Je levai enfin les yeux. Mais il était parti. Pour toujours.
Alors je rebroussai mon chemin, jusqu’à ma toute petite maison. C’était la plus haute du village, elle se trouvait au sommet d’une petite montagne d’où l’on pouvait observer les vallées au loin. En progressant parmi les hautes herbes, je fixai mes petits pieds, ou plus précisément mes vieilles chaussures toutes usées. Avec elles, j’avais marché une bonne partie de mon enfance, car elles étaient en fait beaucoup trop grandes. Mais bientôt, elles ne m’iraient plus. Je fixai les brins d’herbe qui s’amusaient à chatouiller mes pieds. Mais ça ne me faisait pas rire, parce que j’avais mes chaussures. Comme elles étaient bêtes, les herbes.
Je rentrai enfin dans ma petite maison de pierre qui menaçait à tout instant de s’effondrer sur ma tête. C’était la plus vieille maison du village, même si ça ne voulait pas dire grand chose : il n’y avait que vingt maisons et elles avaient toutes été construites la même année. Elle était donc juste mal entretenue. Ma petite bibliothèque aussi menaçait de s’effondrer. Elle était remplie de livres d’images. Des gros, des petits, des colorés, des monochromes, des joyeux, des tristes. Mais aucun texte. Seulement des images. Car nous ne savions pas lire.
Mime les découpait tout le temps pour ensuite mettre une bougie derrière. Ainsi, cela projetait tout un petit univers contre les vieilles pierres du mur. C’était beau, mais il abîmait les livres. C’est pour ça qu’on s’était disputés, un soir de mai.
Moi, j’avais avancé que ces livres étaient un cadeau du scribe du village. Qu’il avait beaucoup voyagé, pour les réaliser minutieusement avec un petit pinceau, qu’il ne fallait donc pas les découper comme ça. Lui, il avait rétorqué que les images étaient trop petites et qu’en les projetant, elles avaient enfin la bonne taille, qu’elles étaient bien plus réalistes ainsi.
Mais il avait vu que j’étais triste, alors il m’avait promis de ne plus y toucher. Et c’est ce qu’il avait vraiment fait. Il ne les avait plus jamais touchés.
Le lendemain, il avait préparé ses affaires. Il partait. Il avait envie de voir ce qui était représenté sur ces petites pages. De les voir en vrai, pas sur du papier.
- Viens avec moi ! avait-il dit.
- Non, Mime, il faut que je reste pour m’occuper de la maison. Si je pars, on me la volera.
- Et alors ? Cette maison se détruit toute seule et il n’y a rien, ici. Tu y tiens vraiment ?
A ce moment là, j’avais fixé le sol. Je ne savais pas quoi répondre. C’était la maison de ma famille. Je ne pouvais pas la laisser.
Alors il était parti sans moi.
Maintenant, j’étais toute seule dans la maison de pierre. Toute seule pour toujours. Je n’avais plus Mime pour m’aider à pêcher des poissons dans le petit lac au dessus de la maison. Je n’avais plus Mime pour m’aider à les vendre au marché régional. Je n’avais plus Mime pour me raconter des histoires le soir, à la lueur de la petite bougie.
Alors j’allai prendre les chaussures qui étaient à mon père. Elles étaient bien trop grandes, mais au moins, elle me dureraient un moment, même si je grandissais. Je laissai mes anciennes chaussures au pied de la porte de ma petite maison de pierre. Je descendis le sentier où les herbes essayèrent de nouveau de me chatouiller. Mais elles n’en avaient pas besoin, je souriais déjà.
Je levai les yeux. Je partis, moi aussi. Pour toujours. Pour retrouver Mime.
Même si je crois que tu m’as confondu avec Nightbringer, car je n’ai pas écrit grand chose en rapport avec la nature…😅 En fait, Nightbringer a écrit la première nouvelle et j’ai écrit la seconde, les deux histoires n’ont donc rien à voir. :)
Je suis très content que tu aies apprécié l’insertion du thème des chaussures !^^
Je suis désolé, il n’y aura pas de suite, puisque c’est une nouvelle, mais je pense fortement qu’elle va le retrouver. :)
Merci beaucoup et à bientôt !^^