La Gardienne des secrets

Notes de l’auteur : Petit recueil de poèmes branlants, dont le lien n’a d’evidence que pour le fil à couper le beurre, je les poste toute pleine de petitesse et de crainte, tout retour est le bienvenu

Elle est la gardienne des secrets 

Elle te regarde en souriant 

Les poings posées sur ses genoux 

Qui ont des centaines d’années 

Au milieu de l’effervescence 

Ses lèvres pâles comme un châle 

Te souffle qu’elle sait déjà tout 

Toi tu sais simplement qu’elle ne parlera pas 

C’est l’intuition donnée par la commissure de sa bouche 

Elle ne montre jamais ses dents de céramique en public

C’est une statue

De granite 

Immobile sans âge et pourtant très ancienne 

Comme le courant de la source

Elle a la peau 

Hyaline 

Elle fait partie du décor 

C’est un portrait toujours aux abords de ton regard

Qui attend 

Tu ne sais pas 

Qui de vous deux fixe l’autre 

Elle fait cet effet là à tout le monde tu sais 

En privé 

C’est autre chose 

Elle se replie sur elle même 

Comme un feu craquant 

Il y a des flamèchds dans chacun de ses gestes, chacun de ses mots et de ses claquements de langue 

Elle dénoue les gorges de tous les muets d’un unique clin d’œil 

Tu n’as pas encore vécu tout cela 

Mais tu verras 

Un instant tu tournera le dos 

Pour mettre l’eau à chauffer 

Et elle changera sa langue en parchemin

Pour soulager ton chat de ses chagrins 

Elle te lira les lignes de la main

Et devinera ton marc de café 

Elle te fera dire 

ce que tu ne savais pas et elle pansera ton cœur avec tes larmes 

Qu’elle aura libérées

Elle te réchauffera d’un frémissement de sa lèvre ou de son doigt 

Et toutes les fleurs s’ouvriront dans le noir 

Par la force de sa chaleur 

Elle a un rire 

Qui n’a pas besoin d’éclater

Elle te le donnera 

Pour les jours de malheur

Tu verras 

Vois tu 

Elle vit à l’heure du thé et des tisanes 

Elle sent 

Le chocolat à l’orange 

La poudre 

D’ambre 

Et les fleurs des ruines 

Mais tu ne sentiras rien maintenant

Pas à la lueur des nuages 

Pas tout de suite 

Alors qu’il y a tout ses corps entortillé dans les mailles

De leurs regards et de leurs désirs 

Pas maintenant 

Alors qu’elle a tant à regarder 

Et que tous ses secrets rebondissent dans son esprit 

Pas maintenant 

Tandis qu’elle prépare son filet

Pour attraper les secrets qui n’ont pas encore éclos 

Et qu’on ne lui a pas encore abandonné 

Vois tu 

Elle 

n’a aucun secret elle 

ne cache rien 

Son corps ne résonne d’aucune caresse d’aucune attente d’aucun plaisir 

Elle est une pluie d’été à réveiller les pierres 

Neutre 

Elle 

Ne connaît aucune respiration 

Son cœur 

Ne bat pas 

Son échos scande l’espace 

Elle

A une voix comme un gramophone

Éternelle 

 

Elle n’a pas d’histoire 

Un jour on lui a dit qu’elle était un conte 

Un jour on lui dit qu’elle était un mythe 

Un jour on lui dit qu’elle était une légende

Un jour chacun a douté de son existence 

 

Et puis 

Son regard noir comme la mémoire 

Noir comme le thé froid

Noir comme les plumes irisés d’un canard 

Ne cesse jamais de tomber sur toi 

Et son sourire de te murmurer la vérité que tu te caches 

 

Alors il n’y qu’une réponse 

C’est la gardienne des secrets 

 

Mais il y a une chose que personne ne devine

Une chose que personne ne devinera jamais  

Car personne ne l´a deviné 

Elle sourit pour se rassurer

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Soul_i_an
Posté le 30/07/2020
Salut,

Encore un texte surprenant et très beau, jusqu'à " parlera pas", ça m'a fait penser à du Brel, par la force subtile et simple des mots et des images et puis comme ton texte précédent on bascule vers quelque chose de plus pudique mais acéré, de plus “ étrange " mais tellement réel...
D'intime mais sorti pour vibrer...
Izit, Hyaline, j'apprends des mots.
Cela se sent que ce texte est intime, habillé d'une tendre mélancolie.
Il faut du courage pour écrire sur les gens qu'on aime.....
Ton texte m'a parlé, il a chuchoté à mon cœur.
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