La lanterne

Le crépuscule se pose en haut du canyon, Sam sait qu'il va devoir trouver un endroit où dormir. Il met sa frontale autour de la tête et avance à l'aveugle dans l'obscurité du canyon afin de trouver une cavité, une grotte où se protéger. Les premières étoiles font leur apparition au dessus de sa tête. Dans le ciel, il aperçoit un animal voler, Sam pense tout de suit à une chauve-souris. Il n'y prête pas attention sauf que l'animal vole de plus en plus prés et devient de plus en plus gros à mesure qu'il s'enfonce dans le canyon. De nouveau, le papillon géant le rejoint. Sam n'est même plus étonné, cela devient une habitude. Il abaisse une aile comme pour lui suggérer de monter dessus de la même manière qu'on monte dans un vaisseau spatial. Ensemble, ils planent à toute allure au cœur des gorges. Sam aime cette sensation de vitesse. En regardant le ciel étoilé qui se déplace lui aussi avec vélocité donne l'impression à Sam d'être dans la saga Star Wars. C'est très jouissif.

Le papillon le dépose proche de la rivière, à coté d'un feu de camp. Une ombre s'avance vers lui, on dirait qu'elle sort de la falaise. Apparaît alors la magicienne une lanterne à la main, elle est comme auréolée de lumière. Elle est belle pense Sam. Néanmoins, il se méfie d'elle comme l' avait averti la petite dame. Sam a donc un moment de recul.

— Que me voulez-vous ? Arrêtez de me suivre !!!

— Sam, ne résiste pas, je suis là pour t'aider. La magicienne dit ses mots avec une voix mélodieuse et enchanteresse.

— Comment connaissez vous mon prénom ? Ne vous approchez pas de moi. Je sais que vous êtes dangereuse.

— Je te jure, je ne te veux aucun mal. Fais moi confiance !

— Jamais !!!

Sam est sur le point de partir quand la magicienne entonne une mélodie terriblement envoûtante. Le papillon entoure Sam avec ses deux ailes comme pour l'enlacer. Sam se débat, il refuse qu'on le force de cette manière. Le papillon renforce son étreinte et lui chuchote à l'oreille. Sam est étourdi, il ne veut pas qu'on le contraigne ainsi.

— Mais lâchez-moi, vous n'avez pas le droit.

Il ne peut plus bouger. La magicienne lui tend une plante à ingérer. Sam tourne la tête.

— Ça ne va pas, vous voulez m'empoisonnez, sorcière !!

La magicienne ignore l'hostilité de Sam, elle lui fourre la plante dans la bouche. Sam s’étouffe et tousse l'obligeant ainsi à en avaler un morceau. Il arrive malgré tout à en cracher un bout.

— C'est dégeu, qu'est-ce que c'est ??

— Ça va te permettre d'y voir plus clair. Laisse toi aller.

Le papillon le relâche. Sam se croit libérer et s’apprête à leur faire faux bond mais à peine commence t-il à mettre un pied devant l'autre que sa tête se met à tourner. Il cherche à se retenir à l'aile du papillon resté à ses côtés. Il vomit puis s'écroule au sol. Il se tourne sur le dos et regarde le ciel. La fumée du feu passe devant ses yeux, sa vision se trouble. Les étoiles se déplacent dans le ciel. La magicienne se met à chanter et le papillon à chuchoter. Sam se bouche les oreilles, les deux sons mélangés l’empêche de penser. Il perd tous ses moyens et surtout le contrôle.
 

*


La salle de discours où Lui officiait quelques temps auparavant est désormais méconnaissable. Elle est vide, la lumière des néons remplie la pièce d'une clarté blanche semblable à celle d'une salle des fêtes, sans âme. Théo quitte ce lieu sans charme pour se rendre à l'extérieur où le soleil brille toujours avec éclat. La chaleur qui lui brûle la peau lui fait du bien. La prison dans laquelle il était enfermé avait rendu son cœur si froid. Un dirigeable majestueux les attend. C'est la première fois qu'il en voit un. Plus il s'avance vers lui plus il est obligé de lever la tête pour admirer l'engin dans son entièreté. Sa forme le fait sourire, il ressemble à un suppositoire géant. Sa couleur noire et son énorme croix blanche le condamne à se sentir tout petit. Théo suit Lui et son escorte d' hommes grenouilles qui ne le lâchent pas d'une semelle. Il est en queue de file. Il ne pose aucune question, il se contente d'admirer le dirigeable dans lequel il va bientôt embarqué. L'idée de voyager dans cet aéronef l'enchante au plus au point. Il est le dernier à monter dans la nacelle. Lui est déjà assis sur un grand fauteuil en velours rouge. On dirait un roi, il ne lui manque plus que la couronne. Théo qui prend place sur une banquette en face de Lui, ose engager la conversation :

— Excusez-moi mais où va t-on ?

Le bas du visage esquisse un sourire. Cela tranche avec la partie supérieur où la moindre expression doit être dissimulée derrière le masque noir. Puis, le visage se fige à nouveau. Lui regarde ailleurs laissant Théo sans réponse. Ce dernier n'insiste pas. Il a envie de lui faire confiance. Cela n'est peut-être pas une bonne idée au vue de son expérience passée avec son double. Cependant, il se dit qu'il n'a plus rien à perdre, alors autant se laisser guider. Le dirigeable se met en mouvement, son déplacement est lent. Théo peut profiter de la vue à travers le hublot qui lui permet d'apercevoir le Cube. En prenant de l'altitude, cette prison de béton à l'apparence d'un bunker géant ressemble peu à peu à un vulgaire galet au milieu des dunes de sable. Théo est heureux de quitter cet endroit.

Le temps est comme suspendu, Théo n'a aucune idée du temps qu'ils ont mis pour atteindre la mer. Théo ne l'a pas vu depuis son déménagement. Elle lui manque plus qu'il ne l'imaginais. En grandissant à Marseille, la mer a toujours fait partie de sa vie. Ses derniers mois à déprimer lui ont même fait oublier son odeur et son goût iodé. Respirer à nouveaux ses embruns lui insuffle un peu de vie dans les veines. Du haut de la nacelle suspendue dans les airs, Théo discerne un bâtiment isolé au bout d'un cap rocheux. Le dirigeable entame sa descente et Théo comprend que le bâtiment est en fait un phare entouré d'une forteresse. L’atterrissage secoue l'ensemble de l'équipage excepté Lui, qui calé dans son fauteuil de roi, demeure inerte comme une statue de marbre. Les hommes-grenouilles invitent Théo à sortir le premier suivi de prêt par Lui.

— Viens petit, je t'invite chez moi.

Théo remarque que la voix de l'homme est devenue plus grave, plus sépulcrale. Le jeune homme le suit moins rassuré. Néanmoins, il a plein de questions à lui poser, il espère que Lui sera moins avare de réponses. Lui l’entraîne en haut du phare, ils ne sont plus que tous les deux. Les hommes-grenouilles sont restés à l'entrée de l'édifice.

En escaladant l'escalier en colimaçon, Theo traverse les appartements de Lui. Il est surpris de constater qu'il loge dans une maison-phare avec un intérieur modeste. Quelques meubles luxueux garnissent l'intérieur somme toute la décoration reste sommaire. Apparemment, Lui qui dirige le monde vit en un ascète chez lui.

En haut du phare, Théo découvre la lanterne composé du système optique à lentilles. Elle tourne grâce à un mouvement d'horlogerie à contre poids. C'est cela qui permet de diffuser la lumière intermittente et ainsi signaler et guider les bateaux à l'approche d'une côte. Le ciel s'est couvert, ténébreux et noir, il est prêt à décharger sa rage sur le monde. Les vagues soulèvent la mer, les oiseaux s'enfuient en hurlant. A l'intérieur du phare, la nuit s'impose. Elle est néanmoins entrecoupée par la lumière du phare qui illumine les visages un bref instant avant de disparaître à nouveau. .

Lui s’assoit sur la banquette qui fait le tour de la pièce. Sam l'imite et se positionne quelques mètres plus loin. Théo sent que l'homme le scrute derrière son masque qu'il ne décide pas à retirer.

— Vous ne retirez jamais votre masque ? Demande timidement Théo.

— Jamais quand j'ai de la compagnie. Et à quoi bon ?

Theo hésite, une question lui chatouille le bout de la langue depuis un moment, il veut en être sur.

— Êtes-vous mon grand oncle Armand ?

— Je suis celui que tu veux voir…

La tempête se déchaîne, un éclair entaille le ciel. Le tonnerre le suit de prêt pour retentir comme le bruit d'une bombe Les vagues montent très haut, la cime apparaît au niveau des baies vitrées qui encerclent la salle de la lanterne. Theo sent son corps se raidir, la peur lui remonte dans le dos. Il a froid. Lui le regarde sans aucune expression ; une statue, figé. Un deuxième éclair s'éclate contre la baie vitrée qui explose en milliers d'éclats de verre. Théo crie au point de sentir ses poumons se presser contre sa poitrine. Il veut se lever. Impossible, il est paralysé. Lui non plus ne bouge pas. Pourtant Théo remarque un léger rictus se dessiner sur le bas du visage de l'homme. Celui lui donne un frisson. Un troisième éclair atteint la lanterne. Les ténèbres s'abattent désormais sur Théo.

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Elly
Posté le 30/09/2023
Coucou !

Les deux frères sont tout deux en mauvaise posture. L'un est drogué, l'autre est paralysé. Difficile de savoir si la magicienne et lui leur veule du bien. Pas sûr, vu ce qu'il leur est arrivé jusqu'ici...

A bientôt !
minoucheKa
Posté le 03/10/2023
Merci Elly de poursuivre la lecture, ca me fait plaisir.
J'accélère le rythme. Je veux finaliser mon histoire. Tu me diras ce que tu en penses bien que cela soit un premier jet.. Je ne sais pas ecore si je garderai cette trame....
A bientot
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