Splash ! La petite sorcière éclata de rire et se mit à courir pour échapper à son amie la vouivre, qui crachait un jet d’eau. La vouivre se lança derrière elle avec sa démarche pataude. Par cette belle journée d’été, rien de tel que de se rafraîchir en jouant à s’éclabousser autour du lac.
La petite sorcière avait gardé ses lunettes, qu’elle avait enchantées pour qu’elles repoussent les gouttes d’eau et restent bien sur son nez. Elle courut à toutes jambes et évita de justesse de tomber dans les orties. La vouivre s’arrêta, essoufflée, et décida de reprendre forme humaine pour aller plus vite. Mais avant qu’elle n’ait pu commencer sa transformation, la voix de son amie s’éleva.
— Méline ! Maison magique !
Galatée la petite sorcière se tenait au milieu du carré de roseaux qu’elles avaient désigné comme lieu de pause au tout début du jeu.
Méline posa une patte sur son front, où luisait son diadème orné d’une escarboucle aux magnifiques reflets rouges.
— Ouf ! dit-elle en posant le bijou soigneusement au pied des roseaux.
Et après avoir récité une formule magique, la dragonne à deux pattes dégagea une vive lumière, se mit à gigoter comme si elle était de la pâte en plein pétrissage, et rapetissa jusqu’à prendre forme humaine. Quand la lumière se dissipa, Méline avait son apparence de fée, avec son ample robe verte qui dissimulait un ventre arrondi et ses cheveux aux épaules. Elle tendit la main vers son diadème, mais se ravisa quand Galatée sortit de la maison magique sur la pointe des pieds.
— Continuons à jouer ! dit-elle.
Et son ventre se dégonfla tandis qu’elle crachait une énorme quantité d’eau en direction de la petite sorcière, qui l’évita de justesse.
Méline et Galatée se connaissaient depuis que Galatée était venue s’installer sur les rives du Lac Félice avec ses parents il y a quatre ans, quand il était devenu apparent qu’elle avait besoin de commencer son apprentissage de sorcière. Elle était alors toute petite et avait fait voler ses doudous dans sa chambre grâce à une baguette magique improvisée (la cuillère en bois qui servait à faire la cuisine).
Galatée avait tout de suite remarqué qu’une dragonne nageait dans le lac, quand les habitants du village croyaient pour la plupart qu’il ne s’agissait que d’un gros poisson. Elle était venue lui parler et lui offrir des fleurs. La dragonne était sortie du lac, puis avait pris forme humaine et était venue se présenter aux parents comme étant la fée Méline, attachée au lieu depuis 237 ans, descendante directe de la fée Mélusine, qui avait fait bâtir de superbes ponts et châteaux dans la région voisine. Les parents de Galatée l’avaient invitée à rester dîner, car une fée était une invitée de marque.
Ce soir-là, Méline leur avait souhaité la bienvenue et s’était réjouie de la présence d’une petite sorcière : il y avait bien longtemps qu’elle n’avait pas enseigné tout ce qu’elle savait à quelqu’un, et les fées enseignent toujours aux sorcières tout ce qu’elles savent. Pas à se transformer en vouivre comme elles, car seules les fées le peuvent ; à connaître les grottes secrètes au flanc des montagnes et à prendre soin des trésors, entre autres.
Mais les fées aimaient aussi beaucoup s’amuser, et à 237 ans, Méline était encore une fée jeune, si bien que Galatée et elle passaient à peu près autant de temps à jouer à Splash-splash, à cache-cache et à ortie-soignante qu’à suivre les enseignements règlementaires qui serviraient à transformer Galatée en Sorcière de premier ordre.
C'est une entrée en matière très vivante et toute petite sorcière qu'elle soit, Galatée est une vraie petite fille, on s'identifie très facilement à elle (enfin, ma petite fille intérieure l'a fait avec bonheur !).
Je me suis immédiatement imaginée que Méline, malgré ses 237 ans était une très jeune fée dont l'apparence humaine était celle d'une enfant de l'âge de Galatée. Mais ce n'est pas vraiment précisé. Si le fait que Galatée ne soit pas tellement décrite facilite l'identification, je pense qu'une touche de description concernant Méline, sous sa forme humaine comme sous forme de vouivre serait un plus. La plupart des enfants ne savent pas ce qu'est une vouivre. Et comme tu la présentes comme une sorte de dragon, ou une fée, on se demande si sa forme draconique a des ailes ? De quelle couleur sont ses écailles ? Idem sous forme humaine, a-t-elle des ailes de fée ?
Personnellement j'imagine qu'elle n'a pas d'ailes, connaissant (adorant !) Mélusine. Mais encore une fois, assez peu d'enfants connaissent cette grande fée médiévale. Peut-être qu'une ou deux lignes concernant Mélusine et la légende de sa transformation serait également bienvenue ?
En tout cas, on "plonge" directement dans le vif de l'histoire, bravo ! ;)