Je suis un mangemort

Notes de l’auteur : Enfermé au manoir des Malefoy, Drago rumine de sombres pensées.

Je suis un mangemort.

Toute ma vie mes parents m'ont préparé à cette idée, je savais que je n'y échapperai pas, et que je suivrai les traces de mon père. Je m'y étais résigné, et j'en étais même fier, du moins au début. Evidemment que je me suis vanté auprès de mes camarades de Serpentard. Evidemment que j'ai exagéré mes responsabilités. Evidemment que j’ai enjolivé mes exploits.

Mais avais-je réellement le choix ?

Non. Je viens d'une famille de Sang-Pur, et chez nous ce sont les idéaux qui priment. Les apparences comptent plus que tout. Je suis forcé de dire que tout va pour le mieux quand je suis au plus mal, je me suis conformé aux décisions de mes parents, et j'ai dû ravaler mes cris de douleur et mes larmes de désespoir. J'ai été contraint de faire bonne figure, de me vanter, et j'avais presque réussi à me convaincre moi-même que cette situation me réjouissait. Mais tout ça c'était avant.

Je suis maintenant désespéré, et je sais que rien ne sera plus pareil, que jamais plus on ne me regardera comme avant. Je suis cloîtré dans mon manoir depuis plusieurs semaines, ou plusieurs mois, je ne sais plus, j'ai depuis longtemps déjà perdu la notion du temps. En réalité, je ne me rappelle plus de grand chose... Je suis soumis régulièrement au sortilège Doloris, au vu des actions passées de mon père qui L'ont mis dans une fureur noire. Au moindre signe suspect, ma tante accourt et se rend utile. Très utile même, selon Ses dires. Elle est la main qui cause ma douleur, l'envoyée de ce mage. Elle a en quelque sorte reniée les siens et Lui est entièrement dévouée.

Il y a de cela quelques mois, mes seules activités se résumaient à, d'une part me moquer allègrement de mes camarades Gryffondor, à éviter les frasques de cette chère Pansy, et enfin de plaire à mes parents. Mais l'Affaire du ministère est arrivée, et cela a complètement bouleversé ma vie. Cette mission fut un véritable désastre et Il ne cesse de nous le rappeler, à nous, les Malefoy. Nous sommes tous relégués à la dernière place, traités comme des moins que rien.

J'ai été obligé de devenir un mangemort, pour Lui plaire, pour ne pas Le mettre plus en colère, pour laver l'honneur de ma famille. Cela fut dur, je ne suis pas courageux, et je n'ai jamais prétendu l'être. Mais là, je pense pouvoir avoir le culot de dire que je l'ai été, j'ai supporté Sa marque, enduré sa brûlure, jusqu'au plus profond de mon être. Cela laisse des traces, des cicatrices si enfouies qu'on ne peut les deviner, pourtant elles sont bien présentes. Et cette marque ne partira pas, Il s'en est assuré, nous sommes associés à du bétail, nous sommes Ses esclaves.

J'ai supporté la vue du sang des victimes de mes congénères, les autres mangemorts, les cruels, assoiffés de sang. Bien que vivant reclus du monde, des informations de l'extérieur me parviennent quelques fois. Mes conditions de vie sont à la limite de la précarité, je vis privé de la lumière du jour, tourmenté par des cauchemars, mes yeux sont cernés, j'ai énormément maigri, ma mère n'ayant jamais eu la capacité de cuisiner. Nous sommes tous affaiblis, tous sur les nerfs, livrés à nos doutes et à nos regrets, condamnés à nous demander comment nous en sommes arrivés là.

Je suis obligé de rester, je ne peux pas partir. Mais même si c'était possible, je n'en aurais pas la force. Je ne sais même plus ce qu'est l'espoir, je ne peux plus apprécier les saveurs, les goûts, les odeurs. J'ai l'impression d'être destitué de mes sens. Je ne peux même plus aimer la vie.

C'est cela être mangemort, c'est une torture, une abomination en réalité, ceux qui ont cette ambition le regretteraient très vite s'ils en connaissaient les mauvais côtés. Parce qu'apparemment le contraire existe, d'après les dires de ma tante, Bellatrix Lestrange. Il paraitrait qu'il y aurait de bons côtés à Lui être enchaîné. Mais quel crédit apporter à ses paroles, cependant ? Elle est rongée de l'intérieur par sa vénération pour Lui, son adoration même. Elle est aveuglée par Sa puissance, et Lui a donné sa vie. Elle ne s'en plaint pas, elle prend cela pour une dignité.

J'aimerais pouvoir crier, mais cela m'est impossible, ma gorge est trop sèche. J'aimerais pouvoir pleurer mais je ne peux plus. Je voudrais aussi me révolter, mais ce serait une honte, une infamie même, pour ma famille. Et j'aime ma famille, jamais je ne ferais quelque chose qui pourrait lui nuire, de quelque façon que ce soit.

J'aimerais me savoir en sécurité, ne pas avoir à être constamment sur mes gardes, ne pas avoir à contrôler chacune de mes paroles, chacun de mes gestes.
Mais je sais bien que je ne le serais jamais tant qu'Il sera en vie. Personne ne peut-l'être. Il faut que cela cesse.

Pourquoi est-ce si compliqué ? Pourquoi ne puis-je tout simplement pas exister ?
Je ne peux pas accepter cette situation.

En fait, je souhaiterais simplement être libre, mais cela semble impossible.

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Lula
Posté le 16/11/2024
Wow! J'ai été réellement impactée par ces parole, venant de celui qu'on pense être le "méchant". Mais chacun agis pour une raison bien précise, n'est ce pas? Il faudrait essayer de mieux se comprendre les uns les autres...
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