La vue

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Manchu souhaitait absolument développer l'art de la vue. Ainsi, Mme Panda lui indiqua tout plein d'éléments de repères afin qu'il ne perde jamais son chemin. Elle lui interdit aussi formellement de suivre des choses inconnues car elles pouvaient se révéler dangereuses.

Or un jour qu'ils se promenaient tous deux, Manchu fut obnubilé par la présence d'une coccinelle qu'il s'empressa de suivre. Le rouge profond de sa carapace ponctuée de pois noirs contrastait avec le vert rafraichissant de la forêt, c'est ce qui la rendait fascinante.

Bien sûr, « une coccinelle n'est pas chose dangereuse » se disait Manchu. Mais c'était sans savoir que ce serait l'instrument de son malheur car il se perdit.

Il ne s'en rendit compte qu'avec l'arrivée du brouillard qui amenuisait son champ de vision. Il ne pouvait plus s'orienter. Alors il resta blotti contre un arbre espérant que cela passe. Le temps fila lentement jusqu'à la nuit, sans aucune amélioration, conférant à son environnement quelque chose d'encore plus effrayant. Il était totalement épouvanté !

Il décida finalement de trouver refuge au milieu de ces bois hostiles en suivant l'image réconfortante de sa mère qu'il croyait voir à travers les étoiles, ses silencieuses amies.

Il s'arrêta, épuisé de fatigue, lorsque tout fut noir autour de lui. Il sanglota désespéré au milieu de ces ténèbres.

Manchu ayant pleuré tout son soul, se calma peu à peu. Il se reprocha son manque de sang froid face à la situation. « Ce n'est pas agir comme un grand, ça. La situation ne s'arrangera pas si je pleure sans essayer quoi que ce soit. ».

C'est pourquoi se calmant peu à peu, il se mis à l'affut d'une vision, et soudain...

Là ! une lueur éclaira doucement l'obscurité.

Surpris, Manchu ne pouvait pas en détacher le regard avant qu'elle ne s'éteigne, déçu.

La lueur refit son apparition... suivie d'une seconde... puis d'une troisième... et toutes s'échappaient quelques instants après, exécutant une danse simultanée.

Mais à chaque disparition, il en venait de plus belle qui s'évanouissaient l'instant d'après tout autant. Des lucioles se déclaraient leur amour, dans un ballet éphémère. Le spectacle était unique !

Mais cela permit à Manchu de savoir qu'il était actuellement dans une grotte, près d'une source et de végétaux remplis de lucioles.

Il prit une branche pour en emmener quelques unes et éclairer son chemin qu'il prit à rebours en suivant ses propres empreintes et scrutant chaque détail minutieusement qui le ramènerait chez lui avant le point du jour.

***(Jeux visuels ???)

Il rentra tant bien que mal auprès de sa mère qui l'enlaça chaleureusement: « Mon petit Manchu ! Que t'est-il arrivé ?! Je me suis tellement inquiétée ! », avant de remarquer un changement grâce à la lueur de l'aube.

« Manchu ! Mon Manchu ! Regardes-toi donc ! Tes yeux sont tout cernés de noir ! »

Sa mère soucieuse d’entendre son récit lui posa maintes questions sur la nuit qu’il avait passée seul.

«La nuit, tous les chats sont gris ! (dicton) comment as-tu réussi à retrouver ton chemin ?» lui demanda t-elle.

Il lui répondit en détail tout ce qu’il avait vécu : le brouillard qui avait affaibli son sens de la vue, sa peur dans le noir complet qui l’avait totalement immobilisé et enfin ses yeux aux aguets de la moindre chose qui lui ont permit de percevoir les lucioles salvatrices...sans oublier ses propres traces qu’il avait suivi à rebours et la connaissance du reste du chemin qu’il avait en mémoire avant qu’il ne se perde.

Sa mère en conclut qu’il avait non seulement su percevoir la lueur dans une situation critique mais aussi examiner scrupuleusement son chemin pour reconnaître de nuit ce qu’il avait parcouru le jour. Garder à l’esprit la voie qu’il s’était tracée lui avait valu de belles marques de reconnaissance aux coins de ses yeux et marquait ses premiers pas vers l’âge adulte.

Les paroles de Mme Panda n'étaient plus qu'un lointain écho, les yeux de Manchu s'étant clos d'épuisement lorsqu'il se retrouva dans les bras cajoleurs de sa mère.

Le lendemain matin, Manchu vérifia son aspect à la surface du lac non loin de leur abri. Ses yeux étaient effectivement cerclés d'un noir profond.

Il ne savait trop qu'en penser...honteux de s'être perdu et fier de s'en être sorti à la fois, il restait songeur de la nuit passée, en se remémorant ce qu'il avait vu avec le net sentiment que ce souvenir serait le premier de son épopée de la maîtrise des cinq sens.

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