ça, c'est pas grave, j'ai l'habitude de ne pas bien piger quand c'est juste expliqué de façon abstraite, je comprendrai mieux quand ce sera plus concret, ça ne me dérange vraiment pas !
C'est la seule grosse remarque que j'avais envie de faire sur ce chapitre, parce que sinon, ben c'est juste absolument cool <3 L'ambiance de Callisto colle PARFAITEMENT à son nom, Callisto ça sonne liquide, fluide, alors si c'est une lune où il pleut des masses, mais c'est parfait. Et c'est donc de là que vient Guevara... Un truc que j'adore absolument dans ton histoire, comme je te le disais pour Wilde et Haccan, c'est qu'il y a un énorme passif derrière les actes présents de tes personnages. On sent que l'histoire a commencé bien avant le début du premier chapitre. C'est un truc que j'essaye d'appliquer à mes propres histoires tellement je l'aime, et ici c'est vraiment, vraiment réussi. Je suis très sensible à la nostalgie, et elle est tellement bien représentée par le clapotement de la pluie sur la ferraille, pour moi c'est la meilleure incarnation possible de la nostalgie. "Ô bruit doux de la pluie, par terre et sur les toits, pour mon coeur qui s'ennuie, ô chant de la pluie !" (ok ça c'est pas moi, c'est Verlaine, mais fuque) 
Bwef, j'aimej'aimej'aime. Vivement la souite <3 
Dan Administratrice
Posté le 25/06/2016
Cücü Ëry !
Ah je ne sais plus ce que tu avais ou non glané avec les lectures du Nouvel An, figure-toi, mais tant mieux si tu es deux fois rassurée :p Hihi c'est vrai qu'on peut lui trouver des petits airs de Thorn, à Dabos... c'est qu'il a des choses à cacher le chenapan !
Alors, concernant toute cette histoire de révolution, je vois bien ce qui te chagrine. Cela dit, j'ai pris un petit jour pour réfléchir et je ne vais pas rajouter des points pour montrer que les luniens sont oppressés, parce qu'ils ne le sont pas tant que ça ! Je sais que c'est pas forcément évident à envisager vu le contexte dans lequel on vit actuellement, parce que pour nous "révolution" c'est effectivement très connoté conflit armé, et c'est pour ça que je faisais s'étonner Disney et répondre Guevara sur le sujet.
Il ne s'agit pas de déclarer la guerre ! Tout le contraire en fait. C'est ce que Guevara expliquera au prochain chapitre de son point de vue, du coup j'ai envie de me dire que, peut-être, si t'avais enchaîné les chapitres, ça aurait moins coincé ? C'est pas vraiment la faute au temps passé et à la lecture décousue par rapport aux premiers chapitres, je pense ; c'est comme ça que je vois leur monde, simplement. Les planétiens ne sont pas d'affreux dictateurs censeurs et les luniens ne vont pas brandir leurs fourches et leurs torches contre les méchants. J'ai bien conscience que c'est moins exaltant mais... à voir comment ça évolue par la suite, parce que tu verras qu'avec les enjeux croisés, on n'est pas loin des complications *sifflote*
Du coup, j'ai rajouté un petit bout dans le chapitre pour essayer de mieux introduire cette idée et peut-être éviter que le lecteur soit aussi déçu que Disney. Je te le copie ici pour que t'aies pas à fouiller, en espérant que ça apaise un peu ta frustration (ou pas du tout x'D) :
"Il y avait une pointe de déception dans sa voix, et Guevara comprenait : dans les bribes d'archives qui circulaient sous le manteau, la révolution, c'était les armes, la dissidence et la rébellion. C'était les édifices effondrés et le tyran exécuté par V. C'était les cargos réduits en cendres pour la transmission d'un message crucial. Mais l'Union n'était ni un despote ni un oppresseur violent, les luniens en règle ne subissaient aucun joug et même les moonshiners n'étaient pas persécutés avec l'acharnement et la rigueur des anciens temps.
La seule faute de l'Union était de considérer la consommation de bière ou de burgers comme un délit. Les luniens vivaient dans un monde gouverné par des gens qui ne leur ressemblaient plus et qui ne les comprenaient pas. Il ne s'agissait pas de le combattre, en réalité ; seulement de leur faire accepter leur différence."
D'où ensuite le passage sur la déclaration d'indépendance. Alors je sais que je sonne un peu "non, je veux pas changer mon texte, je sais mieux que les autres et je pète sur mes commentateurs", ce qui est pas du tout l'esprit x'D Rajouter de l'oppression ça serait raconter une autre histoire, en fait, de mon point de vue. Toute ma démarche est de montrer que les planétiens ont des bonnes raisons d'avoir établi des restrictions, comme certains luniens ont des bonnes raisons de s'y opposer. Mais il ne s'agit pas d'une société totalitaire du tout ; comme tu l'as dit, les luniens vivent relativement en paix en-dehors de quelques scènes dont on a été témoins ^^
Pour ce qui est de mieux comprendre les enjeux, j'espère que les prochains chapitres sur ce sujet t'éclaireront. Je suis désolée en tout cas si c'est une déception ou un ennui pour toi v.v parce que c'est malheureusement l'orientation que prend l'histoire : ils tous très sages, au fond ; ils ne connaissent pas le meurtre et le terrorisme, techniquement ; ils n'ont pas les mêmes sytèmes de valeurs et les mêmes échelles d'évaluation de ce qui est "mal". Mais je me rends compte que je ne dois pas très bien le présenter...
Le plan lui-même sera explicité ensuite ^^ Je voulais vraiment juste poser les bases, là. Mais n'hésite pas le moment venu si c'est toujours obscur ! Je suis vraiment contente que l'ambiance de Callisto t'ait plu, en tout cas =D Et très heureuse vis-à-vis de ce que tu dis sur le passé des personnages. Pour te dire, j'ai même hésité à commencer l'histoire à l'époque de la jeunesse de Guevara & Co, dans un premier tome par exemple, ou un long prologue. C'est sûrement pour ça que ça a l'air aussi prégnant ; parce qu'en fait, un des gros enjeux de l'histoire a débuté avec eux ^^
Et une petite citation de Verlaine en passant ♥ Je te remercie tout plein pour ce commentaire Eryboute, même si je sais que je dois donner l'impression de défendre mon bout de steak, et je m'en excuse v.v J'espère sincèrement que tu aimeras la suite, et je te bisüte ♥
 
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