je ne sais pas encore

Ophélie,

 

Je t’écris cette lettre même si tu ne la liras jamais.

Je sens au fond de moi que c’est vital, il faut que les mots sortent de ma tête car ils m’empêchent de respirer. Cela peut paraitre égoïste, mais je veux tourner la page.

Je sais, tu dois penser que c’est contradictoire car je continue de m’adresser à toi comme si tu étais vivante. Oui c’est vrai, je suis dans le déni mais il faut que j’ouvre enfin les yeux.

Justement il y a quelques jours, j’ai rencontré une connaissance de ma mère qui se trouve être une sorte de voyante. Ne te moque pas ! Mais quand on n’a plus rien à perdre on n’a plus peur de se prendre au jeu ! Elle m’a fait tirer des cartes de tarot et j’avais l’impression de jouer ma vie à chaque fois que j’en piochait une.

Mes mains moites tremblaient, ma mère était là, espérant de tout son cœur qu’il se passe un miracle. Elle n’était pas la seule.

Devine quelle est la première carte qui est sortie : l’amitié.

Bingo !

Ce truc à l’air de marcher, on est dans le vif du sujet.

La voyante m’annonce d’un air solennel :

- Cette carte symbolise ton passé.

Aïe !

Merci de me rappeler que ce concept n’est plus d’actualité.

Ensuite, vint la carte symbolisant mon présent : l’Hermite.

Un personnage représentant un vieillard qui éclaire quelque chose.

En l’occurrence, notre amitié.

Bon c’est vrai, je suis tournée vers le passé.

Voilà mon premier blocage qui m’empêche d’aller de l’avant.

Quelle surprise !

Je pensais que je devais me laisser porter par la vie pour vivre. Mais je me voilais la face, j’espère toujours secrètement te revoir. Mais tu ne reviendras jamais de ton voyage à Londres. Tu es partie pour un plus long voyage. Pourtant je garde en moi l’espoir de te revoir. De revoir ton sourire, d’entendre ton rire encore une fois.

Est-ce si mal ? Ais-je si mal ?

Je ne sais plus.

Car parfois je ne ressens plus rien pour me protéger.

Tu sais, depuis que tu es partie, j’ai arrêté de croire en la vie. Oui, c’est triste, surtout à notre âge.

Pourquoi aurais-je un futur alors que toi non ? C’est injuste.

Qu’ai-je de plus que toi ?

Rien, à part du temps.

Cette vie.

 Et il faut l’avouer, elle ne me sert pas à grand-chose pour le moment.

C’est pas vrai ! Ça ne devait pas se passer comme ça...

Quel est le sens de tout ça ?

La vie, la mort n’a plus de sens. Je tourne en rond comme un foutu hamster.

Suis-je folle ou au contraire plus lucide maintenant ?

Avant je ne me posais pas toutes ces questions.

Par exemple, hier j'ai remarqué le lien entre les mots « à dieu » et « adieu ».

Car c’est vrai maintenant tu es a lui, à Dieu, si on y croit.

Je n’ai jamais trop aimé te partager, mais là, il t’a arraché à moi et à tous ceux qui t’aiment.

Le pire c’est que je le pressentais.

Toute la semaine où tu préparais ton départ pour le mariage de ta sœur, je sentais un poids dans mon corps. J’étais triste sans savoir pourquoi.

Je voyais que tu ne répondais pas à mes messages. Etais-tu en colère ?

C’est vrai, j’ai merdé. J’ai fait une erreur sur la date de mon voyage à Londres.

Tu voulais que je vienne te voir chanter dans un bar. On était tellement euphoriques. Tu étais fière de toi, une vraie Amy Winehouse en herbe !

Au final, je devais arriver deux semaines plus tard.

Trop tard.

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