J-1
La maison était vide. Caroline n’avait jamais fait de menace en l’air. Elle était franche, honnête et bien pensante. Elle était du bois dont on faisait les saints ou les martyres.
C’était sans doute pour cela qu’il tenait autant à elle et aussi la raison pour laquelle leur mariage battait de l’aile depuis des mois vu que, lui, il ne s’était jamais vraiment encombré de morale ou même d’honnêteté.
Caroline était son ange rédempteur. Celle qui effaçait ses fautes et le remettait dans le droit chemin.
Il ne pouvait pas la laisser partir comme ça, pas pour ça.
Hé merde.
Elle lui ferait vraiment faire n’importe quoi.
De: Jolijuju< Juliebokanech@fondationbokanech.com >
Objet: Re : Re : Re : Re : A propos d’Ellis
À: Kami-sama < orangeverte@framsize.fr >
Date: Mardi 23 mars 2010, 10h47
Le rendez-vous est fixé là-bas à 15h. Je ne sais pas encore où cela aura lieu exactement car je n’ai pas encore reçu la décision du psychiatre.
Je m’occupe du reste.
Julie
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Le docteur Elmond Frayer consulta le dossier d’Ellis Marcellin en détail. Il se leva, alla au bureau des infirmières et posa quelques question à l’infirmière en chef. Visiblement en dehors de la brûlure qu’elle s’était faite dimanche et du fait qu’elle parlait peu, elle réagissait plutôt bien.
De retour à son bureau, il prépara une feuille de sortie temporaire.
Bien sûr il ne prendrait sa décision finale que quand il la verrait en consultation le lendemain matin.
Message laissé sur le répondeur du 046543298 (Julie Bokanech) par le 095634275 (Julien Marcellin) - 23/03/2010- 12h32
Allô… Bonjour. C’est Julien Marcellin, le… le père de Ellis Marcellin. Il faudrait que nous parlions d’Ellis… De … de ce que… je pourrais faire pour …pour elle. Demain… c’est son anniversaire… je pense… je crois… (silence) il faudrait que je la vois.
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Chantal Gobinaud venait de prendre son service quand elle passa près d’Ellis. La jeune fille assise à une table griffonnait un motif rouge et bleu sur une feuille. Intriguée, l’infirmière marqua une pause et l’observa. Ellis leva les yeux vers elle. Elle avait l’air détendu, calme, présente.
— Ça va ? demanda Chantal.
— Oui, ça va, répondit mollement Ellis.
C’était la première fois que Chantal entendait le son de sa voix.
— Vous savez…
Ellis affichait un maigre sourire.
— … demain c’est mon anniversaire.
Le regard de l’infirmière arriva à décrypter ce qu’il y avait sur la feuille. Un mot répété à l’infinie.
Demain, demain, demain, demain, demain, demain, demain, demain, demain….
il faudrait que je la vois => voie
Elle avait l’air détendu, calme, présente => grammaticalement on peut accorder les adjectifs au féminin (avec "elle") ou au masculin (avec "l'air") mais ça me semble plus logique de garder le même choix pour tous les adjectifs (ici "détendu" est au masculin et "présente" au féminin)
à l’infinie => à l'infini
C'est aussi difficile d'avoir de l'empathie pour le père d'Ellis, même quand il fait montre de sentiments humains, après l'avoir vu se comporter de manière aussi ignoble tout au long de l'histoire !
Je ne sais pas si ton but ici est de faire ressentir de l'empathie pour lui ou juste de l'humaniser, mais je trouve que le voir se rendre auprès d'Ellis pour ne pas perdre la femme qu'il aime le rend encore plus abjecte. A ce niveau là, je pense que je me contente d'exprimer ma sensibilité sur la question, mais cela me renvoie l'image d'une personne si égoïste qu'elle est prête à exploiter sa fille (parce que je ne crois pas qu'il compte faire quoi que ce soit pour l'aider durant la visite...) plutôt que de faire face aux conséquences de ses actes. J'ai l'impression que tant qu'un personnage n'agit pas dans un but désintéressé ou positif - Julien Marcellin perçoit sa femme comme un espoir de rédemption pour lui et lui uniquement, donc j'aurais plutôt tendance à dire qu'il agit par égoïsme que par une véritable volonté de devenir meilleur ou de réparer le mal qu'il a fait autour de lui - on ne peut pas considérer cela comme un acte rédempteur.
Bien sur, on peut percevoir cela comme un premier pas, je crois même que c'est l'interprétation majoritairement admise pour les arcs de rédemptions...
Quoi qu'il en soit, merci beaucoup pour ce chapitre ! Je suis un peu angoissée de me dire que, demain, le rideau tombera ! A mon avis, ce sera très intéressant de relire cette histoire quand elle sera terminée...
Sinon, si si , c'est totalement voulu que le lecteur ayant une vu d'ensemble voit ce qui se profile, alors que chaque personnage, lui, ne peut pas le discerner. L'ironie dramatique que ça s'appelle, et j'adore faire ça dans mes histoires. Quand j'écris, le lecteur est aussi une sorte de personnage...
Bientôt la fin...