Mésopotamie, 501 avant notre ère.
Quelque part entre Damas et Babylone...
Youssef, 55 ans et son frère Ali, 50 ans sont gardiens de chèvres, le premier mesure 1m80 et le second 1m65, plutôt chétif et si on ne les connaît pas, on a du mal à croire qu'ils soient frères tellement leur physique est différent. Nos deux protagonistes vivent au beau milieu du désert dans un minuscule village d'une soixantaine d'habitants, tout proche d'une magnifique oasis.
C'est leur père, également gardien de biquettes, qui a découvert cet endroit extraordinaire, il y a un peu plus de cinquante ans, une année avant la naissance de son second fils. Les frangins ne se sont jamais éloignés à plus d'un jour de marche de "leur" oasis, la vie a l'air d'y être très agréable et on peut dire qu'ils coulent des jours tranquilles, pépères même, aux cotés de cette perle du désert, dans l'un des plus grands empires de l'antiquité, l'empire Achéménide. [a.ké.mé.nid]
Voilà le cadre idyllique dans lequel évoluent nos deux compères, mais une rencontre inopinée et mythologique va littéralement chambouler leur vie ainsi que celle d'un certain Ja'Dohr, djinn de son état. En effet, le choix d'un souhait improbable va entraîner ce trio dans une quête extraordinaire où mythes, légendes, peuplades étranges et sauvages vont croiser leur route.
I. Ja'Dohr, l’Éfrit
Nous sommes le 7 de nisannu selon le calendrier babylonien, ce qui correspondrait au 1er avril "si mes calculs sont exacts".
Un premier avril !
Si j'avais voulu le faire exprès, je n'aurais sûrement pas fait mieux, espérons que cette histoire ne soit pas qu'une énorme blague !
Les frangins eux, les blagues ils aiment ça, ils aiment en faire, ils aiment en rire et ne sont jamais les derniers pour une franche partie de rigolade.
D'ailleurs, ils ne devraient pas tarder, ils doivent sans doute attendre que je termine cette petite introduction. Vous allez voir, ils sont sympas, je suis sûr que vous allez les adorer.
Ah, les voilà ! Ils traversent le village avec leur troupeau de chèvres, je vous laisse en leur compagnie.
Comme tous les mois, sept jours avant la pleine lune, Youssef et Ali emmènent leur troupeau à une petite vingtaine de kilomètres de l'oasis, dans un lieu bien précis dans les montagnes où l'herbe qui y pousse est assez spéciale. Il paraît qu'elle permet aux chèvres de donner un lait ayant des vertus bénéfiques, un remède contre certaines maladies.
Il est "environ" 9h00, les frangins traversent le village avec leur bétail, saluent en passant leurs amis villageois dont Hamid Fehl un pote d'enfance qui leur dit :
_ Les gars ! Veillez à ce qu'elles se remplissent bien la panse afin qu'elles puissent nous donner un bon lait curatif et riche en vitamines !
Les frères sourient à ce conseil "fort utile" et lui répondent que bien évidemment, ils reviendront avec des chèvres pleines de bon lait pour tout le village, puis ils poursuivent leur chemin. Youssef dit à son frère en souriant :
_ Eh, frérot ! Un lait riche en vitamines, c'est pas demain la veille que nos biquettes nous rendront riches !
_ Comme nous disait papa, le troupeau ainsi que cet endroit magnifique, c'est ça notre trésor ! Répond Ali. (ils longent l'oasis)
Youssef lui rétorque que leur père avait sûrement raison, puis en s'adressant aux chèvres :
_ Pas vrai les fifilles que vous êtes notre trésor !
Il faut savoir que Youssef est comme son père, il adore ses bêtes, elles sont de "sa famille" et il ne voyait pas sa vie autrement. Ali lui, apprécie également les biquettes, mais il a fait le choix d'être gardien de chèvres, car ne sachant pas trop quoi faire de sa vie, il s'est dit que "berger" c'était ce qui lui semblait le plus évident et puis il est avec son frérot, alors ça roule !
Il est vrai que cet endroit est superbe, cette oasis est alimentée en eau par une source, une mini cascade sortant d'un énorme bloc de roche, une eau d'une clarté et d'une pureté incroyable. Au centre de cette "immense piscine", un petit îlet où les gosses du village s'amusent à l'instar de nos deux héros durant leur prime jeunesse. Si on prend un peu d'altitude, on s'aperçoit que l'oasis ressemble à une goutte ou plutôt une larme coulant de cette masse rocheuse faisant penser à un œil qui pleure.
Youssef et son frère prennent donc la direction des montagnes, il faut un peu plus de 6 heures de marche pour arriver à destination, ils resteront sur place pendant deux jours et une nuit.
les frangins et leur troupeau arrivent en fin d'après midi sur un grand plateau de plusieurs hectares où effectivement l'herbe est présente en abondance, en arrière plan on aperçoit un immense canyon s’engouffrant dans les montagnes.
Le troupeau se disperse, les chèvres commençant leur régime vitaminé et comme d'habitude, Ali et Youssef installent leur campement au pied du même gros rocher à la forme surprenante, celui-ci ressemblant, lorsqu'on le regarde sous le bon angle, à une tête surmontée d'une casquette offrant le seul coin d'ombre de tout le site.
La nuit tombe rapidement et après s’être restaurés, nos deux bergers vont se pieuter, épuisés par cette longue marche sous un soleil de plomb.
Ali et son frangin se réveillent aux premières lueurs du jour et après un p'tit dèj rapide, ils vérifient si toutes les bêtes sont au complet, mais il en manque sept, elles ont sans doute dû s'éloigner en broutant cette herbe dont elles raffolent. L’aîné pense qu'elles sont allées vers les gorges à quelques centaines de mètres, c'est déjà arrivé qu'elles s'aventurent là-bas, l'herbe pousse pratiquement de partout dans cet endroit. Ils retrouvent quelques bêtes en chemin, mais il en manquent toujours deux et les frangins vont devoir s'aventurer sur un tout petit sentier longeant les parois abruptes du canyon dans lesquelles sont dissimulées des dizaines de petites grottes. Leur père leur avait raconté qu'un jour, alors qu'ils n'étaient encore que des gosses, il en a retrouvé trois à l'intérieur de l'une d'elles.
La mission est assez périlleuse, un faux pas et c'est la chute, une chute de près de 40 à 50 mètres. Après avoir crapahuté une vingtaine de minutes à flanc de falaise, ils entendent des bêlements venant d'un trou dans la paroi, un trou juste assez grand pour qu'un homme puisse s'y introduire et cette cavité semble se prolonger assez loin dans la roche. Ali décide d'aller voir, il entre et avance sur une dizaine de mètres, puis arrive dans une petite pièce et effectivement les deux chèvres sont bien là. Pourquoi ? Il n'y a rien à brouter ici ! Il n'en sait rien, on n'en sait rien ! (enfin si, moi je sais !)
Le frère cadet s'avance pour récupérer les biquettes, mais celles-ci "refusent" de le suivre et empruntent un petit couloir s'engouffrant encore plus profondément dans la roche d’où philtre une légère lumière. Ali, qui n'avait pas remarqué ce passage, est intrigué par cette lueur, il appelle son frère à le rejoindre afin d'aller voir ce qui a bien pu attirer les chèvres au fond de ce trou. Youssef entre à son tour, les deux frères "suivent la lumière" puis arrivent dans une seconde salle, au centre, éclairée par un puits de lumière, une sculpture assez étrange posée sur un socle directement taillé dans la roche. Ce "truc" ressemble à une grande théière orientale de près d'1m 50 en métal bleuté avec une représentation de notre planète gravée sur deux plaques de quartz cylindriques, une sur chaque face de l'objet. Ces deux Terres sont en tous points identiques, seule une inscription, un mot les différencie, d'un coté il est inscrit "HUMAINS" et de l'autre "DJINNS" !
Les frangins sont intrigués par cet objet, qu'est-ce-qu'une grande théière bleue avec des inscriptions étranges fait dans une grotte perdue au milieu de nulle part ? Les frérot s'interrogent, tournent autour de leur trouvaille, ils n'ont jamais vu quelque chose de semblable et continuent donc leurs "investigations". Les deux gravures représentant la Terre sont recouvertes d'une légère couche de poussière et bien que l'on arrive assez aisément à lire les inscriptions, Youssef décide de nettoyer un coté et demande à son frère d'en faire de même de l'autre. Ali fait le tour de la sculpture, mais au moment où il pose lui aussi sa main sur la partie translucide, celle-ci s'illumine d'une lumière bleue et blanche.
Surpris et quelque peu effrayés, les deux frères font quelques pas en arrière, enfin, pas tout à fait, Ali est carrément allé se planquer dans la première salle suivi par les deux biquettes, Youssef lui, est resté à l'entrée de la seconde. Une fumée lumineuse bleue turquoise s’échappe du bec de la "théière" et vient se placer devant l'artefact, puis une tête bizarre apparaît à l'intérieur façon hologramme, une tête non-humaine. Le visage de cette créature est bleu-gris, ses yeux sont de couleur turquoise, ils scintillent, sa chevelure blanche et longue fait penser à une crinière et on ne le distingue pas très bien, mais on dirait que cette créature possède des ailes blanches.
Une voix grave dit :
_ Tu as trouvé Ja'Dohr, formule ton souhait !
Un génie vient d'apparaître, c'est magique !
Youssef appelle son frère toujours caché dans l'autre pièce et lui dit de ramener ses fesses car quelque chose d'extraordinaire vient de se produire. Ali revient auprès de son aîné et découvre à son tour l'étrange apparition.
Les frangins connaissent les légendes sur les djinns, mais ce ne sont que des légendes, alors que là, il y en a un devant eux et il est prêt, semble-t-il, à leur accorder un vœu !
Youssef se précipite, il demande un coffre de 500 pièces d'or avec sur une face, la tête de son frère et sur l'autre, la sienne. Le djinn trouve cela un peu bizarre, mais s'exécute et un coffre rempli de pièces en or "inédites" apparaît devant lui. Ali a également droit à un souhait, mais il réfléchit un peu plus longtemps que son frère, il prend son temps. Le génie lui demande gentiment d'activer, "qu'il n'a pas que ça à faire" et après encore quelques secondes de réflexion, le cadet fait le souhait de transformer le génie en humain afin de le libérer, les légendes racontant que les djinns sont prisonniers de leur Totem et se doivent d'accorder un vœu aux humains qui les invoquent et retourner ensuite dans leur "prison". Un vœu semblant juste et altruiste à première vue, mais qui va malheureusement embarquer notre génie dans une situation qu'il n'a jamais connu et qu'il ne désirait certainement pas connaître !
Ja'Dohr n'a pas le choix et est obligé d'exaucer ce vœu "stupide" ! La fumée commence à tourner sur elle-même formant un tourbillon, le visage du djinn se fondant et disparaissant à l'intérieur. On entend dans le même temps des paroles, des mots dans une langue inconnue et cela n'a pas l'air de ressembler à des compliments ! Puis la "mini-tornade" disparaît laissant place à un petit bonhomme ne cessant de pester contre Ali et on va très vite comprendre pourquoi !
Le génie majestueux s'est transformé en un petit bonhomme encore plus petit qu'Ali, il semble avoir plus ou moins le même âge et en ce qui concerne son apparence physique, on ne peut pas dire que "la grâce" se soit jointe à cette métamorphose.
Ja'Dohr est furieux ! Il vient de perdre tous ses pouvoirs ainsi que le moyen de retourner dans son monde. Il continue de pester, mais un petit homme en colère impressionne bien moins qu'un grand génie et les frangins ont l'air plus embêtés que terrifiés. Ali lui dit qu'il était persuadé de bien faire, mais visiblement il a eu tord et s'en excuse à plusieurs reprises, puis il rajoute que lui et son frangin feront tout ce qu'ils peuvent afin de l'aider à retrouver sa condition de djinn.
_ C'est la moindre des choses ! Leur dit-il. Vous m'avez mis dans le pétrin, vous allez m'aider à en sortir !
Youssef ne peut s’empêcher de poser une question à son "nouvel ami" et il le fait sur un ton légèrement moqueur. Il lui demande pourquoi un grand et majestueux génie comme lui s'est métamorphosé en un tout petit bonhomme que la nature a "oublié de terminer". Ja'Dohr le regarde d'un air agacé et lui répond que "ça", c'est à cause de "Lui" là-haut ! C'est lui qui défini l'apparence que doit avoir un djinn lorsqu'il se rend sur la Terre des humains, ils sont toujours ou petits, ou gros, ou encore vieux et parfois même tout en même temps, sûrement de "l'humour Divin" ! Précise "l'ex-djinn".
_ Merci Seigneur ! Lance le génie d'un air sarcastique, tout en regardant le plafond de la grotte comme s'il s'adressait aux Cieux.
Ali et Youssef n'en reviennent toujours pas, les génies existent ! Cela veut probablement dire que d'autres "mystères" existent également !
Ja'Dohr a donc besoin de l'aide de ces deux humains pour tenter de redevenir un génie et afin que les frangins comprennent dans quoi ils vont devoir s'embarquer, il leur fait un rapide topo sur ce que sont les djinns.
Il est Ja'Dohr, souverain du royaume des Éfrits et à cause de ce souhait Stupide et il insiste sur le mot stupide, il est bloqué ici, sur leur Terre. Il enchaîne ensuite avec un résumé sur les origines des génies.
Il y a très, très longtemps, bien avant les humains, Dieu a créé les djinns à l'image de son fils "préféré" Iblis (Iblis : id. Lucifer) et cela afin de combattre des créatures géantes, cruelles et incontrôlables qui peuplaient la terre, les airs et les océans. Premières créations du Divin, ces Titans ou presque, étaient en train de dévorer et de détruire tout ce que produisait la nature, mettant en péril le devenir de la planète et après d'âpres et de longues batailles, les anges et les djinns ont vaincu les monstres.
Les génies vivaient en paix sur Terre, puis quelques millénaires plus tard, Dieu s'étant lassé de sa dernière création a eu une nouvelle idée, les humains ! Pour ce faire, il a relégué les djinns sur une terre parallèle ou peut-être est-ce une dimension parallèle, ça j'avoue que je ne sais pas trop, seul "Lui" pourrait nous en dire plus. Cette seconde Terre est géologiquement identique à la première avec quelques différences en ce qui concerne la faune et la flore. Par exemple, il n'y a pas d'abeilles ainsi que d'autres espèces animales indispensables à la vie humaine, ce qui a agit autrement sur l'évolution de tout son écho-système. En effet, on y trouve des espèces animales et florales très différentes et bien plus dangereuses que sur la première, ce monde étant plus sauvage que le notre et quand je dis sauvage, je veux parler de la nature, elle est bien plus rude que sur la Terre "numéro uno" ! Alors que les créatures qui la peuplent sont et cela n'engage que moi, bien plus humaines que la plupart des Hommes.
Voilà pourquoi depuis des millénaires, le fils préféré de Dieu est en colère contre son père.
En fait, il n'y a pas une, mais deux raisons pour lesquelles Iblis est assez remonté contre son "Papa", mais pour en connaître la seconde, il vous faudra attendre le troisième et dernier tome.
Ces deux mondes sont uniquement reliés par quatre artefacts plus ou moins dissimulés comme celui qu'ils ont trouvé. Il existe plusieurs races de djinns, mais seules quatre d'entre elles, les plus puissantes, possèdent un portail reliant les deux mondes. Il y a les Éfrits comme lui, ils peuplent la terre et les déserts, les Marids, ce sont les djinns de l'eau, ils vivent près des mers, des fleuves, des rivières ; il y a ensuite les Sylphes, ce sont les génies de l'air, ils sont dotés d'ailes et vivent plutôt dans les montagnes et enfin, les Goules qui elles, sont anthropophages. Ces dernières fréquentent plutôt les déserts rocheux et plus précisément les grottes, les cavernes et les souterrains qui s'y trouvent.
Chacun de ces Totems est directement "connecté" au souverain de chaque ethnie qui se doit, comme en a décidé Dieu, d'apparaître et d'exaucer un vœu à tout être humain qui activerait l'artefact, un peu comme pour rappeler aux djinns qu'ils ne sont plus la création préférée de leur Père, enfin c'est ce qu'a l'air de penser l'ex-djinn.
Ali et Youssef ont écouté Ja'Dohr avec beaucoup d'attention et lui demandent comment vont-ils pouvoir l'aider ? Le génie leur explique qu'ils vont devoir l'accompagner dans un voyage de plusieurs jours à travers le désert, les montagnes et les terres arides de leur monde jusqu'à Rissahé, une île secrète au centre d'un lac caché à l'intérieur d'un cratère géant. Cette île a l'air de flotter sur l'eau et c'est là que se trouve le temple d'Iblis qui pourra, s'il le veut bien, rendre sa condition de djinn à Ja'Dohr. Les deux frères acceptent "la mission" sans aucune hésitation.
Petites infos supplémentaires sur notre génie, il a 454 ans et règne sur les Éfrits depuis 101 ans et c'est d'ailleurs le plus jeune roi de toute l'histoire du royaume ! Ja'Dohr, n'étant à cette époque là qu'un tout jeune adulte, a dû accéder à ses fonctions royales prématurément, ses parents ont malheureusement été atteints par une maladie rare et mortelle les emportant tous les deux en quelques mois. Les djinns nomment cette maladie la Yavelle, il s'agit d'un virus qui attaque le cerveau ainsi que la peau de ses victimes rendant celle-ci complètement blanche, voire transparente pour certains d'entre eux et comme tout le monde le sait, pour un génie, la Yavelle, c'est mortel !
En cent ans de règne, c'est la première fois qu'il est invoqué par les humains, son père lui, n'avait jamais été appelé durant son court règne, à peine 340 ans. En fait, depuis l'époque de son grand-père, il y a environ 850 ans, personne n'avait découvert et activé le Totem et pour sa première fois, on peut dire qu'il a été agréablement servi, il avait sans doute imaginé des milliers de vœux à exaucer, mais celui-ci sûrement pas ! Et pour cause ! C'est la première fois que cela se produit, notre Ja'Dohr est le tout premier djinn à devenir humain, Dieu n'avait sûrement pas imaginé que cette situation se produirait un jour. (il n'avait pas pensé à moi !)
Avant de partir à l'aventure, nos trois protagonistes vont retourner au village afin de ramener les biquettes, car il est hors de question, surtout pour l'aîné, d'abandonner ses fifilles !
Youssef aimerait prendre son coffre avec lui et le ramener au village, mais sur les conseils avisés de son cadet lui disant que son trésor sera certainement plus en sécurité dans cette grotte, que nulle part ailleurs, il devrait le laisser ici et une fois leur mission terminée, il pourra le récupérer. Le grand écoute le petit, mais pour encore "plus de sécurité", il cache le coffre dans un recoin de la pièce derrière une grosse pierre. Nos trois camarades accompagnés des deux biquettes sortent ensuite de la grotte et prennent la direction du campement.
Une fois sur "le plateau des chèvres", les frangins rangent leurs affaires et rassemblent le troupeau, puis le trio se met en route pour le village. La route va sembler interminable pour notre ex-djinn, il n'a jamais autant marché de toute sa longue vie.
Ils arrivent en fin d'après midi. Ja'Dohr est exténué, épuisé, il est humain depuis tout juste sept heures dont six à marcher dans le désert sous un soleil de plomb et qui plus est, dans ce petit corps si faible et fragile, lui, qui dans sa forme originelle mesure près de trois mètres et possède de grandes et superbes ailes, c'est quand même un comble d'en être réduit à ne pas avoir d'autres choix, que celui de marcher ! (les membres de la famille royale Éfrit sont les seuls de leur ethnie à être dotés d'ailes)
Nos trois camarades traversent le village et qui est là, à les attendre ? Hamid ! Et il va vouloir savoir qui est l'inconnu qui les accompagne ! Les frangins présentent donc leur "nouveau pote" à leur ami d'enfance qui est très sympas, mais très curieux et lui racontent que "Jadel" (c'est Ali qui vient de trouver ce prénom, Ja'Dohr étant trop "exotique", cela pousserait sans doute le "curieux" à poser encore plus de questions) est un cousin qu'ils n'avaient pas vu depuis très longtemps et qu'ils ont rencontré en chemin. Il est venu leur annoncer le décès de leur tante, la sœur de leur père qui vivait dans un village situé à une petite cinquantaine de bornes plus au nord, à mi-chemin entre Tadmor (Palmyre) leur oasis et demain matin, ils repartiront avec lui afin d'assister aux funérailles qui auront lieu dans deux jours. Mais Hamid va bien évidemment vouloir en savoir plus, il les connaît depuis toujours et n'a jamais entendu parler d'un cousin se nommant Jadel !
_ Mais votre tante, elle n'a pas eu que des filles ? Leur dit-il.
Les frangins se regardent un peu embêtés, décidément, Hamid et sa curiosité "font chier" ! Ali et Youssef restent cois ne sachant que répondre, mais Ja'Dohr va leur sauver la mise, il enchaîne avec un certain brio !
_ C'est vrai ! Maman n'a eu que des filles ! En fait, mes vrais parents sont morts quand j'avais trois ans, elle m'a recueilli et depuis, je ne l'ai jamais quittée, alors oui, ces deux "COUILLONS" sont comme mes cousins !
Les deux bergers regardent le génie avec soulagement, dans leurs yeux on pourrait presque lire : "Yes mon pote, trop fort le mensonge !" Même s'ils ont remarqué que Ja'Dohr avait bien insisté sur le mot couillons, histoire de leur rappeler pourquoi ils sont là !
Ali enchaîne :
_ Voilà, c'est ça ! Mais comme papa était en désaccord avec tata à ce sujet, il n'en parlait pas, on n'a jamais compris pourquoi d'ailleurs et c'est pour ça que personne n'est au courant !
Hamid a bien connu leur père et le caractère borné que pouvait avoir celui-ci, il gobe donc ces balivernes sans aucun soucis.
Youssef demande ensuite à Hamid de bien vouloir prendre soin des chèvres pendant leur absence, en lui précisant que celle-ci ne devrait pas durer plus d'une semaine, enfin c'est ce qu'espèrent les frangins !
Ils vont maintenant aller dîner, les frérots ont super faim et Ja'Dohr aussi d'ailleurs, il a une sensation étrange en lui qu'il ne connaît pas et pour cause ! Un djinn n'a pas besoin de se nourrir, il mange de temps en temps par pur plaisir, mais la sensation de faim, les génies ne connaissent pas, c'est tout nouveau pour lui !
Le trio se dirige vers la modeste demeure des frangins et après avoir rentré les biquettes dans leur enclos, Ali, Youssef et "leur cousin" se mettent à table pour ce que l'on pourrait appeler, "le premier repas nécessaire d'un génie sur Terre". Les trois compagnons iront ensuite faire reposer leurs mirettes, ils prendront la route assez tôt demain matin.