À l’aide d’une branche, je trace un grand cercle autour de moi. Peu importe s’il n’est pas d’un rond parfait, le principal reste qu’il m’entoure. Je soupire longuement. Le stress m’envahit un peu, c'est la première fois que je fais ça. Ma grand-mère pratiquait souvent ce genre de rituels, mais ma mère a préféré suivre une autre voie, éloignée de nos racines.
Je m’agenouille au centre, face au petit autel de fortune que j’ai créé avec plusieurs pierres plates. La pleine lune m’aide à voir ce que je fabrique, malgré la pénombre générée par les arbres de la forêt. Je me concentre pour animer la bougie positionnée en direction du sud et récite ma première demande : « Sic invocata tua flamma me permittit videre in tenebris¹. » J’attrape une poignée de feuilles rouge et jaune, avec un peu de terre, et dépose ce présent à l’opposé de la flamme qui se manifeste grâce à mon charme. Je sors un fagot de sauge de mon sac, qui gît près de moi, et approche son extrémité de la chandelle pour l’allumer. La fumée de l’encens, que je place côté est, s’agite un peu sous la brise qui parcourt la forêt. Il ne me reste qu’à remplir d’eau ma coquille creuse, installée sur le dernier point cardinal. « Ut me a tenebris abundans aqua tueatur². » Le liquide apparaît dans l’ormeau.
Soulagée de voir que je contrôle mes enchantements, j’entame le processus de protection en m’emparant de chaque élément un par un pour faire le tour du cercle avec. J'appelle mes gardiens afin qu’ils me préservent si l’être que je vais invoquer me veut du mal. Je sens au fur et à mesure mes pouvoirs crépiter en moi et l’appréhension me gagne. Et si je finissais par tout brûler par inadvertance ?
J’inspire profondément pour calmer les pulsations de mon cœur qui tambourine. J’ai bien étudié les vieux grimoires de Grannie, retrouvés au fond d’une malle scellée dans le grenier. Trouver la formule pour la déverrouiller ne m’a pas pris longtemps, mon aïeule l’avait glissée dans une lettre qu’elle m’avait adressée avant de mourir. La phrase n’ayant rien à voir avec les autres, elle m’avait sauté aux yeux. Nous avions l’habitude d’échanger de cette manière pour évoquer des pratiques occultes sous le nez de ma génitrice.
Je m’installe en tailleur devant l’autel, les avant-bras posés sur mes genoux, paumes ouvertes vers le ciel. La soirée d’Halloween où Mamie m’avait gardée quand j’étais enfant me vient à l’esprit. Nous avions appelé de cette façon quelques-unes de nos ancêtres à se matérialiser. Elle souhaitait qu’elles évoquent mon passé et notre lignée de magiciens, étant donné que Maman évitait le sujet, complètement réfractaire à la sorcellerie. « Cela ne nous apporte que des soucis. Je ne veux pas que les habitants de cette ville nous qualifient de personnes maléfiques. » Comme s’il n’y avait rien de bon dans tout ça ! Au contraire, parler à mes aïeules m’a confortée dans l’idée que la magie n’est pas dangereuse, si elle est utilisée correctement.
Cette nuit du trente-et-un octobre est propice à l’appel des êtres disparus et autres incarnations. Samain inaugure la saison sombre et, quand les ténèbres tombent, la transition opère, permettant d’ouvrir toutes sortes de portails avec beaucoup plus de facilités.
C’est la première fois que je tente l’expérience seule. Mes mains tremblent un peu et je sens du froid dans mon corps. Je sais que je ne le fais pas avec une bonne intention, et qu’ainsi je donne raison à ma mère, mais mes soi-disant camarades de classe doivent payer. Je n’en peux plus d’être leur souffre-douleur depuis tant d’années, je n’en peux plus de me cacher de leurs railleries. Si je pouvais utiliser mes capacités surnaturelles sans peur des représailles de ma famille, mes tortionnaires me craindraient et me laisseraient tranquille. S’ils imaginent s’amuser impunément ce soir, déguisés en monstres, je vais leur en envoyer un vrai. On verra s’ils feront toujours les malins après ça.
Je craque mon cou et mes doigts en les joignant quelques secondes, ferme les yeux et vide ma tête en me concentrant sur ma respiration. Le tumulte de mes pensées se tait peu à peu et j’énonce l’incantation.
« Arzareth, démon de la terreur, je t’invoque, ici et maintenant, afin de me venir en aide. »
J’ouvre une paupière. Rien. Pas un soupçon de changement dans l’air. Je souffle mon agacement. J’ai pourtant bien tracé le cercle, les éléments sont au bon endroit, il fait nuit, la Lune est dégagée, je… j’ai oublié d’allumer la seconde bougie et de verser sa cire sur l’autel de fortune. Je m’énerve contre moi-même en sortant le cierge et l’enflamme d’un simple coup d’œil. Si ma mère me découvrait en train de pratiquer des envoûtements, elle m’enfermerait à double tour pendant des jours…
Lorsque la chaleur fait couler la cire, j’en répands sur la pierre et répète l'incantation. Toujours rien. Je m’attendais à voir apparaître ce démon dans un tourbillon de fumée, la déception se peint sur mon visage. Sans me décourager pour autant, je projette mentalement mes intentions sur l’image que je me fais de lui et plisse le front de détermination. Ma magie s’agite dans mes veines. Les flammes des bougies s’intensifient, les feuilles s’envolent, l’eau déborde de la coquille qui se remplit en continu et la fumée de l’encens m’enveloppe. Un léger tremblement secoue le sol sous mes fesses. D’une voix forte et assurée, je crie : « Arzareth, ô grand démon de la terreur, je t’invoque, ici et maintenant, afin de me venir en aide ! J’ai besoin de toi pour remettre une bande de sales cons à sa place ! »
Une bourrasque fait voler mes longs cheveux argentés autour de moi et mes objets tombent de leur emplacement. J’écarquille les yeux d’effroi et arrête de respirer quand un feu prend naissance à mes pieds. Je me relève avec empressement et tente de l’étouffer en tapant dessus avec mes grosses bottines. Je jure contre moi-même.
D'un revers de la main, je commande l’eau qui abonde toujours dans le coquillage pour l’envoyer sur la flambée et l’éteindre. Génial. Mon premier rituel est un échec cuisant, j’ai failli cramer le bois et Arzareth n’est pas venu. Et si Maman avait raison ? Si j’étais vraiment dangereuse ? Je pousse un grognement aigu jusqu’à hurler ma frustration et range mes affaires. Sac en bandoulière, je rebrousse chemin pour rejoindre le sentier. Je rumine en regardant le sol, histoire de ne pas, en plus, me prendre les pieds dans une racine et m’étaler de tout mon long. Seulement, si ce n’est pas un arbre que je rencontre, je me cogne pourtant dans quelque chose.
— Eh bien, eh bien, qu’avons-nous là ?
La voix grave qui s’adresse à moi me file la chair de poule. Je relève le visage pour découvrir un homme plus grand que moi qui me toise de ses iris bleus translucides et perçants, qui brillent dans le noir. Ma salive se coince dans ma gorge, mais je parviens quand même à articuler pour me faire comprendre.
— Qui t’es, toi ? Tu m’as suivie ?
— Suivi ? C’est toi qui m’as appelé, j’te signale. On peut savoir pourquoi tu déranges les daemones, jeune fille ?
J’enclenche un pas en arrière et prends un instant pour détailler l’inconnu. C’est un être humain, pas un démon… Du moins, il ne ressemble pas aux dessins dans le grimoire. Ses cheveux foncés en bataille recouvrent son front, son faciès fin est étiré par un large sourire. Charmant, même s’il file les jetons sous la lumière que nous octroie la lune. Il est habillé simplement, avec un jean et une chemise noire aux manches courtes, qui laissent libres à ma vision des lignes de symboles sombres tatoués sur ses bras. Méfiante, je le questionne :
— C’est toi, Arzareth ?
— Oh, grand diable, non !
Il éclate de rire, comme si j’avais dit une énormité. Voilà que même les démons se moquent de moi… Je secoue la tête en levant les yeux au ciel. Si ça se trouve, il m’a vue du stationnement m’enfoncer dans la forêt et a décidé de me prendre en filature pour peut-être me kidnapper. Qui sait quel genre de cinglés peuvent être de sortie à Halloween ? La lueur rouge vif qui s’allume dans ses iris me met tout de même le doute.
— Tu sembles déçue de mon apparence. Je ne fais pas assez peur pour un démon, c’est ça ?
— Je te pensais plus… moins…
— Moins séduisant ? Si tu veux, je peux revêtir une forme plus… monstrueuse. Par contre, je ne suis pas Arzareth. Il a franchement autre chose à foutre que de venir régler les petits désirs de vengeance d’une ado.
J’ai du mal à déglutir tant ma gorge s'assèche. Qui ai-je donc invoqué ? Mais, surtout, j’ai réussi l’appel ! Deux sentiments distincts se battent en moi. Tandis que je recule pour échapper à cet individu qui me met mal à l’aise, lui continue de se rapprocher. Je manque de tomber en arrière et il m’attrape le bras pour me ramener à lui. Il empoigne mon menton et avance son visage tout près du mien.
— Alors, ma jolie, qui veux-tu terroriser ?
Son souffle s’infiltre en moi et vrille mes pensées. Je le repousse et m’écarte de nouveau. Je dois découvrir qui est ce démon, ne serait-ce que pour savoir comment il pourrait me servir, tant qu’à profiter de sa présence. Je me dresse bien droite, relève le menton et ancre mon regard dans le sien, avec autant d’assurance que je peux, malgré la légère anxiété qui enfle en moi.
— Si tu n’es pas Arzareth, qui es-tu pour avoir du temps à perdre à répondre à mon petit appel de mortelle ?
— Tu as devant toi Eligol, démon des obsessions. Et ce n’est pas que j’ai du temps à tuer, mais tu me plais bien. Je m’ennuyais un peu et je me suis dit qu’on pourrait s’amuser, tous les deux.
— Co… comment ça ?
Pour l’audace, on repassera. Mon cœur accélère ses battements. Si cet homme décide de s’en prendre à moi, pourrais-je seulement me défendre ? Que valent mes pouvoirs face à un démon ? Malgré la pénombre, je vois nettement ses yeux rouler.
— Ne panique pas, je ne ferai rien sans ton accord. Vous avez de tels à priori sur mon espèce, vous, les humains ! Tu as demandé mon aide, enfin celle d’un autre, mais il est possible que j’aie empêché l’invocation d’arriver à lui, alors me voilà, à ton service !
— Attends… Tu as quoi ?
Il hausse les épaules puis affiche un rictus qui n’augure rien de bon.
— On s’en fout. Tu voulais un démon, tu en as un. Raconte tes misères à Eli. C’est qui, les sales cons à punir ?
Étrangement, je n’ai pas trop peur de lui. Son timbre de voix est rassurant, il ne semble pas agressif, quoiqu’un tantinet aguicheur. Et pour une fois qu’on s’intéresse à moi… Si je n’avais pas piqué la curiosité des démons, aucun d’entre eux ne se serait déplacé, du moins, aucun ne perdrait son temps à me parler. Confiante, je lui détaille tout. Comment je me fais rabaisser et humilier depuis des années, traiter comme une moins que rien, mettre de côté par tous sans exception. « Si Isobel vient à ta fête, tu peux être sûr que personne d’autre ne sera là. » Des phrases telles que celle-ci me restent en tête. Je me souviens du jour où ils m’ont même enfermée dans un placard de l’école, où j’ai passé la nuit…
J'aurais pu remettre mes harceleurs à leur place tant de fois, seulement, je dois me brider, enfouir mes pouvoirs profondément, cacher qui je suis, sous prétexte que c’est le mal. Mes parents m’indiquent la conduite à adopter dans ma vie, m’éloignent de mes racines. C’est comme s’ils tuaient Grand-mère une seconde fois. Je n’en peux plus. J’aimerais être moi, pleinement, et qu’on m’accepte comme ça. En attendant, je reste la fille dont on se moque parce qu’elle est bizarre, trop gentille, mal foutue, différente sans qu’on sache pourquoi. Eh bien j’en ai marre. Je veux leur montrer la sorcière qui sommeille en moi !
— Oula, quel dommage d’empêcher la magie de prospérer ! Alors, qui doit succomber à ses obsessions ?
— Comment ça, qui ?
— Tes parents, les gosses, les deux ? Dis-moi ce que tu préfères, ce soir, je suis ton serviteur.
Un nuage masque la lune quelques secondes et les pupilles d’Eligol virent au rouge incandescent. Est-ce que je vais vraiment faire ça ? Est-ce que, finalement, je suis quelqu’un de mauvais qui ne mérite pas d’avoir les pouvoirs que ses ancêtres ?
— Que vas-tu leur faire ?
— Je peux lire en vous et connaître votre obsession la plus enfouie pour m’en servir. Certaines peuvent être très… divertissantes.
— Encore faut-il qu’ils en aient. Et… je ne veux pas non plus qu’ils meurent, juste qu’ils aient la frousse de leur vie.
— Vous avez tous une obsession, parfois, elle est bien calfeutrée. Par exemple, toi, tu es obnubilée par la superstition. Tu accordes beaucoup d’importance aux signes parce que tu as peur de créer une catastrophe si tu n’y prends pas garde. Quand tu en vois un, tu ne peux pas t’empêcher de toucher le bracelet que tu portes au poignet gauche et de tourner entre tes doigts la breloque qui pendouille.
— Et tu viens juste de lire tout ça en moi ?
— Disons que nous, démons, aimons bien connaître les sorcières. Et, petite chanceuse que tu es, j’ai jeté mon dévolu sur toi, enfin, j’ai choisi de garder un œil sur toi.
J’ai peur de saisir le sens de ses paroles et un frisson me parcourt.
— Il me suffit de te regarder droit dans les yeux et bim ! Tu apercevras encore plus de signes et tu n’arrêteras plus de répéter ton geste, au point d’en briser ton bijou et de poursuivre ton affaire directement sur ta peau. À force, tu pourrais en venir à t’éclater une veine et…
— Stop !
À la suite de mon cri, ma magie s’active malgré moi, comme si mon corps était effrayé par les paroles d’Eligol. Des flammèches jaillissent dans mes paumes et grandissent jusqu’à envelopper mes bras. Je vois ce démon beaucoup plus nettement à présent. Si on ne fait pas attention à la couleur changeante de ses prunelles, rien ne le distingue du commun des mortels. J’en connais qui adoreraient se pavaner devant lui pour espérer son intérêt.
— On se calme. J’ai entendu, pas de morts. Juste assez pour qu’ils la frôlent et aient les pétoches jusqu’à la fin de leur vie. C’était un simple exemple. Maintenant, éteins-moi ta flambée et mettons-nous en route.
Je prends une profonde inspiration et ferme les yeux. Je visualise le salon de Mamie et ses livres éparpillés un peu partout sur les meubles, l’immense bibliothèque au fond de la pièce, son gros fauteuil crapaud en cuir marron près de la grande fenêtre qui donnait sur son jardin, où elle s’asseyait tout le temps. Mon cerveau diffuse en moi le souvenir de la douce odeur fruitée de son infusion d’hibiscus et de sa belle voix qui entonnait des chansons dans un langage que je ne comprenais pas. Sa maison était mon repaire, mon échappatoire. Il demeure mon point d’ancrage quand je perds pied.
Mon agitation s’apaise et je reprends le contrôle. La pleine lune nous éclaire de nouveau et j'observe Eligol me tendre la main en une invitation à le suivre, accompagnée d’un sourire charmeur. Je réajuste mon sac sur mon épaule et passe à côté de lui, sans un regard.
Il m’escorte tout en blablatant sur tout et rien. Je l’écoute d’une oreille distraite et tente de mettre de côté ce qu’il a pu avouer à demi-mot. Pourquoi semble-t-il me connaître ? Je n’entends plus son flot de paroles et finis par m’arrêter net à la sortie de la forêt. Les poings serrés et l’air résigné, je lui fais face et le fixe avec intensité.
— Tout à l’heure, tu as dit avoir intercepté mon appel et… que tu gardes un œil sur moi. Explique-moi ça, plutôt.
— En quoi ça te préoccupe ?
— Ne fais pas semblant d’avoir l’air plus con que tu ne l’es.
Sa mine joyeuse s’assombrit d’un seul coup et la flamme ressurgit dans ses prunelles. Mon cœur rate un battement sous l’effet de la crainte qui m’envahit. S’il jouait au gai luron depuis son arrivée, cette fois, son apparence mauvaise se dévoile.
— Je connais ta lignée depuis des décennies. Plus exactement, j’ai rencontré une de tes ancêtres il y a des centaines d’années, lorsque j’étais encore un simple mortel. Je ne suis pas certain que tu veuilles connaître la suite.
Tout de même intriguée, malgré ma gorge qui tente de m’étrangler, je hoche la tête pour lui indiquer de poursuivre. Il lève les bras en l’air et un rictus se forme au coin de ses lèvres.
— Très bien, comme tu voudras. À l’époque, je faisais partie de ces humains obsédés par les sorcières. Je les avais en horreur, parce que l’une d’elles avait détruit ma mère en charmant mon père. Il nous a quittés pour elle. J’ai alors tout mis tout en œuvre pour les dénicher et… les dénoncer pour le bûcher. En plus, c’était plutôt bien payé, je ne me privais pas.
Ma bouche s’entrouvre et mes yeux s’agrandissent d’effroi. Un chasseur de sorcières… Dans quel pétrin me suis-je fourrée ? Il rigole de ma réaction et poursuit.
— Enfin ça, c’était jusqu’à ce que je tombe sur ton ancêtre Isobel.
Ma panique se transforme en stupéfaction.
— Attends…
— Oui, tu portes le même prénom qu’elle. Tu lui ressembles d’ailleurs beaucoup. C’est sans doute pour ça que tu m’intéresses particulièrement.
— Que s’est-il passé ? Elle t’a empêché de commettre un autre meurtre sur nos semblables ?
Il ricane de plus belle suite à ma répartie acerbe et se radoucit. Ses mots deviennent plus suaves, sa voix plus caressante.
— Oui et non. Elle m’a fait prisonnier en me jetant un sort pour m’empêcher de dévoiler son secret. Je suis resté enfermé des jours dans sa grange. Nous avons beaucoup parlé, elle m’a montré qu’elle n’était pas dangereuse, j’ai appris à la connaître et… j’en suis tombé éperdument amoureux. J’ai enfin compris ce que mon père avait pu ressentir. Quand un autre traqueur l’a découverte, je n’étais pas près d’elle. Je suis rentré et elle n’était déjà plus de ce monde. Une rage folle m’a fait massacrer ceux qui l’ont brûlée. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est qu’elle avait une fille, c’est pour ça que sa lignée ne s’est pas éteinte et que tu es là.
Je prends le temps d’assimiler ces informations. Ce n’est pas un hasard si Eligol est présent ce soir.
— Mais comment es-tu devenu un démon ?
— J’y viens. J’ai été pendu pour complicité de sorcellerie. Étant donné que j’ai participé à plusieurs tueries de tes congénères, les portes du Paradis sont restées fermées à ma mort. Je me suis retrouvé dans les Enfers, et je dois dire que, finalement, je m’y plais bien. Je m’amuse comme un petit fou, car, au lieu d’être torturé pour l’éternité, j’ai été transformé en démon. Et entre démons et sorcières, il y a toujours eu quelque chose. Je n’ai pas oublié mes sentiments pour Isobel. J’ai vu prospérer toute sa descendance, et tu es arrivée. Le même visage fin, les mêmes grands yeux bleus étincelants, la même couleur de cheveux, la même bouche pulpeuse, le même corps… Bref.
Personne ne m’a jamais regardé comme lui le fait. Comment peut-on avoir envie d’un corps aussi maigre que le mien ? J’ai la peau sur les os, un squelette ambulant. Ce n’est pas faute de manger, même si j’ai peu d’appétit. Sans oublier que, parfois, je me sens si mal que je ne peux pas garder ce que je viens d’avaler… Un peu gênée par son insistance et son air affamé, sans trop savoir ce qu’il a en tête, je préfère revenir au sujet principal.
— OK, c’est donc pour ça que tu veux m’aider. Très bien, Eligol, allons-y. Il y a une fête chez Zachary, tous les terminals y seront. Je ne suis pas invitée, alors je ne sais pas…
— T’inquiète pas, princesse. Avec moi, ils vont te laisser entrer.
Il me fait un clin d’œil et nous nous mettons en marche vers la soirée qui doit déjà avoir débuté.
☽☾
¹. Que ta flamme ainsi invoquée me permette d'y voir dans l'obscurité
². Que ton eau qui abonde me protège de la noirceur
un début prometteur, je me demande ce que va donner la relation entre le démon et la jeune sorcière. Ce monsieur Eligol a l'air d'avoir de l'humour. Le thème de la jeune fille harcelée est dans l'air du temps et en même temps ça me fait penser à Carrie de Stephen King qui finit par se venger et lâcher ses pouvoirs :)
Un début plaisant, je suis curieux de voir comment la suite va tourner, je m'interroge sur la fiabilité du démon et en particulier de ce qu'il raconte. Je trouve curieux d'avoir mis "ta eau" au lieu d'un "ton eau", serait-ce délibéré ?
à bientôt