Le bûcheron Hans Trapp n'était pas un homme malheureux : il passait ses journées au grand air, à admirer la nature, tandis que sa femme, la belle Martha, gardait sa maison proprette et accueillante...
Trapp aimait sa femme : elle était gentille, tendre et plutôt jolie... mais elle détestait la forêt autant qu'il l'aimait : pour elle, le plus bel endroit du monde se trouvait entre sa huche à pain et sa cheminée...
— Tu devrais voir de belles choses, lui disait souvent son mari...
— J'en vois beaucoup... J'ai même décidé d'en rajouter... rétorquait-elle. As-tu vu notre nouveau napperon sur le guéridon...?
Arrivé à ce point de la conversation, notre bûcheron saisissait sa hache, sifflait son chien et s'engouffrait dans la forêt dense qui entourait sa maison...
Ce jour-là, Trapp était parti de bonne heure afin de trouver un bel arbre pouvant satisfaire le bourgmestre qui avait commandé un conifère de belle taille afin de remplacer la poutre maîtresse du toit de l'hôtel de ville qui menaçait de céder sous le poids des années et sous celui des colonies de termites qui en avaient fait de toute évidence, la destination tendance de leurs moindres 20 déplacements.
La forêt était silencieuse et l'homme n'entendait que le bruit feutré de ses bottes qui s'enfonçaient dans la neige tendre ou celui, plus discret, des pattes de son berger qui laissaient mille traces à côté des siennes...
Le froid était piquant mais Trapp adorait ce temps vivifiant qui gardait ses sens en éveil... Il arrivait à une clairière et le spectacle qui s'offrit soudain à ses yeux était d'une telle beauté qu'il en lâcha sa hache.... Au centre d'une étendue immaculée à l'aspect cotonneux se dressait un sapin de taille moyenne, à la silhouette harmonieuse et au feuillage d'un vert intense... Ses branches couvertes de givre scintillaient de mille feux, doucement caressées par la lumière dorée du levant qui se reflétait dans des stalactites cristallines d'une grande pureté.
Notre bûcheron, bouche bée devant tant de majesté mit un instant avant de recouvrer ses esprits... Lorsqu'il les retrouva enfin, il courut à perdre haleine vers sa demeure pour annoncer sa découverte à sa tendre moitié.
— Chérie! jeta t-il en entrant, devine ce que je viens de voir !
— Ôte tes chaussures, je viens de cirer... — Il y avait un arbre dans la forêt...
— Lève-toi, je suis en train de nettoyer le fauteuil... — Un sapin.. couvert de givre...
— Je vois... Lève les pieds pour que je puisse balayer...
Notre homme hocha la tête... Il ne servait à rien de lui décrire la scène : elle manquait trop d'imagination...
Le lendemain matin, notre bûcheron repartit en forêt, fermement décidé à ramener à la maison l'objet de son admiration afin que sa femme puisse, elle aussi connaître cet état de grâce forestière. Il retrouva sans peine le merveilleux conifère, le coupa délicatement et le ramena avec précaution chez lui, veillant sur le chemin à ce qu'aucune aiguille de givre ne quitte la majestueuse ramure.
Arrivé dans son salon, il déposa son précieux fardeau avec un sourire devant la cheminée, attendant que sa femme rentre à la maison... L'effet ne fut pas celui qu'il attendait :
— Arrrrrgghhh ! Mon parquet ciré ! Il est trempé ! Le givre, les merveilleuses stalactites scintillantes n'avaient pas résisté à un bon feu de cheminée et inondaient à présent le salon. — Comment je vais réussir à sauver ça ! Vite ! De la cire d'abeille ! Sors-moi ce truc d'ici ! Il va perdre ses aiguilles partout !!!!
Bien malheureux, le bûcheron sortit la tête basse, son sapin sous le bras...
— Evidemment, songea-t-il... J'aurais dû y penser... La beauté des bois reste dans les bois... Elle est éphémère... mais si elle ne l'était pas... Un sourire fleurit sur ses lèvres et il fonça chez le 22 pâtissier du village. Ce dernier se gratta la tête, perplexe...
— Habiller un arbre avec des cristaux de sucre ? C'est l'idée la plus bizarre que j'aie jamais entendue... Tu ne préfèrerais pas qu'on y accroche des bretzels ?
— Tu peux le faire ?
— Oui... mais... Tu es sûr ?
— Certain.” Ce soir-là, le bûcheron courut chez lui et plaça son arbre à la parure éternelle devant la cheminée. La lumière dorée des flammes faisait briller les cristaux de mille feux... — Cette fois, elle va être éblouie...
Mais l'éblouissement n'était pas non plus pour ce soir-là.
—Aaaarrrrrggghhh ! Mon tapis ! C'est quoi cette pâte collante ? Et en plus, il y a plein d'aiguilles collées ! C'est quoi cette horreur ?
Cette horreur était le résultat bien connu de la fusion de cristaux de sucre soumis à une forte chaleur... Un sirop épais suintait sur le tapis et les gouttes tombées trop près de l'âtre commençaient à caraméliser...
— Au moins, ça sent bon ? hasarda le bûcheron.
— Sors cet arbre d'ici !!! Démoralisé, notre homme sortit, son sapin sous le bras et son chien sur les talons.
— Il doit bien exister un moyen pour lui montrer tant de beauté...
Son regard tomba sur l'échoppe de l'artisan verrier qui achevait de faire tourner ce qui allait devenir un vase avec dextérité... Une nouvelle idée se présenta au bûcheron frustré. Cette fois, cela se passerait bien...
Ce soir-là, la femme rentra et resta stupéfaite : un arbre merveilleux couvert de pamprilles étincelantes illuminait le sombre salon. Seule la lueur dorée des flammes dansait sur les facettes cristallines qui tintaient doucement en s'entrechoquant avec douceur...
— C'est magnifique... murmura la femme à son mari tout heureux...
Le bûcheron tout content invita toutes ses connaissances à admirer son oeuvre et bientôt, tous les voisins, fortement encouragés par leurs enfants se dirigèrent vers le verrier et vers la forêt afin d'avoir leur propre arbre de Noël. De ce jour, aucun Noël ne se passa d'un arbre aux décorations magiques et le village tout entier voua une grande reconnaissance au bûcheron pour leur avoir apporté cette idée magique. Quand à ce dernier, il continua à chercher la beauté en forêt... avec sa femme qui ne veut plus rien rater de ce merveilleux spectacle...
J'ai beaucoup aimé le développement du personnage du bûcheron qui essaye de partager ses plaisirs et de faire sourire sa femme de façon un peu maladroite, j'ai eu même un peu pitié pour lui quand elle n'arrêtait pas de le réprimander.
Bon après Martha, épouser un bûcheron et ne pas aimer la forêt... tu l'as un peu cherché !
Ce n'est qu'une suggestion pas vraiment originale, mais je verrais bien Martha un peu souffrante cette année et donc elle ne peut plus sortir de la maison en hiver. Son mari tente de la réconforter mais au lieu de ça il lui apporte plus de travail avec ses maladresses et est donc frustrée (ma propre femme peut en témoigner haha).
Ça changerait peut être trop du ton que tu voulais initialement pour ton histoire, mais l'ajout de description pour Martha au début de l'histoire du style "elle soupira de frustration devant son mari avant de le chasser dans un sourire pour réparer ses bêtises" pourrait me donne plus d'empathie pour elle.
J'ai vu les chiffres 20 et 22 se cacher dans ton texte.
Je comprends l'utilisation des trois petits points dans les dialogues, qui peut signifier un ton traînant, une hésitation, ou des idées un peu lunaires comme le personnage de Luna Lovegood dans Harry Potter, mais je ne sais pas trop comment les interpréter dans les phases de description/narration. Il y en a 38 (oui oui j'ai compté !)
Enfin j'aurais aimer peut être un peu plus de péripéties à la fin du conte qui m'a paru très court. Au moment où j'étais vraiment dedans c'était déjà la fin ( bon point j'imagine ? ). J'aurais bien voulu que le boulanger revienne et lui propose des bonhomme en pain d'épices plutôt que du sucre, bref un travail collaboratif de milles couleurs pour bien illustrer l'esprit de noël :) Même si je comprends que le bûcheron voulait reproduire fidèlement la vision des cristaux de glace qu'il avait vu dans la forêt.
Merci encore pour ton travail et bonne continuation :)