Lettre à Lily

Notes de l’auteur : Une lettre, jamais lue par sa destinataire.

«Ma très chère Lily,

Je ne sais par quoi commencer. Rien qu'en écrivant ces mots je me sens déchiré. Je ne comprend pas comment tout cela a pu arriver, je ne le comprend pas et je n'arrive pas à l'accepter. Comment accepter que tout se finisse comme ça ? Que toi et moi, que ce « nous » n'existe plus... C'est trop dur Lily.

Notre rencontre peut être vue comme le simple fruit du hasard, ou bien comme un coup du destin. Nous n'étions pas faits pour nous rencontrer, nous n'étions pas faits pour nous entendre. Mais nous étions attirés l'un vers l'autre comme des aimants. A force de se tourner autour, nous nous sommes trouvés. Et nous étions complémentaires, nous nous comprenions l'un l'autre, du moins c'est ce que je croyais. Je pensais notre amitié destinée à durer. Je ne pensais pas que cela se finirait un jour.

Je pensais sincèrement que toi et moi cela durerait. Je ne pensais pas que tu partirais comme cela, que du jour au lendemain tu m'abandonnerais. Que nous ne parlerions plus. Que nous ne nous verrions plus. Que nous cesserons d'être ensemble. Il faut que je sorte de ta vie, je l'ai bien compris. Permets simplement d'être faible une dernière fois, permets moi simplement d'écrire ces mots. Je ne veux pas t'importuner, seulement me permettre de passer à autre chose, et te laisser être heureuse. Je n'ai toujours voulu que ton bonheur, même dans les moments les plus noirs de notre histoire, sois-en bien consciente.

Il y a une dernière chose que je souhaite te dire. Il faut que je me libère la conscience, cette réalité est bien trop amère, je ne peux pas vivre avec cela, cela me tue à petit feu. Je voulais seulement te dire que je suis à jamais tien.»

Le jeune homme aux cheveux de jais détacha ses yeux de la feuille de papier, devenue humide à cause de la rosée qui s'écoulait lentement de ses yeux. Il parcourut la lettre de ses doigts, s'arrêtant sur les bords abimés par le temps. Ses yeux semblaient ailleurs, perdus dans un passé douloureux.

L'horloge sonna une fois, puis deux. Il était l'heure, il devait livrer cette lettre à celle qui ne la lirait jamais. Jamais plus elle n'ouvrirait ses yeux pour regarder le monde qui l'entoure, jamais plus ses cheveux de feu ne scintilleront lors de ses longues balades, jamais plus sa bouche ne se contorsionnera dans une gymnastique musicale. « Jamais plus elle ne sera là. »

Il se leva, attrapa son manteau sur la commode, puis sorti, tenant fermemant la lettre dans sa main droite. Il transplana jusqu’à la dernière demeure de la jeune femme. Il parcourait les allées lentement, voulant retarder ce moment le plus possible. Il ne pouvait pas lui dire adieu. Il ne voulait pas. Trop tôt, il arriva devant l'édifice. Il sortit la lettre de sa poche et la déposa au milieu des fleurs, puis douloureusement s'accroupit au pied de l'autel pour murmurer ces mots : « Merci d'avoir enchanté ma vie ».

Il se releva fébrilement et agita sa baguette, de laquelle jaillirent des étincelles. Il demeura immobile quelques instants, et enfin se retourna sans un mot, abandonnant derrière lui une biche argentée cabriolant le long des allées.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez